Skip to main content

Full text of "Les cinq livres de F. Rabelais, publiés avec des variantes et un glossaire par P. Chéron et ornes de 11 eaux-fortes par E. Boilvin"

See other formats


co 


m 


^^:^ï^ 


^^ 

f 
! 

Xv^ 

! 

r 

et      \_M- 

^1 

®hc  ICtbrarg 

of  tlte 

Pntuersttu  oi  Coroitto 


bu 


The  Estate  of  the  late 
G.  Percival  Best,  Esq, 


m 

m 

m 

Tun 

mmê 


m^ 


\  \}J\ 


^\p4>?^^]r^ç^ii^ 


CINQUIÈME  LIVRE 


DE 


F.    RABELAIS 


Pantagruel 


l-  l)  I  T  ION     JOUA  UST 
Paris,    1877 


LES  CINQ  LIVRES 

DE 

F.    RABELAIS 


Livre  V  :  Pantagruel 


K  iiojlviiT  (le\  ftùc 


Imp.  A.  Salmon 


LE  IF^IBUNAL  DE  GHIPPE-MINAULT 
(  Pflbpl«u,L.5,C   lî.) 


LES    CINQ   LIVRES 


DE 


F.  RABELAIS 

PUBLIÉS 

AVEC    DES  VARIANTES    ET    UN    GLOSSAIRE 

PAR   P.  CHÉRON 

ET    ORNÉS    DE 

Onze  Eaux-Fortes  par  E.  Boilvin 
Livre  V  ;    Pantagruel 


PARIS 

LIBRAIRIE  DES    BIBLIOPHILES 
Rue  Saint-Honoré,  338 


JI    D  c  c  c    L  X  X  V  1 1 


C.3- 


6047/9 


NOTE    DE    L'EDITEUR 


ous  ne  voulons  pas  laisser  paraître  cette  nou- 
velle édition  des  œuvres  de  Rabelais  sans 
donner  aux  amateurs  quelques  explications 
sur  les  gravures  dont  elle  est  ornée.  «  Esti- 
mant, disions-nous  lors  de  la  publication 
des  Voyages  de  Gulliver^  que  rien  n'est  moins  artistique 
qu'une  composition  dans  laquelle  se  trouvent  réunis  des 
personnages  entièrement  disproportionnés  de  taille ,  nous 
avons  exclu  tous  les  sujets  de  ce  genre.  »  Si  nous  avions 
pensé  devoir  procéder  ainsi  dans  ce  dernier  ouvrage,  dont 
l'auteur,  par  la  précision  et  l'exactitude  des  détails,  cherche 
à  donner  à  ses  fictions  l'aspect  de  la  vraisemblance,  à  plus 
forte  raison  devions-nous  le  faire  pour  l'œuvre  de  Rabelais, 
qui,  lui,  n'était  nullement  possédé  d'un  semblable  souci.  A 
chaque  instant  il  perd  de  vue  les  proportions  qu'il  a  don- 
nées à  ses  personnages  ou  aux  objets  qui  les  environnent,  et 
Gargantua,  qui  vient  de  s'asseoir,  sans  se  gêner,  sur  le  som- 
met des  tours  de  Notre-Dame,  causera  bientôt  avec  des  inter- 
locuteurs dont  la  voix  ne  pourrait  parvenir  jusqu'à  lui  et 
entrera  avec  eux  dans  des  maisons  qui  s'élèveraient  à  peine  à 
la  cheville  de  son  pied. 

Chez  Rabelais  tout  est  allusion  et  symbole.  Les  grotesques 
exagérations  de  son  récit  ne  sont  pour  lui  qu'un  moyen  de 


6  NOTEDELEDITEUR 

faire  passer  les  dures  vérités  qu'il  veut  dire.  La  grandeur 
physique  de  ses  héros  n'est  que  l'image  de  leur  grandeur 
morale  et  intellectuelle,  et  ils  ne  font  usage  de  leur  force 
que  pour  le  bien  des  hommes  :  car  c'est  l'amour  de  l'huma- 
nité qui  est  la  note  dominante  chez  Rabelais,  et  qui  fait  le 
fond  de  son  œuvre.  Gargantua  et  Pantagruel  sont  les  types 
des  souverains  puissants  et  bons,  qui  ne  font  la  guerre  que 
pour  aller  au  secours  des  opprimés.  Pantagruel  va  spontané- 
ment au-devant  de  Panurge,  qui  est  la  personnification  du 
peuple  souffrant  et  travaillant  ;  il  entreprend  avec  lui  un  long 
voyage,  lui  fait  toucher  du  doigt  tous  les  abus  dont  il  a  été 
victime,  et  l'amène  finalement  devant  la  Dive  Bouteille  à  la- 
quelle il  doit  se  désaltérer,  c'est-à-dire  prendre  sa  part  des 
jouissances  de  ce  monde. 

On  le  voit  donc,  l'œuvre  de  Rabelais  est  éminemment 
philosophique,  et  nous  devions,  dans  les  sujets  destinés  à  la 
décrire  et  à  la  raconter,  concilier  le  sérieux  du  fond  avec  le 
comique  de  la  forme,  en  évitant  de  tomber  dans  le  bur- 
lesque. Voici,  d'ailleurs,  dans  leur  ordre,  les  sujets  que 
nous  avons  choisis  : 

1°  L'Éducation  de  Gargantua.  —  C'est  l'éducation  et 
l'instruction  d'après  la  nature,  remplaçant  les  procédés  sco- 
lastiques  dont  l'intelligence  de  Gargantua  avait  d'abord  été 
la  victime.  —  Liv.  I,  chap.  2  3. 

2"  Gargantua  au  château  du  Gué  deVède.  —  Gargantua 
fait  la  guerre  pour  venir  au  secours  des  opprimés.  —  Liv.  I, 
ch.   36. 

3^  Rencontre  de  Panurge,  que  Pantagruel  prend  sous  sa 
protection  pour  le  sauver  de  la  misère  et  de  l'ignorance.  — 
Liv.  II,  ch.  9. 

4*'  Discussion  entre  Panurge  et  Thaumaste.  —  Triomphe 
du  bon  sens  populaire  sur  les  raisonnements  des  sophistes.  — 
Liv.  II,  ch.   19. 

5"  Panurge  mange  son  blé  en  herbe.  —  Panurge,  homme 
du  peuple  devenu  riche  tout  à  coup,  gaspille  rapidement 
tout  son  bien  avrc  l'imprévoyance  de  celui  qui  n'est  pas 
habitué  à  posséder.  —  Liv.  III,  ch.   2. 


NOTE      DE      L    EDITEUR  C 

6°  Songe  de  Panurge.  —  Nous  devions  forcément  consacrer 
un  sujet  à  la  fameuse  discussion  sur  le  mariage;  celui-ci 
nous  a  fourni  l'occasion,  très-rare  dans  Rabelais,  de  met- 
tre une  femme  en  scène.  —  Liv.  III,  ch.  14. 

7°  Les  Moutons  de  Dindenault.  —  Un  épisode  qui  ne 
fait  pas  l'éloge  de  Panurge,  mais  qui  est  tellement  populaire 
que  nous  ne  pouvions  manquer  de  lui  donner  place  dans 
notre  suite  de  gravures.  —  Liv.  IV,  ch.  8. 

S°  Pantagruel  chez  les  Papimancs.  — Abus  dans  le  clergé. 
—  Liv.  IV,  ch.  5o. 

9''  Le  Tri'.unal  de  Grippe-Minault.  —  Abus  dans  la 
magistrature.  —  Liv.  V,  ch.   i3. 

10°  Panurge  devant  la  Dive  Bouteille.  —  Fin  du  voyage 
de  Pantagruel  et  de  Panurge^  et  conclusion  de  l'ouvrage.  — 
Liv.  V,  ch.  45. 

Tel  est  le  plan  que  nous  avons  suivi  pour  le  choix  de 
nos  sujets.  Nous  espérons  obtenir  l'approbation  des  ama- 
teurs; mais  nous  avons  en  tout  cas  la  certitude  qu'ils  ren- 
dront pleinement  hommage  à  la  puissante  originalité  et  à  la 
vigueur  d'exécution  que  M.  Boilvin  a  montrées  dans  cette 
suite  de  planches,  qui  est  une  œuvre  entièrement  nouvelle. 

D.  J. 


INTRODUCTION 


NCORE  une  édition  de  Rabelais ,  et  ce 
ne  sera  certainement  pas  la  dernière. 
M.  Jouaust,  en  tête  de  sa  belle  publica- 
tion du  Théâtre  de  Molière,  expliquait 
dernièrement  ce  qu'en  devenaient  les  éditions  succes- 
sives; ce  qu'il  dit  à  ce  sujet  peut  s'appliquer  aussi 
bien  aux  éditions  de  Rabelais  :  elles  vont  s'ajoutant 
les  unes  aux  autres  sans  se  détruire,  sans  se  nuire,  ap- 
portant chacune  quelque  clarté  nouvelle  dans  un  texte 
devenu  successivement  plus  facile,  plus  intelligible, 
et  voyant  chaque  jour  augmenter  le  nombre  de  leurs 
lecteurs.  Il  y  a  loin  des  textes  de  Le  Duchat  et  d'Éloy 
Johanneau  à  ceux  qu'on  lit  aujourd'hui.  Et  pour  ar- 
river à  cette  facilité,  à  cette  élucidation,  il  a  fallu  bien 
peu  de  chose  :  revenir  tout  simplement  au  texte  pri- 
mitif de  Rabelais,  que  les  éditeurs  précédents  avaient 
compliqué  comme  à  plaisir. 

Rabelais  I.  a 


ij  INTRODUCTION 

Grâce  à  ce  procédé  tout  naturel,  qu'avait  conseillé 
M.  Brunct,  Kabelais  a  retrouvé  de  nos  jours  le  succès 
qu'il  a  eu  lors  de  son  apparition  prcniicre,  après  avoir 
été  presque  oublié  par  le  XVII^  et  le  XVIII^  siècle. 
Ignoré  du  commun  des  lecteurs,  à  peine  lu  par  quel- 
ques érudits ,  il  ne  fut  bien  connu  que  de  quelques 
grands  esprits,  comme  Molière  et  La  Fontaine,  qui 
portent  dans  leurs  œuvres  la  trace  irrécusable  de  leur 
intime  fréquentation  avec  ce  vaste  génie. 

C'est  la  petite  édition  commencée  par  Labitte ,  et 
continuée  par  M.  Paul  Lacroix,  qui  travailla  d'abord 
à  la  vulgarisation  de  Kabelais.  Et  cependant  que  de 
choses  à  reprendre  dans  ce  texte,  reproduction  de  celui 
de  Le  Duchat!  La  Bibliothèq^ue  elzevirienne,  sui- 
vant les  conseils  de  M.  Brunct,  est  revenue  aux  édi- 
tions publiées  du  vivant  de  l'auteur,  et  désormais  il 
ne  sera  plus  permis  de  s'en  écarter. 

Le  grand  mérite  de  l'édition  de  M.  Lacroix  est 
dans  le  travail  sur  la  vie  de  Kabelais  dont  il  l'a  fait 
précéder.  S'il  adopte  trop  volontiers  les  bouffonneries 
énormes  qu'on  a  prêtées  à  son  auteur,  il  a  élucidé 
avec  grand  soin  beaucoup  de  côtés  obscurs.  Le  regretté 
M.  Kathery,  après  lui,  est  venu  nous  apporter  de  nou- 
velles lumières,  malheureusement  encore  bien  insuffi- 
santes, et  après  tant  de  consciencieuses  recherches  il 
se  trouve  que  nous  n'en  savons  guère  plus  sur  Ra6«- 
lais  que  sur  la  première  moitié  de  la  vie  de  Molière. 

L'incertitude  commence  avec  la  date  de  sa  naissance 
et  la  profession  de  son  père.  Ce  serait  entre  1483   et 


INTRODUCTION  llj 

1495,  —  M.  Benjamin  Fillon,  dans  Poitou  et  Ven- 
dée, a  rendu  presque  certaine  cette  date  de  1495,  — 
qu'il  serait  né  à  Chinon,  dernier  de  plusieurs  fils  de 
Thomas  Kabelaisy  hôtelier  ou  apothicaire  à  l'enseigne 
de  la  Lamproie.  La  connaissance  approfondie  de  la 
botanique  qui  se  retrouve  à  chaque  page  de  Vœuvre 
de  Rabelais,  tendrait  à  faire  croire  qu'il  a  commencé 
sa  vie  dans  une  officine. 

Il  ne  parait  pas  avoir  jamais  connu  sa  mère.  Vers 
neuf  ou  dix  ans,  il  fut  placé  par  son  père  à  l'abbaye 
de  Seuilly,  puis  envoyé  au  couvent  de  la  Baumette,  près 
d'Angers,  oh  il  aurait  connu  les  frères  Du  Bellay,  dont 
Vamitié  lui  devait  être  si  utile. 

On  le  retrouve  en  i  5  1 9  nioine,  au  couvent  des  fran- 
ciscains de  Fontenay-le-Comte.  Ce  doit  être  par  la 
volonté  formelle  de  son  père  qu'il  y  prit  le  froc,  car 
il  est  difficile  de  supposer  qu'il  ait  pu  obéir  à  une  er- 
reur de  vocation.  C'est  là  que  Rabelais  commença  à 
prendre  cet  ardent  désir  de  connaître  qui  fît  de  lui 
non-seulement  un  érudit,  mais  un  savant.  Là  se  ma- 
nifesta sa  passion  pour  l'étude  des  auteurs  grecs  et 
latins,  dont  on  retrouve  tant  de  passages  dans  ses  œu- 
vres; là  il  entra  en  relations  avec  nombre  d'érudits  cé- 
lèbres. Pierre  Lamy,  moine  comme  lui,  le  fit  connaître 
à  Guillaume  Budée,  puis  à  Geoffroy  d'Estissac,  évêque 
de  Maillezais,  qui  lui  resta  toujours  ami,  à  André 
Tiraqueau,  à  Aimery  Bouchard  et  à  bien  d'autres. 

Mais  quoi  !  tout  le  clergé  a  le  grec  en  horreur  : 
c'est  œuvre  diaboliqiie  et  on  devient  hérétique  rien  qu'en 


INTRODUCTION 


étudiant  le  grec.  Pierre  Lamy  et  Rabelais  ne  tardè- 
rent pas,  grâce  à  leur  hellénisme^à  s'attirer  l'attention 
malveillante  de  leurs  supérieurs.  On  fouilla  leurs  cel- 
lules, on  confisqua  leurs  auteurs  grecs,  peut-être  aussi 
quelques  écrits  d'Erasme  ;  on  jeta  les  coupables  en  pri- 
son. Heureusement  l'évêque  de  Maillezais,  Geoffroy 
d'Estissac,  les  couvrit  de  sa  protection.  Il  fît  quitter  à 
Rabelais  le  couvent  des  franciscains  pour  le  soustraire 
à  la  haine  ou  à  l'envie  des  moines,  et  obtint  pour  lui, 
de  Clément  VII,  en  1524,  l'autorisation  de  passer  à 
l'abbaye  de  Maillezais,  sous  la  règle  de  saint  Benoît. 
Il  était  relevé  de  son  vccu  de  pauvreté  et  pouvait  pos- 
séder des  bénéfices.  Là  il  augmenta  encore  le  nombre 
de  ses  relations  d'amitié  et  d'érudition,  puis  il  quitta 
enfin  la  robe  de  moine,  prit  l'habit  séculier  et  s'en  alla 
exercer  à  la  fois  la  médecine  et  le  ministère  sacré. 

Fuyait-il  quelque  persécution,  quelque  vengeance  de 
ses  anciens  confrères  de  Fontcnay-le-Comte?  Voulait- 
il  seulement  visiter  les  Universités  de  France?  Toujours 
est-il  que  le  16  septembre  lySo  //  est  inscrit  sur  les 
registres  de  la  Faculté  de  médecine  de  Montpellier,  et 
que  le  i^'  novembre  de  la  même  année  il  y  passe  son 
examen  de  bachelier.  Quoiqu'il  ne  fut  pas  encore 
docteur,  il  y  fit  des  leçons  publiques,  pendant  les  années 
i53o  et  i53i_,  sur  les  Aphorismes  d'Hippocrate  et 
sur  /'Ars  parva  de  Galicn,  œuvres  dont  il  a  publié 
des  éditions. 

M.   Eugène  Nocl  suppose,  avec   quelque  raison, 
que,  pendant  ce  premier  séjour  à  Montpellier,  Rabe- 


INTRODUCTION  V 

lais  visita  les  îles  d'Hyères,  dont  il  aurait  conservé  un 
doux  souvenir.  Et  en  effet,  en  tête  du  troisième  livre, 
il  prend  le  titre  de  Calloïer  des  isles  d'Hyères. 

C'est  pendant  ce  même  temps  qu'il  prit  part  avec 
ses  amis  et  collègues  [Antoine  Saporta,  Guy  Bour- 
guier,  Balthasar  Noyer,  Tolet,  Jean  Quentin, 
Françoys  Kobinet,  Jean  Perdrier)  à  la  représentation 
de  La  Morale  Comédie  de  celluy  qui  avoit 
ESPOUSÉ  UNE  FEMME  MUTE,  morale  comédie  dont 
Molière  s'est  souvenu  dans  le  Médecin  malgré  lui. 
En  octobre  i532  Kabelais  est  ci  Lyon  en  qualité 
de  médecin  de  VHôtel-Dieu.  Pourquoi  et  comment, 
on  ne  le  sait  pas  encore.  Y  fut-il  en  outre  correcteur 
d'imprimerie,  comme  on  Va  supposé,  rien  ne  le 
prouve.  C'est  à  Lyon  toutefois  qu'il  publia  plusieurs 
éditions  savantes,  et  c'est  de  cette  ville  qu'il  entretint 
une  correspondance  active  avec  les  plus  remarquables 
érudits  de  son  temps. 

C'est  en  cette  même  année  i532  que  parurent  à 
Lyon  Les  Grandes  et  Inestimables  Chroniques  du 
GRAND  et  Énorme  géant  Gargantua^  qui  semblent 
être  le  point  de  départ  de  toute  l'épopée  burlesque  de 
Kabelais.  On  ne  peut  dire  avec  certitude  si  cette  pre- 
mière ébauche  est  bien  de  lui,  ou  s'il  y  a  pris  seule- 
ment son  sujet  parce  que  le  nom  du  héros  était  déjà 
populaire.  C'est  en  i532  aussi  que  parut  à  Lyon  le 
Pantagruel,  suivi  de  la  Pantagrueline  Pronosti- 
CATioN  pour  i533. 

Tout  est  doute  et  problème  dcms  la  vie  et  lespubli- 


V 


INTRODUCTION 


cations  de  Kabelais.  On  ne  sait  si  le  deuxième  livre, 
le  Pantagruel,  n'a  pas  paru  avant  le  premier^  Gar- 
gantua. La  première  édition,  avec  date,  que  l'on  con- 
naisse <iu Gargantua  est  de  Lyon,  i535.  //  existe  un 
seul  exemplaire  connu  d'une  autre  édition  qui  pour- 
rait être  antérieure  à  i535,  mais  le  titre  y  manque,  et 
Von  en  est  réduit  à  des  suppositions. 

En  i533  et  i534  Kabelais  accompagne  à  Kome, 
en  qualité  de  médecin,  de  secrétaire  peut-être,  Jean 
Du  Bellay,  évêque  de  Paris,  ambassadeur  de  Fran- 
çois I*^^.  C'est  pendant  ce  preniier  séjour  à  Kome 
qu'il  aurait  appris  l'arabe. 

A  la  fin  de  i534  il  est  de  retour  à  Lyon,  reprend 
son  poste  à  rHôtel-Dieu,  et  y  fait  une  leçon  publique 
d'anatomie.  Cette  même  année  paraît  à  Lyon  une 
nouvelle  édition  du  Pantagruel,  avec  la  Pantagrue- 
LiNE  Pronostication  pour  l535. 

En  i535  //  quitte  Lyon,  et  l'Hôtel-Dieu  de  cette 
ville  pourvoit  à  son  remplacement  comme  médecin. 

En  i535  et  i536  Kabelais  fait  à  Kome  un  nou- 
veau voyage  avec  Jean  Du  Bellay,  nommé  cardinal 
par  Paul  IIL  C'est  de  là  qu'il  écrit  à  Geoffroy  d'Es- 
tissac  les  lettres  publiées  par  les  frères  de  Sainte- 
Marthe. 

Sur  une  supplique  de  Kabelais,  à  lui  adressée  par 
l'entrcniise  des  cardinaux  Ghinucci  et  Simonetta,  le 
pape  Paul  lll  lui  accorde  absolution  pleine  et  entière 
d'avoir  quitté  sans  permission  le  couvent  de  Maillezais 
et  le  froc.  Il  est  autorisé  à  reprendre  l'habit  de  saint 


NTRODUCTION 


VIJ 


Benoît  et  à  pratiquer  partout  la  médecine  par  charité 
et  sans  répandre  le  sang. 

Revenu  alors  à  Paris,  il  voulut  entrer  à  l'abbaye 
de  Saint-Maur-des-Fossés,  sur  les  revenus  de  laquelle 
le  cardinal  Du  Bellay  lui  avait  assigné  un  bénéfice. 
Il  éprouva  de  la  part  de  ses  confrères  des  difficultés 
au  sujet  desquelles  il  adressa  une  nouvelle  supplique 
au  pape  Paul  III.  Quoique  la  réponse  du  pape  ne 
soit  pas  connue,  il  est  probable  qu'elle  lui  fut  favo- 
rable, car  il  s'établit  à  Saint-Maur-des-Fossés . 

En  i537  Kabelais  est  à  Montpellier,  ou  il  se  fait 
enfin  recevoir  docteur  en  médecine,  le  22  niai,  sous 
la  présidence  d'Antoine  Griphius,  Griphy  ou  Griffy. 
Il  y  avait  déjà  longtemps  qu'il  avait  pris  ce  titre, 
notamment  dans  ses  deux  almanachs  de  i533_e^cie 
i535  et  dans  la  Supplicatio  pro  apostasia  de  i536. 

Kabelais  fait  alors  à  Montpellier  un  cours  sur 
le  texte  grec  des  Pronostics  d'Hippocrate  et  une  nou- 
velle leçon  publique  d'anatomie. 

Il  parait  avoir,  en  i538,  parcouru  le  midi  de  la 
France,  Castres,  Narbonne,  en  exerçant  la  médecine, 
et  à  la  fin  de  cette  année,  de  retour  à  Lyon,  il  y  fait 
la  dissection  du  corps  d'un  pendu,  ce  qui  est  constaté 
par  une  pièce  de  vers  latins  d'Etienne  Dolet. 

En  i539  Kabelais  entre  comme  médecin  au  service 
de  Guillaume  Du  Bellay,  seigneur  de  Langey,  frère 
du  cardinal,  et  gouverneur  du  Piémont,  et  l'accom- 
pagne à  Turin.  Forcé  par  sa  mauvaise  santé  de  quitter 
son  gouvernement,   Guillaume   Du  Bellay    meurt  le 


Viij  INTRODUCTION 

9  janvier  i  543,  à  Saint-Symphorien,  près  de  Lyon,  en 
présence  de  Rabelais,  auquel  il  lègue  une  rente  de 
i5o  livres  tournois.  Kené Du  Bellay,  évêque  du  Mans, 
frère  de  Guillaume,  remplace  cette  rente  par  la  cure 
de  Saint-Christophe  du  Jambet,  au  diocèse  du  Mans, 
cure  dont  Kabelais  touche  les  revenus  sans  être  obligé 
à  la  résidence. 

A  cette  époque  Kabelais  parait  s'être  surtout  occupé 
de  la  publication  du  Gargantua  et  du  Pantagruel, 
qui  avaient  le  plus  grand  succès.  En  1647  plusieurs 
éditions  des  trois  premiers  livres  et  le  commencement 
du  quatrième  avaient  paru. 

Mais  François  I^^  touchait  à  sa  fin,  et  avec  lui  pou- 
vait cesser  la  protection  dont  le  couvraient  ses  nom- 
breux amis.  Kabelais  prit  les  devants  en  allant 
s'établir  à  Metz,  où  il  occupa  les  fonctions  de  médecin 
salarié  de  la  ville  jusqu'au  milieu  de  l'année  l'S^j. 

A  la  mort  de  François  I^^ ,  le  cardinal  Du  Bellay 
fit  un  nouveau  voyage  à  Kome,  accompagné  encore 
une  fois  de  Kabelais,  qui  assista  en  1549  ^"  f^^*^^ 
données  ci  l'occasion  de  la  naissance  de  Louis  d'Or- 
léans, second  fils  de  Henri  II  et  de  Catherine  de 
Médicis,  par  le  cardinal  Du  Bellay  et  d'Urfé,  am- 
bassadeur de  France.  Il  décrivit  ces  fêtes  dans  un 
opuscule,  La  Sciomachie,  qui  est  adressé  au  cardinal 
de  Lorraine. 

C'est  en  cette  même  année  1549  que  Gabriel  de 
Puits-Herbaut,  moine  de  Fontevrauli,  publia,  contre 
la  personne  et  les  écrits  de  Kabelais,  le  Theotimus, 


INTRODUCTION  IX 

SIVE   DE   TOLLENDIS  ET   EXPURGANDIS   MALIS   LIBRIS..,.^ 

violent  pamphlet  qui  servit  de  point  de  départ  à  la 
légende  de  Kahelais  ivrogne  et  glouton.  Le  pam- 
phlet est  bien  oublié^  mais  Rabelais  a  donné  l'immor- 
talité à  Puits-Herbaut,  dont  il  parle  dans  son  qua- 
trième livre. 

Il  s'agissait  maintenant  d'obtenir  de  Henri  II  un 
privilège  pour  ce  quatrième  livre,  et  la  mort  de  Fran- 
çois I^^  avait  privé  de  crédit  tous  les  amis  de  Kabe- 
lais.  Celui-ci  trouva  un  nouveau  protecteur  dans  le 
cardinal  Odet  de  Chàtillon,  qui  lui  obtint  ce  privi- 
lège. Mais,  avant  de  publier  son  nouveau  livre,  Kabe- 
lais  donna  sa  démission  de  ses  deux  cures,  celle  de 
Saint-Christophe  de  Jambet  au  diocèse  du  Mans  et 
celle  de  Saint-Martin  de  Meudon  au  diocèse  de  Paris, 
à  laquelle  il  avait  été  nommé  le  8  janvier  i55o. 
Comme  l'achevé  d'imprimer  du  quatrième  livre,  qui 
parut  avec  privilège  de  Henri  II  et  épitre  au  cardi- 
nal de  Châtillon,  est  du  28  janvier  ibSi,  Kabelais 
ne  garda  la  cure  de  Meudon  qu'un  peu  nioins  de 
deux  ans. 

Dès  que  le  quatrième  livre  eut  paru,  la  Faculté 
de  Théologie  le  censura,  et  un  arrêt  du  Parlement, 
du  i^"*  mars  i552,  en  suspendit  la  vente.  On  ne  sait 
quand  ni  comment  fut  levée  la  défense,  mais  le  vo- 
lume fut  remis  en  vente  peu  de  temps  après. 

On  croit  que  Kabelais  mourut  en  i553^  ci  Paris, 
dans  une  maison  de  la  rue  des  Jardins,  et  qu'il  fut 
enterré  au  cimetière  de  la  paroisse  Saint-Paul. 

h 


X  INTRODUCTION 

Te/5  sont  les  seuls  faits  positifs  que  l'on  connaisse 
de  sa  vie  ;  tout  le  reste  est  supposition  ou  légende. 

Le  cinquième  livre  ne  parut  qu'en  1574,  et  il  est 
permis  de  douter  qu'il  soit  en  entier  de  la  main 
de  Rabelais.  Certains  passages  sont  dignes  des 
quatre  premiers  livres,  mais  il  faut  bien  reconnaître 
qu'en  un  plus  grand  nonibre  la  verve  de  style^  la  ri- 
chesse d'invention  de  Rabelais,  font  défaut.  On  sent 
aussi,  dans  ce  cinquième  livre,  comme  un  souffle  de 
protestantisme  dont  on  chercherait  vainement  la 
trace  dans  les  quatre  premiers,  où  il  fronde  bien  les 
abus  monastiques  et  autres,  mais  sans  aller  jamais 
jusqu'à  la  Réforme,  restant  catholique  avant  tout. 
A  ce  sujet,  M.  Rathery  cite  un  passage  de  Colletet 
qu'il  est  bon  de  reproduire  : 

((  Rabelais,  tout  libertin  qu'il  paroissoit  aux 

yeux  du  monde,  ne  laissoit  pas  d'avoir  de  pieux  et 
devôts  sentiments  et  de  defferer  merveilleusement 
aux  saintes  constitutions  de  l'Eglise  catholique  et 
orthodoxe,  qu'il  reconnut  toujours  pour  sa  véri- 
table mère,  ce  qui  est  si  constant  encore  que  Jean 
Calvin,  ce  grand  hérésiarque,  fit  tout  ce  qu'il  put 
pour  l'attirer  de  son  party,  mais  en  vain,  et  qu'en- 
suite il  le  traita  d'impie  et  d'athée,  comme  on  le 
void  dans  son  Traitté  des  scandales  :  si  est-ce,  ju- 
geant cette  relligion  nouvelle  et  de  l'invention  des 
hommes  plutôt   que  de   Dieu,  il  regimba   contre 


INTRODUCTION 


X) 


elle,  et  se  tint  tousjours  ferme  dans  celle  qu'il  avoit 
reçue  de  ses  pères.  Et  c'est  ce  qui  obligea  sans 
doute  ce  grand  et  fameux  sectateur  de  Calvin, 
Henry  Estienne,  de  parler  de  luy  de  la  sorte  dans 
son  Apologie  d'Hérodote  :  «  Quoyque  François 
Rabelais  semble  estre  des  nostres,  il  jette  souvent 
toutefois  des  pierres  dans  nostre  jardin.  » 

C'est  au  milieu  du  XVI^  siècle,  en  pleine  Kenais- 
sance,  et  lors  des  premiers  progrès  de  la  Kefornie, 
que  se  manifeste  Kabelais,  et  il  résume  en  lui  toutes 
les  aspirations,  comme  aussi  toutes  les  connaissances 
de  cette  vigoureuse  époque.  En  érudition,  en  science, 
rien  ne  lui  est  étranger;  il  est  universel  :  langues 
orientales,  langue  grecque,  médecine,  botanique,  phi- 
losophie, il  sait  tout.  Il  n'y  a  pas  à  parler  du  latin, 
qui  était  alors  une  langue  courante. 

S'il  sait  Aristote  par  cœur,  il  puise  aussi  constam- 
ment dans  ^lien,  dans  Pline,  dans  Lucien,  et  il 
donne,  à  chaque  ligne  de  ses  écrits,  la  preuve  de  sa 
connaissance  approfondie  de  toute  l'antiquité;  il  a 
pour  elle  une  affection  si  enthousiaste  qu'il  en  vient  à 
croire  facilement  tout  ce  que  rapportent  les  auteurs 
grecs  ou  latins.  Et  pourtant  son  admiration  pour 
Aristote  ne  Vempcche  pas  d'être  un  ennemi  acharné 
de  la  scolastique,  et  de  pencher  en  philosophie  pour 
Platon. 

Est-il  besoin  de  faire  ressortir  la  justesse  et  l'hu- 
manité de  ses  idées  sur  l'éducation,  sur  la  guerre. 


XIJ  INTRODUCTION 

sur  l'application  des  sciences^  Il  est  le  propagateur 
de  toutes  les  idées  justes^  Vennemi  acharne  de  Tm- 
justice,  le  défenseur  de  tous  les  opprimés.  Il  combat 
toutes  les  superstitions,  et  il  a  le  courage  d'attaquer 
en  face  des  corporations  puissantes'  qui,  pour  se 
venger  ou  se  défendre  ,  envoient  leurs  adversaires 
au  bûcher;  aussi  est-il  obligé,  pour  leur  échapper, 
d'envelopper  les  bonnes  vérités  qu'il  veut  dire  sous  des 
formes  que  la  pruderie  moderne  trouve  un  peu  crues. 
Son  langage  est  pourtant  celui  de  tout  le  monde  à 
Vépoque  où.  il  vivait,  et  Brantôme,  qu'on  ne  songe 
guère  à  attaquer,  a  eu  de  bien  autres  audaces.  Ra- 
belais voulait  être  lu  de  tout  le  monde  et  en  même 
temps  échapper  au  bûcher,  et  ce  ne  lui  est  pas  un 
petit  mérite  d'y  être  parvenu,  tout  en  disant  hardi- 
ment ce  qu'il  avait  à  dire. 

Il  convient  maintenant  de  donner  quelques  indica- 
tions sur  le  texte  de  cette  nouvelle  édition.  Il  est  la  re- 
production exacte,  pour  les  quatre  premiers  livres,  de 
la  dernière  édition  publiée  du  vivant  de  Rabelais. 
Dans  les  Variantes,  imprimées  à  la  fin  de  chaque 
livre,  sont  mentionnés  avec  soin  tous  les  passages 
des  éditions  antérieures  qui  manquent  dans  celle  qui 
a  servi  de  type. 

Les  seules  modifications  introduites  ont  consisté  : 

i°A  uniformiser  la  ponctuation,  qui,  n'ayant  pas 
alors  de  règles  fixes,  variait  constamment  ; 

2°  .4  multiplier  les  alinéas,  afin  de  rendre  la  lec- 
ture plus  facile  et  moins  fatigante; 


INTRODUCTION  XUJ 

3°  A  distinguer  l'i  et  Vu  consonnes  et  voyelles,  dont 
la  confusion  ne  peut  être  quun  obstacle  pour  le  lec- 
teur. 

Aucun  de  ces  changements  n'a  porté  la  moindre 
atteinte  au  respect  absolu  du  texte. 

Le  cinquième  livre  a  été  l'objet  de  moins  de  scru- 
pules. Publié  après  la  mort  deKabelais,  il  se  ressent 
de  cette  impression  posthume.  Plusieurs  passages  en 
sont  presque  incompréhensibles,  et,  toutes  les  fois  que 
le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  nationale  a  donné 
une  leçon  qui  a  paru  meilleure,  on  Va  suivie.  Ce  ma- 
nuscrit est  de  la  main  d'un  copiste  peu  lettré,  mais 
il  a  été  fait  d'après  une  édition  ou  une  copie  diffé- 
rente des  éditions  connues  :  il  donne  donc  des  va- 
riantes  et  des  passages  nouveaux  qu'on  ne  saurait 
trouver  ailleurs.  M.  de  Montaiglon,  en  imprimant 
ce  manuscrit  pour  la  première  fois,  a  rendu  un  véri- 
table service. 

Enfin  on  a  joint  à  cette  édition  un  glossaire,  beau- 
coup trop  succinct  sans  doute,  mais  qui  suffira  à 
en  rendre  la  lecture  facile  et  courante  :  car,  si  Ra- 
belais est  très-clair  dans  la  construction  de  sa  phrase, 
chez  lui  le  mot  est  souvent  obscur  et  a  besoin  d'ex- 
plication. Souvent  aussi  il  emploie  le  même  mot  dans 
des  acceptions  différentes,  et  toujours  le  glossaire 
présente  les  sens  de  ces  mots  dans  l'ordre  où  ils  se 
rencontrent  au  courant  de  l'ouvrage. 

Il  reste  maintenant  un  vœu  à  former,  c'est  qu'on 
nous  donne  bientôt  une  Bibliographie  rabelaisienne; 


XIV  INTRODUCTION 

mais,  pour  une  telle  œuvre,  il  faut  presque  toute  la 
vie  d'un  érudit.  Il  en  est  un  qui,  depuis  de  longues 
années,  étudie  avec  une  rare  patience  tout  ce  qui 
touche  à  Rabelais,  et  il  est  permis  d'espérer  que 
M.  Paul  Lacroix  voudra  bien  faire  pour  Rabelais 
ce  que  dernièrement  il  a  fait  avec  tant  de  succès  pour 
Molière. 

Paul    Chéron. 


LES  CINQ.  LIVRES 


DE 


F.    RABELAIS 


PROLOGUE 

DE    M.    FRANÇOIS    RABELAIS  ,    POUR    LE    CINQUIESME 

LIVRE    DES    FAICTS    ET    DICTS    HEROÏQUES 

DE    PANTAGRUEL 


AUX  LECTEURS  BENEVOLES 


EUVEURS  infatigables,  et  vous,  VerolUz 
tresprecieux,  pendant  qu'estes  de  loisir 
et  que  n'ay  autre  plus  urgent  affaire  en 
main,  je  vous  demande  en  demandant: 
Pourquoy  est-ce  qu'on  dit  maintenant  en  commun 
proverbe  :  Le  monde  nest  plus  fat^ 

Fat  est  un  vocable  de  Languedoc,  et  signifie  non 
salle,  sans  sel,  insipide,  fade;  par  métaphore  signifie 
fol,  niais,  despourveu  de  sens,  esventé  de  cerveau. 
Voudriez-vous  dire,  comme  de  faict  on  peult  logica- 
lement  inférer,  que  par  cy-devant  le  monde  eust  esté 
fat,  'maintenant  seroit  devenu  sage?  Par  quantes  et 
quelles  conditions  estoit-il  fat?  Quantes  et  quelles 
Rabelais.    V.  i 


2  PROLOGUE 

conditions  estoient  requises  à  le  faire  sage?  Pourquoy 
estoit-il  fat?  Pourquoy  seroit-il  sage?  Enquoy  cong- 
noissez-vous  la  folie  antique  ?  Enquoy  cognoissez- 
vous  la  sagesse  présente?  Qui  le  fi^t  fat?  Qui  l'a  fait 
sage  ?  Le  nombre  desquelz  est  plus  grand  ou  de 
ceux  qui  Vaymoient  fat,  ou  de  ceux  qui  Vayment 
saige?  Quant  de  temps  fut-il  fat?  Quant  de  temps 
sera  il  sage?  Dont  procedoit  la  folie  antécédente? 
Dont  procède  la  sagesse  subséquente?  Pourquoy  en 
ce  temps,  non  plus  tard,  print  fin  l'antique  folie? 
Pourquoy  en  ce  temps,  non  plustost,  commença  la 
sagesse  présente?  Quel  mal  nous  estoit  de  la  folie  pré- 
cédente ?  ^Quel  bien  nous  est  de  la  sagesse  succedente  ? 
Comment  seroit  la  folie  antique  abolie?  Coniment 
seroit  la  sagesse  présente  restaurée? 

Kespondez,  si  bon  vous  semble  :  d'autre  adjura- 
tion n'useray-je  envers  vos  Révérences,  craignant  alté- 
rer vos  Paternitez.  N'ayez  honte,  faictes  confusion  à 
Hcr  der  Tyfel,  ennemy  de  Paradis^  ennemy  de  vérité. 
Courage,  enfansl  si  estes  des  miens,  beuvez  trois  ou 
cinq  fois  pour  la  première  partie  du  sermon,  puis 
respondez  à  ma  demande;  si  estes  de  l'autre,  Avalis- 
que  Sathanas.  Car  je  vous  jure  mon  grand  Hurlu- 
burlu  que,  si  autrement  ne  m'aydcz  à  la  solution  du 
probksme  susdit,  desja,  et  n'y  a  gucrcs,  je  me  repens 
vous  l'avoir  proposé,  pour  tant  que  ce  m'est  pareil 
estrif  comme  si  le  loup  ienois  par  les  aureilles  sans 
espoir  de  secours.  Plaict?  J'entends  bien,  vous  n'estes 
délibérez  de  respondre.  Non  feray-je,  par  ma  barbe; 


PROLOGUE  5 

seulement  vous  allegueray  ce  qu'en  avoit  prédit  en  es- 
prit prophétique  un  vetierable  docteur ^  ciutheur  du  livre 
intitule  la  Cornemuse  des  Prélats.  Que  dit-il^  le 
paillard?  Escoutez,  vietz-dazes,  escoutez  : 

L'an  Jubilé,  que  tout  le  monde  raire 
Fadas  se  feist,  est  supernumeraire 
Au  dessus  trente.  O  peu  de  révérence  ! 
Fat  il  sembloit  ;  mais  en  persévérance 
De  long  brevets,  fat  plus  ne  gloux  sera  : 
Car  le  doux  fruict  de  l'herbe  esgoussera, 
Dont  tant  craignoit  la  fleur  en  prime  vere. 

Vous  l'avez  oy,  l'avez-vous  entendu?  Le  docteur  est 
antique,  les  paroles  sont  laconiques,  les  sentences  sco- 
tines  et  obscures,  ce  nonobstant  qu'il  traitast  naatiere 
de  soy  profonde  et  difficile.  Les  meilleurs  interprètes 
d'iceluy  bon  Père  exposent  Van  Jubilé  passant  le  tren- 
tiesme  estre  les  années  encloses  entre  ceste  aage  cou- 
rante l'an  mil  cinq  cens  cinquante.  Oncques  ne  crain- 
dra la  fleur  d'icelle.  Le  monde  plus  fat  ne  sera  dit, 
venant  la  prime  saison.  Les  fols,  le  nombre  desquels 
est  infiny,  comme  atteste  Salomon,  périront  enragez, 
et  tout  espèce  de  folie  cessera,  laquelle  est  pareillement 
innombrable,  comnie  dict  Avicenne,  maniae  infinitse 
sunt  species.  Laquelle,  durant  la  rigueur  hibernale, 
estoit  au  centre  repercutée,  apparoist  en  la  circonfé- 
rence, et  est  en  cesves  comme  les  arbres.  L'expérience 
nous  le  demonstre,  vous  le  sçavez,  vous  le  voyez.  Et 
fut  jadis  exploré  par  le  grand  bon  homme  Hip- 
pocrates,  Aphorism.  :  Vere  etenim  manise^  etc.  Le 


4  PROLOGUE 

monde  donques  ensagissant,  plus  ne  craindra  la  fleur 
des  febves  en  la  prime  vere,  c'est-à-dire,  comme  pou- 
vez le  voirre  au  poing  et  les  larmes  à  l'œil,  pitoiablc- 
ment  croire  en  caresme  un  tas  de  livres  qui sembloyent 
florides,  florulens,  fîoris  comme  beaux  papillons,  mais 
au  vray  estoient  ennuyeux,  fascheux,  dangereux,  espi- 
neux  et  ténébreux  comme  ceux  d'Heraclitus,  obscurs 
comme  les  Nombres  de  Pythagoras,  qui  fut  Koy  de 
la  febve,  tesmoin  Horace.  Iceux  périront,  plus  ne 
viendront  en  main,  plus  fie  seront  leuz  ne  veuz.  Telle 
estait  leur  destinée,  et  là  fut  leur  fin  prédestinée. 

Au  lieu  d'iceux  ont  succédé  les  febves  en  gousse.  Ce 
sont  ces  joyeux  et  fructueux  livres  de  Pantagruelisme, 
lesquels  sont  pour  ce  jour  d'huy  en  bruit  de  bonne  vente, 
attendant  la  période  du  jubilé  subséquent,  à  Vestude 
desquels  tout  le  monde  s'est  adonné;  aussi  est-il  sage 
nommé.  Voila  vostre  problesme  solu  et  résolu,  faictcs 
vous  gens  de  bien  là-dessus.  Toussez  icy  un  bon  coup 
ou  deux,  et  en  beuvez  neuf  d'arrachepied,  puis  que 
les  vignes  sont  belles  et  que  les  usuriers  se  pendent;  ds 
me  cousteront  beaucoup  en  cordeaux  si  bon  temps 
dure,  car  je  proteste  leur  en  fournir  libéralement  sans 
payer,  toutes  et  quantes  fois  que  pendre  ils  se  voudront, 
espar gnant  le  gain  du  bourreau. 

Afin  donques  que  soyez  participans  de  cette  sagesse 
advcnentc,  émancipez  de  l'antique  folie,  effacez-moy 
présentement  de  vos  pancartes  le  symbole  du  vicl  phi- 
losophe à  la  cuysse  dorée,  par  lequel  il  vous  intcrdi- 
soit  l'usage  et  mangeaille  des  febves,  tenans  pour  chose 


PROLOGUE  D 

vraye  et  confessée  entre,  tous  bons  compagnons  qu'il 
les  vous  interdisoit  en  pareille  intention  que  le  medicin 
d'eaue  douce  feu  Amer,  nepveu  de  l'avocat  Seigneur 
de  Camelotiere,  deffendoit  aux  malades  Vaisle  de  per- 
drix, le  cropion  de  gelines  et  le  col  de  pigeon,  disant  : 
Ala  mala,  cropium  dubium,  coUum  bonum  pelle  re- 
mota,  les  reservans  pour  sa  bouche,  et  laissant  aux 
malades  seulement  les  osselets  à  ronger. 

A  luy  ont  succédé  certains  Caputions  nous  deffen- 
dant  les  febves,  c'est-à-dire  livres  de  Pantagruelisme, 
et  à  l'imitation  de  Philoxenus  et  Gnato  Sicilien,  an- 
ciens architecques  de  leur  monachale  et  ventrcde  vo- 
lupté, lesquels  en  plains  banquets,  lors  qu'estoyent  les 
f ricins  morceaux  servis,  crachoient  sus  la  viande,  affîn 
que  par  horreur  autres  qu'eux  n'en  mangeassent.  Ainsi 
ceste  hideuse,  morveuse,  catharreuse,  vermolue  cago- 
taille,  en  public  et  privé,  déteste  ces  livres  frians,  et 
dessus  vilainement  crachent  par  leur  impudence.  Et 
combien  que  maintenant  nous  lisons  en  nostre  langue 
gallique,  tant  en  vers  qu'en  oraison  solue,  plusieurs 
excellens  escripts,  et  que  peu  de  reliques  restent  de  ca- 
pharderie  et  siècle  Gottis,  ay  neantmoins  esleu  gasouil- 
ler  et  siffler  oye,  comme  dit  le  proverbe,  entre  les 
cygnes,  plustost  que  d'estre  entre  tant  de  gentils  poètes 
et  faconds  orateurs  mut  du  tout  estimé;  jouer  aussi 
quelque  villageois  personnage  entre  tant  disers  joueurs 
de  ce  noble  acte,  plustost  qu'estremis  au  rang  de  ceux 
qui  ne  servent  que  d'ombre  et  de  nombre,  seulement 
baaillans  aux  mousches,  chovans  des  aureilles  comme 


6  PROLOGUE 

un  asne  d'Arcadie  au  chant  des  musiciens ,  et  par 
signes,  en  silence,  signifians  qu'ils  consentent  à  la 
prosopopce. 

Prins  ce  chois  et  eslection,  ay  pensé  ne  faire  auvre 
indigne  si  je  rcmuois  mon  tonneau  Diogenic,  afin  que 
ne  me  dissiez  ainsi  vivre  sans  exemple. 

Je  contemple  un  grand  tas  de  Collinets,  Marots, 
Drouets,  Saingelais,  Sallets,  Masuels,  et  une  longue 
centurie  d'autres  poètes  et  orateurs  galliques,  et  voy 
que,  par  longtemps  avoir  en  Mons  Parnasse  versé  à 
iescole  d'Apollo,  et  du  fons  cabalin  beu  à  plein  godet 
entre  les  joyeuses  Muses,  à  Veternelle  fabrique  de 
nostre  vulgaire,  ils  ne  portent  que  marbre  parien,  ale- 
bastre,  porphyre  et  bon  ciment  royal;  ils  ne  traittent 
que  gestes  héroïques,  choses  grandes,  matières  ardues, 
graves  et  difficiles,  et  le  tout  en  rethorique  armoisine 
et  cramoisine,  par  leurs  escrits  ne  produisent  que  nec- 
tar divin,  vin  précieux,  friand,  ricmt,  muscadet,  déli- 
cat, délicieux.  Et  n'est  ceste  gloire  en  hommes  toute 
consonimée,  les  dames  y  ont  participé,  entre  lesquelles 
une  cxtraicte  du  sang  de  France,  non  allegable  sans 
insigne  prefation  d'honneur,  tout  ce  siècle  a  estonné 
tant  par  ses  escripts,  inventions  transcendentes,  que 
par  ornement  de  langage,  de  style  mirifique.  Imitez- 
les ,  si  sçavez;  quant  est  de  moy,  imiter  je  ne  les 
sçaurois  :  à  chacun  n'est  octroyé  henter  et  habiter  Co- 
rinthc.  A  l'édification  du  temple  de  Salomon  chascun 
un  sicle  d'or  offrit,  à  pleines  poignées  ne  pouvoit.  Puis 
doncqucs  qu'en  nostre  faculté  n'est  en  l'art  d'architec- 


PROLOGUE  7 

tare  tant  promouvoir  comme  ils  font,  je  suis  délibéré 
faire  ce  que  fîst  Kcgnault  de  Montauban,  servir  les 
massons,  mettre  bouillir  pour  les  massons,  et  m'auront, 
puis  que  compagnon  ne  puis  estre,  pour  auditeur,  je 
dis  infatigable,  de  leurs  trescelestes  escripts. 

Vous  mourez  de  peur,  vous  autres  les  Zoïles  emu- 
lateurs et  envieux  ;  allez  vous  pendre,  et  vous  mesmes 
choisissez  arbre  pour  pendages,  la  hart  ne  vous  fau- 
dra mie.  Protestant  icy  devant  mon  Helicon,  en  l'au- 
dience des  divines  Muses,  que,  si  je  vis  encores  Vaage 
d'un  chien,  ensemble  de  trois  corneilles,  en  santé  et 
intégrité,  telle  que  vescut  le  sainct  capitaine  juif,  Xe- 
nophile  musicien,  et  Demonax  philosophe,  par  argu- 
mens  non  impertinans  et  raisons  non  refusables  je 
prouveray  en  barbe  de  je  ne  sçay  quels  centonifiques 
botteleurs  de  matières  cent  et  cent  fois  grabelées,  rap- 
petasseurs  de  vieilles  ferrailles  latines,  revendeurs  de 
vieux  mots  latins  tous  moisis  et  incertains,  que  nostre 
langue  vulgaire  n'est  tant  vile,  tant  inepte,  tant  indi- 
gente et  à  mespriser  qu'ils  l'estiment.  Aussi  en  toute 
humilité  supplians  que  de  grâce  specicde,  ainsi  comme 
jadis  estcms  par  Phebus  tous  les  trésors  es  grands 
poètes  départis,  trouva  toutesfois  Esope  lieu  et  office 
d'apologue,  semblablement,  veu  qu'à  degré  plus  haut 
je  n'aspire,  ils  ne  desdaignent  en  estât  me  recepvoir  de 
petit  Kiparographe,  sectateur  de  Pyreicus.  Ils  le  fe- 
ront, je  m'en  tiens  pour  asseuré  :  car  ils  sont  tous  tant 
bons,  tant  humains,  gracieux  et  débonnaires  que  rien 
plus. 


5  PROLOGUE 

Parquoy,  Beuveurs,  parquoy,  Goûteurs,  iceux  en 
veullent  avoir  fruition  totale,  car  les  recitans  parmy 
leurs  Conventicules,  cultans  les  haulx  mystères  en 
iceulx  comprins,  entrent  en  possession  et  réputation 
singulière,  comme  en  cas  pareil  fîst  Alexandre  le  Grand 
des  livres  de  la  prime  philosophie  composez  par  Aris- 
toteles. 

Ventre  sur  ventre,  quels  trinquenailles  !  quels  galle- 
fret  ier  s  ! 

Pourtant,  Beuveurs,  je  vous  advise  en  heure  opor- 
iune,  faictes  d'iceux  bonne  provision  soudain  que  les 
trouverez  par  les  officines  des  libraires,  et  non  seule- 
ment les  egoussez,  mais  dévorez  comme  opiatte  cor- 
dialle,et  les  incorporez  en  vous  mesmes;lors  cognois- 
trez  quel  bien  est  d'iceux  préparé  à  tous  gentils 
egousseurs  de  febves.  Présentement  je  vous  en  offre  une 
bonne  et  belle  pannerce,  cueillie  on  propre  jardin  que 
les  autres  précédentes,  vous  suppliant,  au  nom  de  Ke- 
verence,  qu'ayez  le  présent  en  gré,  attendant  mieux  à 
la  prochaine  venue  des  arondelles. 


LE 

CINQ.UIESME 

ET    DERNIER    LIVRE 

DES    FAICTS    ET    DITS    HEROÏQUES    DU    BON 

PANTAGRUEL,    COMPOSE    PAR    M.    FRANÇOIS    RABELAIS, 

DOCTEUR    EN    MEDECINE 

Auquel  est  contenu  la  Visitation  de  l'Oracle  de  la  dive 

BacbuCj  et  le  mot  de  la  bouteille,  pour  lequel 

avoir  est  entrepris  tout  ce  long  voyage. 

Nouvellement  mis  en  lumière. 

M.     D.     LXIIII 


EPIGRAMME 


ABELAis  est-il  mort  ?  Voicy  encor  un  livre. 
Non,  sa  meilleure  part  a  repris  ses  esprits 
Pour  nous  faire  présent  de  l'un  de  ses  escrits, 
Qui  le  rend  entre  tous  immortel  et  fait  vivre. 


Nature  quite. 


LIVRE    CINQ.UIÉME 


CHAPITRE   I 


Comment  Pantagruel  arriva  en  l'îsh  Sonnante,  et  du 
bruit  qu'entendismes. 

ONTiNUANT  nostre  routte,  navigasmes 
par  trois  jours  sans  rien  descouvrir; 
au  quatriesme  aperceusmes  terre,  et 
M  nous  fut  dit  par  nostre  pillot  que  c'es- 
toit  risle  Sonnante,  et  entendismes  un  bruit  de 
loing  venant,  frequant  et  tumultueux,  et  nous  sem- 
bloit,  à  l'ouïr,  que  ce  fussent  cloches  grosses,  pe- 
tites et  médiocres,  ensemble  sonnantes  comme  l'on 
faict  à  Paris,  à  Tours,  Gergeau,  Nantes  et 
ailleurs,  es  jours  des  grandes  festes  ;  plus  appro- 
chions, plus  entendions  ceste  sonnerie  renforcée. 


12  LIVRE    V,    CHAPITRE    I 

Nous  doublions  que  feust  Dodone  avecques  ses 
chauderons,  ou  le  Porticque  dit  Heptaphone  en 
Olympie,  ou  bien  le  bruit  sempiternel  du  colosse 
érigé  sus  la  sépulture  de  Memnon  en  Thebes  d'E- 
gypte, ou  les  tintamarres  que  jadis  on  oyoit  autour 
d'un  sépulcre  en  l'isle  Lipara,  l'une  des  iEolides  ; 
mais  la  chorographie  n'y  consentoit.  a  Je  doute, 
dist  Pantagruel,  que  là  quelque  compaignie  d'a- 
beilles ayent  commancé  prendre  vol  en  l'air,  pour 
lesquelles  revocquer  le  voisinage  faict  ce  triballe- 
ment  de  poilles,  chaudrons,  bassins,  cymbales  cory- 
bantiques  de  Cybele,  mère  grande  des  Dieux.  En- 
tendons. » 

Approchans  davantage,  entendismes,  entre  la 
perpétuelle  sonnerie  des  cloches,  chant  infatigable 
des  hommes  là  residens,  comme  estoit  nostre  advis. 
Ce  fut  la  cause  pourquoy,  avant  que  aborder  en 
risle  Sonnante,  Pantagruel  fut  d'opinion  que  des- 
cendissions avecq'  nostre  esquif  en  un  petit  roc 
auprès  duquel  recognoissions  un  hermitage  et  quel- 
que petit  jardinet. 

Là  trouvasmes  un  petit  bon  homme  hermite 
nommé  Braguibus,  natif  de  Glenay,  lequel  nous 
donna  pleine  instruction  de  toute  la  sonnerie,  et 
nous  festoya  d'une  estrange  façon.  Il  nous  fist  qua- 
tre jours  consequens  jeusner,  atfermant  qu'en  l'isle 
Sonnante  autrement  receus  ne  serions,  parce  que 
lors  estoit  le  jeusne  de  Quatre-Temps.  «  Je  n'en- 
tends point,  dit  Panurge  cest  énigme;   ce  seroit 


PANTAGRUEL  l3 

plustost  le  temps  des  quatre  vens,  car,  jeusnant,  ne 
sommes  farcis  que  de  vent.  Et  quoy,  n'avez  vous 
icy  autre  passetemps  que  de  jeusner?  Me  semble 
qu'il  est  bien  maigre;  nous  nous  passerions  bien  de 
tant  de  festes  du  palais.  —  En  mon  Donat,  dit  frère 
Jehan,  je  ne  trouve  que  trois  temps,  prétérit,  pré- 
sent et  futur;  icy  le  quatriesme  doit  estre  pour  le 
vin  du  valet.  —  Il  est,  dit  Epistemon,  aorist  yssu  de 
prétérit  tresimparfaict  des  Grecs  et  des  Latins,  en 
temps  garré  et  bigarré  receu.  Patience,  disent  les 
ladres.  —  Il  est,  dit  l'hermite,  fatal  ainsi  comme 
je  vous  l'aj  dit  ;  qui  contredit  est  hérétique,  et  ne 
luy  fault  rien  que  le  feu.  —  Sans  faulte,  Pater, 
dit  Panurge,  estant  sur  mer,  je  crains  beaucoup 
plus  estre  mouillé  que  chauffé,  et  estre  noyé  que 
bruslé. 

«  Bien,  jeusnons,  de  par  Dieu;  mais  j'ay  par  si 
long-temps  jeusnéqueles  jeusnes  m'ont  sappé  toute 
la  chair,  et  crains  beaucoup  qu'en  fin  les  bastions 
de  mon  corps  viennent  en  descadence.  Autre  peur 
ay-je  d'avantage,  c'est  de  vous  fascher  en  jeusnant, 
car  je  n'y  sçay  rien,  et  y  ay  mauvaise  grâce,  comme 
plusieurs  m'ont  affermé,  et  je  les  croy;  de  ma  part, 
dy-je,  bien  peu  me  soucie  de  jeusner;  il  n'est  chose 
tant  facile  et  tant  à  main  ;  bien  plus  me  soucie  de 
ne  jeusner  point  à  Tadvenir,  car  là  il  fault  avoir 
dequoy  drapper  et  dequoy  mettre  au  moulin.  Jeus- 
nons, de  par  Dieu,  puisqu'entrez  sommes  es  feries 
esuriales,  ja  longtemps  a  que  ne  les  recognoissois. 


M 


LIVRE    V,     CHAPITRE    I 


—  Et  si  jeusner  faut,  dit  Pantagruel,  expédiant 
aultre  n'y  est,  fors  nous  en  despecher  comme  d'un 
mauvais  chemin.  Aussi  bien  veux-je  un  peu  visiter 
mes  papiers,  et  entendre  si  l'estude  marine  est  aussi 
bonne  comme  la  terrienne,  pource  que  Platon,  vou- 
lant descripre  un  homme  niais,  imperit  et  ignorant, 
le  compare  à  gens  nourris  en  mer  dedans  les 
navires,  comme  nous  dirions  à  gens  nourris  dedans 
un  baril ,  qui  onques  ne  regardèrent  que  par  un 
trou.  » 

Nos  jeusnes  furent  terribles  et  bien  espouventa- 
bles,  car  le  premier  jour  nous  jeusnasmes  à  battons 
rompus,  le  second  à  espées  rabatues,  le  tiers  à  fer 
esmoulu,  le  quart  à  feu  et  à  sang.  Telle  estoit  l'or- 
donnance des  fées. 

CHAPITRE    II 

Comment  l'Isle  Sonnante  avoit  esté  habitée  par   les 
Siticines,  lesquels  cstoyent  devenuz  oiseaux. 

os  jeusnes  parachevez,  l'hermite  nous 
bailla  unes  lettres  adressant  à  un  qu'il 
nommoit  Albian  Camat,  maistre  ^Edi- 
tue  de  l'Isle  Sonnante  ;  mais  Panurge, 
le  saluant,  l'appela  maistre  Antitus.  C'estoit  un  pe- 
tit bon  homme  vieux,  chauve,  à  museau  bien  enlu- 
miné et  face  cramoisie.  Il  nous  fit  tresque  bon 
recueil  par  la  recommandation  de  l'hermite,  enten- 


PANTAGRUEL  l5 

dant  qu'avions  jeusné  comme  a  esté  déclaré.  Après 
avoir  tresbien  repeu,  nous  exposa  les  singularitez 
de  l'isle,  affermant  qu'elle  avoit  premièrement  esté 
habitée  par  les  Siticines,  mais,  par  ordre  de  nature, 
comme  toutes  choses  varient,  ils  estoient  devenus 
oiseaux. 

Là  j'eus  pleine  intelligence  de  ce  qu'Atteius  Ca- 
pito ,  PoUux,  Marcellus,  A.  Gellius,  Athenaeus, 
Suidas,  Ammonius  et  autres  avoient  escrit  des  Siti- 
cines et  Sicinnistes,  et  difïîcille  ne  nous  sembla 
croire  les  transformations  de  Nyctimene,  Progné, 
Itys,  Alcmene,  Antigone,  Tereus,  et  autres  oiseaux. 
Peu  aussi  de  doubte  fismes  des  enfans  Matabrune 
convertis  en  cygnes,  et  des  hommes  de  Pallene  en 
Thrace,  lesquelz  ,  soubdain  que  par  neuf  fois  se 
baignent  au  Palude  Tritonique  ,  sont  en  oiseaux 
transformez.  Depuis  autre  propos  ne  nous  tint  que 
de  cages  et  d'oiseaux.  Les  caiges  estoient  grandes, 
riches,  sumptueuses,  et  faictes  par  merveilleuse 
architecture. 

Les  oiseaux  estoient  grands,  beaulx  et  polis  à 
l'avenant,  bien  ressemblans  les  hommes  de  ma  pa- 
trie ;  beuvoient  et  mangeoient  comme  hommes,, 
esmoutissoyent  comme  hommes,  enduisoyent  comme 
hommes,  pedoient  et  dormoient  et  roussinoient 
comme  hommes;  brief,  à  les  veoir  de  prime  face, 
eussiez  dit  que  feussent  hommes;  toutesfoys  ne 
l'estoyent  mie,  selon  l'instruction  de  Maistre  JEd'i- 
tue,  mais  protestant  qu'ils  n'estoient  ny  séculiers  ny 


l6  LIVRE    V,    CHAPITRE    II 

mondains.  Aussi  leur  pennage  nous  mettoit  en  res- 
verie,  lequel  aucuns  avoient  tout  blanc,  autres  tout 
noir,  autres  tout  gris,  autres  miparti  de  blanc  et 
noir,  autres  tout  rouge,  autres  parti  de  blanc  et  de 
bleu  :  c'estoit  belle  chose  de  les  veoir.  Les  masles 
il  nommoit  Clergaux,  Monagaux,  Prestresgaux, 
Abbegaux,  Evesgaux,  Cardingaux,  et  Papegaut,  qui 
est  unique  en  son  espèce.  Les  femelles  il  nommoit 
Clergesses,  Monagesses,  Prestregesses,  Abbegesses, 
Evesgesses,  Cardingesses,  Papegesses. 

«  Tout  ainsi  toutesfoys,  nous  dist-il,  comme 
entre  les  abeilles  hantent  les  freslons,  qui  rien  ne 
font  fors  tout  manger  et  tout  gaster,  aussi  depuis 
trois  cens  ans  ne  sçay  comment  entre  ces  joyeux 
oiseaux  estoit  par  chascune  quinte  lune  avolé  grand 
nombre  de  Cagots,  lesquels  avoient  honny  et  con- 
chié  toute  l'Isle,  tant  hideux  et  monstrueux  que 
tous  estoient  reffuis.  Car  tous  avoient  le  col  tors  et 
les  pattes  pelues,  les  gryphes  et  ventre  de  harpies 
et  les  culs  de  Stymphalides,  et  n'estoit  possible 
les  exterminer  :  pour  un  mort  en  avoloient  vingt- 
quatre.  » 

Je  y  souhaitoye  quelque  second  Hercules,  pour 
ce  que  frère  Jehan  y  perdit  le  sens  par  véhémente 
contemplation,  et  à  Pantagruel  advint  ce  qu'estoit 
advenu  à  Messire  Priapus  contemplant  les  sacrifices 
de  Cerés,  par  faute  de  peau. 


PANTAGRUEL 


17 


CHAPITRE   III 

Comment  en  l'Isle  Sonnante  n'est  qu'un  Papegaut. 

ORS  demandasmes  à  Maistre  yEditue, 
veu  la  multiplication  de  ces  vénérables 
>-^'^  oiseaux  en  toutes  leurs  espèces,  pour- 
quoy  là  n'estoit  qu'un  Papegaut.  Il 
nous  respondit  que  telle  estoit  l'institution  première 
et  fatale  destinée  des  estoilles.  Que  des  Clergaux 
naissent  les  Prestregaux  et  Monagaux  sans  compa- 
gnie charnelle,  comme  fait  entre  les  abeilles  d'un 
jeune  toreau  accoustré  selon  l'art  et  pratique  d'A- 
ristaeus.  Des  Prestregaux  naissent  les  Evesgaux, 
d'iceux  les  beaux  Cardingaux,  et  les  Cardingaux, 
si  par  mort  n'estoient  prévenus,  fînissoient  en  Pa- 
pegaut ;  et  n'en  est  ordinairement  qu'un,  comme 
par  les  ruches  des  abeilles  n'y  a  qu'un  roy,  et  au 
monde  n'est  qu'un  soleil.  Iceluy  decedé,  en  naist 
un  autre  en  son  lieu  de  toute  la  race  des  Cardin- 
gaux, entendez  tousjours  sans  copulation  charnelle. 
De  sorte  qu'il  y  a  en  ceste  espèce  unité  individuale, 
avec  perpétuité  de  succession,  ne  plus  ne  moins 
qu'au  phœnix  d'Arabie. 

Vray  est  qu'il  y  a  environ  deux  mil  sept  cens 
soixante  lunes  que  furent  en  nature  deux  Papegaux 
produits;  mais  ce  fut  la  plus  grande  calamité  qu'on 
vit  onques  en  ceste  Isle.  «  Car,  disoit  iEditue,  tous 
ces  oiseaux  icy  se  pillèrent  les  uns  les  autres,  et 
Rabelais.  V^  3 


l8  LIVRE    V,     CHAPITRE    III 

s'entrepelauderent  si  bien  ce  temps  durant  que 
risle  périclita  d'estre  spoliée  de  ses  habitans.  Part 
d'iceux  adheroit  à  un  et  le  soustenoit,  part  à  l'autre 
et  le  defendoit;  demeurèrent  part  d'iceux  muts 
comme  poissons,  et  onques  ne  chantèrent,  et  part 
de  ces  cloches,  comme  interdicte,  coup  ne  sonna. 
Ce  séditieux  temps  durant,  à  leur  secours  évoquè- 
rent empereurs,  roys,  ducs,  marquis,  comtes,  barons 
et  communautez  du  monde  qui  habite  en  continent 
et  terre-ferme,  et  n'eust  fin  ce  schisme  et  ceste  sé- 
dition qu'un  d'iceux  ne  fut  tollu  de  vie  et  la  plura- 
lité reduicte  en  unité.  » 

Puis  demandasmes  qui  mouvoit  ces  oyseaux  à 
ainsi  sans  cesse  chanter.  ^£ditue  nous  respondit  que 
c'estojent  les  cloches  pendantes  au  dessus  de  leuis 
cages  ;  puis  nous  dit  :  «  Voulez-vous  que  présente- 
ment je  face  chanter  ces  Monagaux  que  voyez  là 
bardocucullez  d'une  chausse  d'hypocras,  comme 
une  allouette  sauvage? — De  grâce,  «  respondis- 
mes  nous.  Lors  sonna  une  cloche  six  coups  seulle- 
ment,  et  Monagaux  d'accourir,  et  Monagaux  de 
chanter.  «  Et  si,  dist  Panurge ,  je  sonnoye  ceste 
cloche,  feray-je  pareillement  chanter  ceux  qui  ont 
le  plumage  à  couleur  de  haran  soret?  —  Pareille- 
ment, »  respondit  ^Editue. 

Panurge  sonna ,  et  soudain  accoururent  ces  oi- 
seaux enfumez,  et  chantoient  ensemblement ,  mais 
ils  avoient  les  voix  raucques  et  mal  plaisantes.  Aussi 
nous  remonstra  .^ditue  qu'ils  ne  vivoient  que  de 


PANTAGRUEL 


'9 


poisson,  comme  les  hérons  et  cormorans  du  monde, 
et  quec'estoit  une  quinte  espèce  de  Cagaux,  impri- 
mez nouvellement.  Adjousta  d'avantage  qu'il  avoit 
eu  advertissement  par  Robert  Valbringue,  qui  par- 
là  n'agueres  estoit  passé  en  revenant  du  pays  d'Af- 
frique ,  que  bientost  y  devoit  avoler  une  sexte  es- 
pèce, lesquels  il  nommoitCapucingaux,  plus  tristes, 
plus  moniaques  et  plus  fascheux  qu'espèce  qui  fust 
en  toute  l'Isle. 

«  Affrique,  dist  Pantagruel,  est  coutumiere 
toujours  choses  produire  nouvelles  et  mons- 
trueuses. » 


CHAPITRE    IV 

Comment  les  oiseaux  de  l'Isle  Sonnante  estaient  tous 
passagers. 

Aïs,  dist  Pantagruel,  veu  qu'exposé 
nous  avez  des  Cardingaux  naistre  Pa- 
pegaut,  et  les  Cardingaux  des  Eves- 
gaux,  les  Evesgaux  des  Prestregaux, 
et  les  Prestregaux  des  Clergaux,  je  voudrois  bien 
entendre  dont  vous  naissent  ces  Clergaux. 

—  Ils  sont,  dit  iEditue,  tous  oiseaux  de  passage, 
et  nous  viennent  de  l'autre  monde,  part  d'une 
contrée  grande  à  merveilles,  laquelle  on  nomme 
Joursanspain  ;  part  d'une  autre  vers  le  ponant,  la- 
quelle on  nomme Tropditieux.  De  ces  deux  contrées 


20  LIVRE     V,     CHAPITRE    IV 

tous  les  ans  à  boutées  ces  Cleigaux  icy  nous 
viennent,  laissans  pères  et  mères,  tous  amis  et  tous 
parens. 

«  La  manière  est  telle  :  quand  en  quelque  noble 
maison  de  ceste  contrée  dernière  y  a  trop  d'iceux 
enfans,  soient  masles,  soient  femelles,  de  sorte  que 
qui  à  tous  part  feroit  de  l'héritage,  comme  raison  le 
veult,  nature  l'ordonne  et  Dieu  le  commande,  la 
maison  seroit  dissipée,  c'est  l'occasion  pourquoy  les 
parens  s'en  deschargent  en  ceste  isle,  mesmement 
s'ils  sont  des  appanaiges  de  l'Isle  Bossard,  —  C'est, 
dit  Panurge,  l'Isle  Bouchard  lez  Chinon? — Je  dis 
Bossard,  respondit  i£ditue,  car  ordinairement  ils 
sont  bossus,  borgnes,  boiteux,  manchots,  podagres, 
contrefaits  et  maleficiez,  poix  inutile  de  la  terre. 
—  C'est,  dit  Pantagruel,  coustume  du  tout  con- 
traire es  institutions  jadis  observées  en  la  réception 
des  pucelles  Vestales,  pour  lesquelles,  comme  atteste 
Labeo  Antistius,  estoit  défendu  à  ceste  dignité  es- 
lire  fille  qui  eust  vice  aucun  en  l'ame,  ou  en  ses 
sens  diminution,  ou  en  son  corps  tasche  quelconque, 
tant  fust  occulte  et  petite. 

—  Je  m'esbahis,  dit  JEdhue  continuant,  si  les 
mères  de  par  de-là  les  portent  neuf  mois  en  leurs 
flancs,  veu  qu'en  leurs  maisons  elles  ne  les  peuvent 
porter  ne  patir  neuf  ans,  non  pas  sept  le  plus  sou- 
vent, et  leur  metians  une  chemise  seulement  sus  la 
robbe,  sur  le  sommet  de  la  teste  leurs  couppans  je 
ne    sçay    quants  cheveux,    avec    certaines    parolles 


PANTAGRUEL  21 

apotrophées  et  expiatoires,  comme  entre  les  iî^gyp- 
tiens  par  certaines  linostolies  et  rasures  estoient 
créez  les  Isiacques,  visiblement,  apertement,  mani- 
festement, par  metempsychosie  pythagorique,  sans 
lésion  ne  blessure  aucune,  les  font  oiseaux  tels  de- 
venir que  présentement  les  voyez.  Ne  sçay  toutes- 
fois,  beaux  amis,  que  peult  estre,  ne  d'où  vient  que 
les  femelles,  soyent  Clergesses,  Monagesses  ou 
Abbegesses,  ne  chantent  motets  plaisans  et  charis- 
teres,  comme  on  souloit  faire  à  Oromasis,  par  l'in- 
stitution de  Zoroaster,  mais  catarates  et  scythropes, 
comme  on  faisoit  au  Dgemon  Arimanian;  et  font 
continuelles  dévotions  de  leurs  parens  et  amis,  qui 
en  oiseaux  les  transformèrent,  je  dis  autant  jeunes 
que  vieilles. 

«  Plus  grand  nombre  nous  en  vient  de  Joursans- 
pain,  qui  est  excessivement  long.  Car  les  Assaphis, 
habitans  d'icelle  contrée,  quand  sont  en  danger  de 
patir  malesuade  famine,  par  non  avoir  dequoy  soy 
alimenter,  et  ne  sçavoir  ne  vouloir  rien  faire,  ne 
travailler  en  quelque  honneste  art  et  mestier,  ne 
aussi  feablement  à  gens  de  bien  soy  asservir;  ceux 
aussi  qui  n'ont  peu  jouir  de  leurs  amours,  qui  ne 
sont  parvenus  à  leurs  entreprinses  et  sont  désespé- 
rez; ceux  pareillement  qui  meschantement  ont 
commis  quelque  cas  de  crime,  et  lesquels  on  cherche 
pour  à  mort  ignominieuse  mettre^  tous  avolenticy; 
icy  ont  leur  vie  assignée,  icy  soudain  deviennent 
gras  comme  glirons,  qui  paravent  estoyent  maigres 


22  LIVRE    V,    CHAPITRE    IV 

comme  pies,  icy  ont  paifaicte  seureté,  indemnité  et 
franchise. 

—  Mais,  demandoit  Pantagruel,  ces  beaux  oi- 
seaux icy  une  fois  avolez,  retournent-ils  jamais  plus 
au  monde  oîi  ils  furent  ponnus  ?  —  Quelques  uns, 
respondit  ^Editue,  jadis  bien  peu,  bien  à  tard  et  à 
regret.  Depuis  certaines  éclipses  s'en  est  revolé  une 
grande  mouée,  par  vertu  des  constellations  célestes. 
Cela  de  rien  ne  nous  melancholie,  le  demeurant 
n'en  a  que  plus  grande  pitance.  Et  tous,  avant  que 
revoler,  ont  leurs  pennages  laissé  parmy  les  orties 
et  espines.  » 

Nous  en  trouvasmes  quelques  uns  reallement,  et 
en  recherchant  d'adventure  rencontrasmes  un  pot 
aux  roses  descouvert. 

CHAPITRE    V 

Comment    les  oiseaux  gourmandcurs   sont  muets   en 
Vlsle  Sonnante. 


L  n'avoit  ces  mots  parachevez,  quand 
prés  de  nous  avolerent  vingt  cinq  ou 
trente  oiseaux  de  couleur  et  pennage 
'que  encore  n'avois  veu  en  l'Isle.  Leur 
pennage  estoit  changeant  d'heure  en  heure,  comme 
la  peau  d'un  chameleon,  et  comme  la  fleur  de  tri- 
poleon  ou  teucrion  ;  et  tous  avoient  au  dessous  de 
l'aisle  gauche  une  marque  comme  de  deux  diame- 


PANTAGRUEL  23 

très  mi-partissant  un  cercle,  ou  d'une  ligne  perpen- 
diculaire tombante  sur  une  ligne  droite.  A  tous 
estoit  presque  d'une  forme,  mais  non  à  tous  d'une 
couleur;  es  uns  estoit  blanche,  es  autres  verde,  es 
autres  rouge,  es  autres  violette,  es  autres  bleue. 

«  Qui  sont,  demande  Panurge,  ceux  cy,  et 
comment  les  nommez?  —  Ils  sont,  respondit  JEd'i- 
tue,  metifs.  Nous  les  appelions  Gourmandeurs,  et 
ont  grand  nombre  de  riches  Gourmanderies  en 
vostre  monde. — Je  vous  prie,  dis-je,  faites  les  un 
peu  chanter,  afin  qu'entendions  leur  voix.  — Ils  ne 
chantent,  respondit-il,  jamais,  mais  ils  repaissent 
au  double  en  recompense.  —  Oii  sont,  demandois- 
je,  les  femelles?  —  Ils  n'en  ont  point,  respondit-il. 

—  Comment  donc,  infera  Panurge,  sont-ils  ainsi 
croutelevez   et   tous    mangez    de    grosse    vérole  ? 

—  Elle  est,  dit-il,  propre  à  ceste  espèce  d'oi- 
seaux, à  cause  de  la  marine  qu'ils  hantent  quelques 
fois.  » 

Puis  nous  dit  :  «  Le  motif  de  leur  venue  icy  prés 
de  vous  est  cestuy,  pour  veoir  si  parmy  vous  reco- 
gnoistront  une  magnifique  espèce  de  gots,  oiseaux 
de  proye  terribles,  non  toutesfois  venans  au  leurre, 
ne  recognoissans  le  gand,  lesquels  ils  disent  estre 
en  vostre  monde,  et  d'iceux  les  uns  porter  jects 
aux  jambes  bien  beaux  et  précieux,  avec  inscription 
aux  vernelles,  par  laquelle  qui  mal  y  pensera  est 
condamné  d'estre  soudain  tout  conchié  ;  autres  au 
devant  de  leur  pennage  porter  le  trophée  d'un  ca- 


24  LIVRE    V,    CHAPITRE    V 

lomniateur,  et  les  autres  y  porter  une  peau  de  bel- 
lier.  —  Maistre  y£ditue,  dit  Panurge,  il  peut  estre 
vray,  mais  nous  ne  lescognoissons. 

—  Ores,  dit  JEditue,  c'est  assez  parlementé  ; 
allons  boire.  —  Mais  repaistre,  dist  Panurge.  — 
Repaistre,dit  ^Editue,  et  bien  boire,  moitié  au  per, 
moitié  à  la  couche.  Rien  si  cher  ne  précieux  est  que 
le  temps;  employons-le  en  bonnes  œuvres.  »  Mener 
il  nous  vouloit  premièrement  baigner  dedans  les 
thermes  des  Cardingaux,  belles  et  délicieuses  sou- 
verainement; yssans  des  bains,  nous  faire  par  les 
aliptes  oindre  de  précieux  basme. 

Mais  Pantagruel  luy  dit  qu'il  ne  bevroit  que  trop 
sans  cela.  Adonques  nous  conduit  en  un  grand  et 
deUcieux  refectouer,  et  nous  dist  :  «  L'hermite  Bra- 
guibus  vous  a  fait  jeusner  par  quatre  jours,  quatre 
jours  serez  icy  à  contrepoints,  sans  cesser  de  boire 
et  de  repaistre.  —  Dormirons-nous  point  cependant, 
dist  Panurge  ?  —  A  vostre  liberté,  respondit  ^Editue, 
car  qui  dort,  il  boit.  » 

Vray  Dieu  !  quelle  chère  nous  fismes  1  O  le  grand 
homme  de  bien  ! 


PANTAGRUEL 


CHAPITRE   VI 


Comment  les  oiseaux  de  l'Isle  Sonnante  sont 
alimentez. 


Çil<? 


ANTAGRUEL  monstroit  face  triste,  et 
sembloit  non  content  du  séjour  cjua- 
tridien  que  nous  terminoit  iEditue  : 
ce  qu'aperceut  ^Editue,  et  dit  :  «  Sei- 
gneur, vous  sçavez  que  sept  jours  devant  et  sept 
jours  après  breume  jamais  n'y  a  sur  mer  tempeste. 
C'est  pour  faveur  que  les  éléments  portent  aux 
aicyones,  oiseaux  sacrez  à  Thetis,  qui  pour  lors 
ponnent  et  esclouent  leurs  petits  lez  le  rivage.  Icy 
la  mer  se  revenche  de  ce  long  calme,  et  par  quatre 
jours  ne  cesse  de  tempester  énormément  quand 
quelques  voyagiers  y  arrivent.  La  cause  nous  esti- 
mons afin  que,  ce  temps  durant,  nécessité  les  con- 
traigne y  demourer,  pour  estre  bien  festoyez  des 
revenus  de  sonnerie.  Pourtant  n'estimez  temps  icy 
ocieusement  perdu  :  force  forcée  vous  y  retiendra, 
si  ne  voulez  combattre  Juno,  Neptune,  Doris, 
iEolus  et  tous  les  Vejoves;  seulement  délibérez 
vous  de  faire  chère  lie.  » 

Après  les  premières  bauffrures,  frère  Jehan  de- 
mandoit  à  iEditue  :  «  En  ceste  Isle  vous  n'avez  que 
cage  et  oiseaux,  ils  ne  labourent  ne  cultivent  la 
terre,  toute  leur  occupation  est  à  gaudir,  gazouil- 
ler et  chanter.  De  quel  pays  vous  vient  ceste  corne 

4 


26  LIVRE     V,    CHAPITRE    VI 

d'abundance  et  copie  de  tant  de  bien  et  frians 
morceaulx? —  De  tout  l'autre  monde,  respondit 
itditue,  exceptez  moy  quelques  contrées  des  régions 
aquilonnaires,  lesquelles  depuis  certaines  années  ont 
meu  la  camerime.  Chou, 

Ils  s'en  repentiront,  don  daine. 
Ils  s'en  repentiront,  don  don. 

«  Beuvons,  amis!  Mais  de  quel  pays  estes-vous  ?  — 
DeTouraine,  respondit  Panurge.  — Vrayement,  dist 
^ditue,  vous  ne  fustesonques  de  mauvaise  pie  cou- 
vez, puisque  vous  estes  de  la  benoiste  Touraine.  De 
Touraine  tant  et  tant  de  biens  annuellement  nous 
viennent  que  nous  fut  dit  un  jour  par  gens  du 
lieu,  par  cy  passans,  que  le  Duc  de  Touraine  n'a 
en  tout  son  revenu  de  quoy  son  saoul  de  lard  man- 
ger, par  l'excessive  largesse  que  ses  prédécesseurs 
ont  fait  à  ces  sacrosaincts  oiseaux,  pour  icy  de 
phaisans  nous  saouler,  de  perdriaux,  de  gelinotes, 
poulies  d'Inde,  gras  chappons  de  Loudunois,  ve- 
naison de  toutes  sortes,  et  toutes  sortes  de  gibier. 
((  Beuvons,  amis  !  Voyez  ceste  perchée  d'oiseaux, 
comment  ils  sont  douillets  et  en  bon  poinct  des 
rentes  qui  nous  en  viennent  :  aussi  chantent-ils  bien 
pour  eux.  Vous  ne  vistes  onques  rossignols  mieux 
gringoter  qu'ils  font  en  plat,  quand  ils  voyent  ces 
deux  bastons  dorez...  —  C'est,  dist  frère  Jean, 
feste  à  bastons...  —  Et  quand  je  leur  sonne  ces 
grosses  cloches  que  vous  voyez  pendues  autour  de 


PANTAGRUEL  2'J 

leurs  cages.  Beuvons,  amis  !  il  fait  certes  huy  beau 
boire,  aussi  fait-il  tous  les  jours.  Beuvons  !  Je  boy 
de  bien  bon  cueur  à  vous ,  et  soyez  les  tresbien 
venus.  N'ayez  peur  que  vin  et  vivres  icy  faillent, 
car,  quand  le  Ciel  seroit  d'airin  et  la  terre  de  fer, 
encores  vivres  ne  nous  fauldroient,  fussent  par  sept, 
voire  huit  ans,  plus  long-temps  que  ne  dura  la 
famine  en  i£gypte.  Beuvons  ensemble  par  bon  ac- 
cord en  charité. 

—  Diables,  s'escria  Panurge ,  tant  vous  avez 
d'aises  en  ce  monde  !  —  En  l'autre,  respondit 
iEditue,  en  aurons  nous  bien  d'avantage.  Les 
Champs  Eliziens  ne  nous  manqueront  pour  le 
moins.  Beuvons,  amis;  je  boy  à  toy.  —  C'a  esté, 
dy-je,  esprit  moult  divin  et  parfait  à  vos  premiers 
Siticines,  avoir  le  moyen  inventé  par  lequel  vous 
avez  ce  que  tous  humains  appetent  naturellement, 
et  à  peu  d'iceux,  ou,  à  proprement  parler,  à  nul 
est  octroyé  :  c'est  Paradis  en  ceste  vie  et  en  l'au- 
tre pareillement  avoir. 

O  gens  heureux  ! 
O  semy-Dieux  ! 

Pleust  au  Ciel  qu'il  m'avint  ainsi  !  » 


LIVRE    V,    CHAPITRE    VII 


CHAPITRE  VII 


Comment    Panurge     racompte     à    Maistre    y^ditue 
l'Apologue  du  Koussin  et  de  l'Asne. 

VOIR  beu  et  bien  repeu,  y^ditue  nous 
mena  en  une  chambre  bien  garnie, 
bien  tapissée,  toute  dorée.  Là  nous 
fist  apporter  mirobalans,  brain  de 
basme  et  zinzembre  verd  confit,  force  hypocras  et 
vin  délicieux,  et  nous  invitoit  par  ces  antidotes, 
comme  par  breuvage  du  fleuve  de  Lethé,  mettre 
en  oubly  et  nonchalance  les  fatigues  qu'avions  paty 
sus  la  marine;  fist  aussi  porter  vivres  en  abondance 
à  nos  navires  qui  surgeoient  au  port.  Ainsi  repo- 
sasmes  par  icelle  nuict,  mais  je  ne  pouvois  dor- 
mir, à  cause  du  sempiternel  brimballement  des 
cloches. 

A  minuict  vEditue  nous  esveilla  pour  boire;  luy 
mesme  y  beut  le  premier,  disant  :  «  Vous  autres  de 
l'autre  monde  dictes  que  ignorance  est  mère  de 
tous  maux,  et  dictes  vray;  mais  toutesfois  vous  ne 
la  bannissez  mie  de  vos  entendemens,  et  vivez  en 
elle,  avec  elle,  par  elle.  C'est  pourquoy  tant  de 
maux  vous  meshaignent  de  jour  en  jour;  tousjours 
vous  plaignez ,  tousjours  lamentez  ;  jamais  n'estes 
assouvis,  je  le  considère  présentement.  Car  igno- 
rance vous  tient  icy  au  lict  liez,  comme  fut  le  Dieu 


PANTAGRUEL 


29 


des  batailles  par  l'art  de  Vulcan ,  et  n'entendez  que 
le  devoir  vostre  estoit  d'espargner  de  vostre  som- 
meil, point  n'espargner  les  biens  de  ceste  fameuse 
Isle.  Vous  debvriez  avoir  ja  faict  trois  repas,  et 
tenez  cela  de  moy,  que  pour  manger  les  vivres  de 
l'Isle  Sonnante  se  fault  lever  bien  matin;  les  man- 
geant, ils  multiplient;  les  espargnans,  ils  vont  en 
diminution.  Fauchez  le  pré  en  sa  saison,  l'herbe  y 
reviendra  plus  drue  et  de  meilleure  emploicte;  ne 
le  fauschez  point,  en  peu  d'années  il  ne  sera  tapissé 
que  de  mousse.  Beuvons,  amis,  beuvons  trestous  ; 
les  plus  maigres  de  nos  oiseaux  chantent  mainte- 
nant tous  à  nous,  nous  boirons  à  eux  s'il  vous 
plaist.  Beuvons,  de  grâce,  vous  n'en  cracherez 
tantost  que  mieux.  Beuvons  une,  deux,  trois,  neuf 
fois  :  non  zelus,  sed  chantas.  » 

Au  poinct  du  jour  pareillement  nous  esveilla 
pour  manger  souppes  de  prime.  Depuis  ne  fîsmes 
qu'un  repas,  lequel  dura  tout  le  jour,  et  ne  sçavois 
si  c'estoit  disner  ou  soupper,  gouster  ou  regoubil- 
loner.  Seulement  par  forme  d'esbat  nous  pourme- 
nasmes  quelques  tours  par  l'Isle,  pour  veoir  et  ouil- 
le joyeux  chant  de  ces  benoists  oiseaux. 

Au  soir  Panurge  dit  à  ^Editue  :  «  Seigneur,  ne 
vous  desplaise  si  je  vous  raconte  une  histoire 
joyeuse,  laquelle  advint  au  pays  de  Chastelle- 
raudois  depuis  vingt  et  trois  lunes. 

«  Le  pallefrenier  d'un  gentilhomme,  au  mois 
d'avril,  pourmenoit  à  un  matin  ses  grands  chevaux 


3o  LIVRE    V,    CHAPITRE    VII 

parmy  les  guerests;  là  rencontra  une  gaye  bergère, 
laquelle, 

A  l'ombre  d'un  buissonnet, 
Ses  brebiettes  gardoit, 

ensemble  un  asne  et  quelque  chèvre.  Devisant  avec 
elle,  luy  persuada  monter  derrière  luy  en  crouppe, 
visiter  son  escurie,  et  là  faire  un  tronçon  de  bonne 
chère  à  la  rustique.  Durant  leur  propos  et  demeure, 
le  cheval  s'adressa  à  l'asne,  et  luy  dist  en  l'aureille 
(car  les  bestes  parlèrent  toute  icelle  année  en  divers 
lieux)  :  «  Povre  et  chetif  baudet,  j'ay  de  toy  pitié 
«  et  compassion.  Tu  travailles  journellement  beau- 
«  coup,  je  l'apperçois  à  l'usure  de  ton  bas-cul:  c'est 
«  bien  faict,  puisque  Dieu  t'a  créé  pour  le  service 
«  des  humains;  tu  es  baudet  de  bien.  Mais  n'estre 
«  autrement  torchonné,  estrillé,  phaleré  et  alimenté 
«  que  je  te  vois,  cela  me  semble  un  peu  tyrannique 
«  et  hors  les  metes  de  raison.  Tu  es  tout  herissonné, 
«  tout  hallebrené,  tout  lanterné,  et  ne  manges  icy 
«  que  joncs,  espines  et  durs  chardons.  C'est  pour- 
«  quoy  je  te  semonds,  Baudet,  ton  petit  pas  avec 
«  moy  venir,  et  veoir  comment  nous  autres,  que 
«  Nature  a  produits  pour  la  guerre,  sommes  traittez 
«  et  nourris.  Ce  ne  sera  sans  toy  ressentir  de  mon 
«  ordinaire.  —  Vrayement,  respondit  l'asne,  j'iray 
«  bien  volontiers.  Monsieur  le  Cheval.  —  Il  y  a, 
«  dist  le  roussin,  bien  Monsieur  le  Roussin  pour 
«  toy.  Baudet.  —  Pardonnez  moy,  respond  l'asne. 


PANTAGRUEL  3l 

((  Monsieur  le  Roussin,  ainsi  sommes  en  nostre  lan- 
ce gage  incorrects  et  mal  apprins,  nous  autres  villa- 
ce  geois  et  rustiques.  A  propos,  je  vous  obeiray 
ce  volontiers,  et  de  loing  vous  suivray  de  paour  des 
c(  coups  (j'en  ai  la  peau  toute  contrepointée), 
ce  puisque  vous  plaist  me  faire  tant  de  bien  et 
((  d'honneur.  » 

«  La  bergère  montée,  l'asne  suyvoit  le  cheval,  en 
ferme  délibération  de  bien  repaistre  advenans  au 
logis.  Le  pallefrenier  l'apperceut,  et  commanda 
aux  garsons  d'estable  le  traicter  à  la  fourche  et 
Tesrener  à  coups  de  baston.  L'asne,  entendant  ce 
propos,  se  recommanda  au  Dieu  Neptune  et  com- 
mençoit  à  escamper  du  lieu  à  grand  erre,  pensant 
en  soy  mesme  et  syllogisant  :  ce  II  dict  bien  aussi 
ee  n'estre  mon  estât  suivre  les  cours  des  gros  sei- 
«  gneurs;  Nature  ne  m'a  produit  que  pour  l'aide 
ce  des  pauvres  gens,  Esope  m'en  avoit  bien  adverty 
ce  par  un  sien  apologue;  ce  a  esté  outrecuidance  à 
(c  moy;  remède  n'y  a  que  d'escamper  d'huy,  je  dis 
ce  plustost  que  ne  sont  cuictes  asperges.  » 

Et  l'asne  au  trot,  à  peds,  à  bonds,  à  ruades, 
Au  gallot,  à  p«tarades. 

ee  La  bergère ,  voyant  l'asne  desloger,  dist  au 
pallefrenier  qu'il  estoit  sien,  et  pria  qu'il  fust  bien 
traité;  autrement  elle  vouloit  partir,  sans  plus  avant 
entrer.  Lors  commanda  le  pallefrenier  que  plustost 
les  chevaux  n'eussent  de  huit  jours  avoine  que  l'asne 


32  LIVRE    V,    CHAPITRE    VII 

n'en  eust  tout  son  saoul.  Le  pis  fut  de  le  révoquer, 
car  les  garsons  l'avoient  beau  flatter  et  l'appeler  : 
«  Truunc,  truunc,  Baudet,  çà.  —  Je  n'y  vois  pas, 
«  disoit  l'asne,  je  suis  honteux.  »  Plus  amiable- 
ment  l'appelloient,  plus  rudement  s'escarmouchoit- 
il,  et  à  saulx,  à  pétarades;  ils  y  fussent  encores,  ne 
fust  la  bergère  qui  les  advertit  cribler  avoine  hault 
en  l'air  en  l'appellant,  ce  que  fut  faict.  Soudain  l'asnc 
tourna  visage,  disant  :  «  Avoine  !  bien,  adveniat,  non 
«  la  forche,  je  ne  dis,  qui  me  dit,  passe  sans  flux.  » 
Ainsi  à  eux  se  rendit,  chantant  mélodieusement, 
comme  vous  sçavez  qui  faict  bon  ouir  la  voix  et 
musique  de  ces  bestes  archadiques. 

«  Arrivé  qu'ail  fut,  on  le  mena  en  l'estable  prés 
du  grand  cheval;  fut  frotté,  torchonné,  estrillé,  li- 
tière fresche  jusqu'au  ventre,  plain  râtelier  de  foin, 
plaine  mangeoire  d'avoine,  laquelle  quand  les  gar- 
sons d'estable  cribloient,  il  leur  chauvoit  des  au- 
reilles ,  leurs  signifiant  qu'il  ne  la  mangeroit  que 
trop  sans  cribler,  et  que  tant  d'honneur  ne  luy  ap- 
partenoit. 

«  Quand  ils  eurent  bien  repeu,  le  cheval  interro- 
guoit  l'asne,  disant  :  «  Et  puis,  pauvre  Baudet, 
«  comment  t'en  va?  Que  te  semble  de  ce  traite- 
«  ment?  Encores  n'y  voulois  tu  pas  venir.  Qu'en 
«  dis-tu?  —  Par  la  figue,  respondit  l'asne,  laquelle 
«  un  de  nos  ancestres  mangeant,  mourut  Philemon 
a  à  force  de  rire,  voicybasme.  Monsieur  le  Roussin. 
«  Mais  quoy,  ce  n'est  que  demie  chère.  Baudouy- 


PANTAGRUEL  33 

«  nez  vous  rien  céans,  vous  autres  Messieurs  les 
x(  Chevaux?  —  Quel  baudouynage  me  dis-tu,  Bau- 
«  det?  demandoit  le  cheval;  tes  maies  avives,  Bau- 
«  det!  Me  prens-tu  pour  un  asne?  —  Ha,  ha, 
<(  respondit  Tasne,  je  suis  un  peu  dur  pour  appren- 
<(  dre  le  langage  courtisan  des  chevaux.  Je  demande  : 
<(  Roussinez-vous  point  céans,  vous  autres  Messieurs 
«  les  Roussins  ?  —  Parle  bas,  Baudet,  dist  le  che- 
«  val,  car,  si  les  garsons  t'entendent,  à  grands  coups 
«  de  fourche  ils  te  pelauderont  si  dru  qu'il  ne  te 
«  prendra  volonté  de  baudoujner.  Nous  n'osons 
«  céans  seulement  roidir  le  bout,  voire  fust-ce  pour 
«  uriner,  de  peur  des  coups  :  du  reste,  aises  comme 
<(  rois.  —  Par  l'aube  du  bas  que  je  porte,  dist  l'asne, 
«  je  te  renonce,  et  dis  fy  de  ta  litière,  fy  de  ton 
«  foin  et  fy  de  ton  avoine  ;  vivent  les  chardons  des 
«  champs,  puisqu'à  plaisir  on  y  roussine  !  Manger 
«  moins  et  tousjours  roussiner  son  coup  est  ma  de- 
«  vise;  de  ce  nous  autres  faisons  foin  et  pitance. 
«  O  Monsieur  le  Roussin,  mon  amy,  si  tu  nous 
«  avois  veu  en  foires,  quand  nous  tenons  nostre 
«  chapitre  provincial,  comment  nous  baudouynonsà 
«  guogo  pendant  que  nos  maistresses  vendent  leurs 
«  oisons  et  poussins  !  »  Telle  fut  leur  départie. 
J'ay  dit.  » 

A  tant  se  teut  Panurge,  et  plus  mot  ne  sonnoit. 

Pantagruel  l'admonestoit  conclure  le  propos.  Mais 

^ditue    respondit  :    «  A    bon   entendeur   ne   faut 

qu'une  paroUe.  J'entends  tresbien  ce  que  par  cest 

Rabelais.  V,  J 


34  LIVRE    V,    CHAPITRE    VII 

apologue  de  l'asne  et  du  cheval  voudriez  dire  et 
inférer,  mais  vous  estes  honteux.  Sachez  qu'icy  n'y 
a  rien  pour  vous,  n'en  parlez  plus.  —  Si  aj-je,  dist 
Panurge,  n'agueres  icy  veu  une  Abbegesse  à  blanc 
plumage,  laquelle  mieux  vaudroit  chevaucher  que 
mener  en  main.  Et  si  les  autres  sont  dams  oiseaux, 
elle  me  sembleroit  dame  oiselle ,  je  dis  cointe  et 
jolie,  bien  valant  un  péché  ou  deux.  Dieu  me 
le  pardoint  parlant,  je  n'y  pensois  point  en  mal  : 
le  mal  que  j'y  pense  me  puisse  soudain  advenir!  » 

CHAPITRE    VIII 

Comment  nous  fust  monstre  Papcgaut  à  grande 
difficulté. 

E  tiers  jour  continua  en  festins  etmes- 
mes  banquets  que  les  deux  jours  pré- 
cédents, auquel  jour  Pantagruel  re- 
queroit  instamment  veoir  Papegaut; 
mais  iEditue  respondit  qu'il  ne  se  laissoit  ainsi  fa- 
cilement veoir.  «  Comment,  dist  Pantagruel ,  a-il 
l'armet  de  Pluton  en  teste,  l'anneau  de  Gygés  es 
griffes,  ou  un  chameleon  en  sein,  pour  se  rendre 
invisible  au  monde?  —  Non,  respondit  i£ditue, 
mais  il  par  nature  est  à  veoir  un  peu  difficile.  Je 
donneray  toutesfoys  ordre  que  le  puissiez  veoir  si 
faire  se  peut.  »  Ce  mot  achevé,  nous  laissa  au  iieu 
grignotans. 


PANTAGRUEL  35 

Un  quart  d'heure  après,  retourné,  nous  dist  Pa- 
pegaut  estre  pour  ceste  heure  visible,  et  nous  mena  en 
tapinois  et  silence  droit  à  la  cage  en  laquelle  ilestoit 
acroué,  accompagné  de  deux  petits  Cardingaux  et 
de  six  gros  et  gras  Evesgaux.  Panurge  curieusement 
considéra  sa  forme,  ses  gestes,  son  maintien;  puis 
s'escria  à  haute  voix,  disant  :  «  En  mal  an  soit  la 
beste  !  il  semble  une  duppe.  —  Parlez  bas,  dit 
iEditue,  de  par  Dieu  ;  il  a  aureilles,  comme  sage- 
ment nota  Michael  de  Matlscones.  —  Si  a  bien  une 
duppe,  dit  Panurge.  —  Si  une  fois  il  vous  entend 
ainsi  blasphemans,  vous  estes  perdus,  bonnes  gens. 
Voyez  vous  là  dedans  sa  cage  un  bassin  ?  D'iceluy 
sortira  foudre,  tonnoirre,  esclairs,  diables  et  tem- 
peste,  par  lesquels  en  un  moment  serez  cent  pieds 
sous  terre  abismez.  —  Mieux  seroit,  dit  frère  Jehan, 
boire  et  banqueter.  » 

Panurge  restoit  en  contemplation  véhémente  de 
Papegaut  et  de  sa  compagnie,  quand  il  apperceut 
au  dessouz  de  sa  cage  une  chevêche.  Adonc  s'es- 
cria, disant  :  a  Par  la  vertu  Dieu,  nous  sommes  icy 
bien  pippez  à  plaines  pippes,  et  mal  equippez.  Il 
y  a,  par  Dieu,  de  la  pipperie,  fripperie  et  ripperie 
tant  et  plus  en  ce  manoir.  Regardez  là  ceste  che- 
vêche ;  nous  sommes,  par  Dieu,  assassinez.  —  Par- 
lez bas,  de  par  Dieu,  dist  i£ditue,  ce  n'est  mie  une 
chevêche;  il  est  masle.  c'est  un  noble  chevecier. 
—  Mais,  dist  Pantagruel,  faictes  nous  icy  quelque 
peu  Papegaut  chanter,  afin  qu'oyons  son  armonie. 


36  LIVRE   V,    CHAPITRE    VIII 

—  Il  ne  chante,  respondit  ^Editue,  qu'à  ses  jours, 
et  ne  mange  qu'à  ses  heures.  —  Non  fay-je,  dit 
Panurge  ;  mais  toutes  les  heures  sont  miennes. 
Allons  doncques  boire  d'autant.  —  Vous,  dit  i£di- 
tue,  parlez  à  ceste  heure  correct  :  ainsi  parlans 
jamais  ne  serez  hérétique.  Allons,  j'en  suis  d'opi- 
nion. » 

Retournans  à  la  beuverie,  apperceusmes  un  vieil 
Evesgaux  à  teste  verde,  lequel  estoit  acroué,  accom- 
pagné d'un  soufflegan  et  de  trois  Onocrotales,  oi- 
seaux joyeux,  et  ronfloient  sous  une  feuillade.  Prés 
luy  estoit  une  jolie  Abbegesse,  laquelle  joyeusement 
chantoit,  et  y  prenions  plaisir  si  grand  que  desirions, 
tous  nos  membres  en  aureilles  convertis,  rien  ne 
perdre  de  son  chant,  et  du  tout,  sans  ailleurs  estre 
distrait ,  y  vaquer.  Panurge  dit  :  «  Ceste  belle 
Abbegesse  se  rompt  la  teste  à  force  de  chanter, 
et  ce  gros  vilain  Evesgaut  ronfle  ce  pendant  ; 
je  le  feray  bien  tantost  chanter,  de  par  le  diable.  » 

Lors  sonna  une  cloche  pendante  sus  sa  cage; 
mais,  quelque  sonnerie  qu'il  fist,  plus  fort  ronfloit 
Evesgaut,  point  ne  chantoit.  u  Par  Dieu,  dist  Pa- 
nurge, vieille  buze,  par  moyen  autre  bien  chanter 
je  vous  feray.  »  Adonques  print  une  grosse  pierre, 
le  voulant  ferir  par  la  moitié.  Mais  yEditue  s'escria, 
disant  :  «  Homme  de  bien,  frappe,  feris,  tue  et 
meurtris  tous  roys  et  princes  du  monde,  en  trahison, 
par  venin  ou  autrement,  quand  tu  voudras,  déniche 
des  cieux  les  anges,  de  tout  auras  pardon  du  Pape- 


PANTAGRUEL  87 

gaut;  à  ces  sacrez  oiseaux  ne  touche,  d'autant 
qu'aymes  la  vie,  le  profit,  le  bien,  tant  de  toy  que 
de  tes  parens  et  amis  vifs  et  trespassez  ;  encores 
ceux  qui  d'eux  après  naistroient  en  seroient  infor- 
tunez!  Considère  bien  ce  bassin.  —  Mieux  donc- 
ques  vaut,  dit  Panurge,  boire  d'autant  et  banqueter. 
—  Il  dit  bien,  monsieur  Antitus,  dist  frère  Jehan; 
cy  voyans  ces  diables  d'oiseaux,  ne  faisons  que  blas- 
phémer; vuydant  vos  bouteilles  et  pots,  ne  faisons 
que  Dieu  louer.  Allons  donques  boire  d'autant.  O 
le  beau  mot  !  » 

Le  quatriesme  jour,  après  boire  (comme  enten- 
dez), nous  donna  iEditue  congé.  Nous  luy  fismes 
présent  d'un  beau  petit  cousteau  perguois,  lequel 
il  print  plus  à  gré  que  ne  fist  Artaxerxes  le  voirre 
d'eaue  froide  que  luy  présenta  un  païsant,  et  nous 
remercia  courtoisement;  envoya  en  nos  navires  re- 
freschissement  de  toutes  munitions;  nous  soubhaita 
bon  voyage,  et  venir  à  sauvement  de  nos  personnes 
et  fin  de  nos  entreprinses,  et  nous  fist  promettre  et 
jurer  par  Jupiter  Pierre  que  nosire  retour  seroitpar 
son  territoire.  Enfin  nous  dist  :  «  Amis,  vous  not- 
terez  que  par  le  monde  y  a  beaucoup  plus  de  couil- 
lons  que  d'hommes,  et  de  ce  vous  souvienne.  » 


38  LIVRE    V,    CHAPITRE    IX 

CHAPITRE   IX 
Comment  nous  descendisnies  en  l'Isle  des  Ferremens. 

ous  estans  bien  àpoinct  sabourez  l'es- 
tomach,  eusmes  vent  en  pouppe,  et 
fust  levé  nostre  grand  artemon,  dont 
advint  qu'en  moins  de  deux  jours  arri- 
vasmes  en  l'Isle  des  Ferremens,  déserte  et  de  nul 
habitée,  et  y  veismes  grand  nombre  d'arbres  por- 
tans  marroches,  piochons,  serfouettes,  faux,  fau- 
cilles, bêches,  truelles,  congnées,  serpes,  scies,  do- 
loueres,  forces,  scizeaux,  tenailles,  pelles,  virolets 
et  vibrequins. 

Autres  portoient  daguenets,  poignards,  sangde- 
dez,  ganivets,  poinssons,  espées,  verduns,  braque- 
marts,  cimeterres,  estocs,  raillons  et  cousteaux. 

Quiconque  en  vouloit  avoir  ne  falloit  que  crous- 
1er  l'arbre,  soudain  tomboient  comme  prunes;  d'a- 
vantage, tombans  en  terre  rencontroient  une  espèce 
d'herbe,  laquelle  on  nommoit  fourreau,  et  s'engai- 
noient  là  dedans.  A  la  cheute  se  falloit  bien  garder 
qu'ils  ne  tombassent  sur  la  teste,  sur  les  pieds,  ou 
autres  parties  du  corps,  car  ils  tomboient  de 
poincte  :  c'estoit  pour  droit  engainer,  et  eussent 
affollé  la  personne. 

Dessoubz  ne  sçay  quels  autres  arbres,  je  vis  cer- 
taines espèces  d'herbes,  lesquelles  croissoient  comme 


PANTAGRUEL  89 

piques,  lances,  javelines,  halebardes,  vouges,  per- 
tuizanes,  rançons,  fourches,  espieux,  croissantes 
haut.  Ainsi  qu'elles  touchoient  à  l'arbre ,  rencon- 
troient  leurs  fers  et  allumelles,  chascune  competante 
à  sa  sorte.  Les  arbres  supérieures  ja  les  avoient  ap- 
prestées  à  leur  venue  et  croissance,  comme  vous 
apprestez  les  robes  des  petis  enfans  quand  les  vou-. 
lez  desmailloter,  afin  que  désormais  n'abhorrez 
l'opinion  de  Platon,  Anaxagoras  et  Democritus. 
Furent-ils  petis  philosophes?  Ces  arbres  nous  sem- 
bloient  animaux  terrestres,  non  en  ce  différentes  des 
bestes  qu'elles  n'eussent  cuir,  graisse,  chair,  veines, 
artères,  liguamens,  nerfs,  cartilages,  adenes,  os, 
mouelle,  humeurs,  matrices,  cerveau  et  articulations 
congneues,  car  elles  en  ont,  comme  bien  déduit 
Theophraste,  mais  en  ce  qu'elles  ont  la  teste,  c'est 
le  tronc  en  bas;  les  cheveux,  ce  sont  les  racines  en 
terre;  et  les  pieds,  ce  sont  les  rameaux  contremont, 
comme  si  un  homme  fesoit  le  chesne  fourcheu.  Et 
ainsi  comme  vous,  Verollez,  de  loin  à  vos  jambes 
ischiatiques,  à  vos  omoplates,  sentez  la  venue  des 
pluyes,  des  vents,  du  serain,  tout  changement  de 
temps,  aussi  à  leurs  racines,  caudices,  gommes,  me- 
dulles,  elles  pressentent  quelle  sorte  de  baston  des- 
souz  elles  croist  et  leur  préparent  fers  et  allumelles 
convenantes. 

Vray  est  qu'en  toutes  choses.  Dieu  excepté,  ad- 
vient quelquefois  erreur.  Nature  mesme  n'en  est 
exempte  quand  elle  produit  choses  monstrueuses  et 


^O  LIVRE    V,    CHAPITRE    IX 

animaux  difformes.  Pareillement  en  ces  arbres  je 
notay  quelque  faute,  car  une  demye  picque  crois- 
sante hors  en  l'air  souz  ces  arbres  ferrementiportes, 
en  touchant  les  rameaux,  en  lieu  de  fer,  rencontra 
un  balay  :  bien,  ce  sera  pour  ramonner  les  chemi- 
nées; une  pertuizane  rencontra  des  cizailles  :  tout 
est  bon,  ce  sera  pour  oster  les  chenilles  des  jardins; 
une  hampe  de  hallebarde  rencontra  le  fer  d'une 
faux,  et  sembloit  hermaphrodite  :  c'est  tout  un,  ce 
sera  pour  quelque  faucheur.  C'est  belle  chose  croire 
en  Dieu  ! 

Nous  retournans  à  nos  navires,  je  vis  derrière  je 
ne  sçay  quel  buysson  je  ne  sçay  quelles  gens  faisans 
je  ne  sçay  quoy  et  je  ne  sçay  comment,  aguisans 
je  ne  sçay  quels  ferremens,  qu'ils  avoient  je  ne  sçay 
où  et  ne  sçay  en  quelle  manière. 

CHAPITRE  X 
Comment  Pantagriicl  arriva  en  l'Isle  de  Cassade. 

ELAissANS  l'Isle  des  Ferremens,  conti- 
'nuasmes  nostre  chemin;  le  jour  en- 
suyvant  entrasmes  en  l'Isle  de  Cas- 
sade,  vraye  idée  de  Fontainebleau, 
car  la  terre  y  est  si  maigre  que  les  os  (ce  sont  rocs) 
luy  persent  la  peau,  areneuse,  stérile,  mal  saine  et 
mal  plaisante.  Là  nous  monstra  nostre  pillot  deux 
petits    rochers  carrez   à  huit   csgalles   pointes    en 


PANTAGRUEL  4I 

cube,  lesquelles,  à  l'apparence  de  leur  blancheur,  me 
sembloient  esire  d'albastre,  ou  bien  couvers  de 
neige  ;  mais  il  les  nous  asseura  estre  d'osselets. 
En  iceux  disoit  estre  à  six  estages  le  manoir  noir 
de  vingt  diables  de  hazard,  tant  redoutez  en  nos 
pays,  desquels  les  plus  grands  bessons  et  accouplez 
il  nommoit  Séries^  les  plus  petits  Ambezas,  les  autres 
moyens  Quine,  Quaderne,  Terne j  Double  Deux;  les 
autres  escouUetez  il  nommoit  Six  et  cinq,  Six  et 
quatre.  Six  et  trois.  Six  et  deux.  Six  et  as.  Cinq  et 
quatre.  Cinq  et  trois,  et  ainsi  consécutivement.  Lors 
je  notay  que  peu  de  joueurs  sont  par  le  monde  qui 
ne  soient  invocateurs  de  diables  :  car,  jettans  deux 
dez  sur  table ,  quand  en  dévotion  ils  s'escryent 
«  Senes,  mon  amy  »,  c'est  le  grand  diable;  «  Am- 
bezas,  mon  mignon  »,  c'est  le  petit  diable;  «  Qua- 
tre et  deux,  mes  enfans  »,  et  ainsi  des  autres;  ils 
invoquent  les  diables  parleurs  noms  et  surnoms.  Et 
non  seulement  les  invoquent,  mais  d'iceux  se  disent 
amis  et  familiers.  Vray  est  que  ces  diables  ne  vien- 
nent tousjours  à  souhait  sus  l'instant,  mais  en  ce 
sont -ils  excusables  :  ils  estoyent  ailleurs,  selon  la 
dacte  et  priorité  des  invoquans ,  partant  ne  faut 
dire  qu'ils  n'ayent  sens  et  oreilles.  Ils  en  ont,  je 
vous  dy,  belles. 

Puis  nous  dit  qu'autour  et  à  bord  de  ces  rochers 
carrez  plus  a  esté  faict  de  brix,  de  naufrages,  de 
pertes  de  vies  et  de  biens,  qu'autour  de  toutes  les 
Syrtes,  Caribdes,    Siraines,   Scylle,  Strophades  et 

6 


42 


LIVRE    V,    CHAPITRE    X 


goufres  de  toute  la  mer.  Je  le  creus  facilement,  me 
recordant  que  jadis  entre  les  sages  Egyptiens  Nep- 
tune estoit  designé  par  le  premier  cube  en  lettres 
hierogliphiques,  comme  Apollo  par  As,  Diana  par 
Deux,  Minerve  par  Sept,  etc.  Là  aussi  nous  dist  estre 
un  flasque  de  Sang  greal,  chose  divine  et  à  peu  de 
gens  congnue. 

Panurge  fist  tant  par  belles  prières  avec  les  sin- 
dicqs  du  lieu  qu'ils  le  nous  monstrerent,  mais  ce  fut 
avec  plus  de  cérémonie  et  solennité  plus  grande 
trois  fois  qu'on  ne  monstre  à  Florence  les  Pandectes 
de  Justinian,  ne  la  Veronnique  à  Rome.  Je  ne  vis 
onques  tant  de  scendeaux,  tant  de  flambeaux,  de 
torches,  de  glimpes  et  d'agiots.  Finalement,  ce  qui 
nous  fut  monstre  estoit  le  visage  d'un  connin  rosty. 
Là  ne  veismes  autres  choses  mémorable,  fors  Bonnes 
Mine,  femme  de  Mauvais  Jeu,  et  les  cocques  des 
deux  œufs  jadis  ponnus  et  esclos  par  Leda,  des- 
quels naquirent  Castor  et  Polux,  frères  d'Helaine 
la  belle.  Les  sindicqs  nous  en  donnèrent  une  pièce 
pour  du  pain. 

Au  départir  achetasmesune  botte  de  chapeaux  et 
bonnets  de  Cassade,  à  la  vente  desquels  je  ne  doute 
que  peu  ferons  de  profit.  Je  croy  qu'à  l'usage  enco- 
res  moins  en  feront  ceux  qui  de  nous  les  achèteront. 


PANTAGRUEL 


CHAPITRE    XI 


Comment  nous  passasmes  le  Guichet,  habite  par 
Grippe-minaud,  Archiduc  des  Chats-fourrez. 

E  là  passasmes  Condemnation,  qui  est 
une  autre  isle  toute  déserte;  passas- 
mes aussi  le  Guichet,  auquel  lieu  Pan- 
tagruel ne  voulut  descendre,  et  fîst 
tresbien,  car  nous  y  fusmes  faits  prisonniers,  et  ar- 
restez  de  faict,  par  le  commandement  de  Grippe- 
minaud,  Archiduc  des  Chats-fourrez,  parce  que 
quelqu'un  de  nostre  bande  voulut  vendre  à  ,un  ser- 
rargent  des  chapeaux  de  Cassade. 

Les  Chats-fourrez  sont  bestes  moult  horribles  et 
espouventables;  ils  mangent  les  petits  enfans ,  et 
paissent  sus  des  pierres  de  marbre.  Advisez,  Beu- 
veurs,  s'ils  ne  devroient  bien  estre  camus.  Ils  ont  le 
poil  de  la  peau  non  hors  sortant ,  mais  au  dedans 
caché,  et  portent  pour  leur  symbole  et  devise,  tous 
et  chascun  d'eux,  une  gibbeciere  ouverte,  mais  non 
tous  en  une  manière,  car  aucuns  la  portent  attachée 
au  col,  autres  en  escharpe,  autres  sus  le  cul,  autres 
sus  la  bedaine,  autres  sur  le  costé,  et  le  tout  par 
raison  et  mistere.  Ont  aussi  les  griphes  tant  fortes, 
longues  et  asserées,  que  rien  ne  leur  eschappe  de- 
puis qu'une  fois  l'ont  mis  entre  leurs  serres.  Et  se 
couvrent  les  testes  aucunefois  de  bonnets  à  quatre 
goutieresou  braguettes,  autres  de  bonnets  à  revers, 


44  LIVRE    V,    CHAPITRE    XI 

autres  de  mortiers,  autres  de  caparassons  mortifiez. 

Entrans  en  leur  tapinaudiere, 
Nous  dist  un  Gueux  de  l'Hostiere^ 

auquel  avons  donné  demy  teston  :  «  Gens  de 
bien,  Dieu  vous  doint  de  leans  bien  tost  en  saul- 
veté  sortir.  Considérez  bien  le  minois  de  ces  vail- 
lans  pilliers ,  arboutans  de  Justice  grippe-minau- 
diere,  et  notez  que,  si  vivez  encore  six  olympiades 
et  l'aage  de  deux  chiens,  vous  verrez  ces  Chats- 
fourrez  seigneurs  de  toute  l'Europe  et  possesseurs 
pacifiques  de  tout  le  bien  et  domaine  qui  est  en 
icelle,  si  en  leurs  hoirs,  par  divine  punition,  soub- 
dain  ne  deperissoit  le  bien  et  revenu  par  eux  injus- 
tement acquis;  tenez-le  d'un  gueux  de  bien. 

«  Parmy  eux  règne  la  Sexte-Essence,  moyennant 
laquelle  ils  grippent  tout,  dévorent  tout  et  con- 
chient  tout;  ils  pendent,  ils  bruslent,  escartelent, 
décapitent,  meurdrissent,  emprisonnent,  ruinent  et 
minent  tout  sans  discrétion  de  bien  et  de  mal.  Car 
parmy  eux  vice  est  vertu  appelle,  meschanceté  est 
bonté  surnommée,  trahison  a  nom  de  feauté,  larre- 
cin  est  dict  libéralité  ;  pillerie  est  leur  devise,  et  par 
eux  faicte  est  trouvée  bonne  de  tous  humains,  ex- 
ceptez moy  les  hérétiques;  et  le  tout  font  avec 
souveraine  et  irréfragable  authorité.  Pour  signe  de 
mon  pronostic,  adviserez  que  leans  sont  les  man- 
geoires au  dessus  des  rasteliers.  De  ce  quelque  jour 
vous  souvienne.  Et  si  jamais  pestes  au  monde,  fa- 


PANTAGRUEL  43 

mine  ou  guerre,  vorages,  cateclismes,  conflagra- 
tions, malheur,  adviennent^  ne  les  attribuez,  ne  les 
referez  aux  conjunctions  des  planettes  maléfiques, 
aux  abus  de  la  cour  romaine  ou  tyrannie  des  roys 
et  princes  terriens,  à  l'imposture  des  caphars,  héré- 
tiques, faux  prophètes,  à  la  malignité  des  usuriers, 
faux  monnoyeurs,  rongneurs  de  testons,  n'a  l'igno- 
rance, impudence,  imprudence  des  médecins,  cirur- 
giens,  apoticaires,  n'a  la  perversité  des  femmes 
adultères,  venefiques,  infanticides  ;  attribuez-le  tout 
à  leur  ruine  indicible,  incroiable,  inestimable  mes- 
chanceté ,  laquelle  est  continuellement  forgée  et 
exercée  en  l'officine  des  Chats-fourrez,  et  n'est  au 
monde  congnue  non  plus  que  la  cabale  des  Juifs  ; 
pourtant  n'est  elle  détestée ,  corrigée  et  punie , 
comme  seroit  de  raison.  Mais,  si  elle  est  quelque 
jour  mise  en  évidence  et  manifestée  au  peuple,  il 
n'est  et  ne  fut  orateur  tant  éloquent  qui  par  son 
art  le  retint,  ne  loy  tant  rigoureuse  et  drachonique 
qui  par  crainte  de  peine  le  gardast,  ne  magistrat 
tant  puissant  qui  par  force  l'empeschast  de  les  faire 
tous  vifs  là  dedans  leur  rabouliere  felonnement 
brusler. 

«  Leurs  enfans  propres  Chats-fourillons  et  autres 
parens  les  avoyent  en  horreur  et  abomination.  C'est 
pourquoy,  ainsi  que  Hannibal  eut  de  son  père 
Amilcar,  souz  solennelle  et  religieuse  adjuration, 
commandement  de  persécuter  les  Romains  tant 
qu'il  vivroit,  ainsi  ay-je  de  feu  mon  père  injonction 


4b  LIVRE    V,    CHAPITRE    XI 

icy  hors  demeurer,  attendant  que  là  dedans  tombe 
la  fouldre  du  ciel  et  en  cendre  les  réduise  comme 
autres  Titanes,  prophanes  et  theomaches,  puisque 
les  humains  tant  et  tant  sont  des  cueurs  endurciz 
que  le  mal  parmy  eux  advenu,  advenant  et  à  venir, 
ne  recordent,  ne  sentent,  ne  prevoyent,  ou  le  sen- 
tens  n'osent,  ne  veulent,  ne  peuvent  les  exterminer. 
—  Qu'est-ce  cela?  dist  Panurge  ;  ha!  non,  non, 
je  n'y  vois  pas,  par  Dieu!  Retournons,  retournons, 
dis-je,  de  par  Dieu  ! 

Ce  noble  gueux  m'a  plus  fort  estonné 
Que  si  du  ciel  en  automne  eust  tonné.  » 

Retournans,  trouvasmes  la  porte  fermée,  et  nous 
fut  dict  que  là  facilement  on  y  entroit  comme  en 
Averne,  à  issir  restoit  la  difficulté ,  et  que  ne  sorti- 
rions hors  en  manière  que  ce  fust  sans  bulletin  et 
descharge  de  l'assistance  ,  par  ceste  seule  raison 
qu'on  ne  s'en  va  pas  des  foyres  comme  du  marché, 
et  qu'avions  les  pieds  pouldreux.  Le  pis  fut  quand 
passasmes  le  Guichet,  car  nous  fusmes  présentez 
pour  avoir  nostre  bulletin  et  descharge  devant  un 
monstre  le  plus  hideux  que  jamais  fust  descrist.  On 
le  nommoit  Grippe-minaud.  Je  ne  vous  le  sçaurois 
mieux  comparer  qu'à  Chimère,  ou  à  Sphinx  et  Cer- 
berus,  ou  bien  au  simulachre  d'Osiris,  ainsi  que  le 
figuroyent  les  Egyptiens,  par  trois  lestes  ensemble 
joinctes,  sçavoir  est  :  d'un  lyon  rugient,  d'un  chien 
flattant  et  d'un  loup  baislant,  entortillées  d'un  dra- 


PANTAGRUEL 


47 


gon  soy  mordant  la  queue,  et  de  rayons  scintillans  à 
l'entour.  Les  mains  avoit  plaines  de  sang,  les  gri- 
phes  comme  de  harpye,  le  museau  à  bec  de  corbin, 
les  dens  d'un  sanglier  quadrannier,  les  yeux  flam- 
boyans  comme  une  gueule  d'enfer,  tout  couvert  de 
mortiers  entrelassez  de  pillons;  seulement  apparois- 
soyent  les  gryphes.  Le  siège  d'iceluy,  et  de  tous  ses 
coUateraulx  Chats-garaniers,  estoit  d'un  long  ratte- 
lier  tout  neuf,  au  dessus  duquel,  par  forme  de  re- 
vers instablées,  estoient  mangeoires  fort  amples  et 
belles,  selon  l'advertissement  du  Gueux. 

A  l'endroit  du  siège  principal  estoit  l'image  d'une 
vieille  femme  tenant  en  main  dextre  un  fourreau  de 
faucille,  en  senestre  une  ballance,  et  portant  bezi- 
cles  au  nez.  Les  coupes  de  la  ballance  estoient  de 
deux  gibbescieres  veloutées,  l'une  pleine  de  billon 
et  pendente ,  l'autre  vuide  et  longue ,  eslevée  au 
dessus  du  tresbuchet.  Et  suis  d'opinion  que  c'estoit 
le  pourtraict  de  Justice  grippe-minaudiere ,  bien 
abhorrente  de  l'institution  des  antiques  Thebains, 
qui  erigeoyent  les  statues  de  leurs  dicastes  et  juges, 
après  leur  mort,  en  or  et  argent,  en  marbre,  selon 
leur  mérite,  toutes  sans  mains. 

Quand  fusmes  devant  luy  présentez,  ne  sçay 
quelle  sorte  de  gens,  tous  vestus  de  gibbescieres  et 
de  sacs,  à  grands  lambeaux  d'escritures,  nous  firent 
sus  une  selette  asseoir.  Panurge  disoit  :  «  Gallefre- 
tiers,  mes  amis,  je  ne  suis  que  trop  bien  ainsi  de- 
bout, aussi  bien  elle  est  trop  basse  pour  homme  qui 


48  LIVRE   V,    CHAPITRE    XI 

a  chausses  neufves  et  court  pourpoint.  — Assoyez- 
vous-là,  respondirent-ils,  et  que  plus  on  ne  vous  le 
die.  La  terre  présentement  s'ouvrira  pour  tous  vifs 
vous  engloutir  si  faillez  à  bien  respondre.  » 


CHAPITRE    XII 

Comment  par  Grippe-minaud  nous   fut  proposé  un 
énigme. 

i^  UAND  fusmes  assis,  Grippe-minaud,  au 
millieu  de  ses  Chats-fourrez,  nous  dist 
en  parolle  furieuse  et  enrouée  :  «  Or 
çà,  or  çà,   or  çà.  —  A  boire,  à  boire 
çà,  »  disoit  Panurge  entre  sesdens. 

«  Une  bien  jeune  et  toute  blondelette 
Conceut  un  fils  Etyopien  sans  père; 
Puis  l'enfanta  sans  douleur  la  tendrette, 
Quoy  qu'il  sortist  comme  faict  la  vipère, 
L'ayant  rongé  en  moût  grand  vitupère 
Tout  l'un  des  flancs,  pour  son  impatience  ; 
Depuis  passa  mons  et  vaux  en  fiance, 
Par  l'air  volant,  en  terre  cheminant, 
Tant  qu'estonna  l'amy  de  sapience, 
Qui  l'estimoit  estre  humain  animant. 

«  Or  çà  ,  respons  moy,  dist  Grippe-minaud,  à 
cest  énigme ,  et  nous  resoulz  présentement  que 
c'est,  or  çà.  —  Or  de  par  Dieu,  respondis-je,  si 
j'avois  Sphinx    en  ma  maison,   or  de    par  Dieu, 


PANTAGRUEL 


49 


comme  l'avoit  Verres,  un  de  vos  précurseurs,  or  de 
par  Dieu,  resouldre  pourrois  l'énigme,  or  de  par 
Dieu;  mais  certes  je  n'y  estois  mie,  et  suis,  or  de 
par  Dieu,  innocent  du  faict.  —  Or  çà,  dit  Grippe- 
minaud,  par  Styx,  puis  qu'autre  chose  ne  veux  dire, 
or  çà,  je  te  monstreray,  or  çà,  que  meilleur  te  se- 
roit  estre  tombé  entre  les  pattes  de  Lucifer,  or  çà, 
et  de  tous  les  diables,  or  çà,  qu'entre  nos  griphes, 
or  çà  ;  les  vois-tu  bien  ?  Or  çà,  malautru,  nous  allègues 
tu  innocence,  or  çà,  comme  chose  digne  d'eschap- 
per  nos  tortures? Or  çà,  nos  loix  sont  comme  toille 
d'araignes,  or  çà:  les  simples  mouscherons  et  petits 
papillons  y  sont  prins,  or  çà  ;  les  gros  taons  mal- 
faisans les  rompent,  or  çà,  et  passent  à  travers,  or 
çà.  Semblablement,  nous  ne  cherchons  les  gros  lar- 
rons et  tyrans,  or  çà;  ils  sont  de  trop  dure  diges- 
tion, or  çà,  et  nousaffolleroient,  or  çà;  vous  autres 
gentils  innocens,  or  çà,  y  serez  bien  innocentez, 
or  çà;  le  grand  Diable,  or  çà,  vous  y  chantera 
Messe  ,  or  çà .  » 

Frère  Jean,  impatient  de  ce  qu'avoit  déduit 
Grippe-minaud  :  «Hau,  Monsieur  le  Diable  engip- 
ponné,  comment  veux-tu  qu'il  responde  d'un  cas 
lequel  il  ignore?  Ne  te  contente-tu  de  vérité?  — 
Or  çà,  dist  Grippe-minaud,  encores  n'estoit  de 
mon  règne  advenu,  or  çà ,  qu'icy  personne  sans 
premier  estre  interrogué  parlast,  or  çà.  Qui  nous  a 
deslié  ce  fol  enragé  icy?  —  Tu  as  menty,  mastin, 
dist  frère  Jean  sans  les  lèvres  mouvoir.  —  Or  çà, 

Rabelais.    V.  n 


5o  LIVRE   V,    CHAPITRE    XII 

quand  seras  en  rang  de  respondre,  or  çà,  tu  auras 
prou  affaire,  or  çà,  maraut.  —  Tu  as  menty,  disoit 
frère  Jean  en  silence.  —  Pense-tu  estre  en  la  fo- 
rest  de  l'Académie,  or  çà,  avec  les  ocieux  veneurs 
et  inquisiteurs  de  vérité,  or  çà?  Nous  avons  bien 
icy  autre  chose  à  faire,  or  çà;  icy  on  respond,  je 
dis,  or  çà,  or  çà,  catégoriquement,  de  ce  que  l'on 
ignore,  or  çà;  on  confesse  avoir  faict,  or  çà,  ce 
qu'on  ne  fist  onques,  or  çà;  on  proteste  sçavoir 
ce  que  jamais  on  n'apprint,  or  çà;  on  faict  prendre 
patience  en  enrageant,  or  çà;  on  plume  l'oye  sans 
la  faire  crier,  or  çà.  Tu  parles  sans  procuration,  or. 
cà,  je  le  voj  bien,  or  çà,  tes  fortes  fiebvres  quar- 
taines,  or  çà,  qui  te  puissent  espouser,  or  çà  ! 

—  Diables,  s'escria  frère  Jean,  Archidiables, 
Protodiables,  Pantodiables,  tu  donques  veux  marier 
les  moines,  ho,  hu,  ho,  hou!  Je  te  prens  pour  hé- 
rétique. » 


PANTAGRUEL  Ol 

CHAPITRE    XIII 
Comment  Panurge  expose  Venigme  de  Grippe-minaud. 

RIPPE-MINAUD,  faisant  semblant  n'en- 
tendre ce  propos,  s'adresse  à  Panurge, 
disant  :  «  Or  çà,  or  çà,  or  çà,  et  toy, 
Guoguelu,  n'y  veux  tu  rien  dire?  — 
Révérend  père  en  diable,  respondit  Panurge,  or  de 
par  le  diable  là,  je  voy  clerement  que  la  peste  est 
icy  pour  nous,  or  de  par  le  diable  là,  veu  qu'inno- 
cence n'y  est  point  en  seureté,  et  que  le  diable  y 
chante  messe,  or  de  par  le  diable  là.  Je  vous  prie 
que  pour  tous  je  la  paye,  or  de  par  le  diable  là,  et 
nous  laisse  aller.  Je  n'en  puis  plus,  or  çà,  de  parle 
diable  là.  —  Aller!  dit  Grippe-minaud;  or  çà,  en- 
cores  n'advint  depuis  trois  cens  ans  en  çà,  or  çà, 
que  personne  eschappast  de  céans  sans  y  laisser  du 
poil,  or  çà,  ou  de  la  peau  pour  le  plus  souvent,  or 
çà.  Car  quoy?  or  çà,  ce  seroit  à  dire  que  par  de- 
vant nous  icy  serois  injustement  convenu,  or  çà,  et 
de  par  nous  injustement  traité,  or  çà;  malheureux 
es-tu  bien,  or  çà;  mais  encoresplus  le  seras,  or  çà, 
si  ne  responds  à  l'énigme  proposé;  or  çà,  que  veut- 
il  dire,  or  çà? 

—  C'est,  or  de  par  le  diable  là,  respondit  Pa- 
nurge, un  cosson  noir  né  d'une  febve  blanche,  or 
de  par  le  diable  là,  par  le  trou  qu'il  avoit  fait  la 


52  LIVRE   V,    CHAPITRE    XIII 

rongeant,  or  de  par  le  diable  là,  lequel  aucunefois 
voile ,  aucunefois  chemine  en  terre ,  or  de  par  le 
diable  là,  dont  fut  estimé  de  Pythagoras,  premier 
amateur  de  sapience,  c'est  en  grec  philosophe,  or 
de  par  le  diable  là,  avoir  d'ailleurs  par  metempsi- 
chosie  ame  humaine  receue,  or  de  par  le  diable  là. 
Si  vous  autres  estiez  hommes,  or  de  parle  diable  là, 
après  vostre  maie  mort,  selon  son  opinion,  vos 
âmes  entreroient  en  corps  de  cossons,  or  de  par  le 
diable  là,  car  en  ceste  vie  vous  rongez  et  mangez 
tout;  en  l'autre  : 

Vous  rongerez,  comme  vipères, 
Les  costez  propres  de  vos  mères, 

or  de  par  le  diable  là. 

—  Cor  Dieu,  dit  frère  Jean,  de  bien  bon  cueur 
je  souhaiterois  que  le  trou  de  mon  cul  devienne 
febve,  et  autour  soit  de  ces  cossons  mangé.  » 

Panurge,  ces  motz  achevez,  jetta  au  milieu  du 
parquet  une  grosse  bource  de  cuir  plaine  d'escus 
au  soleil.  Au  son  de  la  bource  commencèrent  tous 
les  Chais-fourrez  jouer  des  griphes,  comme  si  fus- 
sent violons  démanchez ,  et  tous  s'escrierent  à 
haulte  voix,  disans  :  «  Ce  sont  les  espices;  le  pro- 
cès fut  bien  bon,  bien  friant  et  bien  espicé.  Ils  sont 
gens  de  bien.  —  C'est  or,  dit  Panurge,  je  dis  escus 
au  soleil.  —  La  Cour,  dist  Grippe-minaud,  l'en- 
tend, or  bien,  or  bien,  or  bien.  Allez,  enfans,  or 
bien,  et  passez  outre,   or  bien;   nous  ne  sommes 


PANTAGRUEL  53 

tant  diables,  or  bien,  que  sommes  noirs,  or  bien, 
or  bien,  or  bien.  « 

Issans  du  guischet,  fusmes  conduits  jusques  au 
port  par  certains  griphons  de  montagnes.  Avant 
entrer  en  nos  navires  fusmes  par  iceux  advertis  que 
n'eussions  à  chemin  prendre  sans  premier  avoir  faict 
presens  seigneuriaux,  tant  à  la  Dame  Grippe-mi- 
naude  qu'à  toutes  les  Chattes-fourrées,  autrement 
avoient  commission  nous  remener  au  guischet. 
«  Bren  !  respondit  frère  Jean  ;  nous  icy  à  l'escart 
visiterons  le  fond  de  nos  deniers,  et  donnerons  à 
tous  contentement.  —  Mais,  dirent  les  griphons, 
n'oubliez  le  vin  des  pauvres  diables.  —  Des  pau- 
vres diables,  respondit  frère  Jean,  jamais  n'est  en 
oubly  le  vin,  mais  est  mémorial  en  tout  pais  et  tou- 
tes saisons.  » 


CHAPITRE  XIV 

Comment  les  Chats-fourrez  vivent  de  corruption. 

ES  paroles  n'estoient  achevées  quand 
frère  Jean  apperceut  soixante  et  huict 
galleres  et  frégates  arrivantes  au  port. 
Là  soudain  courut  demander  nouvelles , 
ensemble  de  quelle  marchandise  estoient  les  vais- 
seaux chargez.  Vit  que  tous  chargez  estoient  de 
venaison,  levraux ,  chappons,  palombes,  cochons, 
chevreaux,   vaneaux,    poullets,   canards,   albrans. 


D4  LIVRE    V,    CHAPITRE    XIV 

oisons  et  autres  sortes  de  gibier.  Parmy  aussi  ap- 
perceut  quelques  pièces  de  velours,  satin  et  damas. 
Adoncques  interrogua  les  voyagiers  où  et  à  qui  ils 
portoient  ces  frians  morceaux.  Ils  respondirent  que 
c'estoit  à  Grippe-minaud,  aux  Chats-fourrez  et 
Chattes-fourrées. 

«  Comment,  dit  frère  Jean,  appellez-vous  ces 
drogues-là?  —  Corruption,  respondoient  les  voia- 
gers.  —  Ils,  doncques,  dist  frère  Jean,  de  corrup- 
tion vivent,  en  génération  périront.  Par  la  vertu 
Dieu,  c'est  cela;  leurs  pères  mangèrent  les  bons 
gentilshommes  qui  par  raison  de  leur  estât  s'exer- 
çoient  à  la  vollerie  et  à  la  chasse  pour  plus  estre  en 
temps  de  guerre  escorts  et  ja  endurcis  au  travail. 
Car  venation  est  comme  un  simulachre  de  bataille, 
et  onques  n'en  mentit  Xenophon ,  escrivant  estre 
de  la  vénerie  comme  du  cheval  deTroye,  yssus  tous 
bons  chefs  de  guerre.  Je  ne  suis  pas  clerc,  mais  on 
me  l'a  dit,  je  le  croy.  Les  âmes  d'iceux,  selon  l'opi- 
nion de  Grippe-minaud,  après  leur  mort  entrent 
en  sangliers,  cerfs,  chevreaux,  hérons,  perdrix  et 
autres  tels  animaux,  lesquels  avoient  leur  première 
vie  durante  tousjours  aimez  et  cherchez. 

((  Ores  ces  Chats-fourrez,  après  avoir  leurs  chas- 
teaux,  terres,  dommaines,  possessions,  rentes  et 
revenus  destruit  et  dévoré,  encores  leurs  cher- 
chent-ils le  sang  et  l'ame  en  l'autre  vie.  O  le 
gueux  de  bien  qui  nous  en  donna  advertissement 
à  l'enseigne  de  la  Mangeoire  instablée  au  dessus  du 


PANTAGRUEL  55 

Râtelier  !  —  Voire  mais,  dit  Panurge  aux  voya- 
gers,  on  a  faict  crier  de  par  le  grand  Roy  que  per- 
sonne n'eust,  sur  peine  de  la  hart,  prendre  cerfs 
ne  biches,  sangliers  ne  chevreaux.  —  Il  est  vray, 
respondit  un  pour  tous,  mais  le  grand  Roy  est  tant 
bon  et  tant  bénin,  ces  Chats-fourrez  sont  tant 
enragez  et  affamez  de  sang  chrestien,  que  moins 
de  peur  avons  nous  offenceans  le  grand  Roy  que 
d'espoir  n'entretenans  ces  Chats-fourrez  par  telles 
corruptions;  mesmement  que  demain  le  Grippe- 
minaud  marie  une  sienne  Chatte-fourrée  avec  un 
gros  Mitouard,  Chat  bien  fourré.  Au  temps  passé 
on  les  appelloit  machefoins;  mais,  las  !  ils  n'en 
maschent  plus.  Nous  de  présent  les  nommons 
mache-levraux,  mache-perdrix,  mache-beccasses, 
mache-faisans,  mache-poullets,  mache-chevreaux, 
mache-connils,  mache-cochons;  d'autres  viandes 
ne  sont  alimentez. 

—  Bren,  bren  !  dist  frère  Jean,  l'année  pro- 
chaine on  les  nommera  mache-estrons,  mache- 
foires,  mache-merdes;  me  voulez-vous  croire?  — 
Ouy  dei,  respondit  la  brigade.  —  Faisons,  dit-il, 
deux  choses  :  premièrement,  saisissons-nous  de  tout 
ce  gibbier  que  voyez  cy;  aussi-bien  suis-je  fasché 
de  saleures,  elles  m'eschauffent  les  hypocondres  : 
j'enten  le  bien  payant;  secondement,  retournons 
au  guischet,  et  mettons  à  sac  tous  ces  diables  de 
Chats-fourrez.  —  Sans  faute,  dist  Panurge,  je  n'y 
vais  pas;  je  suis  un  peu  couart  de  ma  nature.  » 


56  LIVRE     V,     CHAPITRE     XV 

CHAPITRE    XV 

Comment  frère  Jean  des  Ento meures  délibère  mettre 
à    sac    les    Chats-foiirrez. 

ERTUS  de  froc,  dist  frère  Jean,  quel 
.voyage  icy  faisons-nous?  C'est  un 
voyage  de  foirards,  nous  ne  faisons 
'que  vessir,  que  peder ,  que  fîanter , 
que  ravasser,  que  rien  faire.  Cor  dieu  !  ce  n'est  pas 
mon  naturel;  si  tousjours  quelque  acte  héroïque  ne 
fais,  la  nuictje  ne  peux  dormir.  Donques  vous  m'avez 
en  compagnon  prins  pour  en  cestuy  voyage  messe 
chanter  et  confesser?  Pasques  de  soles!  le  premier 
qui  y  viendra,  il  aura  en  pénitence  soy  comme  las- 
che  et  meschant  jecter  au  fond  de  la  mer,  en  déduc- 
tion des  peines  de  purgatoire,  je  dis  la  teste  la  pre- 
mière. Qui  a  mis  Hercules  en  bruit  et  renommée 
sempiternelle?  N'esse  que  il,  peregrinant  par  le 
monde,  mettoit  les  peuples  hors  de  tyrannie,  hors 
d'erreur,  de  dangers  et  engaries  ?  Il  mettoit  à  mort 
tous  les  brigans,  tous  les  monstres,  tous  les  serpens 
venimeux  et  bestes  malfaisantes.  Pourquoy  ne  suy- 
vons-nous  son  exemple,  et  comme  il  faisoit  ne 
faisons-nous  en  toutes  les  contrées  que  passons?  Il 
delîist  les  Stymphalides,  l'Hydre  de  Lerne,  Cacus, 
Antheus,  les  Centaures.  Je  ne  suis  pas  clerc,  les 
ders  le  disent. 

«  A  son  imitation  deffaisons  et  mettons  à  sac  ces 


PANTAGRUEL  Sj 

Chats-fourrez,  ce  sont  tiercelets  de  diables,  et 
délivrons  ce  pais  de  tyrannie.  Je  renie  Mahon,  si 
j'estois  aussi  fort  et  puissant  qu'il  estoit,  je  ne  vous 
demanderois  n'ayde  ne  conseil;  çà,  irons-nous?  Je 
vous  asseure  que  facilement  nous  les  occirons,  et  ils 
l'endureront  patiemment,  je  n'en  doute,  veu  que 
de  nous  ont  patiemment  enduré  des  injures  plus 
que  dix  truyes  ne  boyroient  de  lavailles.  Allons  ! 

—  Des  injures,  dis-je,  et  deshonneur  ils  ne  se 
soucient,  pourveu  qu'ils  ayent  escus  en  gibbeciere, 
voire  fussent-ils  tous  breneux,  et  les  defferions 
peult-estre,  comme  Hercules;  mais  il  nous  défaut 
le  commandement  d'Euristheus,  et  rien  plus  pour 
ceste  heure,  fors  que  je  souhaitte  parmy  eux  Jupiter 
soy  pourmener  deux  petites  heures  en  telle  forme 
que  jadis  visita  Semelé  sa  mye,  mère  première  du 
bon  Baccus. 

—  Dieu,  dist  Panurge,  nous  a  faict  belle  grâce 
d'eschapper  de  leurs  griphes;  je  n'y  retourne  pas, 
quant  est  de  moy;  je  me  sens  encore  esmeu  et 
altéré  de  l'ahan  que  j'y  paty.  Et  y  fus  grandement 
fasché  pour  trois  causes  :  la  première,  pource  que 
j'y  estois  fasché;  la  seconde,  pource  que  j'y  estois 
fasché;  la  tierce,  pource  que  j'y  estois  fasché. 
Escoute  icy  de  ton  aureille  dextre,  frère  Jean,  mon 
couillon  gauche  :  toutes  et  quantes  fois  que  vou- 
dras aller  à  tous  les  diables,  devant  le  tribunal  de 
Minos,  iEacus,  Rhadamanthus  et  Dis,  je  suis  prest 
te  faire  compaignie  indissoluble,  avec  toy  passer 


58  LIVRE    V,    CHAPITRE    XV 

Acheron,  Styx,  Cocyte,  boire  plain  godet  du  fleuve 
Lethé,  payer  pour  nous  deux  à  Charon  le  naute  de 
sa  barque;  pour  retourner  au  guischet,  si  de  fortune 
veux  retourner,  saisis  toy  d'autre  compaignie  que 
de  la  mienne,  je  n'y  retourneray  pas;  ce  mot  te  soit 
une  muraille  d'arain.  Si  par  force  et  violence  ne 
suis  mené,  je  n'en  approcheray,  tant  que  ceste  vie 
je  vivray,  en  plus  que  Calpe  d'Abila.  Ulisses  re- 
tourna-il quérir  son  espée  en  la  caverne  du  Cyclope  ? 
Ma  dia  non;  au  guischet  je  n'ay  rien  oublié,  je  n'y 
retourneray  pas. 

—  O  !  dist  frère  Jean,  bon  cueur  et  franc  com- 
pagnon de  mains  paralitiques  !  Mais  parlons  un 
peu  par  escot,  docteur  subtil  :  pourquoy  est-ce, 
et  qui  vous  meut  leur  jetter  la  bourse  plaine 
d'escus?  En  avons-nous  trop?  N'eust-ce  assez  esté 
leur  jecter  quelques  testons  rongnez  ?  —  Parce, 
respondit  Panurge,  qu'à  tous  périodes  de  propos 
Grippe-minaud  ouvroit  sa  gibbeciere  de  velours, 
exclamant  :  «  Or  çà,  or  çà,  or  çà  !  y>  De  là  je 
prins  conjecture  comme  pourrions  francs  et  délivres 
eschapper,  leur  jectant  :  a  Or  là,  or  là  de  par  Dieu, 
«  or  là  de  par  tous  les  diables  là  !  »  Cargibbesciere 
de  velours  n'est  reliquaire  de  testons  ne  menue 
monnoye,  c'est  un  receptable  d'escus  au  soleil;  en- 
tends-tu, frère  Jean,  mon  petit  couillaud  ?  Quant 
tu  auras  autant  rousty  comme  j'ay,  et  esté,  comme 
j'ay  esté,  rousty,  tu  parleras  autre  latin.  Mais  par 
leur  injonction  il  nous  convient  outre  passer.  « 


PANTAGRUEL 


Les  gallefretiers  tousjours  au  port  attendoient 
en  expectation  de  quelque  somme  de  deniers.  Et, 
voyans  que  voulions  faire  voile,  s'adressent  à  frère 
Jean,  l'advertissant  qu'outre  n'eust  à  passer  sans 
paier  le  vin  des  appariteurs,  selon  la  taxation  des 
espices  faictes.  «  Et  Sainct  Hurluburlu  !  dist  frère 
Jean,  estes-vous  encores  icy,  griphons  de  tous  les 
diables?  Ne  suis-je  icy  assez  fasché  sans  m'impor- 
tuner  davantage?  Le  cordieu,  vous  aurez  vostre  vin 
à  ceste  heure,  je  vous  le  promets  seurement.  i> 
Lors ,  desgainant  son  bracquemard  ,  sortit  hors  la 
navire,  en  délibération  de  felonnement  les  occire; 
mais  ils  gagnèrent  le  grand  gallot ,  et  plus  ne  les 
aperceusmes. 

Non  pourtant  feusmes  nous  hors  de  fascherie_, 
car  aucuns  de  nos  mariniers,  par  congé  de  Panta- 
gruel, le  temps  pendant  qu'estions  devant  Grippe- 
minaud,  s'estoient  retirez  en  une  hostellerie  prés  le 
havre  pour  banqueter  et  soy  quelque  peu  de  temps 
refraichir.  Je  ne  sçay  s'ils  avoient  bien  ou  non  payé 
Tescot;  si  est-ce  qu'une  vieille  hostesse,  voyant 
frère  Jean  en  terre,  luy  faisoit  grande  complainte, 
présent  un  serrargent  gendre  d'un  des  Chats-four- 
rez  et  deux  recors  de  tesmoings. 

Frère  Jean,  impatient  de  leurs  discours  eî  alléga- 
tions, demanda  :  «  Gallefretiers,  mes  amis,  voulez- 
vous  dire  en  somme  que  nos  matelots  ne  sont  gens 
de  bien?  Je  maintien  le  contraire,  par  justice  je  le 
vous  prouveray  ;  c'est  ce  maistre  bracquemard  icy,  » 


6o  LIVRE    V,    CHAPITRE    XV 

Ce  disant,  s'escrimoit  de  son  biacquemard.  Les 
païsans  se  meirent  en  fuite  au  trot  :  restoit  seule- 
ment la  vieille,  laquelle  protestoit  à  frère  Jean  que 
ces  matelots  estoient  gens  de  bien  ;  de  ce  se  com- 
plaignoit  qu'ils  n'avoient  rien  payé  du  lict  auquel 
après  disner  ils  avoient  reposé,  et  pour  le  lict  de- 
mandoit  cinq  sols  tournois.  «  Vrayement,  respondit 
frère  Jean,  c'est  bon  marché  ;  ils  sont  ingrats,  et 
n'en  auront  tousjours  à  tel  prix;  je  le  payeray  vo- 
lontiers, mais  je  le  voudrois  bien  voir.  » 

La  vieille  le  mena  au  logis  et  luy  montra  le  lict, 
et,  l'ayant  loué  en  toutes  ses  qualitez,  dist  qu'elle 
ne  faisoit  de  l'encherie  si  en  demandoit  cinq  sols. 
Frère  Jean  luy  bailla  cinq  sols,  puis  avec  son  brac- 
quemard  fendit  la  coytte  et  coissin  en  deux,  et  par 
les  fenestres  mettoit  la  plume  au  vent,  quant  la 
vieille  descendit  criant  à  l'aide  et  au  meurtre,  en 
s'amusant  à  recuillir  sa  plume.  Frère  Jean,  de  ce  ne 
se  souciant,  emporta  la  couverture,  le  mathelats  et 
les  deux  linceux  en  nostre  nef,  sans  estre  veu  de 
personne,  car  l'air  estoit  obscurcy  de  plume  comme 
de  neige,  et  les  donna  es  matelots.  Puis  dist  à 
Pantagruel  là  les  licts  estre  à  beaucoup  meilleur 
marché  qu'en  Chinonnois,  quoy  qu'y  eussions  les 
célèbres  oyes  de  Pautilé,  car  pour  le  lict  la  vieille 
ne  luy  avoit  demandé  que  cinq  douzains,  lequel 
en  Chinonnois  ne  vaudroit  moins  de  douze  francs. 

Si  tost  que  frère  Jean  et  les  autres  de  la  compa- 
gnie furent  dans  la  navire,  Pantagruel  fist  voile. 


PANTAGRUEL  6l 

Mais  il  s'esleva  un  siroch  si  véhément  qu'ils  perdi- 
rent routte,  et,  quasi  reprenant  les  erres  du  pays 
des  Chats-fourrez,  ils  entrèrent  en  un  grand  gouffre, 
duquel  la  mer  estant  fort  haute  et  terrible ,  un 
mousse  qui  estoit  au  haut  du  trinquet  cria  qu'il 
voyoit  encore  les  fascheuses  demeures  de  Grippe- 
minaud ,  dont  Panurge,  forcené  de  peur,  s'es- 
crioit  :  «  Patron ,  mon  ami ,  maugré  les  vents  et 
les  vagues,  tourne  bride.  O  mon  ami,  ne  retournons 
point  en  ce  meschant  pays,  où  j'ay  laissé  ma 
bourse  !  » 

Ainsi  le  vent  les  porta  prés  d'une  isle  à  laquelle 
toutefois  ils  n'osèrent  aborder  de  prime  face, 
et  entrèrent  à  bien  un  mille  de  là,  prés  de  grands 
rochers. 


CHAPITRE    XVI 

Comment  Pantagruel  arriva  en  l'isle  des  Apedeftes  à 
longs  doigts  et  mains  crochues,  et  des  terribles 
aventures  et  monstres  quil  y  veit. 

I  tost  que  les  ancres  furent  jectées  et 
le  vaisseau  asseuré,  l'on  descendit  l'es- 
^quif.  Après  que  le  bon  Pantagruel  eut 
ait  les  prières  et  remercié  le  Seigneur 
de  l'avoir  sauvé  de  si  grand  danger,  il  entra  et 
toute  sa  compagnie  dans  l'esquif  pour  prendre  terre, 
ce  qui  leur  fut  fort  aisé,  car,  la  mer  estant  calme 


02  LIVRE    V,   CHAPITRE    XVI 

et  les  ventz  baissez,  en  peu  de  temps  ils  furent  aux 
rochiers. 

Comme  ils  eurent  prins  terre,  Epistemon,  qui 
admiroitl'assiete  du  lieu  et  l'estrangeié  des  rochiers, 
advisa  quelques  habitans  dudict  pajs.  Le  premier  à 
qui  il  s'adressa  estoit  vestu  d'une  robbe  gocourte, 
de  couleur  de  Roy,  avoit  le  pourpoinct  de  demy- 
ostade  à  bas  de  manches  de  satin ,  et  le  haut  estoit 
de  chamois,  le  bonnet  à  la  coquarde,  homme  d'as- 
sez bonne  façon,  et,  comme  depuis  nous  sceumes, 
il  avoit  nom  Gaingne-beaucoup.  Epistemon  luy 
demanda  comme  s'appelloyent  ces  rochers  et  vallées 
si  estranges.  Gaingne-beaucoup  luy  dist  que  le 
pays  des  rochiers  estoit  une  colonie  tirée  du  pays 
de  Procuration,  et  l'appelloient  les  Cahiers,  et 
qu'au  delà  des  rochiers,  ayant  passé  un  petit  guay, 
nous  trouverions  l'isle  des  Apedeftes.  «  Vertu 
de  Extravagantes  !  dist  frère  Jean  ,  et  vous  aul- 
tres,  gens  de  bien,  de  quoy  vivez-vous  icy  ?  Sçau- 
rions  nous  boire  en  vostre  voirre  ?  Car  je  ne 
vous  voy  aucuns  outils  que  parchemins,  cornets  et 
plumes. 

—  Nous  ne  vivons,  respondit  Gaingne-beaucoup, 
que  de  cela  aussi,  car  il  faut  que  tous  ceux  qui  ont 
affaire  en  l'isle  passent  par  nos  mains.  —  Pourquoy  ? 
dit  Panurge.  Estes-vous  barbiers,  qu'il  faut  qu'ils 
soient  testonnez?  —  Ouy,  dit  Gaingne-beaucoup, 
quant  aux  testons  de  la  bourse.  —  Par  Dieu,  dist 
Panurge,  vous  n'aurez  de  moy  denier  ny  maille; 


PANTAGRUEL  63 

mais  je  vous  prie,  beau  Sire,  menez-nous  à  ces  Ape- 
deftes,  car  nous  venons  du  pays  des  Sçavans,  où  je 
n'ay  gueres  gaingné.  » 

En  devisant,  ils  arrivèrent  en  l'isle  des  Apedef- 
tes,  car  l'eau  fut  tantost  passée.  Pantagruel  fut  en 
grande  admiration  de  la  structure  de  la  demeure  et 
habitation  des  gens  du  pays,  car  ils  demeurent  en 
un  grand  pressouer,  auquel  on  monte  prés  de  cin- 
quante degrez,  et  avant  que  d'entrer  au  maistre 
pressouer,  car  leans  y  a  des  petits,  grands,  secrets, 
moyens,  et  de  toutes  sortes,  vous  passez  par  un 
grand  peristile,  où  vous  voyez  en  paysaige  les 
ruines  presque  de  tout  le  monde,  tant  de  potences 
de  grans  larrons,  tant  de  gibets,  de  questions,  que 
cela  nous  feit  peur.  Voyant  Gaingne-beaucoup  que 
Pantagruel  s'amusoit  à  cela  :  «  Monsieur,  dit-il, 
allons  plus  avant,  cecy  n'est  rien.  —  Comment, 
dit  frère  Jean,  ce  n'est  rien  ?  Par  l'ame  de  ma  bra- 
guette eschauffée,  Panurge  et  moy  tremblons  de 
belle  faim.  J'aymerois  mieux  boire  que  veoir 
ces  ruines  ici,  —  Venez  »,  dist  Gaingne-beau- 
coup. 

Lors  nous  mena  à  un  petit  pressouer  qui  estoit 
caché  sus  le  derrière,  que  l'on  appelloit,  en  lan- 
guaige  de  Vïsle,  Pithies.  Là  ne  demandez  pas  si 
maistre  Jean  se  traicta,  et  Panurge,  car  saulcissons 
de  Millan,  coqs  d'Inde,  chappons,  autardes,  mal- 
voisie et  toutes  bonnes  viandes  estoient  prestes  et 
fort  bien  accoustrées.  Un  petit  bouteillier,  voyant 


64  LIVRE    V,    CHAPITRE    XVI 

que  frère  Jean  avoit  donné  une  œillade  amoureuse 
sus  une  bouteille  qui  estoit  prés  d'un  buffet,  séparée 
de  la  trouppe  bouteillique ,  dist  à  Pantagruel  : 
«  Monsieur,  je  voy  que  l'un  de  vos  gens  faict  l'a- 
mour à  cette  bouteille  ;  je  vous  supplie  qu'il  n'y 
soit  touché,  car  c'est  pour  Messieurs.  —  Comment  ! 
dist  Panurge,  il  y  a  donc  des  Messieurs  céans? 
L'on  y  vendange,  à  ce  que  je  voy.  »  Alors  Gaingne- 
beaucoup  nous  feit  monter  par  un  petit  degré  ca- 
ché en  une  chambre,  par  laquelle  il  nous  monstra 
les  Messieurs  qui  estoyent  dans  le  grand  pressouer, 
auquel  il  nous  dit  qu'il  n'estoit  licite  à  homme  d'y 
entrer  sans  congé,  mais  que  nous  les  verrions 
bien  par  ce  petit  goulet  de  fenestre  sans  qu'ils  nous 
vissent. 

Quand  nous  y  fusmes,  nous  advisasmes  dans  un 
grand  pressouer  vingt  ou  vingt  cinq  gros  pendars 
à  l'entourd'un  grand  bourreau  tout  habillé  de  verd, 
qui  s'entreregardoyent,  ayans  les  mains  longues 
comme  jambes  de  grue,  et  les  ongles  de  deux  pieds 
pour  le  moins,  car  il  leur  est  défendu  de  lesrongner 
jamais,  de  sorte  qu'ils  leur  deviennent  croches 
comme  rançons  ou  rivereaux;  et  sur  l'heure  fut 
amenée  une  grosse  grappe  de  vignes  qu'on  ven- 
dange en  ce  pays-là,  du  plant  de  V Extraordinaire, 
qui  souvent  pend  à  eschalats.  Si  tost  que  la  grappe 
fut  là,  ils  la  meirent  au  pressouer,  et  n'y  eut 
grain  dont  pas  un  ne  presseurast  de  l'huyle  d'or, 
tant  que  la  pauvre  grappe  fut  rapportée   si  seiche 


PANTAGRUEL  65 

et  espluchée  qu'il  n'y  avoit  plus  jus  ne  liqueur  du 
monde. 

Or  nous  comptoit  Gaingne-beaucoup  qu'ils  n'ont 
pas  souvent  ces  grosses-là,  mais  qu'ils  en  ont  tousjours 
d'autres  sus  lepressouer.  «  Mais,  mon  compère,  dist 
Panurge,  en  ont-ils  de  beaucoup  de  plants  ?  —  Oui, 
dit  Gaingne-beaucoup  ;  voyez-vous  bien  ceste-là 
petite  que  vous  voyez  qui  s'en  va  remettre  au  pres- 
souer?  C'est  celle  du  plant  des  Décimes;  ils  en  ti- 
rèrent desja  l'aultre  jour  jusques  au  pressurage, 
mais  l'huile  sentoit  le  coffre  au  prestre,  et  Messieurs 
n'y  trouvèrent  pas  grands  appigrets.  —  Pourquoy 
donc,  dist  Pantagruel,  la  remettent-ils  aupressouer? 
—  Pour  veoir,  dit  Gaingne-beaucoup,  s'il  y  a 
poinct  quelque  omission  de  jus  ou  recepte  dedans 
le  marc.  —  Et,  vertu  Dieu,  dit  frère  Jean,  appellez- 
vous  ces  gens-là  ignorans?  Comment  diable!  ils 
tireroient  de  l'huile  d'un  mur. — Aussi  font-ils,  dist 
Gaingne-beaucoup,  car  souvent  ils  mettent  au  pres- 
souer  des  chasteaulx,  des  parcs,  des  forests,  et  de 
tout  en  tirent  l'or  potable.  —  Vous  voulez  dire 
portable,  dit  Epistemon.  — Je  dy  potable,  dist 
Gaingne-beaucoup,  car  l'on  en  boit  céans  maintes 
bouteilles  que  l'on  ne  bevroit  pas.  Il  y  en  a  de  tant 
de  plants  que  l'on  n'en  sçait  le  nombre.  Passez 
jusques  icy,  et  voyez  dans  ce  courtil  :  en  voila  plus 
de  mille  qui  n'attendent  que  l'heure  d'estre  pressu- 
rez; en  voyla  du  plant  gênerai,  voyla  du  particulier, 
des    Fortifications,  des  Emprunts,  des  Dons,    des 

Rabelais.    V.  o 


66  LIVRE    V,    CHAPITRE    XVI 

Casuels,  des  Domaines,  des  Menus  Plaisirs,  des 
Postes,  des  Offrandes,  de  la  Maison.  —  Et  qui  est 
ceste  grosse-là,  à  qui  toutes  ces  petites  sont  à  l'en- 
viron?  —  C'est,  dit  Gaingne-beaucoup,  de  VEs- 
pargne,  qui  est  le  meilleur  plant  de  tout  ce  pays; 
quand  on  en  pressure  de  ce  plant,  six  mois  après  il 
n'y  a  pas  un  de  ces  Messieurs  qui  ne  s'en  sente,  n 

Quand  ces  Messieurs  furent  levez,  Pantagruel 
pria  Gaingne-beaucoup  qu'il  nous  menast  en  ce 
grand  pressouer,  ce  qu'il  feit  volontiers.  Si  tost  que 
fusmes  entrez ,  Epistemon ,  qui  entendoit  toutes 
langues,  commença  à  monstrer  à  Pantagruel  les 
devises  du  pressouer,  qui  estoit  grand  et  beau, 
faict,  à  ce  que  nous  dit  Gaingne-beaucoup,  du  bois 
de  la  Croix,  car  sur  chacun  ustencile  estoyent  es- 
cripts  les  noms  de  chacune  chose  en  langue  du 
pays.Lavizdu  pressouer  s'appelloit  recepfc  ;  la  met, 
despense;  la  croue,  estât;  le  tesson,  deniers  comptez 
et  non  receus;  les  fusls,  souffrance;  les  belliers,  ra- 
dietur;\es  jumelles,  recuperetiir ;  les  cuves,  plus  val- 
leur;  les  ansées,  rooles;  les  fouUouaires,  acquits; 
les  hottes,  validation;  les  portoueres,  ordonnance 
vallable;  les  seilles,  le  pouvoir;  l'entonnouer,  le 
quittus. 

«  Par  la  Royne  des  Andouilles,  dist  Panurge, 
toutes  les  hierogliphiques  d'Egypte  n'approchèrent 
jamais  de  ce  jargon;  que  diable,  ces  mots-là  ren- 
contrent de  picques  comme  crottes  de  chèvre. 
Mais  pourquoy,  mon  compère,  mon  amy,  appelle- 


PANTAGRUEL  6y 

on  ces  gens  icy  ignorans  ?  —  Parce,  dist  Gaingne- 
beaucoup,  qu'ils  ne  sont  et  ne  doivent  nullement 
estre  clercs,  et  que  céans  par  leur  ordonnance  tout 
se  doibt  manier  par  ignorance,  et  n'y  doibt  avoir 
raison,  sinon  que  Messieurs  l'ont  dict,  Messieurs  le 
veulent  y  Messieurs  l'ont  ordonné.  —  Par  le  vray  Dieu, 
dist  Pantagruel,  puisqu'ils  gaingnent  tant  aux  grap- 
pes, le  serment  leur  peut  beaucoup  valloir.  —  En 
doubtez-vous?  dist  Gaingne-beaucoup,  il  n'est  mois 
qu'ils  n'en  ayent  ;  ce  n'est  pas  comme  en  vos  pays, 
où  le  serment  ne  vous  vaut  rien  qu'une  fois  l'année.  » 
De  là,  pour  nous  mener  par  mille  petits  pres- 
souers,  en  sortant  nous  advisasmes  un  autre  petit 
bourreau,  à  l'entour  duquel  estoient  quatre  ou  cinq 
des  Ignorants  crasseux,  choleres  comme  asnes  à  qui 
l'on  attache  une  fusée  aux  fesses,  qui  sur  un  petit 
pressouer  qu'ils  avoient  là  repassoyent  encores  le 
marc  des  grappes  après  les  autres  ;  l'on  les  appel- 
loit,  en  langage  du  pays,  Courracteurs.  «  Ce  sont 
les  plus  rébarbatifs  villains,  à  les  veoir,  dist  frère 
Jean,  que  j'aye  point  apperceu.  »  De  ce  grand 
pressouer  nous  passasmes  par  infinis  petits  pressouers 
tous  plains  de  vendangeurs  qui  espluchent  les  grains 
avecques  des  ferremens  qu'ils  appellent  articles  de 
Compte,  et  fînablement  arrivasmes  en  une  basse 
salle  où  nous  veismes  un  grand  dogue  à  deux  tes- 
tes de  chien,  ventre  de  loup,  griffé  comme  un  dia- 
ble de  Lamballe,  qui  estoit  là  nourry  de  laict 
d'amendes,  et  estoit  ainsi  délicatement  par  l'ordon- 


68  LIVRE    V,    CHAPITRE    XVI 

nance  de  Messieurs  traicté,  parce  qu'il  n'y  avoit 
celuy  à  qui  il  ne  valust  bien  la  rente  d'une  bonne 
métairie  ;  ils  l'appelloient,  en  langue  d'Ignorance, 
Dupple.  Sa  mère  estoit  auprès,  qui  estoit  de  pareil 
poil  et  forme,  hormis  qu'elle  avoit  quatre  testes, 
deux  masles  et  deux  femelles,  et  elle  avoit  nom 
Quadruple,  laquelle  estoit  la  plus  furieuse  beste  de 
leans  et  la  plus  dangereuse,  après  sa  grand'mere, 
que  nous  veismes  enfermée  en  un  cachot,  qu'ils  ap- 
pelloyent  Omission  de  recepte. 

Frère  Jean,  qui  avoit  tousjours  vingt  aulnes  de 
boyaux  vuides  pour  avaller  une  saulgrenée  d'advo- 
cats,  se  commençant  à  fascher,  pria  Pantagruel  de 
penser  du  disner,  et  de  mener  avecques  luy  Gain- 
gne-beaucoup,  de  sorte  qu'en  sortant  de  leans  par 
la  porte  de  derrière,  nous  rencontrasmes  un  vieil 
homme  enchaisné,  demy  ignorant,  demy  sçavant, 
comme  un  androgyne  de  diable,  qui  estoit  de  lu- 
nettes caparassonné  comme  une  tortue  d'escailles, 
et  ne  vivoit  que  d'une  viande  qu'ils  appellent  en 
leur  patois  Appellations. 

Le  voyant,  Pantagruel  demanda  à  Gaingne-beau- 
coup  de  quelle  race  estoit  ce  Protenotaire,  et  com- 
ment il  s'appeloit.  Gaingne-beaucoup  nous  compta 
comme  de  toute  ancienneté  il  estoit  leans,  à  grand 
regret,  de  Messieurs  enchaisné,  qui  le  faisoyent 
presque  mourir  de  faim,  et  s'appelloit  Kevisit.  «  Par 
les  saincis  couillons  du  Pape,  dit  frère  Jean,  je  ne 
m'esbahis  pas  si  Messieurs  les  Ignorans  font  grand 


PANTAGRUEL  69 

cas  de  ce  papelard  là.  Par  Dieu,  il  m'est  advis,  amy 
Panurge,  si  tu  y  regardes  bien,  qu'il  a  le  minois  de 
Grippe-minaud  ;  ceux-cy,  tous  ignorans  qu'ils  sont, 
en  savent  autant  que  les  autres.  Je  le  renvoyerois 
bien  d'oii  il  est  venu  à  grans  coups  d'anguillade. 

—  Par  mes  lunettes  orientales,  dist  Panurge, 
frère  Jean,  mon  amy,  tu  as  raison,  car,  à  veoir  la 
trogne  de  ce  faux  villain  Kevisit,  il  est  encores  plus 
ignorant  et  meschant  que  ces  povres  Ignorans  icy, 
qui  grappent  au  moins  mal  qu'ils  peuvent,  sans 
longs  procez ,  et  qui  en  trois  petits  mots  vendan- 
gent le  clos  sans  tant  d'interlocutoires  ny  decrotoi- 
res,  dont  ces  Chatz-fourrez  en  sont  bien  faschez.  » 

CHAPITRE   XVII 

Comment  nous  passasmes  Outre^  et  comment  Panurge 
y  faillit  d'estre  tué. 

us  l'instant  nous  prinsmes  la  routte 
d'Outre,  et  contasmes  nos  adventures 
f  à  Pantagruel,  qui  en  eut  commiséra- 
tion bien  grande  et  en  fist  quelques 
élégies  par  passe-temps.  Là  arrivez,  nous  refraischis- 
mes  un  peu,  et  puisasmes  eau  fraische,  prinsmes  aussi 
du  bois  pour  nos  munitions.  Et  nous  sembloient  les 
gens  du  pays,  à  leur  phisionomie,  bons  compagnons 
et  de  bonne  chère. 

Us    estoient  tous  oultrés,  et  tous    pedoient   de 


qO  LIVRE    V,    CHAPITRE    XVII 

graisse  ;  et  apperceusmes ,  ce  que  n'avois  encores 
veus  en  païs  autre,  qu'ils  deschiquetoient  leur  peau 
pour  y  faire  bouffer  la  graisse ,  ne  plus  ne  moins 
que  les  sallebrenaux  de  ma  patrie  descouppent  le 
hault  de  leurs  chaussespoury  faire  bouffer  le  taffetas. 
Et  disoient  ce  ne  faire  pour  gloire  et  ostentation, 
mais  autrement  ne  pouvoient  en  leur  peau.  Ce 
faisant  aussi  plus  soudain  devenoient  grands,  comme 
les  jardiniers  incisent  la  peau  des  jeunes  arbres  pour 
plustost  les  faire  croistre. 

Prés  le  havre  estoit  un  cabaret ,  beau  et  magni- 
fique en  extérieure  apparence,  auquel  accourir 
voyans  nombre  grand  de  peuple  Outré ,  de  tous 
sexes,  toutes  aages  et  tous  estats,  pensions  que  là 
fut  quelque  notable  festin  et  banquet.  Mais  nous 
fut  dit  qu'ils  estoient  invitez  aux  crevailles  de  Thoste, 
et  y  alloient  en  diligence  proches,  parenz  et  alliez. 
N'entendans  ce  gergon,  et  estimans  qu'en  icelluy 
pays  festin  on  nommast  crevailles,  comme  deçà 
nous  appelions  enfiansailles,  espousailles,  velenailles, 
tondailles,  mestivailles,  fusmes  advertis  que  l'hoste 
en  son  temps  avoit  esté  bon  raillard,  grand  grigno- 
teur,  beau  mangeur  de  souppes  lionnoises,  notable 
compteur  de  horloge,  éternellement  disnant  comme 
l'hoste  de  Rouillac ,  et,  ayant  ja  par  dix  ans  pedé 
graisse  en  abondance,  estoit  venu  en  ses  crevailles, 
et,  selon  l'usaige  du  pays,  finoit  ses  jours  en  cre- 
vant, plus  ne  pouvant  le  perytoine  et  peau  par  tant 
d'années  deschiquetée  clorre  et  retenir  ses  trippes 


PANTAGRUEL 


7 


qu'elles  ne  effondrassent  par  dehors,  comme  d'un 
tonneau  deffoncé. 

a  Et  quoy,  dist  Panurge,  bonnes  gens,  ne  luy 
sauriez  vous  bien  à  poinct,  avecques  bonnes  grosses 
sangles  ou  bons  gros  cercles  de  cormier,  voire  de 
fer,  si  besoin  est,  le  ventre  relier?  Ainsi  lié  ne 
jetteroit  si  aisément  ses  fons  hors,  et  si  tost  ne 
creveroit.  »  Ceste  parolle  n'estcit  achevée,  quant 
nous  entendismes  en  l'air  un  son  haut  et  strident, 
comme  si  quelque  gros  chesne  esclatoit  en  deux 
pièces.  Lors  fut  dit  par  les  voisins  que  ses  crevailles 
estoient  faictes,  et  que  cestuy  esclat  estoit  le  ped 
de  la  mort. 

Là  me  souvint  du  vénérable  abbé  de  Castilliers, 
celuy  qui  ne  daignoit  biscoter  ses  chambrières  nisi 
in  PontificaUbuSj  lequel,  importuné  de  ses  parens  et 
amis  de  resigner  sur  ses  vieux  jours  son  abbaye,  dist 
et  protesta  que  point  ne  se  despouilleroit  devant  soy 
coucher,  et  que  le  dernier  ped  que  feroit  sa  pater- 
nité seroit  un  ped  d'abbé. 


LIVRE    V,    CHAPITRE    XVIII 


CHAPITRE  XVIII 

Comment  nostre  natif  fut  encarrée,  et  feusmes  aidez 
d'aucuns  voyagiers  qui  tenaient  de  la  Quinte. 

0 

YANS  serpé  nos  ancres    et  gumenes, 

feismes  voile  au  doux  zephyre.  En- 
viron 2  22  miles  se  leva  un  furieux  tur- 
billon  de  vens  divers,  autour  duquel 
avec  le  trinquet  etboulingues  quelque  peu  tempo- 
risasmes,  pour  seulement  n'estre  dicts  mal  obeïssans 
au  pilot,  lequel  nous  asseuroit ,  veue  la  douceur 
d'iceux  vens ,  veu  aussi  leur  plaisant  combat , 
ensemble  la  sérénité  de  l'air  et  tranquilité  du 
courant,  n'estre  ny  en  espoir  de  grand  bien , 
ny  en  crainte  de  grand  mal ,  partant  à  propos 
nous  estre  la  sentence  du  philosophe  qui  com- 
mandoit  soustenir  et  abstenir,  c'est  à  dire  tem- 
poriser. 

Tant  toutesfoys  dura  ce  turbillon  qu'à  nostre  re- 
queste,  importuné,  le  pilot  essaya  le  rompre  et  sui- 
vre nostre  routte  première.  Defaict,  levant  le  grand 
artemon,  et  à  droitte  calamité  du  boussole  dressant 
le  gouvernail,  rompit,  moyennant  un  rude  cole  sur- 
venant, le  turbillon  susdict.  Mais  ce  feut,  en  pareil 
desconfort,  comme  si,  evitans  Charybde ,  feussions 
tombez  en  Scylle.  Car  à  deux  miles  du  lieu  feurent 
nos  naufs  encarrées  par-my  les  arènes,  telles  que 
sont  les  ratz  Sainct  Mahieu. 


PANTAGRUEL  y3 

Toute  nostre  chorme  grandement  se  contristoit, 
et  force  vent  à  travers  lesmejanes;  mais  frère  Jean 
onques  ne  s'en  donna  melancholie,  ains  consoloit 
maintenant  l'un,  maintenant  l'autre,  par  douces  pa- 
rolles,  leur  remonstrant  que  de  brief  aurions  secours 
du  Ciel ,  et  qu'il  avoit  veu  Castor  sus  le  bout  des 
antennes.  «  Plust  à  Dieu  ,  dist  Panurge  ,  estre  à 
ceste  heure  à  terre,  et  rien  plus,  et  que  chascun  de 
vous  autres,  qui  tant  aimez  la  marine,  eussiez  deux 
cens  mille  escus  :  je  vous  mettrois  un  veau  en  mue, 
et  refraischirois  un  cent  de  fagots  pour  vostre  retour. 
Allez,  je  consens  jamais  ne  me  marier:  faictes  seu- 
lement que  je  sois  mis  en  terre,  et  que  j'aye  cheval 
pour  m'en  retourner,  de  valet  je  me  passeray  bien. 
Je  ne  suis  jamais  si  bien  traité  que  quand  je  suis 
sans  valet.  Plante  jamais  n'en  menoit,  disant  le  nom- 
bre de  nos  croix,  c'est  à  dire  afflictions,  ennuis, 
fascheries,  estre  selon  le  nombre  de  nos  valets,  voire 
fussent-ils  sans  langue,  qui  est  la  partie  plus  dange- 
reuse et  maie  qui  soit  à  un  valet,  et  pour  laquelle 
seule  furent  inventées  les  tortures,  questions  et 
géhennes  sur  les  valets,  ailleurs  non;  combien  que 
les  cotteurs  de  droict,  en  ce  temps,  hors  ce  royaume, 
le  ayent  tiré  à  conséquence  alogique,  c'est  à  dire 
desraisonnable.  » 

En  icelle  heure  vint  vers  nous  droit  aborder  une 
navire  chargée  de  tabourins,  en  laquelle  je  recognu 
quelques  passagers  de  bonne  maison,  entre  autres 
Henry    Cotiral,   compaignon    vieux,   lequel    à    sa 


74 


LIVRE    V,    CHAPITRE    XVIII 


ceinture  un  grand  viet-daze  portoit,  comme  les 
femmes  portent  patenostres ,  et  en  main  senestre 
tenoit  un  gros,  gras,  vieux  et  salle  bonnet  d'un 
taigneux  ;  en  sa  dextre  tenoit  un  gros  trou  de  chou. 
De  prime  face  qu'il  me  recognut,  s'escria  de  joye, 
et  me  dist  :  «  En  aj-je?  Voyez-ci,  monstrant  le 
viet-daze,  le  vray  Algamana  :  cestuy  bonnet  doc- 
toral est  nostre  unique  Elixio;  et  cecy,  monstrant  le 
trou  de  chou,  c'est  Lunaria  major.  Nous  la  ferons 
à  vostre  retour.  —  Mais,  di-je,  d'où  venez  ?  où  allez? 
qu'apportez  ?  avez  senty  la  marine  ?  »  Il  luy  res- 
pond  :  «  De  la  Quinte  ;  en  Touiaine  ;  alchymie  ; 
jusques  au  cul. 

—  Et  quels  gens,  di-je,  avez  là  avec  vous  sus  le 
tillac?  —  Chantres,  respondit-il,  musiciens,  poëtes, 
astrologues,  rimasseurs,  geomantiens,  alchimistes, 
horlogiers;  tous  tiennent  de  la  Quinte,  ils  en  ont 
lettres  d'avertissement  belles  et  amples.  »  Il  n'eut 
achevé  ce  mot,  quand  Panurge,  indigné  et  fasché, 
dist  :  «  Vous  donques  qui  faictes  tout,  jusques  au 
beau  temps  et  petis  enfans,  pourquoy  icy  ne  prenez 
le  cap,  et  sans  delay  en  plain  courant  nous  révo- 
quez ?  —  J'y  allois,  dist  Henry  Coliral  ;  à  ceste 
heure,  à  ce  moment,  présentement  serez  hors  du 
fond.  » 

Lors  feit  deffoncer  7532810  gros  tabourins  d'un 
costé,  cestuy  costé  dressa  vers  le  gaillardet,  et 
estroitement  lièrent  en  tous  les  endroits  les  gume- 
nes,  print  nostre  cap  en  pouppe  et  l'attacha  aux 


PANTAGRUEL 


75 


bitons.  Puis  en  premier  hourt  nous  serpa  des  arènes 
avec  facilité  grande,  et  non  sans  esbattement,  car 
le  son  des  tabourins,  adjoint  le  doux  murmur  du 
gravier  et  le  celeusme  de  la  chorme,  nous  rendoient 
harmonie  peu  moindre  que  celle  des  astres  rotans, 
laquelle  dit  Platon  avoir  par  quelques  nuicts  ouye 
dormant. 

Nous,  abhorrans  d'estre  envers  eux  ingrats  pour 
ce  bienfait  reputez,  leurs  départions  de  nos  an- 
douilles,  amplissions  leurs  tabourins  de  saucisses,  et 
tirions  sur  le  tillac  soixante  et  deux  aires  de  vin, 
quand  deux  grans  physeteres  impétueusement  abor- 
dèrent leur  nauf,  et  leur  jetterent  dedans  plus  d'eau 
que  n'en  contient  la  Vienne  depuis  Chinon  jusques 
à  Saulmur,  et  en  emplirent  tous  leurs  tabourins,  et 
mouillèrent  toutes  leurs  antennes,  et  leurs  baignoient 
les  chausses  par  le  collet. 

Ce  que  voyant  Panurge,  entra  en  joye  tant  exces- 
sifve,  et  tant  exerça  sa  râtelle,  qu'il  en  eut  la  colique 
plus  de  deux  heures.  «  Je  leurvoulois,  dit-il,  donner 
leur  vin,  mais  ils  ont  eu  leur  eau  bien  à  propos.  D'eaue 
douce  ils  n'ont  cure,  et  ne  s'en  servent  qu'à  laveries 
mains.  De  bourach  leur  servira  ceste  belle  eau  sallée, 
de  nitre  et  sel  ammoniac,  en  la  cuisine  de  Geber.  » 

Autre  propos  ne  nous  fut  loisible  avec  eux  tenir, 
le  tourbillon  premier  nous  tollissant  liberté  de 
timon.  Et  nous  pria  le  pilot  que  laississions  d'oren- 
avant  la  mer  nous  guider,  sans  d'autre  chose  nous 
empescher  que  de  faire  chère  lie;  et  pour  l'heure 


yO  LIVRE    V,    CHAPITRE    XVIII 

nous  convenoit  costoyer  cestuy  turbillon  et  obtem- 
pérer au  courant,  si  sans  danger  voulions  au 
royaume  de  la  Qiiinte  parvenir. 

CHAPITRE    XIX 

Comment  nous  arrivasmes  au  Koyaurnc  de  la  Quinte- 
Essence,  nommé  Entclechie. 

YANS  prudemment  coustoyé  le  turbillon 
par  l'espace  d'un  demy  jour,  au  troi- 
sième suivant  nous  sembla  Tair  plus 
serain  que  de  coustume,  et  en  bon 
sauvement  descendismes  au  port  de  Mateotechnie, 
peu  distant  du  palais  de  la  Quinte-Essence.  Des- 
cendans  au  port,  trouvasmes  en  barbe  grand  nombre 
d'archiers  et  gens  de  guerre,  lesquels  gardoient  l'ar- 
senac;  de  prime  arrivée  ils  nous  feisrent  quasi  peur, 
car  ils  nous  feisrent  à  tous  laisser  nos  armes,  et 
roguement  nous  interroguerent,  disant  : 

«  Compères,  de  quels  pais  est  la  venue?  —  Cou- 
sins, respondit  Panurge,  nous  sommes  Touren- 
geaux.  Ores  venons  de  France,  convoiteux  de  faire 
révérence  à  la  Dame  Quinte  Essence,  et  visiter  ce 
trescelebre  royaume  d'Entelechie.  —  Que  dites- 
vous  ?  interroguent-ils.  Dites-vous  Entelechie,  ou 
Endelechie  ?  —  Beaux-cousins,  respondit  Panurge, 
nous  sommes  gens  simples  et  idiots;  excusez  la 
rusticité  de  nostre  langage,  car  au  demourant  les 


PANTAGRUEL  77 

cœurs  sont  francs  et  loyaux.  —  Sans  cause,  dirent- 
ils,  ne  vous  avons  sus  ce  différent  interrogez,  car 
grand  nombre  d'autres  ont  icy  passé  de  vostre  païs 
de  Touraine,  lesquels  nous  sembloient  bons  lour- 
daux,  et  parloient  correct;  mais  d'autre  païs  sont 
icy  venus  ne  sçavons  quels  outrecuidez,  fiers  comme 
Escossois,  qui  contre  nous  à  l'entrée  vouloient  obs- 
tinément contester;  ils  ont  esté  bien  frottez,  quoy 
qu'ils  monstrassent  visaige  rubarbatif. 

«  En  vostre  monde  avez-vous  si  grande  super- 
fluité  de  temps  que  ne  sçavez  en  quoy  l'employer, 
fors  ainsi  de  nostre  Dame  Royne  parler,  disputer 
et  impudentement  escrire?  Il  estoit  bien  besoin  que 
Ciceron  abandonnast  sa  Republique  pour  s'en  em- 
pescher,  et  Diogenes  Laërtius,  et  Theodorus  Gaza, 
et  Argyropile,  et  Bessarion,  et  Politian,  et  Budé, 
et  Lascaris,  et  tous  les  diables  de  sages  fols,  le 
nombre  desquels  n'estoit  assez  grand  s'il  n'eust 
esté  recentement  accreu  par  Scaliger,  Bigot, 
Chambrier,  François  Fleury,  et  ne  sçay  quels 
autres  tels  jeunes  haires  esmouchetez.  Leur  maie 
angine,  qui  leur  suffocast  le  gorgeron  avec  l'epi- 
glotide  !  Nous  les...  —  Mais  quoy  diantre  !  ils 
flattent  les  diables,  disoit  Panurge  entre  les  dents. 
—  Vous  icy  n'estes  venus  pour  en  leur  folie  les 
soustenir,  et  de  ce  n'avez  procuration  :  plus  aussi 
d'iceulx  ne  parlerons. 

«  Aristoteles,  prime  homme  et  paragon  de  toute 
philosophie,  feut  parrain  de  nostre  Dame  Royne  ; 


^8  LIVRE    V,    CHAPITRE    XIX 

il  tresbien  et  proprement  la  nomma  Entelechie. 
Entelechie  est  son  vray  nom;  s'aille  chier  qui  au- 
trement la  nomme  !  Qui  autrement  la  nomme  erre, 
par  tout  le  Ciel  !  Vous  soyez  les  tresbien  venus.  » 
Ils  nous  présentèrent  l'accolade;  nous  en  feusmes 
tous  resjouys. 

Panurge  me  dist  en  l'aureille  :  «  Compaignon, 
as-tu  rien  eu  peur  en  ceste  dernière  boutée  ? 
—  Quelque  peu,  respondy-je.  —  J'en  ay,  dist-il, 
plus  eu  que  jamais  n'eurent  les  soldats  d'Ephraïm 
quand  par  les  Galaadites  feurent  occis  et  noyez 
pour  en  lieu  de  Schibboleth  dire  Sibbolcth.  Et  n'y  a 
homme,  pour  tout  faire,  en  Beauce,  qui  bien  ne 
m'eust  avec  une  charrete  de  foin  estouppé  le  trou 
du  cul.  » 

Depuis  nous  mena  le  capitaine  au  palais  de  la 
Royne  en  silence  et  grandes  cérémonies.  Pantagruel 
luy  vouloit  tenir  quelque  propos,  mais,  ne  pouvant 
monter  si  haut  qu'il  estoit,  souhaitoit  une  eschelle 
ou  des  eschasses  bien  grandes.  Puis  dist  :  «  Baste! 
si  nostre  Dame  la  Royne  vouloit,  nous  serions 
aussi  grans  comme  vous.  Ce  sera  quand  il  luy 
plaira.  » 

Par  les  premières  galleries  rencontrasmes  grand 
tourbe  de  gens  malades,  lesquels  estoient  installez 
diversement,  selon  la  diversité  des  maladies,  les 
ladres  à  part,  les  empoisonnez  en  un  lieu,  les  pes- 
tiferez  ailleurs,  les  verolez  en  premier  rang;  ainsi 
de  tous  autres. 


PANTAGRUEL 


79 


CHAPITRE  XX 

Comment  la  Quinte-Essence  guarissoit  les  maladies 
par  chansons. 

SS  N  la  seconde  gallerie  nous  feut  par  le 
p  capitaine  monstre  la  Dame,  jeune,  et 
si  avoit  dixhuict  cens  ans  pour  le 
Tsrr-.v^  moins,  belle,  délicate,  vestue  gorgia- 
sement,  au  milieu  de  ses  damoiselles  et  gentils- 
hommes. Le  capitaine  nous  dist  :  «  Heure  n'est 
de  parler  à  elle,  soyez  seulement  spectateurs  atten- 
tifs de  ce  qu'elle  faict.  Vous,  en  vostres  royaumes, 
avez  quelques  roys  lesquels  phantastiquement  gua- 
rissent  d'aucunes  maladies,  comme  scrophules,  mal 
sacré,  fiebvres  quartes,  par  seule  apposition  des 
mains.  Geste  nostre  Royne  de  toutes  maladies 
guarist  sans  y  toucher,  seulement  leur  sonnant  une 
chanson  selon  la  competance  du  mal.  »  Puis  nous 
monstra  les  orgues  desquelles  sonnant  faisoit  ces 
admirables  guarisons.  Icelles  estoient  de  façon  bien 
estrange,  car  les  tuyaux  estoient  de  casse  en  canon, 
le  sommier  de  gaiac,  les  marchettes  de  rubarbe,  le 
suppied  de  turbith,  le  clavier  de  scammonie. 

Lors  que  considérions  ceste  admirable  et  nouvelle 
structure  d'orgues,  par  ses  abstracteurs,  spodiza- 
teurs,  massiteres,  pregustes,  tabachins,  chachanins, 
neemanins,  rabrebans,  nercins,  rozuins,  nedibins, 
nearins,  sagamions,  perazons,  chesinins,  sarins,  so- 


8o  LIVRE    V,    CHAPITRE     XX 

trins,  aboth,  enilins,  archasdarpenins,  mebins,  gi- 
borins  et  autres  siens  officiers,  furent  les  lépreux 
introduits.  Elle  leur  sonna  une  chanson,  je  ne  sçay 
quelle  :  soudain  furent  etparfaictement  guaris.  Puis 
feurent  introduits  les  empoisonnez;  elle  leur  sonna 
une  autre  chanson,  et  gens  debout.  Puis  les  aveu- 
gles, les  sourds,  les  muets,  leurs  appliquant  de  mesme. 
Ce  que  nous  espouvanta,  non  à  tort,  et  tombasmes 
en  terre,  nous  prosternans  comme  gens  ecstatiques 
et  ravis  en  contemplation  excessive  et  admiration 
des  vertus  qu'avions  veu  procéder  de  la  Dame,  et 
ne  fut  en  nostre  pouvoir  mot  aucun  dire.  Ainsi 
restions  en  terre ,  quand  elle ,  touchant  Panta- 
gruel d'un  bouquet  de  rose  franche,  lequel  elle 
tenoit  en  main,  nous  restitua  le  sens  et  le  fist  te- 
nir en  pieds.  Puis  nous  dist  en  parolles  byssines, 
telles  que  vouloit  Parysatis  qu'on  proferast  par- 
lant à  Cyrus  son  fils,  ou  pour  le  moins  de  taffetas 
armoisi  : 

«  L'honesteté  scintilante  en  la  circonférence  de 
vos  personnes  jugement  certain  me  fait  de  la  vertu 
latente  au  centre  de  vos  esprits,  et,  voyant  la  sua- 
vité melliflue  de  vos  disertes  Révérences,  facilement 
me  persuade  le  cœur  vostre  ne  patirvice  aucun, 
n'aucune  stérilité  de  sçavoir  libéral  et  hautain,  ains 
abonder  en  plusieurs  peregrines  et  rares  disciplines, 
lesquelles  à  présent  plus  est  facile  par  les  usages 
communs  du  vulgaire  imperit  désirer  que  rencontrer, 
c'est  la  raison  pourquoy  je,  dominante  par  le  passé 


PANTAGRUEL  8l 

à  toute  affection  privée,  maintenant  contenir 
ne  me  peux  vous  dire  mot  trivial  au  monde, 
c'est  que  soyez  les  biens,  les  plus,  les  tresque  bien 
venus. 

—  Je  ne  suis  point  clerc,  me  disoit  secrètement 
Panurge,  respondez  si  voulez.  »  Je  toutesfois  ne 
respondis,  non  fist  Pantagruel,  et  demeurions  en 
silence.  Adonques  dist  la  Royne  : 

«  En  oestre  vostre  taciturnité  congnoy-je  que 
non  seulement  este  issus  de  l'eschole  pythagorique, 
de  laquelle  print  racine  en  successive  propagation 
l'antiquité  de  mes  progeniteurs,  mais  aussi  que  en 
Egypte,  célèbre  officine  de  haute  philosophie, 
mainte  lune  rétrograde,  vos  ongles  mords  avez,  et 
la  teste  d'un  doigt  grattée.  En  l'eschole  de  Pytha- 
goras,  taciturnité  de  congnoissance  estoit  symbole, 
et  silence  des  Egyptiens  recongnu  estoit  en  louange 
deïfique,  et  sacrifioient  les  pontifes  en  Hieropolis 
au  grand  Dieu  en  silence,  sans  bruit  faire  ne  mot 
sonner.  Le  dessein  mien  est  n'entrer  vers  vous  en 
privation  de  gratitude,  ains  par  vive  formalité,  en- 
cores  que  matière  se  voulust  de  moy  abstraire,  vous 
excentriquer  mes  pensées.  » 

Ces  propos  achevez,  dressa  sa  parolle  vers  ses 
officiers,  et  seulement  leur  dist  :  «  Tabachins,  à 
Panacée.  »  Sus  ce  mot  les  tabachins  nous  dirent 
qu'eussions  la  dame  Royne  pour  excusée  si  avec 
elle  ne  disnions,  car  à  son  disner  rien  ne  mangeoit, 
fors  quelcjues  cathegories,,  jecabots,  eminins,  di- 
Rabelais.  V.  i  j 


82  LIVRE    V,    CHAPITRE    XX 

mlons,  abstractions,  harborins,  chelimins,  secondes 
intentions,  caradoth,  antithèses,  metempsichosies, 
transcendentes  prolepsies. 

Puis  nous  menèrent  en  un  petit  cabinet  tout 
contrepointé  d'allarmes;  là  feusmes  traictez  Dieu 
sçait  comment.  On  dict  que  Jupiter  en  la  peau 
diphtere  de  la  chèvre  C|ui  l'allaicta  en  Candie,  de 
laquelle  il  usa  comme  de  pavois  combatans  les  Tita- 
nes, pourtant  est-il  surnommé  Egiuchus,  escrit  tout 
ce  que  l'on  fait  au  monde.  Par  ma  soif,  beuveurs 
mes  amis,  en  dixhuict  peaux  de  chèvres  on  ne  sau- 
roit,  les  bonnes  viandes  qu'on  nous  servit,  les  entre- 
mets et  la  bonne  chère  qu'on  nous  fîst,  descrire, 
voire  fust  ce  en  lettres  aussi  petites  que  dit  Cice- 
ron  avoir  veu  VIliade  d'Homère,  tellement  qu'on 
la  couvroit  d'une  coquille  de  noix.  De  ma  part, 
encores  que  j'eusse  cent  langues,  cent  bouches  et 
la  voix  de  fer,  avec  la  copie  melliflue  de  Platon,  je 
ne  saurois  en  quatre  Uvres  vous  en  exposer  la  tierce 
d'une  seconde.  Et  me  disoit  Pantagruel  que,  selon 
son  imagination,  la  Dame  à  ses  Tabachins  disant  : 
«  à  Panacée  » ,  leur  donnoit  le  mot  symbolique 
entre  eux  de  chère  souveraine,  comme  «  en  Apollo  » 
disoit  Luculle,  quand  festoyer  vouloit  ses  amis  sin- 
gulièrement, encores  qu'on  le  print  à  l'impro- 
viste,  ainsi  que  quelques  fois  faisoient  Ciceron  et 
Hortensius. 


PANTAGRUEL 


83 


CHAPITRE   XXI 


Comment  la  Koyne  passait  temps  après  disner. 

E  disner  parachevé,  fusmes  par  un 
chachanin  menez  en  la  salle  de  la 
Dame,  et  veismes  comment,  selon  sa 
coustume,  après  le  past,  elle,  accom- 
paignée  de  ses  damoiselles  et  princes  de  sa  cour, 
sassoit,  tamisoit,  belutoit  et  passoit  le  tempS 
avec  un  beau  et  grand  sas  de  soye  blanche  et 
bleue. 

Puis   apperceus   que ,  revoquans    l'antiquité    en 
usaige,  ils  jouèrent  ensemble  aux 


Cordace, 

Emmelie, 

Sicinnie, 

Nicatisme, 

Thracie, 

Calabrisme, 

Molossicque, 

Cernophore, 


lambicques, 
Persicque, 
Phrygie, 
Mongas, 
Thermanstrie, 
Florule, 

Pyrricque,  et  mille   au- 
tres danses. 


Depuis,  par  son  commandement,  visitasmes  le 
palais,  et  vismes  choses  tant  nouvelles,  admirables 
et  estranges,  qu'y  pensant  suis  encores  tout  ravy 
en  mon  esprit.  Rien  toutesfois  plus  par  admiration 
ne  subveriit  nos  sens  que   l'exercice   des  gentils- 


84  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXI 

hommes  de  sa  maison,  abstracteurs,  perazons,  ne- 
dibins,  spodizateurs  et  autres,  lesquels  nous  dirent 
franchement,  sans  dissimulation,  que  la  dame  Royne 
faisoit  tout  impossible,  et  guarissoit  les  incurables 
seulement;  eux,  ses  officiers,  faisoientet  guarissoient 
le  reste. 

Là  je  vy  un  jeune  parazon  guarir  les  verolez,  je 
dy  de  la  bien  fine,  comme  vous  diriez  de  Rouen, 
seulement  leur  touchant  le  vertèbre  dentiforme  d'un 
morceau  de  sabot  par  trois  fois. 

Un  autre  je  vy  hydropique  parfaictement  guarir, 
tympanistes,  ascites  et  hyposargues,  leur  frappant 
par  neuf  fois  sur  le  ventre  d'une  bezaguë  Tenedie, 
sans  solution  de  continuité. 

Un  guarissoit  de  toutes  fiebvres  quartes  sur 
l'heure,  seulement  leurs  pendant  à  la  cinture  sus  le 
costé  gauche  une  queue  de  renard  [alopex  est  nommé 
des  Grecs). 

Un  du  mal  des  dents,  seulement  lavant  par  trois 
fois  la  racine  de  la  dent  affligée  avec  vinaigre  su- 
zat,  et  au  soleil  par  demye  heure  la  laissant  dessei- 
cher. 

Un  autre  toute  espèce  de  goutte,  fust  chaude, 
fust  froide,  fust  naturelle,  fust  accidentalle,  seule- 
ment faisant  es  goutteux  clorre  la  bouche  et  ouvrir 
les  yeux. 

Un  autre  je  vy  lequel  en  peu  d'heures  guarist 
neuf  bons  gentils-hommes  antiques  du  mal  Sainct 
François,  les  ostant  de  toutes  debtes^  et  à  chacun 


PANTAGRUEL  85 

d'eux  mettant  une  corde  au  col,  à  laquelle  pendoit 
une  bourse  pleine  de  dix  mille  escus  au  soleil. 

Un  autre  par  engin  mirifique  jettoit  les  maisons 
par  les  fenestres;  ainsi  restoient  emundées  d'air  pes- 
tilent. 

Un  autre  guarissoit  toutes  les  trois  manières  d'he- 
tiques,  atrophes,  tabides,  emaciez,  sans  bains,  sans 
laict  tabian,  sans  dropace,  pication  n'autre  médi- 
cament, seulement  les  rendant  moynes  par  trois 
mois.  Et  nous  affermoit  que,  si  en  estât  monachal 
ils  n'engraissoient,  ne  par  art  ne  par  nature  jamais 
n'engraisseroient. 

Un  autre  vy  accompagné  de  femmes  en  grand 
nombre  par  deux  bandes  :  l'une  estoit  de  jeunes 
fillettes  saffrettes,  tendrettes,  blondelettes,  gra- 
tieuses  et  de  bonne  volonté,  ce  me  sembloit;  l'au- 
tre de  vieilles  edentées,  chassieuses,  riddées,  baza- 
nées,  cadavéreuses.  Là  fut  dit  à  Pantagruel  qu'il 
refondoit  les  vieilles,  les  faisant  ainsi  rejeunir,  et 
telles,  par  son  art,  devenir  qu'estoient  les  fillettes 
là  présentes,  lesquelles  il  avoit  cestuyjourreffondues 
et  entièrement  remises  en  pareille  beauté,  forme, 
élégance,  grandeur  et  composition  des  membres 
comme  estoient  en  l'aage  de  quinze  et  seize  ans, 
excepté  seulement  les  talons,  lesquels  leurs  restent 
trop  plus  courts  que  n'avoyent  en  leur  première 
jeunesse.  Cela  estoit  la  cause  pourquoy  elles  dorén- 
avant à  toutes  rencontres  d'hommes  seront  moult 
subjettes  et  faciles  à  tomber  à  la  renverse. 


86  LIVREV,     CHAPITREXXI 

La  bande  des  vieilles  attendoit  l'autre  fournée  en 
grande  dévotion,  et  l'importunoient  en  toute 
instance,  alleguans  que  chose  est  en  nature  into- 
lérable 

quand  beauté  fault 

A  cul  de  bonne  volonté. 

Et  avoit  en  son  art  pratique  continuelle  et  gain 
plus  que  médiocre.  Pantagruel  interroguoit  si  par 
fonte  pareillement  faisoit  les  hommes  vieux  rejeunir? 
Respondu  luy  fut  que  non,  mais  la  manière  d'ainsi 
rejeunir  estre  par  habitation  avec  femme  refondue, 
car  là  on  prenoit  ceste  quinte  espèce  de  vérole 
nommée  la  Pellade,  en  grec  Ophiasis,  moyennant 
laquelle  on  change  de  poil  et  de  peau,  comme  font 
annuellement  les  serpcns,  et  en  eux  est  jeunesse 
renouvellée,  comme  au  phénix  d'Arabie.  C'est  la 
vraye  fontaine  de  Jouvence.  Là,  soudain,  qui  vieux 
estoit  et  décrépit  devient  jeune,  alaigre  et  dispos, 
comme  dit  Euripides  estre  advenu  à  lolaûs;  comme 
advint  au  beau  Phaon,  tant  aimé  de  Sappho,  par 
le  bénéfice  de  Venus;  à  Tithone,  par  le  moyen 
d'Aurore;  à  Eson ,  par  l'art  de  Medée,  et  à  Jason 
pareillement,  qui,  selon  le  tesmoignage  de  Phere- 
cides  et  de  Simonides,  fut  par  icelle  reteint  et 
rejeuny;  et  comme  dict  Eschylus  estre  advenu  es 
nourrices  du  bon  Bacchus,  et  à  leurs  maris  aussi. 


PANTAGRUEL  87 


CHAPITRE   XXII 

Comment  les  officiers  de  la  Quinte  diversement 
s'exercent^  et  comment  la  Dame  nous  retint  en 
estât  d'abstracteurs. 

^ZÎlnS  E  ^y  api'és  grand  nombre  de  ses  offi- 
^^^  ciers  susdits,  lesquels  blanchissoient 
]i0^  les  Ethiopiens  en  peu  d'heures,  du 
S^  fond   d'un   panier   leur   frottant   seu- 


lement le  ventre; 

Autres  à  trois  couples  de  regnards  souz  un  joug 
aroient  le  rivage  areneux,  et  ne  perdoient  leur  se- 
•  mence; 

Autres  lavoient  les  tuilles,  et  leur  faisoier.t  perdre 
couleur; 

Autres  tiroient  eau  des  pumices,  que  vous  appel- 
iez pierre  ponce,  la  pillant  long  temps  en  un  mor- 
tier de  marbre,  et  luy  changeoient  substance; 

Autres  tondoient.  les  asnes,  et  y  trouvoient  toison 
de  laine  bien  bonne; 

Autres  cueilloient  des  espines  raisins,  et  figues 
des  chardons; 

Autres,tiroient  laict  des  boucs,  et  dedans  un  crible 
le  recevoient,  à  grand  profit  de  mesnage; 

Autres  lavoient  les  testes  des  asnes,  et  n'y  per- 
doient la  laixive  ; 


88  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXII 

Autres  chassoient  aux  vents  avec  des  rets,  et  y 
prenoient  escrevisses  decumanes. 

J'y  vy  un  jeune  spodizateur  lequel  artificiel- 
lement tiroit  des  peds  d'un  asne  mort,  et  en  ven- 
doit  l'aune  cinq  sols; 

Ung  aultre  putrefioit  des  sechaboths.  O  la  belle 
viande  ! 

Mais  Panurge  rendit  vilainement  sa  gorge,  voyant 
un  archasdarpenim  lequel  faisoit  putréfier  grande 
doye  d'urine  humaine  en  fiant  de  cheval,  avec  force 
merde  chrestienne.  Fy,  le  vilain  !  Il  toutesfois  nous 
respondit  que  d'icelle  sacrée  distillation  abreuvoit 
les  roys  et  grans  princes,  et  par  icelle  leur  allon- 
geoit  la  vie  d'une  bonne  toise  ou  deux. 

Autres  rompoient  les  andouilles  au  genoil; 

Autres  escorchoient  les  anguilles  par  la  queue, 
et  ne  crioient  les  dictes  anguilles  avant  que  d'estre 
escorchées,  comme  font  celles  de  Melun; 

Autres  de  néant  faisoient  choses  grandes,  et 
grandes  choses  faisoient  à  néant  retourner; 

Autres  coupoient  le  feu  avec  un  cousteau,  et 
puisoient  l'eau  avec  un  rets; 

Autres  faisoient  de  vessies  lanternes,  et  de  nues 
poisles  d'airain. 

Nous  en  veismes  douze  autres  banquetans  souz 
une  fueillade,  et  beuvans  en  belles  et  amples  retum- 
bes  vins  de  quatre  sortes,  frais  et  délicieux  à  tous, 
et  à  toute  reste,  et  nous  fut  dit  qu'ils  haulsoient  le 
temps   selon   la  manière   du   lieu,    et   qu'en  ceste 


PANTAGRUEL  89 

manière  Hercules  jadis  haulsa  le  temps  avec  Atlas; 

Autres  faisoient  de  nécessité  vertu,  et  me  sem- 
bloit  l'ouvrage  bien  beau  et  à  propos; 

Autres  faisoient  alchimie  avec  les  dens  :  en  ce 
faisant  emplissoient  assez  mal  les  selles  percées; 
avoient  toutesfois  le  bast  advantageux; 

Autres  dedans  un  long  parterre  songneusement 
mesuroient  les  saux  des  pusses,  et  cestuy  acte  m'af- 
fermoient  estre  plus  que  nécessaire  au  gouvernement 
des  royaumes,  conduictes  des  guerres,  administra- 
tions des  republicques,  allegant  que  Socrates, 
lequel  premier  avoit  des  cieux  en  terre  tiré  la  Phi- 
losophie, et  d'oisive  et  curieuse  l'avoit  rendue  utile 
et  profitable,  employoit  la  moitié  de  son  estude  à 
mesurer  le  saux  des  pusses,  comme  atteste  Aristo- 
phanes  le  Quintessential. 

Je  vy  deux  giborins  à  part  sur  le  haut  d'une  tour, 
lesquels  faisoient  sentinelle,  et  nous  fut  dit  qu'ils 
gardoient  la  lune  des  loups. 

J'en  rencontray  quatre  autres  en  un  coin  de  jar- 
din amèrement  disputans  et  prests  à  se  prendre  au 
poil  l'un  l'autre.  Demandant  dont  sourdoit  leur  dif- 
férent, entendy  que  ja  quatre  jours  estoient  passez 
depuis  qu'ils  avoient  commencé  disputer  de  trois 
hautes  et  plus  que  physicales  propositions  à  la  réso- 
lution desquelles  ils  se  promettoient  montaignes 
d'or.  La  première  estoit  de  l'ombre  d'unasne  couil- 
lard,  l'autre  de  la  fumée  d'une  lanterne,  la  tierce  de 
poil  de  chèvre  sçavoir  si  c'estoit  laine.   Puis  nous 


90 


LIVRE    V,    CHAPITRE    XXII 


fut  dit  que  chose  estrange  ne  leur  sembloit  estre 
deux  contradictoires  vrayes  en  mode,  en  forme,  en 
figure  et  en  temps,  chose  pour  lacjuelle  les  sophis- 
tes de  Paris  piustost  se  feroient  desbaptiser  que  la 
confesser. 

Nous  curieusement  considerans  les  admirables 
opérations  de  ces  gens,  survint  la  Dame  avec  sa  no- 
ble compagnie,  ja  reluisans  le  clair  Hesperus.  A  sa 
venue  fusmes  derechef  en  nos  sens  espouventez  et 
esblouys  en  nostre  veue.  Incontinent  nostre  effroy 
apperceut,  et  nous  dist  :  «  Ce  que  fait  les  humains 
pensemens  esgarer  par  les  abismes  d'admiration 
n'est  la  souveraineté  des  effects,  lesquels  apertement 
ils  esprouvent  naistre  des  causes  naturelles,  moyen- 
nant l'industrie  des  sages  artisans  ;  c'est  la  nouveauté 
de  l'expérience  entrant  en  leurs  sens,  non  prevoyans 
la  facilité  de  l'œuvre,  quant  jugement  serain  associe 
estude  diligent.  Pourtant  soyez  en  cerveau,  et  de 
toute  frayeur  vous  despouillez  si  d'aucune  estes 
saisis  à  la  considération  de  ce  que  voyez  par  mes 
officiers  estre  fait.  Voyez,  entendez,  contemplez  à 
vostre  libre  arbitre  tout  ce  que  ma  maison  contient, 
vous  peu  à  peuemancipansdu  servage  d'ignorance. 
Le  cas  bien  me  siet  en  volonté,  pour  de  laquelle 
vous  donner  enseignement  non  feint,  en  contem- 
plation des  studieux  désirs  desquels  me  semblez 
avoir  en  vos  cœurs  fait  insigne  mont-joye  et  suffi- 
sante preuve,  je  vous  retiens  présentement  en  estât 
et  office  de  mes  abstracteurs.  Par  Geber,  mon  pre- 


PANTAGRUEL  91 

mier  labachin,  y  serez  descris  au  partement  de  ce 
lieu.  » 

Nous  la  remerciasmes  humblement  sans  mot  dire, 
acceptasmes  l'offre  du  bel  estât  qu'elle  nous  don- 
noit. 

CHAPITRE  XXIII 

Comment  fut  la  Koyne  à  soupper  servicj  et  comment 
elle  mangeoit. 

\  A  dame,  ces  propos  achevez,  se  re- 
'1  tourna  vers  ses  gentils-hommes,  et 
•leurs  dist  :  «  L'orifice  du  stomach, 
=^^  commun  ambassadeur  pour  ravitaille- 
ment de  tous  membres,  tant  inférieurs  que  supé- 
rieurs, nous  importune  le  leur  restaurer  par  appo- 
sition de  idoines  alimeris  ce  que  leur  est  decheut 
par  action  continue  de  la  naïfve  chaleur  en  l'humi- 
dité radicale.  Spodizateurs,  cesinins,  nemains  et 
perazons,  par  vous  ne  tienne  que  promptement  ne 
soient  tables  dressées,  foisonnantes  de  toute  légi- 
time espèce  de  restaurans.  Vous  aussi,  nobles  pre- 
gustes,  accompagnez  de  mes  gentils  massitéres, 
l'espreuve  de  vostre  industrie  passementée  de  soing 
et  diligence  fait  Cjue  ne  vous  puis  donner  ordre  que 
desordre  ne  sovt  en  vos  offices  et  vous  teniez  tous- 
jours  sur  vos  gardes.  Seulement  vous  ramenter  faut 
ce  que  faictes.  » 


92  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXIII 

Ces  mots  achevez,  se  retira  avec  part  de  ses  da- 
moiselles  quelque  peu  de  temps,  et  nous  fut  dict 
que  c'estoit  pour  soy  baigner,  comme  estoit  la 
coustume  des  anciens,  autant  usitée  comme  est 
entre  nous  de  présent  laver  les  mains  avant  le  past. 
Les  tables  feurent  promptement  dressées,  puis  feu- 
rent  couvertes  de  napes  tresprecieuses.  L'ordre  du 
service  fut  tel  que  la  Dame  ne  mangea  rien  fors 
céleste  anibrosie,  rien  ne  beut  que  nectar  divin. 
Mais  les  seigneurs  et  dames  de  sa  maison  furent,  et 
nous  avec  eux,  serviz  de  viandes  rares,  friandes  et 
précieuses,  si  onques  en  songea  Appicius. 

Sus  l'issue  de  table  fut  apporté  un  pot  pourry,  si 
par  cas  famine  n'eust  donné  tresves;  et  estoit  de 
telle  amplitude  et  grandeur  que  la  plataine  d'or  la- 
quelle Pythius  Bithius  donna  au  roy  Daire  à  peine 
l'eust  couvert.  Le  pot  pourry  estoit  plain  de  pota- 
ges d'espèces  diverses,  sallades,  fricassées,  saulgre- 
nées,  cabirotades,  rousty,  boully,  carbonnades, 
grandes  pièces  de  bœuf  salle,  jambons  de  haulte 
taille,  saulmates  déifiques,  pastisseries,  tarteries,  un 
monde  de  coscotons  à  la  moresque,  formages,  jon- 
cades,  gelées,  fruicts  de  toutes  sortes.  Le  tout  me 
sembloit  bon  et  friand;  je  toutefois  n'y  tastay, 
pour  estre  bien  remply  et  refaict.  Seulement  ay 
vous  advertir  que  là  vy  des  pastez  en  paste,  chose 
assez  rare,  et  les  pastez  en  paste  estoient  pastez  en 
pot.  Au  fond  d'iceluy  j'apperceu  force  dez,  cartes, 
tarots,  luettes,  eschets  et  tabliers,  avec  plaine  tasse 


PANTAGRUEL  98 

d'escuz  au  soleil  pour  ceux  qui  jouer  voudroient. 

Au  dessous  finablement  j'advisay  nombre  de 
mulles  bien  phalerées,  avec  housses  de  velours,  ha- 
quenées  de  mesme  à  usance  d'hommes  et  femmes, 
lictieres  bien  veloutées  pareillement  ne  sçaj  com- 
bien, et  quelques  coches  à  la  Ferraroise  pour  ceux 
qui  voudroient  aller  hors  à  l'esbat. 

Cela  ne  me  sembla  estrange,  mais  je  trouvay 
bien  nouvelle  la  manière  comment  la  Dame  man- 
geoit.  Elle  ne  maschoit  rien,  non  qu'elle  n'eust 
dens  fortes  et  bonnes,  non  que  ses  viandes  ne  re- 
quissent mastication,  mais  tel  estoit  son  usage  et 
coustume.  Les  viandes,  desquelles  ses  pregustes 
avoient  fait  essay,  prenoient  ses  massiteres,  et  no- 
blement les  luy  maschoient,  ayans  le  gosier  doublé 
de  satin  cramoisi,  à  petites  nervures  et  canetilles 
d'or,  et  les  dens  d'ivoire  bel  et  blanc,  moyennent 
lesquelles,  quand  ils  avoient  bien  à  poinct  masché 
les  viandes,  ils  les  luy  couloient  par  un  embut  d'or 
fin  jusques  dedens  l'estomach.  Par  mesme  raison 
nous  fut  dict  qu'elle  ne  fiantoit  sinon  par  procu- 
ration. 


94  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXIV 

CHAPITRE    XXIV 

Comment  fut  en  présence  de  la  Qiiintc  faict  un  bal 
joyeux  en  forme  de  tournay. 

E  soupper  parfait,  fut  en  présence  de 
la  Dame  faict  un  bal  en  mode  de 
tournaj,  digne  non  seulement  d'estre 
regardé,  mais  aussi  de  mémoire  éter- 
nelle. 

Pour  iceluy  commencer  fut  le  pavé  de  la  salle 
couvert  d'une  ample  pièce  de  tapisserie  veloutée, 
faite  en  forme  d'eschicjuier,  savoir  est  à  carreaux, 
moitié  blanc,  moitié  jaulne,  chascun  large  de  trois 
palmes,  et  carré  de  tous  coustez,  quant  en  la  salle 
entrèrent  trente  deux  jeunes  personnages,  desquels 
seize  estoient  vestus  de  drap  d'or,  sçavoir  est  huict 
jeunes  nymphes,  ainsi  que  les  peignoient  les  an- 
ciens en  la  compagnie  de  Diane,  un  roy,  une 
royne,  deux  custodes  de  la  Rocque,  deux  cheva- 
liers et  deux  archiers.  En  semblable  ordre  estoient 
seize  autres  vestus  de  drap  d'argent.  Leur  assiette 
sus  la  tapisserie  fut  telle  :  les  roys  se  tindrent  en  la 
dernière  ligne,  sus  le  quatriesme  carreau,  de  sorte 
que  le  roy  auré  estoit  sus  le  carreau  blanc,  le  roy 
argenté  sus  le  carreau  jaulne;  les  roynes  à  costé 
de  leurs  roys,  la  dorée  sus  le  carreau  jaulne,  l'ar- 
gentée sus  le  carreau  blanc;  deux  archiers  auprès 
de  chascun  costé,  comme  gardes  de  leurs  roys  et 


PANTAGRUEL 


95 


roynes;  auprès  des  archiers  deux  chevaliers;  auprès 
des  chevaliers  deux  custodes;  au  ranc  prochain  de- 
vant eux  estoientles  huict  nymphes.  Entre  les  deux 
bandes  des  nymphes  restoient  vuides  quatre  rancs 
de  carreaux. 

Chascune  bande  avoit  de  sa  part  ses  musiciens 
vestus  de  pareille  livrée,  uns  de  damas  orengé,  au- 
tres de  damas  blanc;  et  estoient  huict  de  chascun 
costé  avec  instrumens  tous  divers,  de  joyeuse  in- 
vention, ensemble  moult  concordans  et  mélodieux 
à  merveilles,  varians  en  tons,  en  temps  et  mesure, 
comme  requeroit  le  progrez  du  bal  :  ce  que  je 
trouvois  admirable,  attendu  la  numereuse  diversité 
de  pas,  de  desmarches,  de  saux,  sursaux,  retours, 
fuites,  embuscades,  retraictes  et  surprinses. 

Encore  plus  transcendoit  opinion  humaine,  ce  me 
sembloit,  que  les  personnages  du  bal  tant  soudain 
entendoient  le  son  qui  competoit  à  leurs  desmarche 
ou  retraicte,  que  plustot  n'avoit  signifié  le  ton  la 
musique  qu'ils  se  poussoient  en  place  designée,  non  - 
obstant  que  leur  procédure  fust  toute  diverse.  Car 
les  nymphes,  qui  sont  en  première  filliere  comme 
prestes  d'exciter  le  combat,  marchent  contre  leurs 
ennemis  droit  en  avant,  en  forme  d'un  carreau  en 
outre,  exceptée  la  première  desmarche,  en  laquelle 
leur  est  libre  passer  deux  carreaux.  Elles  seulles  ja- 
mais ne  reculent.  S'il  advient  qu'une  d'entr'elles 
passe  jusques  à  la  filliere  de  son  roy  ennemy,  elle 
est  couronnée  royne  de  son  roy,  et  prent  et  des- 


96  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXIV 

marche  d'orenavant  en  mesme  privilège  que  la 
royne;  autrement  jamais  ne  ferissent  les  ennemis 
que  en  ligne  diagonale  obliquement,  et  devant 
seulement.  Ne  leur  est  toutesfois,  n'a  autres,  loi- 
sible prendre  aucuns  de  leurs  ennemis,  si  le  pre- 
nant elles  laissoient  leur  roy  descouvert  et  en  prinse. 

Les  roys  marchent  et  prennent  leurs  ennemis  de 
toutes  faces  en  carré,  et  ne  passent  que  de  carreau 
blanc  et  prochain  au  jaune,  et  au  contraire;  excep- 
tez qu'à  la  première  desmarche,  si  leurfilliere  estoit 
trouvée  vuide  d'autres  officiers,  fors  les  custodes, 
ils  le  peuvent  mettre  en  leur  siège,  et  àcostédeluj 
se  retirer. 

Les  roynes  desmarchent  et  prennent  en  plus 
grande  liberté  que  tous  autres,  sçavoir  est  en  tous 
endroits  et  en  toutes  manières,  en  toutes  sortes,  en 
ligne  directe,  tant  loing  que  leur  plaist,  pourveu 
que  ne  soit  des  siens  occupé,  et  diagonale  aussi, 
pourveu  que  soit  en  couleur  de  son  assiette. 

Les  archiers  marchent  tant  en  avant  comme  en 
arrière,  tant  loing  que  prés.  Aussi  jamais  ne  varient 
la  couleur  de  leur  première  assiette. 

Les  chevaliers  marchent  et  prenent  en  forme  li- 
gneare,  passant  un  siège  franc,  encores  qu'il  fust 
occupé  ou  des  siens  ou  des  ennemis,  et  au  second 
soy  posans  à  dextre  ou  à  senestre,  en  variation  de 
couleur,  qui  est  sault  grandement  dommageable  à 
partie  adverse,  et  de  grande  observation.  Car  ils  ne 
prennent  jamais  à  face  ouverte. 


PANTAGRUEL 


97 


Les  custodes  marchent  et  prenent  à  face  tant  à 
dextre  qu'à  senestre,  tant  arrière  que  devant, 
comme  les  rojs,  et  peuvent  tant  loing  marcher 
qu'ils  voudront  en  siège  vuide,  ce  que  ne  font  les 
roys. 

La  loy  commune  es  deux  parties  estoit,  en  fin 
dernière  du  combat,  assiéger  et  clorre  le  roydepart 
adverse  en  manière  qu'évader  ne  peust  de  costé 
quelconque.  Iceluy  ainsi  clos,  fuir  ne  pouvant,  ny 
des  siens  estre  secouru,  cessoit  le  combat  et  per- 
doit  le  roy  assiégé.  Pourdonques  de  cestuy  incon- 
vénient le  guarentir,  il  n'est  celuy  ne  celle  de  sa 
bande  qui  n'y  offre  sa  vie  propre,  et  se  prenent  les 
uns  les  autres  de  tous  endroicts,  advenant  le  son  de 
la  musique.  Quand  aucun  prenoit  un  prisonnier  de 
part  contraire,  luy  faisant  la  reverance,  luy  frappoit 
doucement  en  main  dextre,  le  mettoit  hors  le  par- 
quet et  succedoit  en  sa  place.  S'il  advenoit  qu'un 
des  roys  fust  en  prise,  n'estoit  licite  à  partie  ad- 
verse le  prendre;  ainsi  estoit  fait  rigoreux  com- 
mandement à  celuy  qui  l'avoit  descouvert,  ou  le 
tenoit  en  prise,  luy  faire  profonde  reverance,  et 
l'advertir,  disant  :  «  Dieu  vous  gard'  » ,  afin  que 
de  ses  officiers  fust  secouru  et  couvert,  ou  bien 
qu'il  changeast  de  place,  si  par  malheur  ne  pou- 
voit  estre  secouru.  N'estoit  toutesfoisprins  de  par- 
tie adverse,  mais  salué  le  genoil  gauche  en  terre, 
luy  disant  :  «  Bon  jour.  ))  Là  estoit  fin  du  tournay, 

Rabelais.  V,  ,3 


LIVRE    V,    CHAPITRE    XXV 

CHAPITRE  XXV 

Comment   les  trente  deux  personnages  du  bal 
combatent. 

iNsi  posées  en  leurs  assiettes  les  deux 
f\  compagnies,  les  musiciens  commen- 
cent ensemble  sonner  en  intonation 
martiale,  assez  espouventablement, 
comme  à  l'assault.  Là  voyons  les  deux  bandes  fré- 
mir, et  soy  affermer  pour  bien  combatre,  venant 
l'heure  du  hourt,  qu'ils  seront  évoquez  hors  leur 
camp.  Quand  soudain  les  musiciens  de  la  bande 
argentée  cessèrent,  seulement  sonnoient  les  or- 
ganes de  la  bande  aurée,  en  quoy  nous  estoit 
signifié  que  la  bande  aurée  assailloit.  Ce  que  bien 
tost  advint,  car  à  un  ton  nouveau  veismes  que  la 
nymphe  parquée  devant  la  royne  fist  un  tour  entier 
à  gausche  vers  son  roy,  comme  demandant  congé 
d'entrer  en  combat,  ensemble  aussi  saluant  toute  sa 
compagnie.  Puis  desmarcha  deux  carreaux  avant 
en  bonne  modestie,  et  fist  d'un  pied  révérence 
à  la  bande  adverse,  laquelle  elle  assailloit.  Là  cessè- 
rent lesmusiciens  aurez,  commencerentlesargentez. 
Icy  n'est  à  passer  en  silence  que  la  nymphe, 
avoir  en  tour  salué  son  roy  et  sa  compagnie,  afin 
qu'eux  ne  restassent  ocieux,  pareillement  la  resa- 
luerent  en  tour  entier  gyrans  à  gausche,  exceptée 
la  royne,  laquelle  vers  son  roy  se  destourna  à  dex- 


PANTAGRUEL  99 

tre,  et  fut  ceste  salutation  de  tous  desmarchans 
observée  en  tout  le  discours  du  bal,  le  ressaluement 
aussi,  tant  d'une  bande  comme  de  l'autre. 

Au  son  des  musiciens  argentez  desmarcha  la 
nymphe  argentée,  laquelle  estoit  parcjuée  devant  sa 
royne,  son  roy  saluant  gratieusement,  et  toute  sa 
compagnie,  eux  de  mesme  la  resaluans,  comme  a 
esté  dict  des  aurées,  excepté  qu'ils  tournoient  à 
dextre  et  leur  royne  à  senestre;  se  posa  sus  le  se- 
cond carreau  avant,  et,  faisant  révérence  à  son  ad- 
versaire, se  tint  en  face  de  la  première  nymphe 
aurée,  sans  distance  aucune,  comme  preste  à  com- 
batre,  ne  fust  qu'elles  ne  frappent  que  des  costez. 
Leurs  compagnes  les  suyvent,  tant  aurées  comme 
argentées,  en  figure  intercalaire,  et  là  font  comme 
apparence  de  escarmoucher,  tant  que  la  nymphe 
aurée,  laquelle  estoit  première  en  camp  entrée, 
frappant  en  main  une  nymphe  argentée  à  gausche, 
la  mist  hors  du  camp  et  occupa  son  lieu.  Mais  bien 
tost,  à  son  nouveau  des  musiciens,  fut  de  mesme 
frappée  par  l'archer  argenté;  une  nymphe  aurée  le 
fist  ailleurs  serrer;  le  chevalier  argenté  sortit  en 
camp  ;  la  royne  aurée  se  parqua  devant  son  roy. 

Adonc  le  roy  argenté  change  place,  doutant  la 
furie  de  la  royne  aurée,  et  se  tira  au  lieu  de  son 
custode  à  dextre,  lequel  lieu  sembloit  tresbienmuny 
et  en  bonne  défense. 

Les  deux  chevaliers  qui  tenoient  à  gausche,  tant 
aurez  qu'argentez,    desmarchent    et    font    amples 


lOO  LIVRE   V,    CHAPITRE    XXV 

prinses  des  nymphes  adverses,  lesquelles  ne  pou- 
voient  arrière  soy  retirer,  mesmement  le  chevalier 
auré,  lequel  met  toute  sa  cure  à  prinse  de  nymphes. 
Mais  le  chevalier  argenté  pense  chose  plus  impor- 
tante, dissimulant  son  entreprinse,  et,  quelquefois 
qu'il  a  peu  prendre  une  nymphe  aurée,  il  la  laisse 
et  passe  outre,  et  a  tant  faict  qu'il  s'est  posé  prés 
ses  ennemis,  en  lieu  auquel  il  a  salué  le  roy  advers, 
et  dit  :  «  Dieu  vous  gard'.  »  La  bande  aurée, 
ayant  cestuy  advertissement  de  secourir  son  roy, 
fremist  toute,  non  que  facilement  elle  ne  puisse  au 
roy  secours  soudain  donner,  mais  que,  leur  roysaul- 
vant,  ils  perdoient  leur  custode  dextre,  sans  y  pou- 
voir remédier.  Adonques  se  retira  le  roy  auré  à 
gausche,  et  le  chevalier  argenté  print  le  custode 
auré,  ce  que  leur  fut  en  grande  perte.  Toulesfois 
la  bande  aurée  délibère  de  s'en  venger,  et  l'envi- 
ronnent de  tous  costez,  à  ce  que  reffuir  il  ne  puisse 
ny  eschapper  de  leurs  mains;  il  faict  mille  efforts 
de  sortir,  les  siens  font  mille  ruses  pour  le  garen- 
tir,  mais  en  fin  la  royne  aurée  le  print. 

La  bande  aurée^  privée  d'un  de  ses  supposts,  s'es- 
vertue,  et  à  tors  et  à  travers  cherche  moyen  de  soy 
venger,  assez  incautement,  et  fait  beaucoup  de  dom- 
mage parmy  l'ost  des  ennemis.  La  bande  argentée 
dissimule  et  attend  l'heure  de  revanche,  et-presente 
une  de  ses  nymphes  à  la  royne  aurée,  luy  ayant 
dressé  une  embuscade  secrète,  tant  qu'à  la  prinse 
de  la  nymphe  peu  s'en  faillit  que  l'archer  auré  ne 


PANTAGRUEL  lOI 

surprint  la  royne  argentée.  Le  chevalier  auré  in- 
tente prinse  de  roy  et  royne  argentée,  et  dit  : 
«  Bon  jour.  »  L'archer  argenté  les  salue;  il  fut 
prins  par  une  nymphe  aurée  ;  icelle  fut  prinse  par 
une  nymphe  argentée.  La  bataille  est  aspre.  Les 
custodes  sortent  hors  de  leurs  sièges  au  secours; 
tout  est  en  meslée  dangereuse  ;  Enyo  encores  ne 
se  déclare. 

Aucunefois  tous  les  argentez  enfoncent  jusques 
à  la  tente  du  roy  auré,  soudain  sont  repoussez. 
Entre  autres  la  royne  aurée  fait  grandes  prouesses, 
et  d'une  venue  prent  l'archer,  et  costoyant  prent 
le  custode  argenté.  Ce  que  voyant,  la  royne  ar- 
gentée se  met  en  avant  et  foudroyé  de  pareille 
hardiesse,  et  prent  le  dernier  custode  auré  et  quel- 
ques nymphes  pareillement. 

Les  deux  roynes  combatirent  longuement,  part 
taschant  de  s'entresurprendre,  part  pour  soy  sau- 
ver et  leurs  roys  contregarder.  Finalement  la 
royne  aurée  prit  l'argentée,  mais  soudain  après 
elle  fut  prinse  par  l'archer  argenté.  Là  seule- 
ment au  roy  auré  restèrent  trois  nymphes,  un  archer 
et  un  custode.  A  l'argenté  restoient  trois  nym- 
phes et  le  chevalier  dextre,  ce  que  fut  cause 
qu'au  reste  plus  cautement  et  lentement  ils  com- 
batirent. 

Les  deux  roys  sembloient  dolens  d'avoir  perdu 
leurs  dames  roynes  tant  aimées,  et  est  tout  leur  es- 
tude  et  tout  leur  effort  d'en  recevoir  d'autres,  s'ils 


I02  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXV 

peuvent,  de  tout  le  nombre  de  leurs  nymphes,  à 
ceste  dignité  et  nouveau  mariage,  les  aimer  joyeu- 
sement, avec  promesses  certaines  d'y  estre  re- 
ceues  si  elles  pénètrent  jusques  à  la  dernière  filliere 
du  roy  ennemy.  Les  aurées  anticipent,  et  d'elles 
est  créé  une  royne  nouvelle,  à  laquelle  on  impose 
une  couronne  en  chef,  et  baille  l'on  nouveaux  ac- 
coustremens. 

Les  argentées  suyvent  de  mesme,  et  plus  n'estoit 
qu'une  ligne  que  d'elles  ne  feust  royne  nouvelle 
créée  ;  mais  en  cestuy  endroit  le  custode  auré  la 
guettoit;  pourtant  elle  s'arresta  quoy. 

La  nouvelle  royne  aurée  voulut,  à  son  advenement, 
forte,  vaillante  et  belliqueuse  se  monstrer.  Fist 
grans  faicts  d'armes  parmy  le  camp.  Mais  en  ces 
entrefaictes  le  chevalier  argenté  print  le  custode 
auré,  lequel  gardoit  la  metedu  camp  ;  par  ce  moyen 
fut  faicte  nouvelle  royne  argentée,  laquelle  se  vou- 
lut semblablement  vertueuse  monstrer  à  son  nouveau 
advenement. 

Fut  le  combat  renouvelle  plus  ardent  que  devant. 
Mille  ruses,  mille  assaulx,  mille  desmarches  furent 
faictes,  tant  d'un  costé  que  d'autre,  si  bien  que  la 
royne  argentée  clandestinement  entra  en  la  tente 
du  roy  auré,  disant  :  «  Dieu  vous  gard'  »,  et  ne 
peust  estre  secouru  que  par  sa  nouvelle  royne. 
Icelle  ne  fist  difficulté  de  soy  opposer  pour  le  sau- 
ver. Adonques  le  chevalier  argenté,  voltigeant  de 
tous  costez,  se  rendoit  prés  sa  royne,  et  misrent  le 


PANTAGRUEL  Io3 

roy  auré  en  teldesarroy  que  pour  son  salut  luy  con- 
vint perdre  sa  royne.  Mais  le  roy  auré  print  le  che- 
valier argenté.  Ce  nonobstant  l'archer  auré,  avec 
deux  nymphes  qui  restoient,  à  toutes  leurs  puis- 
sances defendoient  leur  roy;  mais  en  fin  tous  fu- 
rent prins  et  mis  hors  le  camp,  et  demoura  le  roy 
auré  seul. 

Lors  de  toute  la  bande  argentée  luy  fut  dit  en 
profonde  révérence  :  «  Bon  jour  »,  comme  restant 
le  roy  argenté  vainqueur.  A  laquelle  parolle  les 
deux  compagnies  de  musiciens  commencèrent  en- 
semble sonner,  comme  victoire.  Et  print  fin  ce 
premier  bal  en  tant  grande  allégresse^  gestes  tant 
plaisans,  maintien  tant  honneste,  grâces  tant  rares, 
que  nous  fusmes  tous  en  nos  esprits  rians  comme 
gens  ecstatiques,  et  non  à  tord  nous  sembloit  que 
nous  fussions  transportez  es  souveraines  délices  et 
dernière  félicité  du  ciel  Olimpe. 

Fini  le  premier  tournay,  retournèrent  les  deux 
bandes  en  leur  assiette  première,  et,  comme  avoient 
combatu  paravant,  ainsi  commencèrent  à  combatre 
pour  la  seconde  fois,  excepté  que  la  musique  fut 
en  sa  mesure  serrée  d'un  demy  temps  plus  que  la 
précédente,  les  progrez  aussi  totalement  difîerens 
du  premier. 

Là  je  vy  que  la  royne  aurée,  comme  despitée  de 
la  route  de  son  armée,  fut  par  l'intonation  de  la 
musique  évoquée,  et  se  mist  des  premières  en  camp 
avec  un  archer  et  un  chevalier,  et  peu   s'en  faillit 


104  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXV 

qu'elle  ne  surprint  le  roy  argenté  en  sa  tente  au 
millieu  de  ses  officiers.  Depuis,  voyant  son  entre- 
prinse  descouverte,  s'escarmoucha  parmy  latrouppe, 
et  tant  desconfit  de  nymphes  argentées  et  autres 
officiers  que  c'estoit  cas  pitoiable  les  voir.  Vous 
eussiez  dit  que  ce  fut  une  autre  Panthasilée  Ama- 
zone foudroyante  par  le  camp  des  Grégeois  ;  mais 
peu  dura  cestuy  esclandre,  car  les  argentées,  fre- 
missans  à  la  perte  de  leurs  gens,  dissimulans  tou- 
tefois leur  dueil,  luy  dressèrent  occultement  en 
embuscade  un  archer  en  angle  lointain  et  un  che- 
valier errant,  par  lesquels  elle  fut  prinse  et  mise 
hors  le  camp.  Le  reste  fut  bien  tost  deffait.  Elle 
sera  une  autre  fois  mieux  advisée,  prés  de  son  roy 
se  tiendra,  tant  loin  ne  s'escartera,  et  ira  quand 
aller  faudra,  bien  autrement  accompagnée.  Là 
doncques  restèrent  les  argentez  vainqueurs,  comme 
devant. 

Pour  le  tiers  et  dernier  bal  se  tindrent  en  pieds 
les  deux  bandes,  comme  devant,  et  me  semblèrent 
porter  visage  plus  gay  et  délibéré  qu'es  deux  pre- 
cedens.  Et  fut  la  musique  serrée  en  la  mesure  plus 
que  de  hemiole,  en  intonation  phrygienne  et  belli- 
que,  comme  celle  qu'inventa  jadis  Marsyas.  Adon- 
ques  commencèrent  tournoyer  et  entrer  en  combat, 
avec  telle  légèreté  qu'en  un  temps  de  la  musique 
ils  faisoient  quatre  desmarches,  avec  les  révérences 
de  tours  competans,  comme  avons  dit  dessus,  de 
mode    que  ce    n'estoient  que  saux ,  gambades    et 


PANTAGRUEL  Io3 

voltigemenspetauristiques  entrelassez  les  uns  parmy 
les  autres.  Et,  les  voyans  sus  un  pied  tournoyer 
après  la  révérence  faite,  les  comparions  au  mouve- 
ment d'une  rhombe  girante  au  jeu  des  petis  en- 
fans,  moyennant  les  coups  de  fouet,  lors  que  tant 
subit  est  son  tour  que  son  mouvement  est  repos, 
elle  semble  quiète,  non  soy  mouvoir,  ains  dormir, 
comme  ils  le  nomment.  Et  y  figurant  un  point  de 
quelque  couleur,  semble  à  nostre  veue  non  point 
estre,  mais  ligne  continue,  comme  sagement  Ta  noté 
Cusane,  en  matière  bien  divine. 

Là  nous  n'oyons  que  frappemens  de  mains,  et 
episemasies  à  tous  destroits  réitérez,  tant  d'une 
bande  que  d'autre.  Il  ne  fut  onques  tant  severe 
Caton,  ne  Crassus  l'ayeul  tant  agelaste,  ne  Timon 
Athénien  tant  misanthrope,  ne  Heraclitus  tant  ab- 
horrant du  propre  humain  qui  est  rire,  qui  n'eust 
perdu  contenance,  voyant  au  son  de  la  musique 
tant  soudaine,  en  cinq  cens  diversitez,  si  soudain 
se  mouvoir,  desmarcher,  sauter,  voltiger,  gamba- 
der, tournoyer  ces  jouvenceaux  avecq'  les  roynes 
et  nymphes,  en  telle  dextérité  qu'onques  l'un  ne 
fist  empeschement  à  l'autre. 

Tant  moindre  estoit  le  nombre  de  ceulx  qui  res- 
toient  en  camp,  tant  estoit  le  plaisir  plus  grand, 
veoir  les  ruses  et  destours  desquels  ils  usoient  pour 
surprendre  l'un  l'autre,  selon  que  par  la  musique 
leur  estoit  signifié.  Plus  vousdiray  :  si  ce  spectacle 
plus  qu'humain  nous  rendoit  confus  en  nos  sens, 

14 


I06  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXV 

estonnez  en  nos  esprits  et  hors  de  nous  mesmes, 
encores  plus  sentions  nous  nos  cœurs  esmeus  et  ef- 
frayez à  l'intonation  de  la  musique;  et  croyrois  fa- 
cilement que  par  telle  modulation  Ismenias  excita 
Alexandre  le  Grand,  estant  à  table  et  disnant  en 
repos,  à  soy  lever  et  armes  prendre.  Au  tiers  tour- 
nay  fut  le  roy  auré  vainqueur. 

Durant  lesquelles  dances  la  Dame  invisiblement 
disparut,  et  plus  ne  la  vismes.  Bien  fusmes  menez 
par  les  Michelots  de  Geber,  et  là  fusmes  inscripts 
en  Testât  par  elle  ordonné.  Puis,  descendans  au 
port  de  Mateotechnie,  entrasmes  en  nos  navires, 
entendans  qu'avions  vent  en  pouppe,  lequel  si  re- 
fusions sur  l'heure,  à  peine  pourroit  estre  recou- 
vert de  trois  quartiers  brisans. 

CHAPITRE    XXVI 

Comment  nous  descendismes  en  l'Isle  d'Odes,  en 
laquelle  les  chenùns  cheminent. 

VOIR  par  deux  jours  navigé,  s'offrit  à 
nostre  veue  l'Isle  d'Odes,  en  laquelle 
vismes  une  chose  mémorable.  Les  che- 
mins y  sont  animaux,  si  vraye  est  la 
sentence  d'Aristoteles  disant  argument  invincible 
d'un  animant  si  se  meut  de  soy  mesme.  Car  les 
chemins  cheminent  comme  animaux,  et  sont  les 
uns  chemins  errans,  à   la  semblance  des  planètes  ; 


PANTAGRUEL 


7 


autres  chemins  passans,  chemins  croisans,  chemins 
traversans.  Et  vy  que  les  voyagiers  souvent  es  ha- 
bitans  du  pays  demandoient  :  «  Où  va  ce  chemin? 
et  cestuy-cy?  »  On  leurrespondoit  :  «  Entre  Midy 
et  Fevrolles,  à  la  paroisse,  à  la  ville,  à  la  rivière.  » 
Puis,  se  guidans  au  chemin  oportun  sans  autre- 
ment se  peiner  ou  fatiguer,  se  trouvoient  au  lieu 
destiné,  comme  vous  voyez  advenir  à  ceux  qui  de^ 
Lyon  en  Avignon  et  Arles  se  mettent  en  basieau 
sur  le  Rosne;  et  comme  vous  savez  qu'en  toutes 
choses  il  y  a  de  la  faute,  et  rien  n'est  en  tous  en- 
droits heureux,  aussi  là  nous  fut  dict  estre  une  ma- 
nière de  ^ens  lesquels  ils  nommoient  Guetteurs  de 
chemins  et  Batteurs  de  pavez,  et  les  pauvres  che- 
mins les  craignoient  et  s'esloignoient  d'eux  comme 
des  brigans.  Ils  les  guettoient  au  passage  comme 
on  fait  les  loups  à  la  traînée  et  les  bécasses  au  fillet. 
Je  vy  un  d'iceux  lequel  estoit  appréhendé  de  la 
justice,  pource  qu'il  avoit  prins  injustement,  mal- 
gré Pallas,  le  chemin  de  l'escole  :  c'estoit  le  plus 
long;  un  autre  se  ventoit  avoir  prins  de  bonne 
guerre  le  plus  court,  disant  luy  estre  tel  advantage 
à  ceste  rencontre  que  premier  venoit  à  bout  de  son 
entreprinse. 

Aussi  dist  Carpalim  à  Epistemon ,  quelque  jour 
le  rencontrant  sa  pissotière  au  poing,  contre  une 
muraille  pissant,  que  plus  ne  s'esbahissoit  si  tous- 
jours  premier  estoit  au  lever  du  bon  Pantagruel, 
car  il  tenoit  le  plus  court  et  le  moins  chevauchant. 


Io8  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXVI 

Je  y  recongnu  le  grand  chemin  de  Bourges,  et 
le  vy  marcher  à  pas  d'abbé,  et  le  vy  aussi  fuir  à  la 
venue  de  quelques  charretiers  qui  le  menassoient 
fouller  avec  les  pieds  de  leurs  chevaux  et  luy  faire 
passer  les  charrettes  dessus  le  ventre,  comme  Tullia 
fist  passer  son  charriot  dessus  le  ventre  de  son  père 
Servius  Tullius,  sixiesme  roy  des  Romains. 

Je  y  recongnu  pareillement  le  vieu  quemin  de 
Peronne  à  Sainct  Quentin,  et  me  sembloit  quemin 
de  bien  de  sa  personne. 

Je  y  recongnu  entre  les  rochers  le  bon  vieulx 
chemin  de  la  Ferrate  sus  le  mont  d'un  grand  Ours. 
Le  voyant  de  loin,  me  souvint  de  Sainct  Hierosme 
en  peinture,  si  son  ours  eust  esté  lyon,  car  il  estoit 
tout  mortifié,  avoit  la  longue  barbe  toute  blanche  et 
mal  peignée  :vouseussiez  proprementdit  que  fussent 
glassons;  avoit  sur  soy  force  grosses  patenostres  de 
pinaslre  mal  rabottées,  et  estoit  comme  à  genoil- 
lons,  et  non  debouf  ne  couché  du  tout,  et  se  bat- 
toit  la  poitrine  avec  grosses  et  rudes  pierres.  Il  nous 
fîst  peur  et  pitié  ensemble.  Le  regardant,  nous  tira 
à  part  un  bachelier  courant  du  pais,  et,  monstrant 
un  chemin  bien  licé,  tout  blanc  et  quelque  peu 
feustré  de  paille,  nous  dist  :  «  Dorénavant  ne  des- 
prisez l'opinion  de  Thaïes  Milesien,  disant  l'eau 
estre  de  toutes  choses  le  commencement;  ne  la  sen- 
tence d'Homcrc,  affermant  toutes  choses  prendre 
naissance  de  l'Océan.  Ce  chemin  que  voyez nasquit 
d'eau,  et  s'y  en  retournera  ;  devant  deux  mois  les 


PANTAGRUEL  IO9 

basteaux  par-cy  passoient,  à  ceste  heure  y  passent 
les  charrettes.  —  Vrayement,  dist  Pantagruel,  vous 
nous  la  baillez  bien  piteuse!  En  nostre  monde  nous 
en  voyons  tous  les  ans  de  pareille  transformation 
cinq  cens  et  davantage.  y> 

Puis,  considerans  les  alleures  de  ces  chemins 
mouvans,  nous  dist  que,  selon  son  jugement.  Phi- 
lolaùs  et  Aristarchus  avoient  en  icelle  isle  philoso- 
phé, Seleucus  prins  opinion  d'affermer  la  terre  vé- 
ritablement autour  des  pôles  se  mouvoir,  non  le 
ciel,  encores  qu'il  nous  semble  le  contraire  estre 
vérité,  comme,  estans  sur  la  rivière  de  Loire, 
nous  semblent  les  arbres  prochains  se  mouvoir,  tou- 
tesfois  ils  ne  se  mouvent,  mais  nous  par  le  decours 
du  batteau.  Retournans  à  nos  navires,  vismes  que 
prés  le  rivage  on  mettoit  sus  la  roue  trois  guetteurs 
de  chemins  qui  avoient  esté  prins  en  embuscade,  et 
brusloit  à  petit  feu  un  grand  paillard,  lequel  avoit 
battu  un  chemin  et  luy  avoit  rompu  une  coste,  et 
nous  fut  dict  que  c'estoit  le  chemin  des  aggeres  et 
levées  du  Nil  en  Egypte. 


IIO  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXVII 


CHAPITRE  XXVII 

Comment  passasmes  Vlsle  des  Esclots^  et  de  l'Ordre 
des  frères  Fredons. 

^EPUis  passasmes  l'Isle  des  Esclots,  les- 
quels ne  vivent  que  de  souppes  de 
merlus;  fusmes  toutesfois  bien  recuil- 
#^^^£i^.lis  et  traitez  du  roy  de  l'Isle,  nommé 
Benius,  tiers  de  ce  nom,  lequel  après  boire  nous 
mena  voir  un  monastère  nouveau,  fait,  érigé  et 
basty  par  son  invention  pour  les  frères  Fredons  : 
ainsi  nommoit-il  ses  religieux,  disant  qu'en  terre 
ferme  habitoient  les  frères  petits  serviteurs  et  amis 
de  la  douce  Dame,  item  les  glorieux  et  beaux  frè- 
res mineurs,  qui  sont  semi-briefs  de  bulles,  les  frè- 
res minimes  haraniers  enfumez,  aussi  les  frères  mi- 
nimes crochus,  et  que  du  nom  plus  diminuer  ne 
pouvoit  qu'en  fredons.  Par  les  statuts  et  bulle  pa- 
tente obtenue  de  la  Quinte,  laquelle  est  de  tous 
bons  accords,  ils  estoient  tous  habillez  en  brusleurs 
de  maisons,  excepté  qu'ainsi  que  les  couvreurs  de 
maisons  en  Anjou  ont  les  genoux  contrepointez, 
ainsi  avoient-ils  les  ventres  carrelez,  et  estoient  les 
carreleurs  de  ventre  en  grande  réputation  parmy 
eux. 

Ils  avoient  la  braguette  de  leurs  chausses  à  forme 
de  pantoufle,  et  en  portoient  chascun  deux,  l'une 
devant  et  l'autre  derrière    cousue,    affermans  par 


PANTAGRUEL  III 

ceste  duplicité  braguatine  quelques  abscons  et  hor- 
rifiques  misteres  estre  duement  représentez.  Ils 
portoient  souliers  ronds  comme  bassins,  à  l'imita- 
tion de  ceux  qui  habitent  la  mer  areneuse;  du  de- 
mourant  avoient  barbe  rase  et  pieds  ferrats.  Et, 
pour  monstrer  que  de  fortune  ils  ne  se  soucient,  il 
les  faisoit  raire  et  plumer  comme  cochons  la  partie 
postérieure  de  la  teste,  depuis  le  sommet  jusques 
aux  omoplates.  Les  cheveux  en  devant  depuis  les 
os  bregmatiques  croissoient  en  liberté.  Ainsi  con- 
trefortunoient  comme  gens  aucunement  ne  se  sou- 
cians  des  biens  qui  sont  au  monde.  Deffians  davan- 
tage Fortune  la  diverse,  portoient,  non  en  main 
comme  elle,  mais  à  la  ceincture,  en  guise  de  pate- 
nostres,  chascun  un  rasouer  tranchant,  lequel  ils 
esmouloient  deux  fois  le  jour  et  afhloient  trois  fois 
de  nuict. 

Dessus  les  pieds  chascun  portoit  une  boulle  ronde, 
parce  qu'est  dict  Fortune  en  avoir  une  soubs  ses 
pieds.  Le  cahuet  de  leurs  scaputions  estoit  devant 
attaché,  non  derrière;  en  ceste  façon  avoient  le  vi- 
saige  caché,  et  se  moquoient  en  liberté  tant  de 
Fortune  comme  des  fortunez,  ne  plus  ne  moins 
que  font  nos  damoiselles  quand  c'est  qu'elles  ont 
leur  cachelaid,  que  vous  nommez  touret  de  nez; 
les  anciens  le  nomment  chareté,  parce  qu'il  couvre 
en  elles  de  péchez  grande  multitude. 

Avoient  aussi  tousjours  patente  la  partie  posté- 
rieure de  la  teste,  comme  nous  avons  le  visaige; 


112  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXVII 

cela  estoit  cause  qu'ils  alloientde  ventre  ou  de  cul, 
comme  bon  leur  sembloit.  S'ils  alloient  de  cul,  vous 
eussiez  estimez  estre  leur  alleure  naturelle,  tant  à 
cause  des  souliers  ronds  que  de  la  braguette  pré- 
cédente; la  face  aussi  derrière  rase  et  peinte  rude- 
ment, avec  deux  yeux,  une  bouche,  comme  vous 
voyez  es  nois  indiques.  S'ils  alloient  de  ventre, 
vous  eussiez  pensé  que  fussent  gensjouans  au  cha- 
pifou.  C'estoit  belle  chose  de  les  voir. 

Leur  manière  de  vivre  estoit  telle.  Le  clair  Lu- 
cifer commençant  apparoistre  sus  terre,  ils  s'entre- 
bottoient  et  esperonnoient  l'un  l'autre  par  charité. 
Ainsi  bottez  et  esperonnezdormoient,  ou  ronfloient 
pour  le  moins,  et  dormans  avoient  beziclesau  nez, 
ou  lunettes  pour  pire. 

Nous  trouvions  ceste  façon  de  faire  estrange, 
mais  ils  nous  contentèrent  en  la  response,  nous 
remonstrans  que,  le  jugement  final  lors  que  seroit, 
les  humains  prendroient  repos  et  sommeil.  Pour 
donques  evidentement  monstrer  qu'ils  ne  refîusoient 
y  comparoistre,  ce  que  font  les  fortunez,  ils  se  te- 
noient  bottez,  esperonnez  et  prests  à  monter  à 
cheval  quand  la  trompette  sonneroit. 

Midy  sonnant,  notez  que  leurs  cloches  estoient, 
tant  de  l'horloge  que  du  batail  de  l'église  et  refec- 
touer,  faictes  selon  la  divise  pontiale,  savoir  est 
de  fin  dumet  contrepointé,  et  le  batail  estoit  d'une 
queue  de  renard;  midy  donques  sonnant,  ils  s'es- 
veilloient  et  desbottoient,  pissoient  qui  vouloir,  et 


PANTAGRUEL  Il3 

esmeutissoient  qui  vouloit,  esternuoient  qui  vou- 
loit.  Mais  tous,  par  contrainte,  statut  rigoureux, 
amplement  et  copieusement  baisloient,  se  desjeu- 
noient  de  baisler.  Le  spectacle  me  sembloit  plai- 
sant; car,  leurs  bottes  et  espérons  mis  sus  un  ras- 
telier,  ils  descendoient  aux  cloistres,  là  se  lavoient 
curieusement  les  mains  et  la  bouche,  puis  s'asseoient 
sus  une  longue  selle,  et  se  curoient  les  dens  jus- 
ques  à  ce  que  le  prevost  fist  signe,  sifflant  en 
paume;  lors  chascun  ouvroit  la  gueule  tant  qu'il 
pouYoit,  et  baailloient  aucunefois  demie  heure, 
aucunefois  plus,  aucunefois  moins,  selon  que  le 
prieur  jugeoit  le  desjuner  estre  proportionné  à  la 
feste  du  jour;  après  cela  faisoient  une  belle  pro- 
cession en  laquelle  ils  portoient  deux  bannières,  en 
l'une  desquelles  estoit  en  belle  peinture  le  pourtrait 
de  Vertu,  en  l'autre  de  Fortune.  Un  Fredon  pre- 
mier portoit  la  bannière  de  Fortune,  après  luy 
marchoit  un  autre  portant  celle  de  Vertu,  en  main 
tenant  un  aspersoir  mouillé  en  eau  mercuriale, 
descrite  par  Ovide  en  ses  Fastes,  duquel  continuelle- 
ment il  comme  sonettoit  [fouettoit?]  le  précèdent 
Fredon  portant  Fortune. 

«  Cest  ordre,  dist  Panurge,  est  contre  la  sen- 
tence de  Ciceron  et  des  Académiques,  lesquels  veu- 
lent Vertu  précéder,  non  suyvre  Fortune.  »  Nous 
fut  toutesfois  rernonstré  qu'ainsi  leur  convenoit-il 
faire,  puisque  leur  intention  estoit  fustiguer  For- 
tune. 

Rabelais.  V.  i  5 


114  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXVII 

Durant  la  procession  ils  fredonnoient  entre  les 
dents  mélodieusement  ne  sçay  quelles  antiphones, 
car  je  n'entendois  leur  patelin,  et,  ententivement 
escoutant,  aperceu  qu'ils  ne  chantoient  que  des  au- 
reilles.  O  la  belle  armonie,  et  bien  concordante  au 
son  de  leurs  cloches!  Jamais  ne  les  voirrez  discor- 
dans.  Pantagruel  fist  un  notable  mirifique  sus  leur 
procession,  et  nous  dist  :  «  Avez-vous  veu  et  noté 
la  finesse  de  ces  Fredons  icy?  Pour  parfaire  leur 
procession,  ils  sont  sortis  par  une  porte  de  l'église 
et  sont  entrez  par  l'autre.  Ils  se  sont  bien  gardez 
d'entrer  par  où  ils  sont  yssus.  Sus  mon  honneur, 
ce  sont  quelques  fines  gens,  je  dy  fins  à  dorer, 
fins  comme  une  dague  de  plomb,  fins  non  affinez, 
mais  affinans,  passez  par  estamine  fine.  —  Cette 
finesse,  dist  frère  Jean,  est  extraicte  d'occulte  phi- 
losophie, et  n'y  entends  au  diable  rien.  —  D'au- 
tant, respondit  Pantagruel,  est  elle  plus  redoutable 
que  l'on  n'y  entend  rien;  car  finesse  entendue, 
finesse  preveue,  finesse  descouverte,  perd  de  finesse 
et  l'essence  et  le  nom  :  nous  la  nommons  lourde- 
rie.  Sus  mon  honneur  qu'ils  en  savent  bien  d'au- 
tres. » 

La  procession  achevée  comme  pourmenement  et 
exercitation  salubre,  ils  se  retiroient  en  leur  refec- 
toir,  et  dessous  les  tables  se  mettoient  à  genoux, 
s'appuyans  la  poictrine  et  stomach  chacun  sus  une 
lanterne.  Eux  estans  en  cest  estât,  entroit  un  grand 
Esclot,  ayant  une  fourche  en  main,  et  là  les  traitoit 


PANTAGRUEL  Il5 

à  la  fourche  :  de  sorte  qu'ils  commençoient  leur 
repas  par  fourmage,  et  l'achevoient  par  moustarde 
et  laictue,  comme  tesmoigne  Martial  avoir  esté  l'u- 
sage des  anciens.  En  fin  on  leur  presentoit  à  chas- 
cun  d'eux  une  platelée  de  moustarde,  et  estoient 
servis  de  moustarde  après  disner. 

Leur  diette  estoit  telle.  Au  dimanche  ils  man- 
geoient  boudins,  andouilles,  saucissons,  frican- 
deaux, hastereaux,  caillettes,  exceptez  tousjours  le 
fourmage  d'entrée  et  moustarde  pour  l'issue.  Au 
iundy  beaux  pois  au  lard,  avec  ample  comment  et 
glose  interlineare.  Au  mardy  force  pain  benist, 
fouaces,  gasteaux,  galettes  biscuites.  Au  mercredy 
rustrerie  :  ce  sont  belles  testes  de  mouton,  testes  de 
veau,  testes  de  bedouaux,  lesquelles  abondent  en 
icelle  contrée.  Au  jeudy  potages  de  sept  sortes,  et 
moustarde  éternelle  parmy.  Au  vendredy  rien  que 
cormes,  encore  n'estoient-elles  trop  meures,  selon 
que  juger  je  pouvois  à  leur  couleur.  Au  samedy  ron- 
geoient  les  os;  non  pourtant  estoient-ils  pauvres 
ne  souffreteux,  car  un  chascun  d'eux  avoit  bénéfice 
de  ventre  bien  bon.  Leur  boire  estoit  un  antifortu- 
nal  :  ainsi  appelloient-ils  ne  sçay  quel  bruvage  du 
pays.  Quand  ils  vouloient  boire  ou  manger,  ils  rab- 
battoient  leur  cahuet  de  leurs  scaputions  par  le  de- 
vant, et  leur  servoit  de  baviere. 

Le  disner  parachevé,  ils  prioient  Dieu  tresbien, 
et  tout  par  fredons.  Le  reste  du  jour,  attendans  le 
jugement  final,  ils  s'exerçoient  à  œuvre  de  charité. 


llb  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXVII 

au  dimanche  se  pelaudans  l'un  l'autre,  au  lundy 
s'entrenazardans,  au  mardy  s'entre-esgratignans, 
au  mercredy  s'entremouchans,  au  jeudy  s'entretirans 
les  vers  du  nez,  au  vendredy  s'entrechatouillans,  au 
samedy  s'entrefouettans. 

Telle  estoit  leur  diette  quand  ils  residoient  en 
couvent;  si  par  commandement  du  prieur  claustral 
ils  issoient  hors,  défense  rigoureuse,  sur  peine  horri- 
fique,  leur  estoit  faite  poisson  lors  ne  toucher,  ne 
manger,  qu'ils  seroient  sus  mer  ou  rivière,  ne  chair 
telle  qu'elle  fust  lorsque  ils  seroient  en  terre  ferme, 
afin  qu'à  un  chascun  fust  évident  qu'en  jouyssans 
de  l'objet  ne  jouyssoient  de  la  puissance  et  concu- 
piscence, et  ne  s'en  esbranloient  non  plus  que  le 
roc  Marpesian;  le  tout  faisoient  avec  antiphones 
compétentes  et  à  propos  tousjours  chantans  des  au- 
reilles,  comme  avons  dit.  Le  soleil  soy  couchant 
en  rOcean,  ils  bottoient  et  esperonnoient  l'un 
l'autre  comme  devant,  et,  bezicles  au  nez,  se  com- 
posoient  à  dormir.  A  la  minuit  l'Esclot  entroit,  et 
gens  debout;  là  esmailloient  [esmouloient?]  et 
affilloient  leurs  rasouers,  et,  la  procession  faite, 
mettoient  les  tables  sus  eux,  et  repaissoient  comme 
devant. 

Frère  Jehan  des  Entommeures,  voyant  ces  joyeux 
frères  Fredons,  et  entendant  le  contenu  de  leurs 
statuts,  perdit  toute  contenance ,  et,  s'escriant 
hautement,  dist  :  «  O  le  gros  rat  à  la  table  !  Je 
romps  cestuy-là,  et   m'en  vois  par  Dieu  de  pair.  O 


PANTAGRUEL 


117 


que  n'est  icy  Priapus,  aussi  bien'  que  fust  aux  sacres 
nocturnes  de  Canidie,  pour  le  veoir  à  plein  fond 
peder,  et  contrepedant  fredonner  !  A  ceste  heure 
congnois-je  en  vérité  que  sommes  en  terre  antic- 
thone  et  antipode.  En  Germanie  Ton  demolist  mo- 
nastères et  deffroque  on  les  moynes;  icy  on  les  érige 
à  rebours  et  à  contrepoil.  » 

CHAPITRE    XXVIII 

Comment   Panurge,  interroguant  un   frère    Fredon, 
n'eust  response  de  luy  qu'en  monosillabes. 

ANURGE,  depuis  nostre  entrée,  n*avoit 
autre  chose  que  profondement  con- 
templé les  minois  de  ces  royaux  Fre- 
dons;  adonc  tira  par  la  manche  un 
d'iceux,  maigre  comme  un  diable  soret,  et  luy  de- 
manda : 

«  Frater,  Fredon,  Fredon,  Fredondille,  où  est  la 
garse?  » 

Le  Fredon  luy  respondit  :  «  Bas. 
Pan.  En  avez-vous  beaucoup  céans?  Fr.  Peu. 
Pan.  Combien  au  vray  sont  elles?  Fr.  Vingt. 
Pan.  Combien  en  voudriez  vous?  Fr.  Cent. 
Pan.  Où  les  tenez  vous  cachées?  Fr.  Là. 
Pan.  Je  suppose  qu'elles  ne  sont  toutes  d'un  aage  ; 
mais  quel  corsage  ont  elles?  Fr.  Droit. 
Pan.  Le  taint,  quel?  Fr.  Lys. 


Il8  LIVRE    V,     CHAPITRE    XXVIII 

Pan.  Les  cheveux?  Fr.  Blonds. 

Pan.  Les  yeulx,  quels?  Fr.  Noirs. 

Pan.  Les  tetins  ?  Fr.  Ronds. 

Pan.  Le  minois?  Fr.  Coinct. 

Pan.  Les  sourcils?  Fr.  Mois. 

Pan.  Leurs  attraicts  ?  Fr.  Meurs. 

Pan.  Leur  regard?  Fr.  Franc. 

Pan.  Les  pieds,  quels?  Fr.  Plats. 

Pan.  Les  talons?  Fr.  Courts. 

Pan.  Le  bas,  quel?  Fr.  Beau. 

Pan.  Et  les  bras?  Fr.  Longs. 

Pan.  Que  portent  elles  aux  mains?  Fr.  Gands. 

Pan.  Les  anneaux  du  doigt,  quoy?  Fr.  D'or. 

Pan.  Qu'employez  à  les  vestir?  Fr.  Drap. 

Pan.  De  quel  drap  les  vestez  vous?  Fr.  Neuf. 

Pan.  De  quelle  couleur  est-il?  Fr.  Pcrs. 

Pan.  Leur  chapperonnage,  quel  ?  Fr.  Bleu. 

Pan.  Leur  chaussure,  quelle?  Fr.  Brun. 

Pan.  Touts  les  susdits  draps,  quels  sont-ils  ?  Fr. 
Fins. 

Pan.  Qu'est  ce  de  leurs  soulliers?  Fr.  Cuir. 

Pan.  Mais  quels  sont-ils  volontiers?  Fr.  Ords. 

Pan.  Ainsi  marchent  en  place?  Fr.  Tost. 

Pan.  Venons  à  la  cuisine,  je  dis  des  garses,  et 
sans  nous  haster  espluchons  bien  tout  par  le  menu. 
Qu'y  a  il  en  cuisine?  Fr.  Feu. 

Pan.  Qui  entretient  ce  feu  là?  Fr.  Bois. 

Pan.  Ce  bois  icy,  quel  est  il?  Fr.  Sec. 

Pan.  De  quels  arbres  le  prenez?  Fr.  D'ifz. 


PANTAGRUEL  II9 

Pan.  Le  menu  et  les  fagots?  Fr.  D'houst. 

Pan.  Quel  bois  bruslez  en  chambre?  Fr,  Pins. 

Pan.  Et  quels  arbres  encores?  Fr.  Teils. 

Pan.  Des  garses  susdites,  j'en  suis  de  moitié, 
comment  les  nourrissez  vous?  Fr.  Bien. 

Pan.  Que  mangent  elles?  Fr.  Pain. 

Pan.  Quel?  Fr.  Bis. 

Pan.  Et  quoy  plus?  Fr.  Chair. 

Pan.  Mais  comment?  Fr.  Rost. 

Pan.  Mangent  elles  point  souppes  ?  Fr.  Point. 

Pan.  Et  de  pâtisserie?  Fr.  Prou. 

Pan.  J'en    suis;   mangent   elles  point    poisson? 
Fr.  Si. 

Pan.  Comment?  Et  quoy  plus?  Fr.  Œufs. 

Pan.  Et  les  aiment?  Fr.  Cuits. 

Pan.  Je  demande  comment  cuits?  Fr.  Durs. 

Pan.  Est  ce  tout  leur  repas?  Fr.  Non. 
.   Pan.  Quoy  donc  ?  Qu'ont  elles  d'avantage  ?  Fr. 
Bœuf. 

Pan.  Et  quoy  plus?  Fr.  Porc. 

Pan.  Et  quoy  plus?  Fr.  Oyes. 

Pan.  Quoy  d'abondant?  Fr.  Jars. 

Pan.  Item  ?  Fr.  Coqs. 

Pan.  Qu'ont  elles  pour  leur  saulce  ?  Fr.  Sel. 

Pan.  Et  pour  les  friandes?  Fr.  Moust. 

Pan.  Pour  l'issue  du  repas?  Fr.  Ris. 

Pan.  Et  quoy  plus?  Fr.  Laict. 

Pan.  Et  quoy  plus?  Fr.  Pois. 

Pan.  Mais  quel  pois  entendez  vous  ?  Fr.  Verds. 


I20  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXVIII 

Pan.  Que  mettez-vous  avec?  Fr.  Lard. 

Pan.  Et  des  fruicts?  Fr.  Bons. 

Pan.  QuojPFr.  Cruds. 

Pan.  Plus?  Fr.  Noix. 

Pan.  Mais  comment  boivent  elles?  Fr.  Net. 

Pan.  Quoy  ?  Fr.  Vin. 

Pan.  Quel?  Fr.  Blanc. 

Pan.  En  hjver?  Fr.  Sain. 

Pan.  Au  printemps?  Fr.  Brusq. 

Pan.  En  esté?  Fr.  Frais. 

Pan.  En  automne  et  vendange?  Fr.  Doux. 

—  Pote  de  froc,  s'escria  frère  Jehan,  comment 
ces  mastinesicy  fredonniques  devroient  estre grosses, 
et  comment  elles  devroient  aller  au  trot,veu  qu'elles 
repaissent  si  bien  et  copieusement  !  — Attendez,  dist 
Panurge,  que  j'achève  : 

«  Quelle  heure  est  quand  se  couchent?  Fr. 
Nuict. 

Pan.  Et  quand  elles  se  lèvent?  Fr.  Jour. 

—  Voicy,  dist  Panurge,  le  plus  gentil  Fredon 
que  je  chevauchay  de  cest  an.  Pleust  à  Dieu,  et  au 
benoist  sainct  Fredon,  et  à  la  benoiste  et  digne 
vierge  saincte  Fredonne,  qu'il  fust  premier  président 
de  Paris  !  Vertugoy  !  mon  ami,  quel  expéditeur  de 
causes,  quel  abreviateur  de  procès,  quel  vuydeurde 
débats,  quel  esplucheur  de  sacs,  quel  fueilleteur 
de  papiers,  quel  minuteur  d'escritures  ce  seroit  ! 
Or  maintenant  venons  sus  les  autres  vivres,  et  par- 


PANTAGRUEL  121 

Ions  à  traits  et  à  sens  rassis  de  nosdictes  sœurs  en 
charité. 

«  Quel  est  le  formulaire?  Fr.  Gros. 

Pan.  a  l'entrée?  Fr.  Frais. 

Pan.  Au  fond?  Fr.  Creux. 

Pan.  Je  disois  qu'il  y  faict  ?  Fr.  Chaud. 

Pan.  Qu'y  a  il  au  bord  ?  Fr.  Poil. 

Pan.  Quel?  Fr.  Roux. 

Pan.  Et  celuy  des  plus  vieilles?  Fr.  Gris. 

Pan.  Le  sacquement  d'elles,  quel?  Fr.  Prompt. 

Pan.  Le  remuement  des  fesses?  Fr.  Dru. 

Pan.  Toutes  sont  voltigeantes?  Fr.  Trop. 

Pan.  Vos instrumens,  quels  sont-ils?  Fr.  Grands. 

Pan.  En  leur  marge,  quels?  Fr.  Ronds. 

Pan.  Le  bout,  de  quelle  couleur?  Fr.  Bail. 

Pan.  Quand  ils  ont  fait,  quels  sont-ils ?Fr.  Coys. 

Pan.  Les  genitoires,  quels  sont?  Fr,  Lourds. 

Pan.  En  quelle  façon  troussez?  Fr.  Prés. 

Pan.  Quand  c'est  faict,  quels  deviennent  ?  Fr. 
Mats. 

Pan.  Or,  par  le  serment  qu'avez  faict,  quant 
voulez  habiter,  comment  les  projettez-vous  ?  Fr. 
Jus. 

Pan.  Que  disent  elles  en  culletant  ?  Fr.  Mot. 

Pan.  Seulement  elles  vous  font  bonne  chère  ; 
au  demourant  elles  pensent  au  joly  cas?  Fr.  Vray. 

Pan.  Vous  font  elles  des  enfans  ?  Fr.  Nuls. 

Pan.  Comment  couchez  ensemble  ?  Fr.  Nuds. 

Pan.  Par  ledit  serment  qu'avez  faict,    quantes 

i6 


122  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXVIII 

fois  de  bon  compte  ordinairement  le  faictes  vous 
par  jour  ?  Fr.  Six. 

Pan.  Et  de  nuict  ?  Fr.  Dix. 

—  Cancre  !  dist  frère  Jelian,  le  paillard  ne  dai- 
gneroit  passer  seize,  il  est  honteux. 

—  Voire,  le  ferois  tu  bien  autant,  frère  Jean?  Il 
est,  par  Dieu,  ladre  verd. 

«  Ainsi  font  les  autres  ?  Fr.  Tous. 

Pan.  Qui  est  de  tous  le  plus  galland?  Fr.  Moy. 

Pan.  N'y  faictes  vous  onques  faute?  Fr.  Rien. 

Pan.  Je  perds  mon  sens  en  ce  poinct.  Ayans 
vuydé  et  espuysé  en  ce  jour  précèdent  tous  vos  va- 
ses spermatiques,  au  jour  subsequant  y  en  peut  il 
tant  avoir?  Fr.  Plus. 

Pan.  Ils  ont,  ou  je  resve,  l'herbe  de  l'Indie  célé- 
brée par  Theophraste.  Mais  si,  par  empeschement 
légitime  ou  autrement,  en  ce  déduit  advient  quelque 
diminution  de  membre,  comment  vous  en  trouvez 
vous?  Fr.  Mal. 

Pan.  Et  lors,  que  font  les  garses  ?  Fr.  Bruit. 

Pan.  Et  si  cessiez  un  jour?  Fr.  Pis. 

Pan.  Alors,  que  leur  donnez  vous?  Fr.  Trunc. 

Pan.  Que  vous  font  elles  pour  lors?  Fr.  Bren. 

Pan.  Que  dis  tu  ?  Fr.  Peds. 

Pan.  De  quel  son  ?  Fr.  Cas. 

Pan.  Comment  les  chastiez  vous?  Fr.  Fort. 

Pan.  Et  en  faictes  quoy  sortir?  Fr.  Sang. 

Pan.  En  cela  devient  leur  tain?  Fr.  Tainct. 

Pan.  Mieux  pour  vous  il  ne  seroit?  Fr.  Painct. 


PANTAGRUEL  123 

Pan.  Aussi  restez  vous  tousjours?  Fr.  Craints. 

Pan.  Depuis  elles  vous  cuident?  Fr.  Saincts. 

Pan.  Par  ledit  serment  de  bois  qu'avez  fait,  quelle 
est  la  saison  de  l'année  quand  plus  lasches  lefaictes? 
Fr.  Aoust. 

Pan.  Celle  quand  plus  brusquement?  Fr.  Mars. 

Pan.  Au  reste  vous  le  faictes?  Fr.  Gay.  » 

Alors  dist  Panurge  en  soubriant  :  ce  Voici  le  pau- 
vre Fredon  du  monde  !  Avez-vous  entendu  com- 
ment il  est  résolu,  sommaire  et  compendieux  en 
ses  responses  ?  Il  ne  rend  que  monosyllabes.  Je 
croy  qu'il  feroit  d'une  cerize  trois  morceaux.  —  Cor- 
bieu,  dist  frère  Jehan,  ainsi  ne  parle  il  mie  avec  ses 
garses;  il  y  est  bien  polysyllabe;  vous  parlez  de 
trois  morceaux  d'une  cerise  :  par  Sainct  Gris,  je  ju- 
rerois  que  d'une  espaule  de  mouton  il  ne  feroit  cjue 
deux  morceaux,  et  d'une  quarte  de  vin  qu'un  traict. 
Voyez  comment  il  est  hallebrené.  — Ceste,  dist 
Epistemon,  meschante  freraille  de  moines  sont  par 
tout  le  monde  ainsi  aspres  sus  les  vivres,  et  puis  nous 
disent  qu'ils  n'ont  que  leur  vie  en  ce  monde.  Que 
diable  ont  les  roys  et  grans  princes?  » 


24  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXIX 

CHAPITRE  XXIX 

Comment  l'institution  de  Quaresme  desplait    à 
Epistemon. 

VEZ  vous,  dist  Epistemon,  noté  com- 
ment ce  meschant  et  malautru  Fredon 
nous  a  allégué  mars  comme  mois  de 
ruffîennerie?  —  Ouy,  respondit  Panta- 
gruel; toutesfois  il  est  tousjours  en  quaresme,  le- 
quel a  esté  institué  pour  macérer  la  chair,  mortifier 
les  appétits  sensuels  etreserrer  les  furies  vénériennes. 
—  En  ce,  dist  Epistemon,  pouvez  vous  juger  de 
quel  sens  estoit  celuy  pape  qui  premier  l'institua, 
qu£  ceste  vilaine  savatte  de  Fredon  confesse  soy 
n'estre  jamais  plus  embrené  en  paillardise  qu'en  la 
saison  de  quaresme  ;  aussi,  par  les  évidentes  raisons 
produites  de  tous  bons  et  sçavans  médecins,  affer- 
mans  en  tout  le  decours  de  l'année  n'estre  viandes 
mangées  plus  excitantes  la  personne  à  lubricité 
qu'en  cestuj  temps  :  febves,  poix,  phaseols,  chiches, 
oignons,  noix,  huytres,  harans,  saleures,  garon, 
salades  toutes  composées  d'herbes  veneriques , 
comme  eruce,  nasitord,  targon,  cresson,  berle,  res- 
ponse,  pavot  cornu,  haubelon,  figues,  ris,  raisins. 

—  Vous,  dist  Pantagruel,  seriez  bien  esbahy  si, 
voyant  le  bon  Pape  instituteur  du  sainct  quaresme 
estre  lors  la  saison  quand  la  chaleur  naturelle  sort 
du  centre  du  corps,  auquel  s'cstoit  contenue  durant 


PANTAGRUEL  125 

les  froidures  de  Thyver,  et  se  dispert  par  la  circon- 
férence des  membres,  comme  la  sesve  faict  es  arbres, 
auroit  ces  viandes  qu'avez  dictes  ordonnées  pour 
aider  à  la  multiplication  de  l'humain  lignage.  Ce 
que  me  l'a  faict  penser  est  qu'au  papier  baptistère 
de  Touars  plus  grand  est  le  nombre  des  enfans  en 
octobre  et  novembre  nez  qu'es  dix  autres  mois  de 
l'année,  lesquels,  selon  la  supputation  rétrograde, 
tous  estoient  faits,  conceus  et  engendrez  en  qua- 
resme. 

—  Je,  dist  frère  Jean,  escoute  vos  propos,  et  y 
prens  plaisir  non  petit;  mais  le  curé  de  Jambet 
attribuoit  ce  copieux  engrossissement  de  femmes 
non  aux  viandes  de  quaresme,  mais  aux  petits  ques- 
teurs voultés,  aux  petits  prescheurs  bottés,  aux  petits 
confesseurs  crottés,  lesquels  damnent,  par  cestuy 
temps  de  leur  empire,  les  ribaulx  mariez  trois  toises 
au  desoubs  des  grifes  de  Lucifer.  A  leur  terreur  les 
mariez  plus  ne  biscotent  leurs  chambrières,,  se  reti- 
rent à  leurs  femmes.  J'ay  dict. 

—  Interprétez,  dist  Epistemon,  l'institution  de 
quaresme  à  vostre  phantasie,  chascun  abonde  en 
son  sens  ;  mais  à  la  suppression  d'iceluy,  laquelle  me 
semble  estre  impendente,  s'opposeront  tous  les  mé- 
decins, je  le  sçay,  je  leur  ay  ouy  dire.  Car  sans  le 
quaresme  seroit  leur  art  en  mespris,  rien  ne  gaigne- 
roient,  personne  ne  seroit  malade.  En  quaresme 
sont  toutes  maladies  semées  :  c'est  la  vraye  pépinière, 
la  naïfve  couche  et  promoconde  de  tous  maux.  En- 


120  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXIX 

cores  ne  considérez  que,  si  quaresme  faict  les  corps 
pourrir,  aussi  faict  il  les  âmes  enrager.  Diables  alors 
font  leurs  efforts,  caffards  alors  sortent  en  place, 
cagots  tiennent  leurs  grands  jours,  foires,  sessions, 
stations,  perdonnances,  confessions,  fouettemens, 
anathematisations.  Je  ne  veux  pourtant  inférer  que 
les  Arimaspians  soient  en  cela  meilleurs  que  nous, 
mais  je  parle  à  propos. 

—  Or  çà,  dist  Panurge,  couillon  cultant  et  fre- 
donnant, que  vous  semble  de  cestuy-cy?  Est-il  pas 
hérétique?  Fr.  Très. 

Pan.  Doibt  il  pas  estre  bruslé?  Fr.  Doibt. 
Pan.  Et  le  plustost  qu'on  pourra?  Fr.  Soit. 
Pan.  Sans  le  faire  pourbouillir?  Fr.  Sans. 
Pan.  En  quelle  manière  donques?  Fr.  Vif. 
Pan.  Si  qu'en  fin  s'en  ensuyve?  Fr.  Mort. 
Pan.  Car  il  vous  a  trop  faschë?  Fr.  Las! 
Pan.  Que  vous  sembloit  il  estre?  Fr.  Fol. 
Pan.  Vous  dictes  fol  ou  enragé?  Fr.  Plus. 
Pan.  Que  voudriez  vous  qu'il  fust?  Fr.  Ars. 
Pan.  On  en  a  bruslé  d'autres?  Fr.  Tant. 
Pan.  Qui  estoient  hérétiques?  Fr.  Moins. 
Pan.  Encore  en  bruslera  on?  Fr.  Maints. 
Pan.  Les  rachepterez  vous?  Fr.  Grain. 
Pan.  Les  faut  il  pas  tous  brusler?  Fr.  Faut. 

—  Je  ne  sçay,  dist  Epistemon,  quel  plaisir  vous 
prenez  raisonnant  avecques  ce  meschant  penaillon 
de  moyne;  mais,  si  d'ailleurs  ne  m'estiez  congnu, 
vous  me  créeriez  en  l'entendement  opinion  de  vous 


PANTAGRUEL  127 

peu  honorable.  —  Allons,  de  par  Dieu,  dist  Pa- 
nurge,  je  l'emmenerois  volontiers  à  Gargantua,  tant 
il  me  plaist;  quand  je  seray  marié,  il  serviroit  à  ma 
femme  de  fou.  —  Voire  teur,  dist  Epistemon ,  par 
la  figure  tmesis.  —  A  ceste  heure,  dist  frère  Jehan 
en  riant,  as  tu  ton  vin,  pauvre  Panurge;  tu  n'es- 
chappe  jamais  que  tu  ne  sois  cocujusques  au  cul.  » 

CHAPITRE    XXX 

Comment  nous  visitasmes  le  pays  de  Satin. 

'M  ^ 


J^  OYEUX  d'avoir  veu  la  nouvelle  religion 

J!^^  des    frères    Fredons,   navigasmes   par 

lc|j^^  deux  jours;   au  troisiesme  descouvrit 

^^fe^É^  nostre    pilot  une   isle    belle  et   déli- 


cieuse sur  toutes  autres.  On  l'appelloit  l'Isle  de 
Frize,  car  les  chemins  estoient  de  frize.  En  icelle 
estoit  le  pays  de  Satin,  tant  renommé  entre  les 
pages  de  cour,  duquel  les  arbres  et  herbes  jamais 
ne  perdoient  fleur  ne  fueilles,  et  estaient  de  damas 
et  velous  figuré.  Les  bestes  et  oiseaux  estoient  de 
tapisserie.  Là  nous  vismes  plusieurs  bestes,  oiseaux 
et  arbres,  tels  que  les  avons  de  par  deçà  en  figure, 
grandeur,  amplitude  et  couleur,  excepté  qu'ils  ne 
mangeoient  rien  et  point  ne  chantoient,  point  aussi 
ne  mordoient  ils  comme  font  les  nostres. 

Plusieurs  aussi  y  vismes    que  n'avions    encores 
veu;    entre    autres   y    vismes    divers   elephans    en 


125  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXX 

diverse  contenance;  sus  tous  j'y  notayles  sixmasles 
et  six  femelles  présentez  à  Rome  en  théâtre  par 
leur  instituteur,  au  temps  de  Germanicus,  nepveu 
de  l'empereur  Tibère,  elephans  doctes,  musiciens, 
philosophes,  danseurs,  pavaniers,  baladins;  et  es- 
toient  à  table  assis  en  belle  composition,  beuvans 
et  mangeans  en  silence,  comme  beaux  Pères  au  re- 
fectouer.  Ils  ont  le  museau  long  de  deux  coudées, 
et  le  nommons  proboscide,  avec  lequel  ils  puisent 
eau  pour  boire,  prennent  palmes,  prunes,  toutes 
sortes  de  mangeaille,  s'en  deffendent  et  offendent 
comme  d'une  main,  et  au  combat  jettent  les  gens 
haut  en  l'air,  et  à  la  cheute  les  font  crever  de  rire. 
Ils  ont  joinctures  et  articulations  es  jambes;  ceux 
qui  ont  escrit  le  contraire  n'en  veirent  jamais  qu'en 
peinture.  Entre  leurs  dents  ils  ont  deux  grandes 
cornes,  ainsi  les  appelloit  Juba;  et  dit  Pausanias 
estre  cornes,  non  dents;  Philostrate  tient  que  soient 
dents,  non  cornes;  ce  m'est  tout  un,  pourveu 
qu'entendiez  que  c'est  le  vray  yvoire,  et  sont  lon- 
gues de  trois  ou  quatre  coudées,  et  sont  en  la 
mandibule  supérieure,  non  inférieure.  Si  croyez 
ceux  qui  disent  le  contraire,  vous  en  trouverez  mal, 
voire  fust  ce  Elian,  tiercelet  de  menterie.  Là,  non 
ailleurs,  en  avoit  veu  Pline,  dansans  aux  sonnettes 
sus  cordes  et  funambules,  passans  aussi  sus  les  tables 
en  plain  banquet  sans  olfenser  les  beuveurs  beu- 
vans. 

J'y  vy  un  rhinocéros  du  tout  semblable  à  cestuy 


PANTAGRUEL 


129 


que  Henry  Clerberg  m'avoit  autrefois  monstre,  et 
peu  differoit  d'un  verrat  qu'autrefois  j'avois  veu  à 
Limoges,  excepté  qu'il  avoit  une  corne  au  mufle 
longue  d'une  coudée,  et  pointue,  de  laquelle  il 
osoit  entreprendre  contre  un  éléphant  en  combat, 
et  d'icelle  le  poignant  sous  le  ventre,  qui  est  la  plus 
tendre  et  débile  partie  de  l'elephant,  le  rendoit 
mort  par  terre. 

J'y  vy  trente  deux  unicornes  :  c'est  une  beste 
félonne  à  merveilles,  du  tout  semblable  à  un  beau 
cheval,  excepté  qu'elle  a  la  teste  comme  un  cerf^ 
les  pieds  comme  un  éléphant,  la  queue  comme  un 
sanglier ,  et  au  front  une  corne  aiguë ,  noire  ^ 
et  longue  de  six  ou  sept  pieds,  laquelle  ordinaire- 
ment luy  pend  en  bas  comme  la  creste  d'un  coq 
d'Inde;  elle,  quand  veut  combattre  ou  autrement 
s'en  aider,  la  levé  roide  et  droite.  Une  d'icelles  je 
vy,  accompagnée  de  divers  animaux  sauvages,  avec 
sa  corne  emunder  une  fontaine. 

Là  me  distPanurge  que  son  courtaut  ressembloit 
à  ceste  unicorne,  non  en  longueur  du  tout,  mais  en 
vertu  et  propriété.  Car,  ainsi  comme  elle  purifioit 
l'eau  des  mares  et  fontaines  d'ordure  ou  venin 
aucun  qui  y  estoit,  et  ces  animaux  divers  en  seureté 
venoient  boire  après  elle,  ainsi  seurement  on  pou- 
voit  après  luy  fatrouiller  sans  danger  de  chancre, 
vérole,  pisse-chaude,  pouUains,  grèves  et  tels  autres 
menus  suffrages  :  car,  si  mal  aucun  estoit  au  trou 
méphitique,  il  esmondoit  tout  avec  sa  corne  ner- 

Rabelais.   V.  i  -j 


l3o  LIVRE    V,     CHAPITRE    XXX 

veuse.  «  Quand,  dist  frère  Jehan,  vous  serez  marié, 
nous  ferons  l'essay  sus  vostre  femme,  pour  l'amour 
de  Dieu  soit,  puisque  nous  en  donnez  instruction 
fort  salubre.  —  Voire,  respondit  Panurge,  et  sou- 
dain en  l'estomac  la  belle  petite  pilulle  agrégative  de 
Dieu,  composée  de  vingt  deux  coups  de  pongnart, 
à  la  Cesarine.  —  Mieux  vaudroit,  disoit  frère  Jehan, 
une  tasse  de  quelque  bon  vin  frais.  » 

J'y  vy  la  Toison  d'Or  conquise  par  Jason.  Ceux 
qui  ont  dit  n''estre  toison,  mais  pommes  d'or,  parce 
que  |j(.-?jXa  signifie  pomme  et  brebis,  avoient  mal 
visité  le  pays  de  Satin. 

J'y  vy  un  chameleon,  tel  que  le  descrit  Aristo- 
teles,  et  tel  que  me  l'avoit  quelquefois  monstre 
Charles  Marais,  médecin  insigne  en  la  noble  cité  de 
Lyon  sur  le  Rosne  ;  et  ne  vivoit  que  d'air  non  plus 
que  l'autre. 

J'y  vy  trois  hydres,  telles  qu'en  avois  ailleurs 
autrefois  veu.  Ce  sont  serpens  ayans  chascun  sept 
testes  diverses. 

J'y  vy  quatorze  phœnix.  J'avois  leu  en  divers 
autheurs  qu'il  n'en  estoit  qu'un  en  tout  le  monde 
pour  un  aage;  mais,  selon  mon  petit  jugement, 
ceux  qui  en  ont  escrit  n'en  veirent  oncques  ailleurs 
qu'au  pays  de  Tapisseiie,  voire  fust-ce  Lactance 
Firmian. 

J'y  vy  la  peau  de  l'Asne  d'or  d'Apulée. 

J'y  vy  trois  cens  et  neuf  pélicans,  six  mille  et 
seize  oizeaux  seleucides,  marchans  en  ordonnance 


PANTAGRUEL  l3l 

et  devorans  les  sauterelles  parmy  les  bleds  ;  des 
cynamolges,  des  argathyles,  des  caprimulges,  des 
thynnuncules,  des  crotenotaires,  voire,  dis-je,  des 
onocrotales  avec  leur  grand  gosier;  des  stympha- 
lides,  harpyes,  panthères,  dorcades,  cemades,  cyno- 
céphales, satyres,  cartasonnes,  tarandes,  ures,  mo- 
nopes,  pephages,  cèpes,  neares,  stères,  cercopite- 
ques,  bisons,  musimones,  bytures,  ophyres,  stryges, 
gryphes. 

J'y  vy  la  My-caresme  à  cheval;  la  My-aoust  et 
la  My-mars  luy  tenoient  l'estaphe  ;  loups-garoux, 
centaures,  tygres,  léopards,  hyènes,  camelopardales, 
ériges. 

J'y  vy  une  remore,  poisson  petit,  nommé  echeneis 
des  Grecs,  auprès  d'une  grande  nauf,  laquelle  ne  se 
mouvoit,  encores  qu'elle  eust  pleine  voile  en  haute 
mer.  Je  croy  bien  que  c'estoit  celle  de  Perianderle 
tyran,  laquelle  un  poisson  tant  petit  arrestoit  contre 
le  vent.  Et  en  ce  pays  de  Satin,  non  ailleurs,  l'avoit 
veue  Mutianus.  Frère  Jean  nous  dist  que  par  les 
cours  de  Parlement  souloient  jadis  régner  deux 
sortes  de  poisson ,  lesquels  faisoient  de  tous 
poursuyvans,  nobles,  roturiers,  pauvres,  riches, 
grands,  petits,  pourrir  les  corps  et  enrager  les  âmes. 
Les  premiers  estoient  poissons  d'avril,  ce  sont 
maquereaux  ;  les  seconds  bénéfiques  remores , 
c'est  sempiternité  de  procès  sans  fin  de  jugement. 

Icy  vy  des  sphynges,  des  raphes,  des  oinces^  des 
cephes,  lesquels  ont  les  pieds  de  devant  comme  les 


l32  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXX 

mains,  et  ceux  de  derrière  comrxie  les  pieds  d'un 
homme;  des  crocutes,  des  eales,  lesquels  sont  grands 
comme  hippopotames,  la  queue  comme  elephans, 
les  mandibules  comme  sangliers,  les  cornes  mobiles, 
comme  sont  les  aureilles  d'asne;  des  cucrocutes, 
bestes  treslegeres,  grandes  comme  asnes  de  Mire- 
balais,  ont  le  col,  la  queue  et  poitrine  comme  un 
lion,  les  jambes  comme  un  cerf,  la  gueule  fendue 
jusques  aux  aureilles,  et  n'ont  autres  dents  qu'une 
dessus  et  une  autre  dessous;  elles  parlent  de  voix 
humaine,  mais  lors  mot  ne  sonnèrent. 

Vous  dites  qu'on  ne  veit  oncques  aire  de  sacre  : 
vrayement  j'y  en  vy  onze,  et  les  notay  bien. 

J'y  vy  des  hallebardes  gaucheres,  ailleurs  n'en 
avois  veu. 

J'y  vy  des  menthichores,  bestes  bien  estranges  : 
elles  ont  le  corps  comme  un  lion,  le  poil  rouge,  la 
face  et  les  aureilles  comme  un  homme,  trois  rangs 
de  dents  entrant  les  unes  dedans  les  autres,  comme 
si  vous  entrelassiez  les  doigts  des  deux  m.ains  les  uns 
dedans  les  autres;  en  la  queue  elles  ont  un  aiguil- 
lon, duquel  elles  poignent,  comme  font  les  scor- 
pions, et  ont  la  voix  fort  mélodieuse. 

J'y  vy  des  catoblepes,  bestes  sauvages,  petites  de 
corps,  mais  elles  ont  les  testes  grandes  sans  pro- 
portion, à  peine  les  peuvent  lever  de  terre;  elles 
ont  les  yeux  tant  vénéneux  que  quiconques  les 
voit  meurt  soudainement,  comme  qui  verroit  un 
basilic. 


PANTAGRUEL  l33 

J'y  vy  des  bestes  à  deux  dos,  lesquelles  me  sem- 
bloyent  joyeuses  à  merveilles  et  copieuses  en  cule- 
tis,  plus  que  n'est  la  mocitelle,  avecques  sempiternel 
remuement  de  cropions. 

J'y  vy  des  escrevisses  laictées,  ailleurs  jamais  n'en 
avois  veu,  lesquelles  marchoient  en  moult  belle  or- 
donnance, et  les  faisoit  moult  bon  veoir. 


CHAPITRE    XXXI 

Comment  au  pays  de  Satin  nous  veismes  Ouy-dire, 
tenant  eschole  de  tesmoignerie. 

ASSANS  quelque  peu  avant  en  ce  pays 
de  Tapisserie,  vismes  la  mer  Méditer- 
ranée ouverte  et  descouverte  jusques 
aux  abismes,  tout  ainsi  comme  au  gouf- 
fre Arabie  se  descovrit  la  mer  Erithrée,  pour  faire 
chemin  aux  Juifs  issans  d'Egypte, 

Là  je  recongnu  Triton  sonnant  de  sa  grosse 
conche,  Glaucus,  Proteus,  Nereus  et  mille  autres 
dieux  et  monstres  marins.  Vismes  aussi  nombre  infîny 
de  poissons  en  espèces  diverses,  dansans,  volans, 
voltigeans,  combatans,  mangeans,  respirans,  belu- 
tans,  chassans,  dressans  escarmouches,  faisans  em- 
buscade, composans  trefves,  marchandans,  jurans, 
s'esbatans. 

En  un  coing  là  prés  vismes  Aristoteles  tenant  une 


3, 


LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXI 


lanterne,  en  semblable  contenance  que  Ton  peint 
l'hermite  prés  Sainct  Christofle,  espiant,  considé- 
rant, le  tout  rédigeant  par  escrit.  Derrière  luy  es- 
toient  comme  records  de  sergents  plusieurs  autres 
philosophes,  Appianus ,  Heliodorus,  Atheneus, 
Porphirius ,  Pancrates ,  Archadian  ,  Numenius , 
Possidonius^  Ovidius,  Oppianus,  Olympius,  Seleu- 
cus,  Leonides,  Agathocles,  Theophraste,  Damos- 
trate,  Mutianus,  Nymphodorus,  Elianus,  cinq  cens 
autres  gens  aussi  de  loisir,  comme  fut  Chrysippus 
ou  Aristarchus  de  Sole,  lequel  demeura  cinquante 
huit  ans  à  contempler  Testât  des  abeilles,  sans  autre 
chose  faire.  Entre  iceux  j'y  advisay  Pierre  Gylles, 
lequel  tenoit  un  urinai  en  main,  considérant  en  pro- 
fonde contemplation  l'urine  de  ces  beaux  poissons. 
Avoir  longuement  considéré  ce  pays  de  Satin, 
dist  Pantagruel  :  «  J'ay  icy  longuement  repeu  mes 
yeux,  mais  je  ne  m'en  peux  en  rien  saouler,  mon 
estomach  brait  de  maleraigede  faim.  —  Repaissons, 
repaissons,  di-je,  et  tastons  de  ces  anacampserotes 
qui  pendent  là-dessus.  Fy  !  ce  n'est  rien  qui  vaille.  » 
Je  donques  prins  quelques  mirobalans  qui  pen- 
doient  à  un  bout  de  tapisserie,  mais  je  ne  les  peu 
mascher  n'avaller;  et,  les  goustans,  eussiez  propre- 
ment dictet  juré  que  fust  soye  retorsse,  et  n'avoient 
saveur  aucune.  On  penseroit  qu'Heliogabalus  là 
eustpris,  comme  transsumpt  de  bulle,  forme  de 
festoyer  ceux  qu'il  avoit  long-tems  fait  jusner, 
leur  promettant  enfin  bancquet  somptueux,  abon- 


PANTAGRUEL  l35 

dant,  impérial,  puis  les  paissoit  de  viandes  en 
cire,  en  marbre,  en  potterie,  en  peintures  et  nappes 
figurées. 

Cerchans  donques  par  ledit  pays  si  viandes  au- 
cunes trouverions,  entendismes  un  bruit  strident  et 
divers,  comme  si  fussent  femmes  lavant  la  buée,  ou 
traquets  de  moulins  du  Bazacle  lez  Toloze;  sans 
plus  séjourner  nous  transportasmes  au  lieu  où  c'estoit, 
etvismesun  petit  vieillard  bossu,  contrefait  et  mons- 
trueux. On  le  nommoitOuy-dire  ;  il  avoitla  gueule 
fendue  jusques  aux  aureilles,  dedans  la  gueule  sept 
langues,  et  la  langue  fendue  en  sept  parties;  quoy 
que  ce  fust,  de  toutes  sept  ensemblement  parloit 
divers  propos  et  languages divers;  avoit  aussi parmy 
la  teste  et  le  reste  du  corps  autant  d'aureilles  comme 
jadis  eut  Argus  d'yeux;  au  reste  estoit  aveugle  et 
paralitique  des  jambes. 

Autour  de  luy  je  vy  nombre  innumerable  d'hom- 
mes et  de  femmes  escoutans  et  attentifs,  et  en  re- 
congnu  aucuns  parmy  latrouppe  faisans  bon  minois, 
d'entre  lesquels  un  pour  lors  tenoit  une  mappe- 
monde, et  la  leur  exposoit  sommairement  par  pe- 
tites aphorismes,  et  y  devenoient  clercs  et  sçavans 
en  peu  d'heure,  et  parloient  de  prou  de  choses  pro- 
digieuses elegantement  et  par  bonne  mémoire,  pour 
la  centiesme  partie  desquelles  sçavoirne  suffiroit  la 
vie  de  l'homme  :  des  Pyramides,  du  Nil,  de  Baby- 
lone  ,  des  Troglodites ,  des  Hymantopodes ,  des 
Blemmies,  des  Pygmées,  des  Canibales,  des  Monts 


l36  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXI 

Hyperborées,  des  Egipanes,  de  tous  les  Diables,  et 
tout  par  Ouy-dire. 

Là  je  vy,  selon  mon  advis,  Hérodote,  Pline, 
Solin,  Berose,  Philostrate,  Mêla,  Strabo,  et  tant 
d'autres  antiques;  plus  Albert  le  Jacobin  grand, 
Pierre  Tesmoin ,  Pape  Pie  second,  Volateran, 
Paulo  Jovio  le  vaillant  homme,  Jacques  Cartier, 
Chaiton  Armenian,  Marc  Paule  Vénitien,  Ludovic 
Romain,  Piètre  Aliares,  et  ne  sçay  combien  d'autres 
modernes  historiens  cachez  derrière  une  pièce  de 
tapisserie,  en  tapinois  escrivans  de  belles  besongnes, 
et  tout  par  Ouy-dire. 

Derrière  une  pièce  de  velours  figuré  à  fueille  de 
menthe,  prés  d'Ouy-dire,  je  vy  nombre  grand  de 
Percherons  et  Manceaux,  bons  estudians,  jeunes 
assez  ;  et  demandans  en  quelle  faculté  ils  appliquoient 
leur  estude,  entendismes  que  là  de  jeunesse  ils  ap- 
prenoient  estre  tesmoins,  et  en  cestuy  art  proufitoient 
si  bien  que,  partans  du  lieu  et  retournez  en  leur 
province,  vivoient  honnestement  du  mestier  de 
tesmoignerie,  rendans  seur  tesmoignage  de  toutes 
choses  à  ceux  qui  plus  donneroient  par  journée,  et 
tout  par  Ouy-dire.  Dictes  en  ce  que  voudrez,  mais 
ils  nous  donnèrent  de  leurs  chanteaux,  et  beusmes 
à  leurs  barils  à  bonne  chère.  Puis  nous  advertirent 
cordialement  qu'eussions  à  espargner  vérité,  tant 
que  possible  nous  seroit,  si  voulions  parvenir  en 
court  de  grans  seigneurs. 


PANTAGRUEL 


CHAPITRE  XXXII 

Comment  nous  fut  descouvert  le  pais  de  Lanternois. 

^AL  traictez  et  mal  repeus  au  païs  de 
^  Satin,  navigasmes  par  trois  jours;  au 
I  quatriesme  en  bon  heur  approchasmes 
^l  de  Lanternois.  Approchans ,  voyons 
sur  mer  certains  petits  feuz  volans;  de  ma  part,  je 
pensois  que  fussent  non  lanternes,  mais  poissons, 
qui,  de  la  langue  flamboyans,  hors  la  mer  fissent 
feu,  ou  bien  lampyrides,  vous  les  appeliez  les  cicin- 
deles,  là  reluisans,  comme  au  soir  font  en  ma 
patrie,  l'orge  venant  à  maturité.  Mais  le  pilot  nous 
advertit  que  c'estoient  lanternes  des  guets,  lesquelles 
autour  de  la  banlieue  descouvroient  le  païs,  et  fai- 
soient  escorte  à  quelques  lanternes  estrangeres, 
qui,  comme  bons  cordeliers  et  jacobins,  alloient 
là  comparoistre  au  Chapitre  provincial.  Doutans 
toutesfois  que  fust  quelque  prognostic  de  tempeste, 
nous  asseura  qu'ainsi  estoit. 


38  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXIII 


CHAPITRE    XXXIII 

Comment  nous  descendismes  au  port  des  Lychno- 
biens  et  entrasmes  en  Lanternois. 


.^...v.^ 


:t^;^, 


\.Q^. 


'^•i'J\\js  l'instant  entrasmes  au  port  de  Lan- 

I^Tternois.  Là  sus  une  haute  tour  recon- 

,  gnut  Pantagruel  la  lanterne  de  la  Ro- 


m 


®T^^4o^  chelle,  laquelle  nousfist  bonne  clarté. 
Vismes  aussi  la  lanterne  de  Pharos,  de  Nauplion, 
et  d'Acropolis  en  Athènes,  sacrée  à  Pallas.  Prés  le 
port  est  un  petit  village  habité  par  lesLychnobiens, 
qui  sont  peuples  vivans  de  lanternes,  comme  en  nos 
païs  les  frères  briffaux  vivent  de  nonnains,  gens  de 
bien  et  studieux.  Demosthenes  y  avoit  jadis  lan- 
terné. De  ce  lieu  jusques  au  Palais  fusmes  conduicts 
par  trois  Obeliscolychnies ,  gardes  militaires  du 
havre,  à  baux  bonnets  comme  Albanois,  esquels 
exposasmes  les  causes  de  nos  voyage  et  délibéra- 
tion, laquelle  estoit  là  impetrer  de  la  royne  de 
Lanternois  une  lanterne  pour  nous  esclairer  et  con- 
duire par  le  voyage  que  faisions  vers  l'oracle  de  la 
Bouteille.  Ce  que  nous  promisrent  faire,  et  volon- 
tiers, adjoustans  qu'en  bonne  occasion  etoportunité 
estions  là  arrivez,  et  qu'avions  beau  faire  chois  de 
lanternes,  lors  qu'elles  tenoient  leur  Chapitre  pro- 
vincial. 

Advenans  au  palais  royal,  fusmes  par  deux  lan- 
ternes  d'honneur,  sçavoir  est  la   lanterne  d'Aris- 


PANTAGRUEL  ï3<) 

lophanes  et  la  lanterne  de  Cleanthes,  présentez  à 
la  royne,  à  laquelle  Panurge,  en  langage  lanter- 
nois,  exposa  briefvement  les  causes  de  nostre 
voyage;  et  eusmes  d'elle  bon  recueil,  et  comman- 
dement d'assister  à  son  soupper,  pour  plus  facile- 
ment choisir  celle  que  voudrions  pour  guide.  Ce 
que  nous  pleut  grandement,  et  ne  fusmes  negligens 
bien  tout  noter  et  tout  considérer,  tant  en  leurs 
gestes,  vestemens  et  maintien,  qu'aussi  en  l'ordre 
du  service. 

La  royne  estoit  vestue  de  cristallin  vergé  par  art 
de  tauchie,  et  azzeminé  à  ouvrage  damasquin,  pas- 
sementé  de  gros  diamens.  Les  lanternes  du  sang 
estoient  vestues,  aucunes  de  strain,  autres  de  pierres 
phengites;  le  demeurant  estoit  de  corne,  de  papier, 
de  toille  cirée.  Les  fallots  pareillement,  selon  leurs 
estais  d'antiquité  de  leurs  maisons.  Seulement  j'en 
advisay  une  de  terre,  comme  un  pot,  en  rang  des 
plus  gorgiases  :  de  ce  m'esbahissent,  entendy  que 
c'estoit  la  lanterne  d'Epictetus,  de  laquelle  on  avoit 
autresfois  refusé  trois  mile  dragmes. 

J'y  consideray  diligentement  la  mode  et  accous- 
trement  de  la  lanterne  Polymyxede  Martial,  encore 
plus  de  ricosimyxe  jadis  consacrée  par  Canope, 
fille  de  Tisias.  J'y  notay  tresbien  la  lanterne  Pensile, 
jadis  prinse  deThebes  au  Temple  d'Apollo  Palatin, 
et  depuis  transportée  en  la  ville  de  Cyme  iEolicque 
par  Alexandre  le  conquérant.  J'en  notay  une  autre 
insigne,  à  cause  d'un  beau  fioc  de  soye  cramoisine 


140  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXIII 

qu'elle  avoit  sus  la  teste,  et  me  fut  dit  que  c^estoit 
Bartole,  lanterne  de  droit.  J'en  notay  pareillement 
deux  autres  insignes,  à  cause  des  bourses  declystere 
qu'elles  portoient  à  la  ceincture,  et  me  fut  dictque 
l'une  estoit  le  grand  et  l'autre  le  petit  luminaire  des 
apoticaires. 

L'heure  du  soupper  venue,  la  royne  s'assit  en 
premier  lieu,  consequemment  les  autres,  selon  leur 
degré  et  dignité.  D'entrée  de  table  toutes  furent 
servies  de  grosses  chandelles  de  moulle,  excepté 
que  la  royne  fut  servie  d'un  gros  et  roidde  flambeau 
flamboyant  de  cire  blanche,  un  peu  rouge  par  le 
bout;  aussi  furent  les  lanternes  du  sang  exceptées 
du  reste,  et  la  lanterne  provinciale  de  Mirebalais, 
laquelle  fut  servie  d'une  chandelle  de  noix,  et  la 
provinciale  du  Bas-Poitou,  laquelle  je  vy  estre 
servie  d'une  chandelle  armée.  Et  Dieu  sçait  quelle 
lumière  après  elles  rendoient  avecques  leurs  meche- 
rons.  Exceptez  icy  un  nombre  de  jeunes  lanternes 
du  gouvernement  d'une  grosse  lanterne.  Elles  ne 
luisoient  comme  les  autres,  mais  me  sembloient  avoir 
les  paillardes  couleurs.  Après  soupper  nous  retiras- 
mes  pour  reposer.  Le  lendemain  matin  la  royne 
nous  fîst  choisir  une  lanterne,  pour  nous  conduire, 
des  plus  insignes.  Et  ainsi  prinsmes  congé. 


PANTAGRUEL 


141 


CHAPITRE    XXXIV 

Comment  nous  arrivasmes  à  l'oracle  de  la  Bouteille. 

È  osTRE  noble  lanterne  nous  esclairant 
r  et  conduisant  en  toute  joyeuseté, 
arrivasmes  en  l'isle  désirée,  en  laquelle 
estoit  l'oracle  de  la  Bouteille.  Descen- 
dant Panurge  en  terre,  fist  sur  un  pied  la  gambade 
en  l'air  gaillardement,  et  dist  à  Pantagruel  :  «  Au- 
jourd'huy  avons-nous  ce  que  cherchons  avecques 
fatigues  et  labeurs  tant  divers.  »  Puis  se  recom- 
manda courtoisement  à  nostre  lanterne.  Icelle  nous 
commanda  tous  bien  espérer,  et,  quelque  chose  qui 
nous  apparust,  n'estre  aucunement  effrayez. 

Approchans  au  temple  de  dive  Bouteille,  nous 
convenoit  passer  parmy  un  grand  vinoble  faict  de 
toutes  espèces  de  vignes,  comme  Phalerne,  Mal- 
voisie, Muscadet,  Taige,  Beaune,  Mirevaux,  Or- 
léans, Picardent,  Arbois,  Coussi,  Anjou,  Grave, 
Corsicque,  Verron,  Neracet  autres.  Le  dit  vignoble 
fut  jadis  par  le  bon  Bacchus  planté  avec  telle  béné- 
diction que  tous  temps  il  portoit  feuille,  fleur  et 
fruict,  comme  les  orangiers  de  Suraine.  Nostre  lan- 
terne magnifique  nous  commanda  manger  trois 
raisins  par  homme ,  mettre  du  pampre  en  nos  sou- 
liers, et  prendre  une  branche  verde  en  main  gauche. 

Au  bout  du  vignoble  passasmes  dessous  un  arc 
antique,  auquel  estoit  le  trophée  d'un  beuveur  bien 


142  ■        LIVRE    V,     CHAPITRE     XXXIV 

mignonnementinsculpé,  sçavoir  est  en  un  bien  long 
ordre  de  flaccons,  bourraches,  bouteilles,  fiolles, 
barils,  barraux,  pots,  pintes,  semaises  antiques  pen- 
dentes  d'une  treille  ombrageuse.  En  autre,  grande 
quantité  d'ails,  oignons,  eschalottes,  jambons,  bou- 
targues,  parodelles,  langues  de  bœuf  fumées,  for- 
mages vieux,  et  semblable  confiture  entrelassée  de 
pampre,  et  ensemble  par  grande  industrie  fagottées 
avecquesdes  ceps.  En  autre,  cent  formes  de  voerres, 
comme  voerres  à  pied  et  voerres  à  cheval,  cuveaux, 
retombes,  hanaps,  jadaux,  salvernes,  taces,  gobe- 
lets, et  telle  semblable  artillerie  bacchique.  En  la 
face  de  l'arc,  dessous  le  zoophore,  estoient  ces 
deux  vers  inscripts  : 

Passant  icy  ceste  poterne, 
Garny  toy  de  bonne  lanterne. 

«  A  cela,  dist  Pantagruel,  avons  nous  pourveu, 
car  en  toute  la  région  de  Lanternois  n'y  a  lanterne 
meilleure  et  plus  divine  que  la  nostre.  » 

Cestuy  arc  finissoit  en  une  belle  et  ample  ton- 
nelle, toute  faicte  de  ceps  de  vignes,  aornez  de 
raisins  de  cinq  cens  couleurs  diverses,  et  cinq  cens 
diverses  formes,  non  naturelles,  mais  ainsi  compo- 
sées par  art  d'agriculture,  jaunes,  bleus,  tanez, 
azurez,  blancs,  noirs,  verds,  violets,  riolez,  piolez, 
longs,  ronds,  toranglés,  couillonnez,  couronnez, 
barbus,  cabus,  herbus.  La  fin  d'icelle  estoit  close  de 
trois  antiques  lierres,  bien  verdoyanset  tous  chargez 


PANTAGRUEL  1^3 

de  bagues.  Là  nous  commanda  notre  illustrissime 
lanterne  de  ce  lierre  chascun  de  nous  se  faire  un 
chappeau  albanois  et  s'en  couvrir  toute  la  teste;  ce 
que  fut  faict  sans  demeure. 

«  Dessous,  dist  lors  Pantagruel,  ceste  treille  n'eust 
ainsi  jadis  passé  la  pontife  de  Jupiter.  —  La  raison, 
dist  nostre  preclare  lanterne,  estoit  mystique.  Car  y 
passant  auroit  le  vin,  ce  sont  les  raisins,  au-dessus 
de  la  teste,  et  sembloit  estre  comme  maistrisée  et 
dominée  du  vin,  pour  signifier  que  les  pontifes  et 
tous  personnages  qui  s'adonnent  et  dédient  à  con- 
templation des  choses  divines  doivent  en  tranquil- 
lité leurs  esprits  maintenir,  hors  toute  perturbation 
de  sens,  laquelle  plus  est  manifestée  en  yvrognerie 
qu'en  autre  passion,  quelle  que  soit. 

«  Vous  pareillement  au  temple  ne  seriez  receus 
de  la  dive  Bouteille,  estans  par  cy  dessous  passez, 
sinon  que  Bacbuc  la  noble  pontife  vist  de  pampre 
vos  souliers  plains,  qui  est  acte  du  tout  et  par  entier 
diamètre  contraire  au  premier,  et  signification  évi- 
dente que  le  vin  vous  est  en  mespris,  et  par  vous 
conculqué  et  subjugué.  —  Je,  dist  frère  Jean,  ne 
suis  point  clerc,  dont  me  desplaist;  mais  je  treuve 
dedans  mon  bréviaire  que  en  la  révélation  fut  comme 
chose  admirable  veue  une  femme  ayant  la  lune  sous 
les  pieds  :  c'estoit,  comme  m'a  exposé  Bigot,  pour 
signifier  qu'elle  n'estoit  de  la  race  et  nature  des 
autres,  qui  toutes  ont  à  rebours  la  lune  en  teste,  et 
par  conséquent  le  cerveau  tousjours  lunatique;  cela 


144  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXIV 

m'induit  facillement  à  croire  ce  que  dites,  Madame 
lanterne  m'amie.  » 


CHAPITRE   XXXV 

Comment  nous  desccndisnies  soubs  terre  pour  entrer 
au  temple  de  la  Bouteille,  et  comment  Chinon  est 
la  première  ville  du  monde. 

iNSi  descendismes  sous   terre  par  un 
arceau  incrusté  de   piastre,  peint  au 
dehors     rudement    d'une    danse    de 
^:^W!l-i^b  femmes  et  satyres,  accompagnans  le 
vieil  Silenus  riant  sus  son  asne. 

Là  jedisois  à  Pantagruel  :  «  Geste  entrée  me  ré- 
voque en  souvenir  la  cave  peinte  de  la  première 
ville  du  monde,  car  là  sont  peinctures  pareilles,  en 
pareille  fraischeur,  comme  icy.  —  Où  est,  demanda 
Pantagruel,  qui  est  ceste  première  ville  que  dites? 
—  Chinon,  di-je,  ou  Caynon,  en  Touraine.  —  Je 
sçay,  respondit  Pantagruel,  où  est  Chinon,  et  la 
cave  peinte  aussi;  j'y  ai  beu  maints  verres  de  vin 
frais,  et  ne  fais  doute  aucune  que  Chinon  ne  soit 
ville  antique;  son  blason  l'atteste,  auquel  est  dit 
deux  ou  trois  fois  : 

...  Chinon, 
Petite  ville,  grand  renom, 
Assise  sus  pierre  ancienne  ; 
Au  hault  le  bois,  au  pied  la  Vienne. 


PANTAGRUEL  I45 

Mais  comment  seroit-elle  ville  première  du  monde? 
Où  le  trouvez  vous  par  escrit?  Quelle  conjecture 
en  avez?  —  Je,  dy,  trouve  en  l'Escriture  sacrée 
que  Cayn  fut  premier  bastisseur  de  villes;  vray 
donques  semblable  est  que  la  première,  il,  de  son 
nom,  nomma  Caynon,  comme  depuis  ont  à  son 
imitation  tous  autres  fondateurs  et  instaurateurs  de 
villes  imposé  leurs  noms  à  icelles.  Athené,  c'est  en 
grec  Minerve,  à  Athènes;  Alexandre  à  Alexandrie; 
Constantin  à  Constantinople;  Pompée  à  Pompeio- 
polis,  en  Cilicie;  Adrian  à  Adrianople;  Canaan  aux 
Cananéens;  Saba  aux  Sabeians;  Assur  aux  Assy- 
riens; Ptolomaïs,  Cesarea,  Tiberium,  Herodium, 
en  Judée.  » 

Nous  tenans  ces  menus  propos,  sortit  le  grand 
flasque  (nostre  Lanterne  i'appelloit  phlosque)  gou- 
verneur de  la  dive  Bouteille,  accompagné  de  la 
garde  du  temple,  et  estoient  tous  Bouteillons  Fran- 
çois. Iceluy,  nous  voyans  tyrsigeres,  comme  j'ay 
dit,  et  couronnez  de  lierre,  recognoissant  aussi 
nostre  insigne  lanterne,  nous  fist  entrer  en  seureté, 
et  commanda  que  droit  on  nous  menast  à  la  princesse 
Bacbuc,  dame  d'honneur  de  la  Bouteille  et  pontife 
de  tous  les  mystères.  Ce  que  fut  fait. 


Rabelais.  V. 


[46  LIVRE   V,    CHAPITRE    XXXVL 


CHAPITRE    XXXVI 

Comment  nous  descendismes  les  degrez  teiradiqueSy 
et  de  la  peur  qu'eut  Panurge. 

EPUis  descendismes  un  degré  marbrin 
sous  terre  :  là  estoit  un  repos  ;  tournans 
à  gauche,  en  descendismes  deux  autres  : 
là  estoit  un  pareil  repos  ;  puis  trois 
à  destour,  et  repos  pareil  ;  et  quatre  autres  de  mesme. 
Là  demanda  Panurge  :  «  Est-ce  icy?  —  Quant 
degrez ,  dist  nostre  magnifique  lanterne ,  avez 
compté?  —  Un,  respondit  Pantagruel,  deux,  trois, 
quatre.  —  Quants  sont-ce  ?  demanda  elle.  —  Dix, 
respondit  Pantagruel.  —  Par,  dist  elle,  mesme 
tétrade  pythagorique,  multipliez  ce  qu'avez  résul- 
tant. —  Ce  sont,  dist  Pantagruel,  dix,  vingt ^ 
trente,  quarante.  —  Combien  fait  le  tout?  dist 
elle.  —  Cent,  respondit  Pantagruel.  —  Adjoustez, 
dist  elle,  le  cube  premier  :  ce  sont  huit  ;  au  bout  de 
ce  nombre  fatal  trouverez  la  porte  du  temple.  Et 
y  notez  prudentement  que  c'est  la  vraye  Psyco- 
gonie  de  Platon,  tant  célébrée  par  les  Acade- 
miens,  et  tant  peu  entendue,  de  laquelle  la 
moictié  est  composée  d'unité  des  deux  premiers 
nombres  plains  de  deux  quadrangulaires  et  de  deux 
cubiques.  » 

Descendus    ces    degrez   numeraulx    sous    terre. 


PANTAGRUEL  1 47 

nou5  furent  bien  besoin  premièrement  nos  jambes, 
car  sans  icellesne  descendions  qu'en  rouUant  comme 
tonneaux  en  cave  basse;  secondement,  nostre 
preclare  lanterne,  car  en  ceste  descente  ne  nous 
apparoissoit  autre  lumière  en  plus  que  si  nous  fus- 
sions au  trou  de  Sainct  Patrice  en  Hybernie,  ou 
en  la  fosse  de  Trophonius  en  Boëtie.  Descendus 
environ  septante  et  huit  degrez,  s'escria  Panurge, 
addressant  sa  parolle  à  nostre  luysante  lanterne  ; 

«  Dame  mirifique,  je  vous  prie  de  cœur  contrit» 
retournons  arrière.  Par  la  mort  bœuf,  je  meurs  de 
malle  peur.  Je  consens  jamais  ne  me  marier;  vous 
avez  prinsde  peine  et  fatigues  beaucoup  pour  moy. 
Dieu  vous  le  rendra  en  son  grand  rendouer,  je  n'en 
seray  ingrat  issant  hors  ceste  caverne  des  Troglodi- 
tes.  Retournons,  de  grâce.  Je  doubte  fort  que  soit 
icy  Tenare,  par  lequel  on  descend  en  enfer,  et  me 
semble  que  j'oy  Cerberus  abbayant.  Escoutez,  c'est 
luy,  ou  les  aureilles  me  cornent;  je  n'ay  à  luy  dé- 
votion aucune,  car  il  n'est  mal  des  dens  si  grand 
que  quant  les  chiens  nous  tiennent  aux  jambes.  Si 
c'est  icy  la  fosse  de  Trophonius,  les  lémures  et  lu- 
tins nous  mangeront  tous  vifs,  comme  jadis  ils 
mangèrent  un  des  hallebardiers  de  Demetrius , 
par  faute  de  bribes.  Es  tu  là,  frère  Jean?  Je  te 
prie,  mon  bedon,  tien  toy  prés  de  moy,  je  meurs 
de  peur.  As  tu  ton  bragmard?  Encores  n'ay-je 
armes  aucunes,  n'offensives  ne  defîensives.  Re- 
tournons. 


148  LIVRE    V,     CHAPITRE    XXXVI 

—  J'y  suis^  dist  frère  Jean,  j'y  suis;  n'ayes  peur, 
je  te  tien  au  collet  ;  dix  huit  diables  ne  t'empor- 
teront de  mes  mains,  encores  que  sois  sans  armes. 
Armes  jamais  au  besoin  ne  faillirent  quand  bon  cueur 
est  associé  de  bon  bras  ;  plustost  armes  du  Ciel  pleu- 
veroient,  comme  au  champs  de  la  Crau,  prés  les 
fosses  Mariannes  en  Provence,  jadis  pleurent  cailloux 
(ils  y  sont  encores)  pour  l'aide  d'Hercules,  n'ayant 
autrement  dequoy  combatre  les  deux  enfans  de 
Neptune.  Mais  quoy  ?  Descendons  nous  icy  es  lim- 
bes des  petits  enfans?  Par  Dieu,  ils  nousconchieront 
tous,  ou  bien  en  enfer  à  tous  les  diables?  Cordieu, 
je  les  vous  galleray  bien,  à  ceste  heure  que  j'ay  du 
pampre  en  mes  souliers.  O  que  je  me  battray  verde- 
ment  !  Où  est  ce?  où  sont  ils?  Je  ne  crains  que 
leurs  cornes.  Mais  les  deux  cornes  que  Panurge 
marié  portera  m'en  garentiront  entièrement.  Je  le 
voy  ja,  en  esprit  prophétique^  un  autre  Acteon, 
cornant,  cornu,  cornancul.  —  Garde,  Frater,  dist 
Panurge,  attendant  qu'on  marira  les  moines,  que 
n'espouses  la  fiebvre  quartaine.  Car  je  puisse  donc 
sauf  et  sain  retourner  de  cestuy  hypogée,  en  cas 
que  je  ne  te  la  beline,  pour  seulement  te  faire 
cornigere,  cornipetant;  autrement  pensé-je  bien 
que  la  fiebvre  quarte  est  assez  mauvaise  bague. 
Il  me  souvient  que  Grippe-minaud  te  la  vou- 
lut donner  pour  femme,  mais  tu  l'appellas  héré- 
tique. » 

Icy  fut  le  propos  interrompu  par  nostre  splen- 


PANTAGRUEL 


49 


dide  lanterne,  nous  remonstrantque  là  estoit  le  lieu 
auquel  convenoit  favorer  et  par  suppression  de 
parolles  et  taciturnité  de  langues.  Du  demourant 
fist  response  peremptoire  que  de  retourner  sans 
avoir  le  mot  de  ia  Bouteille  n'eussions  d'espoir 
aucun,  puisqu'une  fois  avions  nos  souliers  feustrez 
de  pampre. 

«  Passons  donques,  dist  Panurge,  et  donnons 
de  la  teste  à  travers  tous  les  diables.  A  périr  n'y 
a  qu'un  coup.  Toutesfois  je  me  reservois  la  vie 
pour  quelque  bataille.  Boutons,  boutons,  passons 
outre.  J'ay  du  courage  tant  et  plus  ;  vray  est  que 
le  cueur  me  tremble,  mais  c'est  pour  la  froideur 
et  relenteur  de  ce  Cavayn.  Ce  n'est  de  peur, 
non,  ne  de  fîebvre.  Boutons,  boutons,  passons, 
poussons,  pissons.  Je  m'appelle  Guillaume  sans 
peur.  » 

CHAPITRE    XXXVII 

Comment  les  portes  du  temple  par  soy  mesme 
admirablement  s* entr' ouvrirent. 

hr-j  N  fin  des  degrez  rencontrasmes  un 
portai  de  fin  jaspe,  tout  compassé  et 
basty  à  ouvrage  et  forme  dorique,  en 
Tss^r^Vs^  la  face  duquel  estoit  en  lettres  ioni- 
ques d^or  trespur  escripte  ceste  sentence  :  'Ev  oTvw 
oiXrfieioi,  c'est  à  dire  en  vin  vérité.  Les  deux  portes 


l5o  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXVII 

estoient  d'arain  comme  coiinthian,  massives,  faites 
à  petites  vinettes,  enlevées  et  esmaillées  mignonne- 
ment  selon  l'exigence  de  la  sculpture ,  et  estoient 
ensemble  jointes  et  refermées  esgalement  en  leur 
mortaise  sans  clavier  et  sans  catenat,  sans  lyaison 
aucune.  Seulement  y  pendoit  un  diamant  indique, 
de  la  grosseur  d'une  febve  egyptiatique,  enchâssé 
en  or  brisé  à  deux  pointes^  en  figure  exagone  et  en 
ligne  directe.  A  chascun  costé  vers  le  mur  pendoit 
une  poignée  de  scordion. 

Là  nous  dist  nostre  noble  lanterne  qu'eussions 
son  excuse  pour  légitime  si  elle  desistoit  plus  avant 
nous  conduire;  seulement  qu'eussions  à  obtempérer 
es  instructions  de  la  pontife  Bacbuc,  car  entrer 
dedans  ne  luy  estoit  permis  pour  certaines  causes, 
lesquelles  taire  meilleur  estoit  à  gens  vivans  vie 
mortelle  qu'exposer.  Mais,  en  tout  événement,  nous 
commanda  estre  en  cerveau,  n'avoir  frayeur  ne  peur 
aucune,  et  d'elle  se  confier  pour  la  retraite.  Puis 
tira  le  diamant  pendant  à  la  commissure  des  deux 
portes,  et  à  dextre  le  jetta  dedans  une  capse  d'ar- 
gent, à  ce  expressément  ordonnée  ;  tira  aussi  de 
Tessueil  de  chascune  porte  un  cordon  de  soye  cra- 
moisine,  long  d'une  toise  et  demie,  auquel  pendoit 
le  scordion,  l'attacha  à  deux  boucles  d'or  expres- 
sément pour  ce  pendantes  aux  costez,  et  se  retira 
à  part. 

Soudainement  les  deux  portes,  sans  que  personne 
y  touchast,  de  soy  mcsme  s'ouvrirent,  et  s'ouvrant 


PANTAGRUEL  l5l 

firent  non  bruit  strident,  non  frémissement  horrible, 
comme  font  ordinairement  portes  de  bronze  rudes 
et  pesantes,  mais  doux  et  gratieux  murmur  reten- 
tissant par  la  voulte  du  temple ,  duquel  soudain 
Pantagruel  entendit  la  cause,  voyant  sous  l'extré- 
mité de  l'une  et  l'autre  porte  un  petit  cylindre,  le- 
quel par  sus  l'esseuil  joignoit  la  porte,  et  se  tour- 
nant selon  qu'elle  se  tiroit  vers  le  mur,  dessus  une 
dure  pierre  d'ophytes,  bien  terse  et  esgalement  po- 
lie, par  son  frottement  faisoit  ce  doux  et  harmonieux 
murmur. 

Bien  je  m'esbahissois  comment  les  deux  portes, 
chascune  par  soy,  sans  l'oppression  de  personne, 
estoient  ainsi  ouvertes;  pour  cestuy  cas  merveilleux 
entendre,  après  que  tous  fusmes  dedans  entrez,  je 
projettay  ma  veuë  entre  les  portes  et  le  mur,  con- 
voiteux  de  sçavoir  par  quelle  force  et  par  quel 
instrument  estoient  ainsi  refermées,  doutant  que 
nostre  amiable  lanterne  eust  à  la  conclusion  d'i- 
celles  apposé  l'herbe  dite  ethiopis ,  moyennant 
laquelle  on  ouvre  toutes  choses  fermées  ;  mais 
j'apperceu  que  la  part  en  laquelle  les  deux  portes 
se  fermoient,  en  la  mortaise  intérieure,  estoit 
une  lame  de  fin  acier,  enclavée  sur  la  bronze  corin- 
thiane, 

J'apperceu  d'avantage  deux  tables  d'aimant  indi- 
ques, amples  et  espoisses  de  demye  paume,  à  cou- 
leur cerulée,  bien  licées  et  bien  polies;  d'icelles 
toute  l'espoisseur  estoit  dedans  le  mur  du  temple 


l52  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXVII 

engravée,  à  l'endroit  auquel  les  portes  entièrement 
ouvertes  avoient  le  mur  pour  fin  d'ouverture. 

Par  doncques  la  rapacité  violente  de  l'aimant, 
les  lames  d'acier,  par  occulte  et  admirable  insti- 
tution de  nature,  patissoient  cestuy  mouvement  ; 
consequemment  les  portes  y  estoient  lentement 
ravies  et  portées,  non  tousjours  toutesfois ,  mais 
seulement  l'aimant  susdit  osté,  par  la  prochaine 
session  duquel  Pacier  estoit  de  l'obéissance  qu'il 
a  naturellement  à  l'aimant  absout  et  dispensé  ; 
ostées  aussi  les  deux  poignées  de  scordion ,  les- 
quelles nostre  joyeuse  lanterne  avoit  par  le  cor- 
don cramoisin  eslongnées  et  suspendues,  parce 
qu'il  mortifie  l'aimant  et  despouille  de  ceste  vertu 
attractive. 

En  l'une  des  tables  susdites,  à  dextre,  estoit  ex- 
quisitement  insculpé  en  lettres  latines  antiquaires  ce 
vers  iambique  senaire  : 

Ducunt  volentemfata,  nokntem  trahunt. 

Les  destinées  meuvent  celuy  qui  consent,  tirent 
celuy  qui  refuse.  En  l'autre  je  veis  à  senestre,  en 
majuscules  lettres,  elegantement  insculpé  ceste  sen- 
tence : 

Toutes  choses  se  meuvent  a  leur  fin. 


PANTAGRUEL  i53 


CHAPITRE   XXXVIII 

Comment  le  pavé  du  temple  estait  faict  par  emble- 
mature  admirable. 


^A^  EUES  ces  inscriptions,  jettay  mes  yeux 
j^))  à  la  contemplation  du  manifique  temple, 
)-''  et  considerois  l'incredible  compacture 
^  du  pavé,  auquel  par  raison  ne  peut 
estre  ouvrage  comparé  qui  onques  soit  ou  ait  esté 
dessous  le  firmament,  fust-ce  celuy  du  temple  de 
Fortune  en  Preneste,  au  temps  de  Sylla,  ou  le  pavé 
des  Grecs  appelle  Asarotum^  lequel  fist  Sosistratus 
en  Pergame.  Car  il  estoit  à  ouvrage  tesseré,  en 
forme  de  petits  carreaux,  tous  de  pierres  fines  et 
polies,  chascune  en  sa  couleur  naturelle  :  Tune  de 
jaspe  rouge  tainct  plaisamment  de  diverses  macules, 
l'autre  d'ophite ,  l'autre  de  porphyre,  l'autre  de 
lycoptalmie  semé  de  scintiles  d'or  menues  comme 
atomes,  l'autre  d'agathe  à  onde  de  petits  flammeaux 
confus  et  sans  ordre,  de  couleur  laictée,  l'autre  de 
calcédoine  trescher,  l'autre  de  jaspe  verd,  avec  cer- 
taines veines  rouges  et  jaunes,  et  estoient  en  leur 
assiete  départies  par  ligne  diagonale. 

Dessus  le  portique,  la  structure  du  pavé  estoit 
une  emblemature,  à  petites  pierres  rapportées,  chas- 
cune en  sa  naïfve  couleur,  servans  au  dessain  des 
figures,  et  estoit  comme  si  par  dessus  le  pavé  susdit 
on  eust  semé  une  jonchée  de  pampre,  sans  trop 


1^4  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXVIII 

curieux  agensement  :  car  en  un  lieu  sembloit  estre 
espandu  largement,  en  l'autre  moins,  et  estoit  ceste 
infoliature  insigne  en  tous  endroits,  mais  singuliè- 
rement y  apparoissoient .  au  demy  jour,  aucuns 
limassons  en  un  lieu,  rampans  sus  les  raisins,  en 
autre  petits  lisars  courans  à  travers  le  pampre  ;  en 
autre  apparoissoient  les  raisins  à  demy  et  raisins 
totalement  meurs,  par  tel  art  et  engin  de  l'archi- 
tecte composez  et  formez  qu'ils  eussent  aussi  faci- 
lement deceu  les  estourneaux  et  autres  petis  oise- 
lets que  fîst  la  peincture  de  Xeuxis  Heracleotain. 
Quoy  que  soit,  ils  nous  trompoient  tresbien,  car  à 
l'endroit  auquel  l'architecte  avoit  le  pampre  bien 
espois  semé,  craignans  nous  offenser  les  pieds,  nous 
marchions  haut  à  grandes  enjambées,  comme  on 
fait  passant  quelque  lieu  inégal  et  pierreux.  Depuis 
jettay  mes  yeux  à  contempler  la  voulte  du  temple, 
avec  les  parois,  lesquels  estoient  tous  incrustez  de 
marbre  et  porphyre,  à  ouvrage  mosayque,  avec 
une  mirifique  emblemature,  depuis  un  bout  jusques 
à  l'autre,  en  laquelle  estoit,  commençant  à  la  part 
senestre  de  Tentrée,  en  élégance  incroiable  repré- 
sentée la  bataille  que  le  bon  Bacchus  gagna  contre 
les  Indians,  en  la  manière  que  s'ensuit. 


PANTAGRUEL  i55 


CHAPITRE  XXXIX 

Comment  en  l'ouvrage  mosayque  du  temple  estoit 
représentée  la  bataille  que  Bacchus  gagna  contre 
les  Indians. 

u  commencement  estoient  en  figure 
diverses  villes,  villages,  chasteaux, 
forteresses,  champs  et  forests,  toutes 
£  ardentes  en  feu.  En  figure  aussi  estoient 
femmes  diverses  forcenées  et  dissolues,  lescjuelles 
metoient  furieusement  en  pièces  veaux,  moutons  et 
brebis  toutes  vives,  et  de  leur  chair  se  paissoient. 
Là  nous  estoit  signifié  comme  Bacchus,  entrant  en 
Indie,  mettoit  tout  à  feu  et  à  sang. 

Ce  nonobstant^  tant  fut  des  Indians  desprisé 
qu'ils  ne  daignèrent  luy  aller  encontre,  ayans  adver- 
tissement  certain  par  leurs  espions  qu'en  son  ost 
n'estoient  gens  aucuns  de  guerre,  mais  seulement 
un  petit  bon  homme,  vieux,  efféminé  et  tousjours 
yvre,  accompagné  de  jeunes  gens  agrestes,  tous 
nuds,  tousjours  dansans  et  sautans,  ayans  queues  et 
cornes,  comme  ont  les  jeunes  chevreaux,  et  grand 
nombre  de  femmes  yvres.  Dont  se  résolurent  les 
laisser  outre  passer,  sans  y  résister  par  armes, 
comme  si  à  honte,  non  à  gloire,  deshonneur  et 
ignominie  leurs  revint,  non  à  honneur  et  prouesse, 
avoir  de  telles  gens  victoire.  En  cestuy  despris, 
Bacchus  tousjours  gaignoit  pais,  et  mettoit  tout  à 


l56  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXIX 

feu,  pource  que  feu  et  foudre  sont  de  Bacchus  les 
armes  paternelles,  et  avant  naistre  au  monde  fut 
par  Jupiter  saulvé  de  foudre,  sa  mère  Semelé  et  sa 
maison  maternelle  arse  et  destruite  par  feu,  et  sang 
pareillement,  car  naturellement  il  en  faict  au  temps 
de  paix  et  en  tire  au  temps  de  guerre.  En  tesmoi- 
gnage  sont  les  champs  en  l'isle  de  Samos,  dits  Pa- 
nema,  c'est  à  dire  tout  sanglant,  auquel  Bacchus 
les  Amazones  acconceut,  fuyantes  de  la  contrée 
des  Ephesians,  et  les  mist  toutes  à  mort  par  phlebo- 
tomie,  de  mode  que  le  dit  champ  estoit  de  sang 
tout  embeu  et  couvert. 

Dont  pourrez  doresnavant  entendre ,  mieux  que 
n'a  descrit  Aristoteles  en  ses  Problèmes ,  pourquoy 
jadis  on  disoit  en  proverbe  commun  :  «  En  temps 
de  guerre  ne  mange  et  ne  plante  menthe.  »  La 
raison  est,  car  en  temps  de  guerre  sont  ordinaire- 
ment départis  coups  sans  respect;  donques  l'homme 
blessé,  s'il  a  celuy  jour  manié  ou  mangé  menthe, 
impossible  est,  ou  bien  difficile,  luy  restreindre  le 
sang.  Consequemment  estoit  en  la  susdite  emble- 
mature  figuré  comment  Bacchus  marchoit  en  bataille, 
et  estoit  assis  sur  un  char  magnifique  tiré  par  trois 
coubles  de  jeunes  pards  joints  ensemble;  sa  face 
estoit  comme  d'un  jeune  enfant,  pour  enseignement 
que  tous  bons  beuveurs  jamais  n'envieillissent,  rouge 
comme  un  chérubin,  sans  un  poil  de  barbe  au  man- 
ton.  En  teste  portoit  cornes  agues,  au  dessus 
d'icelles  une  belle  couronne  faicte  de  pampre  et  de 


PANTAGRUEL  I Sj 

raisins,  avec  une  mitre  rouge  cramoisine ,  et  estoit 
chaussé  de  brodequins  dorez. 

En  sa  compagnie  n'estoit  un  seul  homme,  toute 
sa  garde  et  toutes  ses  forces  estoient  de  Bassarides, 
Evantes,  Euhyades,  Edonides,  Trieterides,  ^gj" 
gies,  Mimallones,  Menades,  Thyades  etBacchides, 
femmes  forcenées,  furieuses,  enragées,  ceinctes  de 
dragons  et  serpens  vifs  en  Heu  de  ceinctures ,  les 
cheveux  voletans  en  l'air,  avecques  frontaux  de 
vignes,  vestues  de  peaux  de  cerfs  et  de  chèvres,  por- 
tans  en  mains  petites  haches,  tyrses,  rançons,  et 
hallebardes  en  forme  de  noix  de  pin,  et  certains 
petits  boucliers  légers,  sonnans  et  bruyans  quand  on 
y  touchoit  tant  peu  feust,  desquels  elles  usoient, 
quand  besoin  estoit,  comme  de  tabourins  et  de  tym- 
bons.  Le  nombre  d'icelles  estoit  septante  et  neuf 
mille  deux  cens  vingt  sept.  L'avantgarde  estoit 
menée  par  Silenus,  homme  auquel  il  avoit  sa  fiance 
totalle,  et  duquel  par  le  passé  avoit  la  vertu  et  ma- 
gnanimité de  courage  et  prudence  en  divers  endroits 
congneu. 

C'estoit  un  petit  vieillard  tremblant,  courbé,  gras, 
ventru  à  plain  basts,  et  les  aureilles  avoit  grandes 
et  droictes,  le  nez  pointu  et  aquilin,  et  les  sour- 
cilles rudes  et  grandes  comme  un  sillon;  estoit  monté 
sus  un  asne  couillard;  en  son  poing  tenoit  poursoy' 
appuyer  un  baston,  pour  aussi  gallentement  com- 
batre,  si  par  cas  convenoit  descendre  en  pieds,  et 
estoit  vestu  d'une  robbe  jaulne  à  usage  de  femme. 


l58  LIVRE    V,    CHAPITRE    XXXIX 

Sa  compagnie  estoit  de  jeunes  gens  champestres , 
cornus  comme  chevreaux  et  cruels  comme  lions, 
tous  nuds,  toujours  chantans  et  dansans  les  cor- 
daces  :  on  les  appelloit  Tityres  et  Satyres.  Le  nom- 
bre estoit  octante  cinq  mille  six  vingts  et  treize. 

Pan  menoit  l'arrieregarde,  homme  horrifique  et 
monstrueux.  Car  par  les  parties  inférieures  du  corps 
il  ressembloit  à  un  bouc,  les  cuisses  avoit  velues, 
portoit  cornes  en  teste  droictes  contre  le  ciel.  Le 
visage  avoit  rouge  et  enflambé,  et  la  barbe  bien  fort 
longue;  homme  hardy,  courageux,  hazardeux  et 
facile  à  entrer  en  courroux;  en  main  senestre  por- 
toit une  fluste,  en  dextre  un  baston  courbé;  ses 
bandes  estoient  semblablement  composées  de  Saty- 
res, Hemipans,  Aegipans,  Sylvains,  Faunes,  Lé- 
mures, Lares,  Farfadets  et  Lutins,  en  nombre  de 
soixante  et  dixhuit  mille  cens  et  quatorze. 

Le  signe  commun  à  tous  estoit  ce  mot  :  Evohe. 


PANTAGRUEL  I Sg 

CHAPITRE    XL 

Comment  en  Vemhlematare  estait  figuré  le  hourt  et 
l'assaut  que  donnait  le  bon  Bacchus  contre  les 
Indians. 

ONSEQUEMMENT  estoit  figuré  le  hourt  et 
l'assaut  que  donnoit  le  bon  Bacchus 
contre  les  Indians.  Là  consideroisque 
SilenuSj  chef  de  l'avantgarde,  suoit  à 
grosses  gouttes,  et  son  asne  aigrement  tourmen- 
toit;  l'asne  de  mesmes  ouvroit  la  gueule  horrible- 
ment, s'esmouchoit,  desmanchoit,  s'escarmouchoit 
en  façon  espouvantable,  comme  s'il  eust  un  freslon 
au  cul. 

Les  Satyres,  capitaines,  sergens  de  bandes,  caps 
d'escadre,  corporals,  avec  cornaboux  sonnant  les 
orthies,  furieusement  tournoyoient  autour  de  l'ar- 
mée à  saux  de  chèvres,  à  bons,  à  pets,  à  ruades  et 
pennades,  donnans  courage  aux  compagnons  de 
vertueusement  combatre.  Tout  le  monde  en  figure 
cryoit  Evohe  !  Les  Menades  premières  faisoient  in- 
cursion sur  les  Indians  avec  cris  horribles  et  sons 
espouvantables  de  leurs  tymbons  et  bouchers;  tout 
le  ciel  en  retentissoit,  comme  designoit  l'emblema- 
ture,  à  fin  que  plus  tant  n'admirez  l'art  d'Apelles, 
Aristides  Thebain,  et  autres  qui  ont  painct  les  ton- 
nerres, esclairs,  foudres,  vents,  paroles,  lémures,  et 
les  esprits. 


l6o  LIVRE    V,    CHAPiTRE    XL 

Consequemment  estoit  i'ost  des  Indians  comme 
adverty  que  Bacchus  mettoit  leur  pays  en  vastation. 
En  front  estoient  les  elephans,  chargez  de  tours, 
avec  gens  de  guerre  en  nombre  infiny;  mais  toute 
l'armée  estoit  en  routte,  et  contre  eux  et  sus  eux  se 
tournoient  et  marchoient  leurs  elephans  par  le 
tumulte  horrible  des  Bacchides  et  la  terreur  panique 
qui  leur  avoit  le  sens  tollu.  Là  eussiez  veu  Silenus 
son  asne  aigrement  talonner,  et  s'escrimer  de  son 
baston  à  la  vieille  escrime,  son  asne  voltiger  après 
les  elephans  la  gueule  bée,  comme  s'il  brailloit,  et 
braillant  martiallement(en  pareille  braveté  que  jadis 
il  esveilla  la  nymphe  Lotis  en  plains  Bacchanales, 
quand  Priapus  plein  de  priapisme  la  vouloit  dor- 
mant priapiser  sans  la  prier)  sonnast  l'assaut. 

Là  eussiez  veu  Pan  sauteler  avec  ses  jambes  tortes 
autour  des  Menades,  avec  sa  fluste  rustique  les 
exciter  à  vertueusement  combatre.  Là  eussiez 
aussi  veu  en  après  un  jeune  Satyre  mener  prison- 
niers dixsept  roys,  une  Bacchide  tirer  avec  ses  ser- 
pens  quarante  et  deux  capitaines,  un  petit  Faune  por- 
ter douze  enseignes  prinses  sur  les  ennemis,  et  le 
bon  homme  Bacchus  sur  son  char  se  pourmener  en 
seureté  parmy  le  camp,  riant,  se  gaudissant  et  beu- 
vant  d'autant  à  un  chascun.  En  fin  estoit  repré- 
senté en  figure  emblématique  le  trophée  de  la  vic- 
toire et  triomphe  du  bon  Bacchus. 

Son  char  triomphant  estoit  tout  couvert  de  lierre 
prins  et  cueilly  en  la  montagne  Meros,  et  ce  pour  la 


PANTAGRUEL  l6l 

rarité,  laquelle  hausse  le  pris  de  toutes  choses  en 
Indie,  expressément  d'icelles  herbes.  En  ce  depuis 
l'imita  Alexandre  le  Grand  en  son  triomphe  Indique, 
et  estoit  le  char  tyré  par  elephans  joints  ensemble. 
En  ce  depuis  l'imita  Pompée  le  Grand,  à  Rome, 
en  son  triomphe  aphricain.  Dessus  estoit  le  noble 
Bacchus  beuvant  en  un  canthare.  En  ce  depuis  l'imita 
Gains  Marins  après  la  victoire  des  Gimbres,  qu'il 
obtint  prés  Aix  en  Provence.  Toute  son  armée  estoit 
couronnée  de  lierre,  leurs  tyrses,  boucliers  et  tym- 
bons  en  estoient  couvers;  il  n'estoit  l'asne  de  Sile- 
nus  qui  n'en  fust  capparaçonné. 

Es  costez  du  char  estoient  les  roys  Indians,  prins 
et  liez  à  grosses  chaisnes  d'or;  toute  la  brigade 
marchoit  avec  pompes  divines  en  joye  et  liesse  indi- 
cible, portant  infinis  trophées,  ferculeset  despouilles 
des  ennemis,  en  joyeux  epinicies  et  petites  chan- 
sons villatiques  et  dithyrambes  resonnans.  Au  bout 
estoit  descript  le  pays  d'Egipte  avec  le  Nil  et  ses 
crocodilles,  cercopitheces,  ibides,  singes,  trochiles, 
ichneumones,  hipopotames,  et  autres  bestes  à  luy 
domestiques,  et  Bacchus  marchant  en  icelle  contrée 
à  la  conduite  de  deux  beufs,  sus  l'un  desquels  estoit 
escript  en  lettres  d'or  Apis,  sus  l'autre  Osyris, 
pource  qu'en  Egipte,  avant  la  venue  de  Bacchus, 
n'avoit  esté  veu  beuf  ny  vache. 


Rabelais.  V. 


>2  LIVRE    V,    CHAPITRE    XLI 

CHAPITRE  XLI 

Comment  le  temple  estait  esclairé  par  une  lampe 
admirable. 

VANT  qu'entrer  à  Texposition  de  la  Bou- 
teille, je  vous  descrirayla  figure  admi- 
rable d'une  lampe  moyennant  laquelle 
.estoit  eslargie  lumière  partout  le  tem- 
ple, tant  copieuse  qu'encor  qu'il  fust  subterrain,  on 
y  voyoit  comme  en  plein  midy  nous  voyons  le  soleil 
cler  et  serain,  luysant  sur  terre. 

Au  milieu  de  la  voulte  estoit  un  anneau  d'or 
massif  attaché,  de  la  grosseur  de  plein  poing,  au- 
quel pendoient  de  grosseur  peu  moindre  trois 
chesnes  bien  artificiellement  faites,  lesquelles,  deux 
pieds  et  demy  en  l'air,  comprenoient  en  figure 
triangle  une  lame  de  fin  or,  ronde,  de  telle  gran- 
deur que  le  diamètre  excedoit  deux  coudées  et 
demye  palme.  En  icelle  estoient  quatre  boucles  ou 
pertuys,  en  chascune  desquelles  estoit  fixement  re- 
tenue une  boule  vuyde,  cavée  par  le  dedans,  ou- 
verte du  dessus  comme  petite  lampe,  ayant  en  cir- 
conferance  environ  deux  palmes,  et  estoient  toutes 
de  pierres  bien  précieuses,  l'une  d'améthyste,  l'autre 
de  carboucle  lybien,  la  tierce  d'opalle,  la  quarte 
d'anthracite.  Chascune  estoit  plaine  d'eau  ardente 
cinq  fois  distilce  par  alambic  serpentin,  inconsomp- 
tible  comme  l'huille  que  jadis  mist  Callimachus  en 


PANTAGRUEL  l63 

la  lampe  d'or  de  Pallas  en  l'Acropolis  d'Athènes, 
avec  un  ardent  lychnion,  faict  part  de  lin  abestin, 
comme  estoit  jadis  au  temple  de  Jupiter  en  Ammo- 
nie  (et  le  veit  Cleombrotus,  philosophe  tresstudieux), 
part  de  lin  carpasien,  lesquels  par  feu  plustost  sont 
renouveliez  que  consommez. 

Au  dessouz  d'icelle  lampe,  environ  deux  pieds  et 
demy,  les  trois  chesnes  en  leurs  figures  premières 
estoient  embouclées  en  trois  anses,  lesquelles  issoient 
d'une  grande  lampe  ronde  de  cristalin  trespur, 
ayans  en  diamètre  une  coudée  et  demye,  laquelle 
au  dessus  estoit  ouverte  environ  deux  palmes;  par 
ceste  ouverture  estoit  au  milieu  posé  un  vaisseau  de 
cristalin  pareil,  en  forme  de  coucourde,  ou  comme 
à  un  urinai,  et  descendoit  jusques  au  fonds  de  la 
grande  lampe  avec  telle  quantité  de  la  susdicte  eau 
ardente  que  la  flamme  du  lin  abestin  estoit  droicte- 
ment  au  centre  de  la  grande  lampe.  Par  ce  moyen 
sembloit  donc  tout  le  corps  spherique  d'icelle  ardre 
et  enflamboyé,  parce  que  le  feu  estoit  au  centre  et 
poinct  moyen. 

Et  estoit  difficile  d'y  asseoir  ferme  et  constant 
regard,  comme  on  ne  peut  au  corps  du  soleil,  estant 
la  matière  de  merveilleuse  perspicuité,  et  l'ouvrage 
tant  diaphane  et  subtil,  par  la  flexion  des  diverses 
couleurs,  qui  sont  naturelles  es  pierres  précieuses, 
des  quatre  petites  lampes  supérieures  à  la  grand 
inférieure,  et  d'icelles  quatre  estoit  la  resplandeur 
en  tous  points  inconstante  et  vacillante  parle  temple. 


164  LIVRE   V,    CHAPITRE   XII 

Venant  d'avantage  icelle  vague  lumière  toucher  sur 
la  pollissure  du  marbre,  duquel  estoit  incrusté  tout 
le  dedans  du  temple,  apparoissoient  telles  couleurs 
que  voyons  en  l'arc  céleste  quand  le  clair  soleil 
touche  les  nues  pluvieuses. 

L'invention  estoit  admirable,  mais  encores  plus 
admirable,  ce  me  sembloit,  que  le  sculpteur  avoit 
autour  de  la  corpulance  d'icelle  lampe  cristaline 
engravéeà  ouvrage  catagljphe  une  prompte  et  gail- 
larde bataille  de  petis  enfans  nuds,  montez  sus  des 
petis  chevaux  de  bois,  avec  lances  de  virolets  et 
pavois  faits  subtilement  de  grappes  de  raisins  entre- 
lassées de  pampre,  avec  gestes  et  effors  puériles 
tant  ingénieusement  par  art  exprimez  que  nature 
mieux  ne  le  pourroit.  Et  ne  sembloient  engravez 
dedans  la  matière,  mais  en  bosse,  ou  pour  le  moins 
en  crotesque  apparoissoient  enlevez  totalement, 
moyennant  la  diverse  et  plaisante  lumière,  laquelle, 
dedans  contenue,  ressortissoit  par  la  sculpture. 


PANTAGRUEL 


65 


CHAPITRE   XLII 

Comment  par  la  pontife  Bacbuc  nous  fust  monstre 
dedans  le  temple  une  fontaine  fantastique. 

ONSiDERANS  en  ecstase  ce  temple  miri- 
fique et  lampe  mémorable,  s'offrit 
à  nous  la  vénérable  pontife  Bacbuc 
avec  sa  compagnie,  à  face  joyeuse  et 
riante;  et,  nous  voyans  accoustrez  comme  a  esté 
dit,  sans  difficulté  nous  introduit  au  lieu  moyen  du 
temple,  auquel,  dessouz  la  lampe  susdite,  estoit  la 
belle  fontaine  fantastique. 


CHAPITRE  XLIII 

Comment  l'eau  de  la  fontaine  rendoit  goust  de  vin, 
selon  l'imagination  des  beuvans. 

s  nous  commanda  estre  hanaps, 
I^N^  tasses  et  gobelets  présentez,  d'or, 
!ii  d'argent,  de  crystalin,  de  porcelaine, 
2  et  fusmes  gratieusement  invitez  à 
boire  de  la  liqueur  sourdante  d'icelle  fontaine,  ce 
que  fismes  tresvolontiers  :  car  pour  plainctive  es- 
toit  une  fontaine  fantastique,  d'estofîe  et  ouvrage 
plus  précieux,  plus  rare  et  mirifique  qu'onques 
n'en  songea  dedans  les  limbes  Pluto.  Le  soubaste- 


l66  LIVRE    V,    CHAPITRE   XLIII 

ment  d'icelle  estoit  de  trespur  et  treslimpide  ala- 
bastre,  haulteur  ayant  de  trois  palmes,  peu  plus,  en 
figure  heptagonne,  esgalement  party  par  dehors, 
avec  ses  stylobates,  arulettes,  cimasultes  et  undicu- 
lations  doriques  à  Tentour.  Par  dedans  estoit  ronde 
exactement.  Sus  le  poinct  moyen  de  chascun  an- 
gle et  marge  estoit  assise  une  coulomne  ventri- 
cule, en  forme  d'un  cycle  d'yvoire  ou  alabastre 
(les  modernes  architectes  l'appellent  portri),  et  es- 
toient  sept  en  nombre  total  selon  les  sept  angles. 
La  longueur  d'icelles,  depuis  les  bases  jusques  aux 
architraves,  estoit  de  sept  palmes,  peu  moins,  à 
juste  et  exquise  dimension  d'un  diamètre  passant 
par  le  centre  de  la  circonférence  et  rotondité  inté- 
rieure. 

Et  estoit  l'assiette  en  telle  composition  que,  pro- 
jettans  la  veuë  derrière  l'une,  quelle  que  fust  en  sa 
cube,  pour  regarder  les  autres  opposites,  trouvions 
le  cône  pyramidal  de  nostre  ligne  visuale  finer  au 
centre  susdit,  et  là  recevoir,  de  deux  opposites,  ren- 
contre d'un  triangle  equilateral,  duquel  deux  lignes 
partissoient  esgalement  la  colomne.  Celle  que  vou- 
lions mesurer,  et  passante  d'un  costé  et  d'autre, 
deux  colomnes  franches  à  la  première  tierce  partie 
d'intervalle,  rencontroient  leur  ligne  basique  et  fon- 
damentale, laquelle  par  ligne  consulte  pourtraicte 
jusques  au  centre  universal,  esgalement  mipartie, 
rendoit  en  juste  départ  la  distance  des  sept  colom- 
nes opposites  par  ligne  directe,  principiante  à  l'angle 


PANTAGRUEL 


167 


obtus  de  la  marge,  comme  vous  sçavez  qu'en  toute 
figure  angulaire  impare  un  angle  tousjours  est  au 
milieu  des  deux  autres  trouvé  intercalant.  En  quoy 
nous  estoit  tacitement  exposé  que  sept  demis  diamè- 
tres font  en  proportion  géométrique  amplitude  et 
distance,  peu  moins,  telle  qu'est  la  circonferance  de 
la  figure  circulaire  de  laquelle  ils  seroient  extraicts, 
sçavoir  est  trois  entiers  avec  une  huitiesme  et  demie, 
peu  plus,  ou  une  septiesme  et  demie,  peu  moins, 
selon  l'antique  advertissement  d'Euclides,  Aristo- 
teles,  Archimedes  et  autres. 

La  première  colomne,  sçavoir  est  celle  laquelle  à 
l'entrée  du  temple  s'objectoit  à  nostre  veuë,  estant 
de  saphir  azuré  et  céleste;  la  seconde  de  hiacinthe 
naïfvement  la  couleur,  avec  lettres  grecques  A  I  en 
divers  lieux,  représentant  de  celle  fleur,  en  laquelle 
fut  d'Ajax  le  sang  colericque  converty;  la  tierce  de 
diamant  anachite,  brillant  et  resplendissant  comme 
foudre;  la  quarte  de  rubis  baillay,  masculin  et  ame- 
thistizant,  de  manière  que  sa  flame  et  lueur  finis- 
soit  en  pourpre  et  violet,  comme  est  l'amethiste;  la 
quinte  d'emeraude,  plus  cinq  cens  fois  magnifique 
qu'onques  ne  fut  celle  de  Serapis  dedans  le  laby- 
rinthe des  Egyptiens,  plus  floride  et  plus  luysante 
que  n'estoient  celles  qu'en  lieu  des  yeux  on  avoit 
apposé  au  lion  marbrin  gisant  prés  le  tombeau  du 
roy  Hermias;  la  sexte  d'agathe,  plus  joyeuse  et  va- 
riante en  distinctions  de  macules  et  couleurs  que  ne 
fut  celle  que  tant  chère  tenoit  Pirrhus,  roy  desEpy- 


l68  LIVRE    V,    CHAPITRE    XLIII 

rotes;    la    septiesme    de   sienite    transparente,    en 
blancheur  de  berylle,  avec  resplendeur  comme  miel 
hymetian,  et  dedans  y  apparoissoit  la  lune,  en  figure 
et  mouvement  telle  qu'elle  est  au  ciel,  pleine,  silente, 
croissante  ou  décroissante  :  qui  sont  pierres  par  les 
antiques  Caldeans  et  mages  attribuées  aux  sept  pla- 
nettes  du  ciel.  Pour  laquelle  chose  par  plus  rude 
Minerve  entendre,  sus  la  première  de  saphir  estoit, 
au  dessus  du  chapiteau,  à  la  vive  et  centrique  ligne 
perpendiculaire,  eslevée,  en  plomb  elutian  bien  pré- 
cieux, l'image  de  Saturne  tenant  sa  faux,  ayant  aux 
pieds  une  grue  d'or  artificiellement  esmaillée,  selon 
la  competance  des   couleurs,   naïfvement    deuz   à 
l'oiseau  saturnin;  sus  la  seconde  de  hiacinthe  tour- 
nant à  gausche  estoit  Jupiter  en  estain  jovetian,  sus 
la  poictrine  un  aigle  d'or  esmaillé  selon  le  naturel; 
sus  la  troisiesme  Phebus  en  or  obrizé,  en  sa  main 
dextre  un  coq  blanc;  sus  la   quatriesme  en  airain 
corinthien  Mars,  à  ses  pieds  un  lion;  sus  la  cinquiesme 
Venus  en  cuyvre,  matière  pareille  à  celle  dont  Aris- 
tonides  fist  la  statue  d'Athamas,  exprimant  en  rou- 
gissante blancheur  la  honte  qu'il  avoit  contemplant 
Learche,  son  fils,  mort  d'une  cheute  à  ses  pieds; 
sus  la  sixiesme  Mercure  en  hydrargyre,  fixe,  malea- 
ble  et  immobile,  à  ses  pieds  une  cigogne;   sus  la 
septiesme  la  Lune  en  argent,  à  ses  pieds  un  lévrier. 
Et  estoient  ces  statues  de  telle  hauteur,  qui  estoit 
la  tierce  partie  des  colonnes  subjettes,  peu  plus, 
tant  ingénieusement  représentées,  selon  le  portraict 


PANTAGRUEL  169 

des  mathématiciens,  que  le  canon  de  Polycletus, 
lequel  faisant  fut  dit  l'art  apprendre  de  l'art  avoir 
fait,  à  peine  y  eust  esté  receu  à  comparaison. 

Les  bases  des  colonnes,  les  chapiteaux,  les  archi- 
traves, zoophores  et  comices,  estoient  à  ouvrage 
phrygien,  massives,  d'or  plus  pur  et  plus  fin  que 
n'en  porte  le  Leede  prés  Montpelier,  Gange  en 
Indie,  le  Pau  en  Italie,  l'Hebrus  en  Thrace,  leTage 
en  Espagne,  le  Pactol  en  Lydie;  les  arceaux  entre 
les  colomnes  surgeans,  de  la  propre  pierre  d'icelles 
jusques  à  la  prochaine  par  ordre,  sçavoir  est  de 
saphir  vers  le  hiacinthe,  de  hiacinthe  vers  le  dia- 
mant, et  ainsi  consécutivement.  Dessus  les  arces  et 
chapiteaux  de  colomne  en  face  intérieure  estoit  une 
croppe,  érigée  pour  couverture  de  la  fontaine,  la- 
quelle derrière  l'assiette  des  planettes  commençoit 
en  figure  heptagone,  et  lentement  finissoit  en  figure 
spherique,  et  estoit  de  cristal  tant  emundé,  tant 
diaphane  et  tant  poly,  entier  et  uniforme  en  toutes 
ses  parties,  sans  venes,  sans  nuées,  sans  glassons, 
sans  capilamens,  que  Xenocrates  onques  n'en  vid 
qui  fust  à  luy  à  parangonner. 

Dedans  la  corpulance  d'icelle  estoient  par  ordre 
en  figure  et  characteres  exquis  artificiellement  inscul- 
pez  les  douze  signes  du  zodiaque,  les  douze  mois 
de  l'an,  avec  leurs  proprietez,  les  deux  solstices,  les 
deux  equinoxes,  la  ligne  eclyptique,  avec  certaines 
plus  insignes  estoiles  fixes  autour  du  pol  antar- 
tique,  et  ailleurs,  par  tel   art  et  expression  que  je 

22 


yo 


LIVRE    V,     CHAPITRE    XLIII 


pensois  estre  ouvrage  du  roy  Necepsus  ou  de  Peto- 
siris,  antique  mathématicien. 

Sus  le  sommet  de  la  croppe  susdite,  correspon- 
dant au  centre  de  la  fontaine,  estoient  trois  unions 
eleichies,  uniformes,  de  figure  turbinée  en  totale 
perfection  lachrimale,  toutes  ensemble  cohérentes,  en 
forme  de  fleur  de  lis,  tant  grandes  que  la  fleur  exce- 
doit  une  palme.  Du  calice  d'icelles  sortoit  un  car- 
boucle  gros  comme  un  œuf  d'autruche,  taillé  en 
forme  heptagonne  (c'est  nombre  fort  aimé  de  Na- 
ture), tant  prodigieux  et  admirable  que,  levans 
nos  yeux  pour  le  contempler,  peu  s'en  faillit  que 
perdissions  la  veuë  :  car  plus  flamboyant  ne  plus 
croissant  est  le  feu  du  soleil,  ne  l'esclair;  lors  il 
nous  apparoissoit  tellement  qu'entre  justes  estima- 
teurs jugé  facilement  seroit  plus  estre  en  ceste  fon- 
taine et  lampes  cy-dessus  descriptes  de  richesses  et 
singularitez  que  n'en  contiennent  l'Asie,  l'Aff'rique 
et  l'Europe  ensemble.  Et  eust  aussi  facilement 
obscurcy  le  pantharbe  de  loachas,  magicien  Indic, 
c^ue  sont  les  estoilles  par  le  soleil  et  clair  midy. 

Aille  maintenant  se  vanter  Cleopatra,  royne  d'E- 
gypte, avec  ses  deux  unions  pendens  à  ses  aureilles, 
desquels  l'un,  présent  Antonius  triumvir,  elle  par 
force  de  vinaigre  fondit  en  eau,  estant  à  l'estimation 
de  cent  fois  sexterces. 

Aille  Pompeïe  Plautine  avec  sa  robbe  toute  cou- 
verte d'emeraudes  et  marguerites,  en  tissure  alter- 
native, laquelle  tiroit  en  admiration  tout  le  peuple 


PANTAGRUEL 


7 


de  la  ville  de  Rome,  laquelle  on  disoit  estre  fosse 
et  magazin  des  vainqueurs  larrons  de  tout  le 
monde. 

Le  coulement  et  laps  de  la  fontaine  estoit  par  trois 
tubules  et  canals  faits  de  marguerites  fines  en  l'as- 
siette de  trois  angles  equilateraux  promarginaires 
cy-dessus  exposez,  et  estoientles  canals  produits  en 
ligne  limaciale  bipartiente.  Nous  avions  iceux  con- 
sidéré, ailleurs  tournions  nostre  veuë,  quand  Bac- 
buc  nous  commanda  entendre  à  l'exiture  de  l'eau; 
lors  entendismes  un  son  à  merveille  harmonieux, 
obtus  toutesfois  et  rompu,  comme  de  loin  venant  et 
soubterrain.  En  quoy  plus  nous  sembloit  délectable 
que  si  apert  eust  esté  et  de  prés  ouy.  De  sorte 
qu'autant  comme  les  fenestres  de  nos  yeux,  nos  es- 
prits s'estoient  oblectez  à  la  contemplation  des 
choses  susdites,  autant  en  restoit  il  aux  aureilles,  à 
l'audiance  de  ceste  harmonie. 

Adonc  nous  dist  Bacbuc  :  «  Vos  philosophes 
nient  estre  par  vertu  de  figures  mouvement  fait  ;  oyez 
icy,  et  voyez  le  contraire.  Par  la  seule  figure  lima- 
ciale que  voyez  bipartiente,  ensemble  une  quintuple 
infoliature  mobile  à  chascune  rencontre  intérieure, 
telle  qu'est  en  la  veine  cave  au  lieu  qu'elle  entre  le 
dextre  ventricule  du  cueur,  est  ceste  sacrée  fon- 
taine excolée,  et  par  icelle  une  armonie  telle  qu'elle 
monte  jusques  à  la  mer  de  vostre  monde.  »  Puis 
commanda  qu'on  nous  fist  boire. 

Car,  pour  clerement  vous  advertir,  nous  ne  som- 


172  LIVRE    V,     CHAPITRE     XLIII 

mes  du  calibre  d'un  tas  de  veaux  qui,  comme  les 
passereaux  ne  mangent  sinon  qu'on  leur  tappe  la 
queue,  pareillement  ne  boivent  ne  mangent  sinon 
qu'on  les  rue  à  grands  coups  de  levier;  jamais 
personne  n'esconduisons  nous  invitant  courtoise- 
ment à  boire.  Puis  nous  interrogua  Bacbuc,  de- 
mandant que  nous  en  sembloit.  Nouslujfismesres- 
ponse  que  ce  nous  sembloit  bonne  et  fresche  eau  de 
fontaine,  limpide  et  argentine  plus  que  n'est  Argi- 
rondes  en  Etolie,  Peneus  en  Thessalie,  Axius  en 
Mydonie,  Cidnus  en  Cilicie,  lequel,  voyant  Alexan- 
dre Macedon  tant  beau,  tant  clair  et  tant  froid  en 
cœur  d'esté,  composa  la  volupté  de  soy  dedans 
baigner  au  mal  qu'il  prevoyoit  luy  advenir  de  ce 
tiansitoire  plaisir.  «  Ha!  dist  Bacbuc,  voila  que 
c'est  non  considérer  en  soy  ni  entendre  les  mouve- 
mens  que  faict  la  langue  musculeuse,  lorsque  le 
boire  dessus  coule  pour  descendre  en  l'estomac. 
Gens  peregrins,  avez-vous  les  gosiers  enduits,  pavez 
et  esmaillez,  comme  eut  jadis  Pythillus,  dit  Theutes, 
que  de  ceste  liqueur  deïfique  onques  n'avez  le  goust 
ne  saveur  recongneu?  Apportez  icy,  dist  à  ses  da- 
moiselles,  mes  descrottoires  que  sçavez,  à  fin  de  leur 
racler,  esmonder  et  nettoyer  le  palat.  » 

Furent  donques  apportez  beaux  gros  et  joyeux 
jambons,  belles  grosses  et  joyeuses  langues  de 
bœuf  fumées,  saumades  belles  et  bonnes,  cervelats, 
boutargues,  bonnes  et  belles  saucisses  de  venaison, 
et  tels  autres  ramonneurs  de  gosier;  par  son  com- 


PANTAGRUEL 


■75 


mandement  nous  en  mangeasmes  jusques  là  que 
confessions  nos  estomachs  estre  tresbienescurez,  de 
soif  nous /importunant  assez  fascheusement;  donc 
nous  dist  :  «  Jadis  un  capitaine  Juif,  docte  et  che- 
valeureux,  conduisant  son  peuple  par  les  desers  en 
extrême  famine,  impetra  des  cieux  la  manne,  la- 
quelle leur  estoit  de  goust  tel  par  imagination  que 
paravant  realement  leur  estoient  les  viandes.  Icy  de 
mesme,  beuvans  de  ceste  liqueur  mirifique,  sentirez 
goust  de  tel  vin  comme  l'aurez  imaginé.  Or  imagi- 
nez et  beuvez.  «  Ce  que  nous  fîsmes. 

Puis  s'escria  Panurge,  disant  :  «  Par  Dieu  !  c'est 
ici  vin  de  Beaune,  meilleur  qu'onques  jamais  je 
beus,  ou  je  me  donne  à  nonante  et  seize  diables. 
O  !  pour  plus  longuement  le  gouster,  qui  auroit  le 
col  long  de  trois  coudées,  comme  desiroit  Phi- 
loxenus,  ou  comme  une  grue,  ainsi  que  souhaittoit 
Melanthius!  —  Foy  de  lanternier,  s'escria  frère 
Jean,  c'est  vin  de  Grèce,  gallant  et  voltigeant,  O  ! 
pour  Dieu,  amye,  enseignez-moy  la  manière  com- 
ment tel  le  faictes.  —  A  moy,  dist  Pantagruel,  il 
me  semble  que  sont  vins  de  Mirevaux,  car  avant 
boire  je  l'imaginois.  Il  n'a  que  ce  mal  qu'il  est 
frais,  mais  je  dis  frais  plus  que  glasse,  que  l'eau  de 
Nonacris  et  Dercé,  plus  que  la  fontaine  de  Con- 
thoporie  en  Corinthe,  laquelle  glassoit  l'estomach 
et  les  parties  nutritives  de  ceux  qui  en  beuvoient.  — 
Beuvez,  dist  Bacbuc,  une,  deux  ou  trois  fois,  de 
rechef  changeans  d'imagination,  telle  trouverez  au 


174  LIVRE    V,    CHAPITRE    XLIII 

goust,  saveur  ou  liqueur  comme  l'aurez  imaginé, 
Et  doresnavant  dictes  qu'à  Dieu  rien  soit  impos- 
sible. —  Onques,  respondi-je,  ne  fut  dit  de  nous: 
nous  maintenons  qu'il  est  tout  puissant.  » 


CHAPITRE    XLIV 

Comment  Bacbuc  accoustra  Panurge  pour  avoir 
le  mot  de  la  Bouteille. 


ES  paroles  et  beuvettes  achevées,  Bac- 
buc demanda:  «  Quiestceluy  de  vous 
qui.  veut  avoir  le  mot  de  la  dive  Bou- 
teille ?  —  Je,  dist  Panurge,  vostre 
humble  et  petit  entonnouer. —  Mon  amy,  dist-elle, 
je  n'ay  à  vous  faire  instruction  qu'une,  c'est  que, 
venant  à  l'Oracle,  ayez  soin  n'escouter  le  mot,  sinon 
d'une  aureille. — C'est,  dit  frère  Jean,  du  vin  à  une 
aureille.  r> 

Puis  le  vestit  d'une  galleverdine,  l'encapitonna 
d'un  beau  et  blanc  béguin,  l'affeubla  d'une  chausse 
d'hypocras^  au  bout  de  laquelle,  en  lieu  de  floc, 
mist  trois  obélisques,  l'enguentela  de  deux  bra- 
guettes antiques,  le  ceingnit  de  trois  cornemeuses 
liées  ensemble,  le  baigna  la  face  trois  fois  dedans  la 
fontaine  susdite,  enfin  luy  jetta  au  visage  une  poi- 
gnée de  farine,  mist  trois  plumes  de  coq  sus  le  costé 
droit  de  la  chausse  hypocratique,  le  fist  cheminer 
neuf  fois  autour  de  la  fontaine,  luy  fist  faire  trois 


PANTAGRUEL 


.75 


beaux  petits  sauts,  luy  fist  donner  sept  fois  du  cul 
contre  la  terre,  tousjours  disant  ne  sçay  quelles 
conjurations  en  langue  ethrusque,  et  quelquefois 
lisant  en  un  livre  ritual,  lequel  prés  elle  portoit  une 
de  ses  mystagogues. 

Somme,  je  pense  que  Numa  Pompilius,  roy  second 
des  Romains,  Cerites  de  Tuscie  et  le  sainct  Capitaine 
Juif,  n'instituèrent  oncques  tant  de  cérémonies  que 
lors  je  vy,  n'aussi  les  vaticinateurs  memphitiques 
à  Apis  en  Egipte,  ne  les  Euboïens  en  la  cité  de 
Rhamnes  à  Rhamnasie,  n'a  Jupiter  Ammon,  n'a 
Feronia,  n'usèrent  les  anciens  d'observances  tant 
religieuses  comme  là  je  considerois. 

Ainsi  accoustré,  le  sépara  de  nostre  compagnie 
et  mena  à  main  dextre  par  une  porte  d'or,  hors  le 
temple,  en  une  chappelle  ronde  faite  de  pierres 
phengites  et  speculaires,  par  la  solide  speculance 
desquelles,  sans  fenestre  n'autre  ouverture,  estoit 
receuë  lumière  du  soleil,  là  luysant  par  le  précipice 
de  la  roche  couvrante  le  temple  major,  tant  facile- 
ment et  en  telle  abondance  que  la  lumière  sembloit 
dedans  naistre,  non  de  hors  venir.  L'ouvrage  n'es- 
toit  moins  admirable  que  fut  jadis  le  sacré  temple 
de  Ravenne,  ou  en  Egypte  celuy  de  l'isleChemnis. 
Et  n'est  à  passer  en  silence  que  l'ouvrage  d'icelle 
chappelle  ronde  estoit  en  telle  symmetrie  compassé 
que  le  diamètre  du  project  estoit  la  hauteur  de  la 
voûte. 

Au  milieu  d'icelle  estoit  une  fontaine  de  fin  alabas- 


176 


LIVRE    V,    CHAPITRE    XLIV 


tre,  en  figure  heptagonne,  à  ouvrage  et  infoliature 
singulière,  pleine  d'eau  tant  clere  que  pourroitestre 
un  élément  en  sa  simplicité,  dedans  laquelle  estoit 
à  demy  posée  la  sacrée  Bouteille,  toute  revestuëde 
pur  cristalin,  en  forme  ovale,  excepté  que  le  limbe 
estoit  quelque  peu  patent  plus  qu'icelle  forme  ne 
porteroit. 

CHAPITRE   XLV 

Comment  la  pontife  Bacbuc  présenta  Panurge 
devant  ladicte  Bouteille. 


A  fîst  Bacbuc,  la  noble  pontife,  Pa- 
nurge besser  et  baiser  la  marge  de 
la  fontaine,  puis  le  fîst  lever,  et  autour 
danser  trois  Ithymbons.  Cela  fait,  luy 
commanda  s'asseoir  entre  deux  scelles,  le  cul  à  terre, 
là  préparées.  Puis  desploya  son  Livre  ritual,  et,  luy 
soufflant  en  l'oreille  gausche,  le  fist  chanter  une 
epilenie,  comme  s'ensuit  : 


E.Boilvin  del  ft  se 


inp  A  S«.!mon 


PANURGE  DEVANT  LA  DIVE   BOUTEILLE 

'  Rabelais,  L.  5,  C.iS) 


PANTAGRUEL 


177 


o 

BOUTEILLE 

PLEINE 

TOUTE 

DE   PrlISTERES, 

d'une       OREILLE 

JE      t'escoute  ; 

NE  DIFFERES, 

ET     LE     MOT     PROFERES 

A  U  Q_U  E  L    PEND     MON     CUEUR. 

EN        LA      TANT      DIVINE      LICQ^UEUR, 

QUI       EST      DEDANS       TES       FLANS     RECLOSE  , 

BACHUS ,       QUE       FUT       d'iNDE      VAINCQUEUR  , 

TIENT         TOUTE         VERITE  ENCLOSE. 

VIN    TANT  DIVIN,   LOING  DE  TOY    EST  FORCLOSE 

TOUTE    MENSONGE     ET      TOUTE     TROMPERYE   ; 

EN     JOYE      SOIT      l'aME      DE     NOÉ      CLOSE  , 

LEQUEL  DE  TOY  NOUS  FEIST   LA  TEMPERYE. 

SONNE    LE    BEAU   MOT,    JE   t'eN    PRYE  , 

QUI   ME   DOIBT  OSTER  DE   MISERES. 

AINSI  NE  SE  PERDE  UNE  GOUTTE 

DE  TOY,  SOIT  BLANCHE,  OU 

SOIT   VERMEILLE, 

O      BOUTEILLE, 

PLEINE        TOUTE 

DE  MISTERES. 


Rabelais.  V, 


23 


iy8  LIVRE    V,     CHAPITRE    XLV 

Ceste  chanson  parachevée,  Bacbuc  jetta  je  ne  sçay 
quoy  dedans  la  fontaine,  et  soudain  commença  l'eau 
bouillir  à  force,  comme  fait  la  grande  marmite  de 
Bourgueil  quand  y  est  feste  à  bastons.  Panurge  es- 
coutoit  d'une  aureille  en  silence,  Bacbuc  se  tenoit 
près  de  luy  agenouillée,  quand  de  la  sacrée  Bou- 
teille issit  un  bruit  tel  que  font  les  abeilles  naissantes 
de  la  chair  d'un  jeune  taureau  occis  et  accoustré 
selon  l'art  et  invention  d'Aristeus,  ou  tel  que  fait 
un  guarot  desbandant  l'arbaleste,  ou  en  esté  une 
forte  pluye  soudainement  tombant.  Lors  feut  ouy 
ce  mot:  «  Trinch.  » 

«  Elle  est,  s'escria  Panurge,  par  la  vertu  Dieu, 
rompue  ou  feslée,  que  je  ne  mente;  ainsi  parlent 
les  bouteilles  cristallines  de  nos  pays  quand  elles 
prés  du  feu  esclattent.  » 

Lors  Bacbuc  se  leva,  et  print  Panurge  sous  le  bras 
doucettement,  luy  disant  :  a  Amy,  rendez  grâces  es 
Cieulx,  la  raison  vous  y  oblige;  vous  avez  prompte- 
ment  eu  le  mot  de  la  dive  Bouteille.  Je  dy  le  mot 
plus  joyeux,  plus  divin,  plus  certain  qu'encores 
d'elle  aye  entendu  depuis  le  temps  qu'icy  je  mi- 
nistre à  son  tressacré  oracle.  Levez-vous,  allons  au 
chapitre  en  la  glose  duquel  est  le  beau  mot  inter- 
prété. —  Allons,  dist  Panurge,  de  par  Dieu.  Je 
suis  aussi  sage  que  entan.  Esclairez  :  ou  est  ce  livre? 
Tournez:  où  est  ce  chapitre?  Voyons  ceste  joyeuse 
glose.  )) 


PANTAGRUEL 


79 


CHAPITRE  XLVI 
Comment  Bacbuc  interprète  le  mot  de  la  Bouteille. 

ACBUC,  jettant  ne  sçay  quoy  dedans  le 
timbre,  dont  soudain  fut  l'ebulition  de 
j  à  l'eau  restraincte,  mena  Panurge  au 
(^^ê^^^^  temple  major,  au  lieu  central  auquel 
€Stoit  la  vivifique  fontaine.  Là,  tirant  un  gros  livre 
d'argent  en  forme  d'un  demy  muy,  ou  d'un  quart 
de  sentences,  le  puysa  dedans  la  fontaine  et  luy 
<list:  «  Les  philosophes,  prescheurs  et  docteurs  de 
vostre  monde  vous  paissent  de  belles  paroles  par 
les  aureilles,  icy  nous  realement  incorporons  nos 
preceptionspar  la  bouche.  Pourtant  je  ne  vous  dy  : 
Lisez  ce  chapitre,  voyez  ceste glose.  Je  vous  dy  :  Tas- 
fez  ce  chapitre,  avaliez  ceste  belle  glose. 

«  Jadis  un  antique  prophète  de  la  nation  judaïque 
mangea  un  livre,  et  fut  clerc  jusques  aux  dents; 
présentement  vous  en  boirez  un,  et  serez  clerc 
jusques  au  foye.  Tenez,  ouvrez  les  mandibules.  » 
Panurge  ayant  la  gueule  bée,  Bacbuc  print  le  livre 
d'argent,  et  pensions  que  fust  véritablement  un 
livre,  à  cause  de  sa  forme,  qui  estoit  comme  un 
bréviaire,  mais  c'estoist  un  veneré,  vray  et  naturel 
flascon  plein  de  vin  Phalerne,  lequel  elle  fist  tout 
avaller  à  Panurge. 

c(  Voicy,  dist  Panurge,  un  notable  chapitre,  et 
glose  fort  autentique;  est-ce  tout  ce  que  vouloit 


ibo  LIVRE    V,    CHAPITRE    XL VI 

prétendre  le  niot  de  la  Bouteille  trimegiste?  J'en 
suis  bien,  vrayement. —  Rien  plus,  respondit  Bac- 
buc,  car  Trinch  est  un  mot  panomphée,  célèbre 
et  entendu  de  toutes  nations,  et  nous  signifie  : 
Beuvez.  Vous  dites  en  vostre  monde  que  sac  est 
vocable  commun  en  toute  langue,  et  à  bon  droit 
et  justement  de  toutes  nations  receu.  Car,  comme 
est  l'apologue  d'Esope,  tous  humains  naissent  un 
sac  au  col,  souffreteux  par  nature,  et  mandians  l'un 
de  l'autre.  Roy  souz  le  ciel  tant  puissant  n'est  qui 
passer  se  puisse  d'autruy,  pauvre  n'est  tant  arrogant 
qui  passer  se  puisse  du  riche,  voire  fust-ce  Hippias 
le  philosophe,  qui  faisoit  tout.  Encores  moins  se 
passe  l'on  de  boire  qu'on  ne  fait  de  sac. 

«  Et  icy  maintenons  que  non  rire,  ains  boire, 
est  le  propre  de  l'homme.  Je  ne  dy  boire  simple- 
ment et  absolument,  car  aussi  bien  boivent  les  bes- 
tes;  je  dy  boire  vin  bon  et  frais.  Notez,  amis,  que 
de  vin  divin  on  devient,  et  n'y  a  argument  tant  seur, 
ny  art  de  divination  moins  fallace.  Vos  Académiques 
l'afferment  rendans  l'etimologie  de  vin,  lequel  ils 
disent  en  grec  oTvoç,  estre  comme  vis,  force,  puis- 
sance :  car  pouvoir  il  a  d'emplir  l'ame  de  toute 
vérité,  tout  sçavoir  et  philosophie.  Si  avez  noté  ce 
qui  est  en  lettres  ioniques  escrit  dessus  la  porte  du 
temple,  vous  avez  peu  entendre  qu'en  vin  est  vérité 
cachée.  La  dive  Bouteille  vous  y  envoyé,  soyez 
vous  mesmes  interprètes  de  vostre  entreprinse. 

—  Possible  n'est,  dist  Pantagruel,  mieux  dire  que 


PANTAGRUEL  l8l 

fait  ceste  vénérable  pontife;  autant  vous  en  dy-je 
lorsque  premièrement  m''en  parlastes.  Trinch  donc- 
ques.  Que  vous  dit  le  cœur,  eslevé  par  enthusiasme 
bacchique? 

«  Trinquons,  dist  Pamir ge^  de  par  le  bon  Bacchus. 
Ha,  ho,  ho,  je  voiray  bas  culs 
De  bref  bien  à  poinct  sabourez 
Par  couilles  et  bien  embourez 
De  ma  petite  humanité. 
Qu'est-ce  cy  ?  La  paternité 
De  mon  cœur  me  dict  seurement 
Que  je  seray  non  seulement 
Tost  marié  en  nos  quartiers, 
Mais  aussi  que  bien  volontiers 
Ma  femme  viendra  au  combat 
Vénérien  :  Dieu,  quel  débat 
Jy  prevoy  !  Je  laboureray 
Tant  et  plus,  et  saboureray 
A  guoguo,  puis  que  bien  nourry 
Je  suis.  C'est  moy  le  bon  mary. 
Le  bon  des  bons.  lo  Pean  ! 
lo  Pean,  lo  Pean  ! 

10  mariage  trois  fois  ! 

Çà,  çà,  frère  Jean,  je  te  fais 
Serment  vray  et  intelligible 
Que  cest  oracle  est  infallible, 

11  est  seur,  il  est  fatidique. 


LIVRE    V_,    CHAPITRE    XLVII 


CHAPITRE  XLVII 

Comment  Panurge  et  les  autres  rithment  par  fureur 
poétique. 


^^1  fjj  s-TU,  dist  frère  Jean,  fol  devenu  ou 
vi^ enchanté?  Voyez  comme  il  escume, 
entendez  comment  il  rithmaille.  Que 
tous  les  diables  a-il  mangé?  Il  tourne 
les  yeux  en  la  teste  comme  une  chèvre  qui  se  meurt. 
Se  retirera-il  à  l'escart?  Fiantera-il  plus  loing? 
Mangera-il  de  l'herbe  aux  chiens  pour  descharger 
son  thomas,  ou  à  usage  monachal  mettra-il  dedans 
la  gorge  le  poing  jusques  au  coude  afin  de  se  curer 
leshypochondres?  Reprendra-il  du  poil  de  ce  chien 
qui  le  mordit? 

Pantagruel  reprend  frère  Jean  et  luy  dit  : 

"  Croyez  que  c'est  la  fureur  poétique 
Du  bon  Bacchus  :  ce  bon  vin  eclyptique 
Ainsi  fait  sens  et  le  faict  cantiqueur. 

Car  sans  mespris 

A  ses  esprits 

Du  tout  espris 

Par  sa  liqueur, 

De  cris  en  ris, 

De  ris  en  pris. 

En  ce  pourpris, 

Faict  son  gent  cœur 

Rhetoriqueur 

Roy  et  vaincueur 

De  nos  souris  ; 


PANTAGRUEL  l83 

Et,  veu  qu'il  est  de  cerveau  phanatique, 
Ce  me  seroit  acte  de  trop  piqueur, 
Penser  moquer  un  si  noble  trinqueur. 

—  Comment!  dist  frère  Jean,  vous  rithmez  aussi? 
Par  la  vertu  de  Dieu,  nous  sommes  tous  poivrez. 
Plust  à  Dieu  que  Gargantua  nous  vist  en  cestuy 
estât!  Je  ne  sçay,  par  Dieu,  que  faire  de  pareille- 
ment comme  vous  rithmer,  ou  non.  Je  n'y  sçay  rien 
toutesfois,  mais  nous  sommes  en  rithmaillerie.  Par 
sainct  Jean,  je  rithmerai  comme  les  autres,  je  le 
sens  bien;  attendez,  et  m'ayez  pour  excusé  si  je  ne 
rithme  en  cramoisi  : 

O  DieUj  père  paterne. 
Qui  muas  l'eau  en  vin. 
Fais  de  mon  cul  lanterne. 
Pour  luire  à  mon  voisin.  » 

Panurge  continue  son  propos  et  dit  : 

«  Onq'  de  Pythias  le  tréteau 

Ne  rendit  par  son  chapiteau 

Response  plus  seure  et  certaine; 

Et  croirois  qu'en  ceste  fontaine 

Y  soit  nommément  colporté 

Et  de  Delphes  cy  transporté. 

Si  Pkuarque  eust  icy  trinqué 

Comme  nous,  il  n'eust  révoqué 

En  doute  pourquoy  les  oracles 

Sont  eh  Delphes  plus  muts  que  macles, 

Plus  ne  rendent  response  aucune. 

La  raison  est  assez  commune  : 

En  Delphes  n'est,  il  est  icy. 

Le  tréteau  fatal  ;  le  voicy. 


184  LIVRE    V,    CHAPITRE    XLVII 

Qui  presagist  de  toutes  choses  : 
Car  Athenaeus  nous  expose 
Que  ce  tréteau  estoit  Bouteille 
Pleine  de  vin  à  une  aureille, 
De  vin,  je  dis  de  vérité  ; 
11  n'est  telle  syncerité 
En  Tart  de  divination 
Comme  est  l'insinuation 
Du  mot  sortant  de  la  Bouteille. 
Çà,  frère  Jean,  je  te  conseille, 
Cependant  que  sommes  icy. 
Que  tu  ayes  le  mot  aussi 
De  la  Bouteille  trimegiste, 
Pour  entendre  se  rien  obsiste 
Que  ne  te  doives  marier  ; 
Tien  cy,  de  peur  de  varier, 
Et  joue  l'amorabaquine. 
Jectez  luy  un  peu  de  farine.   » 

Frère  Jean  respondit  en  fureur,  et  dist  : 

«  Marier!  Par  la  grand'  Bottine, 

Par  le  houseau  de  sainct  Benoist, 

Tout  homme  qui  bien  me  congnoist 

Jurera  que  feray  le  chois 

D'estre  desgradé  ras  ainçois 

Qu'estre  jamais  engarié 

Jusques  là  que  sois  marié  ; 

Cela  !  que  fusse  spolié 

De  liberté  !  fusse  lié 

A  une  femme  désormais  ! 

Vertu  Dieu,  à  peine  jamais 

Me  liroit  on  à  Alexandre, 

Ny  à  Ca2sar,  ny  à  son  gendre, 

N'au  plus  chevaleureux  du  monde.   » 

Panurge,  deffeublant  sa  gualleverdine  et  accous- 
trcment  mistique,  respondit  : 


PANTAGRUEL  l85 

«  Aussi  seras  tu,  beste  immonde. 

Damné  comme  une  maie  serpe. 

Et  je  seray  comme  une  herpe 

Sauvé  en  paradis  gaillard  : 

Lors  bien  sus  toy,  pauvre  paillard, 

Pisseray-je,  je  t'en  asseure. 

Mais  escoutez  :  advenant  l'heure 

Qu'à  bas  seras  au  vieux  grand  diable, 

Si^  par  cas  assez  bien  croyable. 

Advient  que  dame   Proserpine 

Fust  espinée  de  l'espine 

Qui  est  en  ta  brague  cachée, 

Et  feust  de  fait  amourachée 

De  tadite  paternité, 

Survenant  l'oportunité 

Que  vous  feriez  les  doux  accords 

Et  luy  montasses  sus  le  corps. 

Par  ta  foy,  envoyeras  tu  pas 

Au  vin,  pour  fournir  le  repas 

Du  meilleur  cabaret  d'Enfer, 

Le  vieil  ravasseur  Lucifer? 

Elle  ne  fut  onques  rebelle 

Aux  bons  frères,  et  si  fut  belle. 

—  Va,  vieil  fol,  dist  frère  Jean,  au  diable  !  Je  ne 
saurois  plus  rithmer,  la  rithme  meprent  à  la  gorge; 
parlons  de  satisfaire  icy.  » 


86  LIVRE    V,    CHAPITRE    XLVIII 


CHAPITRE  XLVIII 

Comment,   avoir  prins  congé  de  Bacbuc, 
délaissent  l'Oracle  de  la  Bouteille. 


'iCY  satisfaire,  respondit  Bacbuc,  ne 
soyez  en  esmoy,  à  tout  sera  satisfaict 
À  de  nous  estes  contens.  Çàbasen  ces 
îgions  circoncentrales  nous  establis- 
sons  le  bien  souverain  non  en  prendre  et  recevoir, 
ains  en  eslargir  et  donner,  et  heureux  nous  reputons 
non  si  d'autruy  prenons  et  recevons  beaucoup, 
comme  paraventure  décrètent  les  sectes  de  vostre 
monde,  ains  si  à  autruy  tousjours  eslargissons  et 
donnons  beaucoup.  Seulement  vous  prie  vos  noms 
et  païs  icy  en  ce  Livre  ritual  par  escrit  nous  laisser.  » 
Lors  ouvrit  un  beau  et  grand  Livre,  auquel,  nous 
dictans,  une  de  ses  mystagogues  excequant,  furent 
avecques  un  stile  d'or  quelques  traits  projectez, 
comme  si  l'on  eust  escrit,  mais  de  l'escriture  rien  ne 
nous  apparoissoit. 

Cela  faict,  nous  emplit  trois  oires  de  l'eau  phan- 
tastique,  et  manuellement  nous  les  baillant,  dist  : 
«  Allez,  amis,  en  protection  de  cette  sphère  intel- 
lectuale  de  laquelle  en  tous  lieux  est  le  centre  et 
n'a  en  lieu  aucun  circonférence,  que  nous  appelions 
Dieu.  Et,  venus  en  vostre  monde,  portez  tesmoi- 
gnage  que  sous  terre  sont  les  grands  trésors  et 
choses  admirables.  Et  non  à  tort  Cerés,  ja  révérée 


PANTAGRUEL  IO7 

par  tout  l'univers  parce  qu'elle  avoit  montré  et  en- 
seigné l'art  d'agriculture,  et  par  invention  de  bled 
aboly  entre  les  humains  le  brutal  aliment  de  gland, 
a  tant  et  tant  lamenté  de  ce  que  sa  fille  fut  en  nos 
régions  subterraines  ravie,  certainement  prévoyant 
que  sous  terre  plus  trouveroit  sa  fille  de  biens  et 
excellences  qu'elle  sa  mère  n'avoit  faict  dessus. 
Qu'est  devenu  l'art  d'évoquer  des  cieux  la  foudre 
et  le  feu  céleste,  jadis  inventé  par  le  sage  Prome- 
theus?  Vous  certes  l'avez  perdu;  il  est  de  vostre 
hémisphère  departy,  icy  sous  terre  est  en  usage.  Et 
à  tort  quelquefois  vous  esbahissez  voyans  villes  con- 
flagrer  et  ardre  par  foudre  etfeuetheré,  etignorans 
de  qui,  et  par  qui,  et  quelle  part  tiroit  cestuy  es- 
clandre horrible  à  vostre  aspect,  mais  à  nous  fami- 
lier et  utile.  Vos  philosophes,  qui  se  complaignent 
toutes  choses  estre  par  les  anciens  escriptes,  rien 
ne  leur  estre  laissé  de  nouveau  à  inventer,  ont  tort 
trop  évident.  Ce  que  du  ciel  vous  apparoist,  et 
appeliez  phénomènes,  ce  que  la  terre  vous  exhibe, 
ce  que  la  mer  et  autres  fleuves  contiennent,  n'est 
comparable  à  ce  qui  est  en  terre  caché. 

«  Partant  est  equitablement  le  souverain  Domi- 
nateur presques  en  toutes  langues  nommé  par  epi- 
thete  de  richesses.  Il,  quant  leur  estude  addonne- 
ront  et  labeur  à  bien  rechercher  par  imploration  de 
Dieu  souverain,  lequel  jadis  les  Egyptiens  nommoient 
en  leur  langue  l'Abscond,  le  Musse,  le  Caché,  et, 
par  ce  nom  l'invoquant,  supplioient  à  eux  se  mani- 


l88  LIVRE    V,    CHAPITRE    XLVIII 

fester  et  descouvrir,  leur  eslargira  cognoissance  et 
de  soy  et  de  ses  créatures,  par  ainsi  conduite  de 
bonne  lanterne.  Car  tous  philosophes  et  sages  anti- 
ques à  bien  seurement  et  plaisamment  parfaire  le 
chemin  de  la  congnoissance  divine  et  chasse  de  sa- 
pience  ont  estimé  deux  choses  nécessaires,  guyde 
de  Dieu  et  compagnie  d'homme.  Ainsi  entre  les 
philosophes  Zoroaster  print  Arimaspes  pour  com- 
pagnon de  ses  pérégrinations;  Esculapius,  Mer- 
cure; Orpheus,  Musée;  Pythagoras,  Agleopheme; 
entre  les  princes  et  gens  belliqueux,  Hercules  eut 
en  ses  plus  difficiles  entreprinsespour  amy  singulier 
Theseus;  Ulysses,  Diomedes;  Eneas,  Achates.  Vous 
autres  en  avez  autant  fait  prenans  pour  guide  vostre 
illustre  dame  Lanterne.  Or  allez^  de  par  Dieu,  qui 
vous  conduie.  » 


Fin  du  cinqiiiesme  Livre  des  faids  et  dicts  héroïques 
du  noble  Pantagruel. 


VARIANTES 


CINQUIÈME    LIVRE 


Nous  suivons  le  texte  de  l'édition  de  1564,  mais,  comme 
le  cinquième  livre  n'a  été  publié  pour  la  première  fois  que 
plusieurs  années  après  la  mort  de  Rabelais,  nous  n'avons  pas 
eu  le  même  respect  du  texte  que  dans  les  quatre  premiers 
livres,  et  toutes  les  fois  que  les  leçons  du  manuscrit  nous  ont 
paru  meilleures,  nous  les  avons  préférées.  Nous  donnons  ici 
les  passages  du  manuscrit  qui  ne  sont  pas  dans  l'édition  de 
1564. 


Prologue.  Page  2,  ligne  28.  «  J'entends  bien...  »  On 
lit  dans  le  manuscrit  : 

«  Plaist-i,  Carneades  ?  Despartés,  tous  les  diables.  Il  n'y 
viendra  pas  à  vostre  reigle  ;  car  Neptun,  par  Lucilius  intro- 
duict  pour  resolution  d'un  double  pareil,  oncques  des 
Champs  Elisiens  evocquer  ne  le  peult.  J'entends  bien...   » 

Le  Chapitre   i* 
nuscrit  : 


page  1 1 ,  commence  ainsi  dans  le  ma- 


('  Estans  montez  sus  mer  et  navigué    par  plusieurs  jours 
avecques  bon  vent,  entendismes  ung  son,  de  loin  venant...» 


90 


VARIANTES 


Le  Chapitre  XI,  page  48,  commence  ainsi  dans  le  ma- 
nuscrit : 

n  Quelques  jours  après,  ayant  failly  plusieurs  foys  à  faire 
naufrage,  nous  passasmes...   » 

Chapitre  XI,  page  48,  lignes  10-11  :  parce  que  quel- 
qu'un de  nostre  bande  voulust  vendre...  »  On  lit  dans  le 
manuscrit  : 

«  Parce  que  quelc'un  de  nostre  bande  avoit  battu  le 
Chicanoux,  passant  procuration.  Les  chatz...  » 

Chapitre  XXVI,  page  109,  à  la  fin,  après  «  et  levées  du 
Nil  en  Egypte  »,  le  manuscrit  ajoute  à  ce  chapitre  : 

c<  Là  davantaige  nous  fust  dict  que  Panigon  sur  ses  der- 
niers jours  s'estoit  en  ung  hermitaige  d'icelle  Isle  retiré,  et 
vivoit  en  grande  saincteté  et  vraye  foy  catholique,  sans  con- 
cupissance,  sans  affection,  sans  vice,  en  innocence,  son 
prochain  aymant  comme  soy  mesmes  et  Dieu  sur  toutes 
choses  ;  par  tant  faisoit  il  plusieurs  beaulx  miracles.  A  nos- 
tre département  de  Clothu,  je  veiz  le  pourtraict  mirifique  de 
Varlet  cherchant  Maistre,  jadis  depainct  par  Charles  Char- 
moys,  Aurelian.  » 

Chapitre  XXVIII,  page  128,  à  la  fin  :  «  Que  diable  ont 
les  roys  et  grands  princes  ?  »,  le  manuscrit  ajoute  : 

'.(...  dadvantaige?  Ma  foy,  je  m'anuye  beaulcoup  icy.  — 
Allons  chasciin,  dist  Panurge,  à  son  affection  ;  mais,  si  une 
foys  je  suys  marié  à  mon  souhait,  je  feray  encores  une  nou- 
velle Moynerve.  Je  n'entendz  mye  de  moynes  moynez  ;  ilz 
sont  moynes  moynans,  et  je  les  nourriray  frères  lenps  (?)  ou 
bien  frères  Narjorie  (?)  parfaictz.  Hz  n'yront  pas  si  tost  que 
ses  gallandz  Fredons  icy.   » 

Chapitre  XXXIII,  page  140,  ligne  20,  après  «  du  gou- 
vernement d'une  grosse  Lanterne  »,  le  manuscrit  termine 
ainsi  ce  chapitre  : 

«  Là  me   souvint  de   Matheline,  laquelle  ne  vouloit  per- 


VARIANTES  I9I 

mectre  que  l'on  mist  au  corps  huille  ne  chandelle  ;  aussi  ne 
luysoient  elles  comme  les  aultres,  mais  me  sembloient  avoir 
les  paillardes  couleurs.  » 

Puis  vient  dans  le  manuscrit  : 

CHAP... 

Comment  furent  les  dames  Lanternes  servies  à  soupper. 

Les  vezes  bouzines  et  cornemuses  sonnèrent  harmonieuse- 
ment, et  leurs  furent  les  viandes  apportées.  A  l'entrée  du 
premier  service,  la  royne  print  en  guise  de  pillules  qui  sentent 
si  bon,  je  dis  ante  cibum,  pour  soy  desgresser  l'estonmatz, 
une  cuillerée  de  petasine.  Puys  furent  servies...    » 

S'ensLiyt  ce  qui  estoiî  en  marge  et  non  compris  au  présent 
livre  : 

Servato,  in-4°  lier.,  Panorgum  ad  nuptias. 

Les  quatre  quartiers  du  mouton  que  porta  Hellé  et  Frixus 
au  destroit  de  Propontide  ; 

Les  deux  chevreaulx  de  la  célèbre  chèvre  Amaltée,  nourrisse 
de  Jupiter  ; 

Les  fans  de  la  cerfve  bische  Egerye^  consellere  de  Numa 
Fompillius  ; 

Six  oysons  couvez  par  la  digne  oye  îlmaticque,  laquelle  par 
son  chanipt  saulva  la  rocque  Tarpée  de  Rome; 

Les  cochons  de  la  truye...; 

Le  veau  de  la  vache  Ino,  mal  jadis  gardée  par  Argus  ; 

Le  poulmon  du  regnard  que  Neptune  et...  Julius  Pollux 
in  canibus. 

Le  cigne  auquel  se  convertit  Jupiter  pour  l'amour  de 
Leda  ; 

Le  Beuf  Apis  de  Menphes  en  Egipte,  que  reffusa  sa  pitance 
de  la  main  de  Germanicus  César, 

Et  six  beufz  desrobez  par  Cacus,  recouvertz  par  Hercules  ; 

Les  deux  chevreaulx  que  Coridon  rescovrit pour  Alexis  ; 

Le  sanglier  Herimentien,  Olimpicque  et  Calidonien; 

Les  cramasteres  du  toreautant  aymé  de  Pasiphé; 


192  VARIANTES 

Le  cerf  auquel  fut  transformé  Actheon  ; 
Le  foye  de  l'ourse  Calixio... 

Des  corquignolles  savoreuses,  Des    genabins    de    haulte  fus- 

Des  happelourdes,  taye, 

Des  badigonyeuses.  Des  starabillatz, 

Des  cocquemares  à  la  vinai-  Des  cormeabotz, 

grette,  Des    cornameuz     revestuz    de 
Des  coquecigrues,  bize, 

Des  etangourres.  De  la  gendarmenoyre, 

Des  ballivarnes  en  pasté,  Des  jerangoys, 

Des  estroncs  fins  à  la  nasar-  De  la  trismarmaillej 

dine.  Des  ordisopiratz, 

Des  aucbares  de  mer,  De  la  mopsopige, 

Des    godiveaulx     de    lévrier  Des  brebasenas, 

bien  bons,  Des  frondilles. 

Du  promerdis,  grand' viande.  Des  chinfreneaulx. 

Des  bourbelettes,  Des  bubagaz, 

Primeronges,  Des  volepupinges. 

Des  bregizollons,  Des  gafelages, 

Des  lansbregotz.  Des  brenouzets. 

Des  freleginingues,  De  la  mirelaridaine. 

De  la  bistroye.  De  la  croquepye. 
Des  brigailles  mortiffiées, 

En  second  service  furent  servies  : 

Des  ondrespondredetz,  Du  suif  d'asnon. 

Des  entreduchz.  De  la  crotte  en  poil. 

De    la    friande    vesianpenar-  Du  moinascon, 

derye.  Des  fanfreluches. 

Des  baguenauldes.  Des  spopondrilloches. 

Des  dorelotz  de  liepvre.  Du  Laisse  moy  en  paix. 

Des     bandelivagues,     viande  Du  Tire  toy  là, 

rare,  Du  Boutte  luy  toy  mesmes. 

Des  manigoulles  de  levant.  De  la  clacquemain. 
Des  brinborions  de  ponnent,  Du  sainct  balleran, 
De  la  petaradine.  Des  epiboches, 

Des  notrodilles.  Des  ivrichaulx, 


VARIANTES 


19Î 


De  la  vesse  coulière, 
De  la  foyre  en  braye. 
De  la  baudaille, 
Des  smubrelotz, 
Des  Je  renye  ma  vye^ 
Des  hurtalis, 
De  la  patissandrye, 
Des  ancrastabotz, 
Des  babillebabous. 
De  la  marabire, 
Des  sinsanbregoys, 
Des  quaisse  quesse, 
De  cocquelicous, 
Des  maralipes, 
Du  brochaucultis, 


Des  giboullées  de  mars. 

Des  tricquebilles, 

Des  hoppelatz, 

De  la  marnitandaille  avec  beau 

pissefort, 
Du  merdignon, 
Des  croquinpedaignes, 
Des  tintaloyes, 
Des  piedz  à  boulle. 
Des  chinferneaulx, 
Des    nez   d'as    de    treffles    en 

paste, 
Des  pasques  de  solles, 
De    estafillades, 
Des  guyacoux. 


Pour  le  dernier  service  furent  présentées  : 


Des  drogues  sernogues, 

Des  tricquedaudaines, 

Des  gringuenauldes  à  la  jon- 

cade. 
Des  brededinsbrededas, 
De  la  galimaffrée   à    l'escafi- 

gnade, 
De  barabinbarabas, 
Des  mocquecroquettes, 
De  la  hucquemasche. 
De  la  tirelytantaine, 
Des  neiges  d'antan,  desquelles 

ilz  ont    eu  en    abondance 

en  Lanternois, 
Des  gringaletz, 
jDu  sallehort. 
Des  rairelaridaines, 


Des  mizenas. 

Des    gresamines,    fruict     deli- 

cieulx, 
Des  marioletz, 
De  fricquenelles. 
De  la  piedebillorie, 
De  la  mouchancullade, 
Du  souffle  au  cul  myen. 
De  la  menigance, 
Des  tritrepoluz, 
Des  befaibemis, 
Des  aliborrins, 
Des  tirepetadans. 
Du  coquerin. 
Des  coquilles  betissons, 
Du  croquignologe, 
Des  tinctamarrois. 


Pour  déserte  apportèrent  ung  plain  plat  de  merde,  cou- 
vert d'estrongs  fleuris  ;  c'estoit  ung  plat  plain  de  miel  blanc, 
couvert  d'une  guimple  de  soye  cramoisine. 

Rabelais.  V,  2  5 


194 


VARIANTES 


Leur  boitte  feut  en  tirelarigotz,  vaisseaulx  beaulx  et  an- 
îicques,  et  riens  ne  beuvoient  fors  elaiodes,  breuvaige  assez 
mal  plaisant  en  mon  goust,  mais  en  Lanternois  c'est  boitte 
deiffique  et  s'enyvrent  comme  gens,  si  bien  que  je  veiz 
une  vieille  lanterne  edentée  revestue  de  parchemin,  lanterne  ^ 
corporalle  d'aultres  jeunes  lanternes,  laquelle ,  criant  aux 
semetieres  lampades  nostre  extinguntur,  feut  tant  ivre  du 
breuvaige  qu'elle,  sur  l'heure,  y  perdit  vye  et  lumière  ;  et 
feut  dict  à  Pantagruel  que  souvent  en  Lanternois  ainsi  peris- 
soi[en]t  les  lanternrs  lanternées,  mesmes  au  temps  qu'elle[s] 
îenoi!^enjt  chappitre. 

Le  soupper  finy,  furent  les  tables  levées.  Lors,  les  menes- 
triers  plus  que  devant  mélodieusement  sonnantz,  fut  par  la 
royne  commancé  ung  bransle  double,  auquel  tous  et  falotz 
et  lanternes  ensemble  dansèrent.  Depuys  se  relira  la  royne 
en  son  siege^  les  aultres,  aux  dives  sons  des  bouzines,  dan- 
sèrent diversement,  comme  vous  pourrez  dire   : 


Serre  martin, 

C'est  la  belle  franciscane. 

Dessus  les  marches  d'Arras, 

Bastienne, 

Le  trihorry  de  Bretaigne, 

Hely  pourtant  si  estes  belle, 

Les  sept  visaiges, 

La  gaillarde, 

La  revergasse. 

Les  crapaulx  et  les  grues, 

La  marquise, 

Si  j'ay  mon  joly  temps  perdu, 

L'espine, 

C'est  à  grand  tort, 

La  frique. 

Par  trop  je  suys  brunelte. 

De  mon  dueil  triste, 

Quant  m'y  souvent, 

La  gallioue, 

La  goutte. 


Sainct  Roc, 

Sanxerre, 

Nevers, 

Picardie  la  jolye, 

La  doulourouze, 

Sans  elle  ne  puys, 

Curé,  venez  donc, 

Je  demeurre  seulle, 

La  mousque  de  Biscaye, 

L'entrée  du  fol, 

A  la  venue  de  Noël, 

La  péronnelle, 

Le  gouvernai, 

A  la  bannye, 

Foix, 

Verdure, 

Princesse  d'amour. 

Le  cueur  est  myen, 

Le  cueur  est  bon, 

Jouyssance, 


VARIANTES 


195 


Marry  de  par  sa  femme, 

La  gaye, 

Malemaridade, 

La  pamine, 

Catherine, 

Jacqueline, 

Le  grand  helas, 

Tant  ay  d'ennuy, 

Mon  cueur  sera, 

La  seignore, 

Beauregard^ 

Perrichon, 

Maulgré  danger. 

Les  grandz  regretz, 

A  l'ombre  d'un  buissonne;;, 

La  douleur  qui  au  cueur  me 

blesse, 
La  fleurye. 
Frère  Pierre, 
Va  t'en  regretz, 
Toute  noble  cité. 
N'y  boutés  pas  tout, 
Les  regretz  de  l'aignau. 
Le  bail  d'Espagne, 
C'est  simplement  donné  congé. 
Mon  con  est  devenu  sergent, 
Expect  ung  poc  ou  pauc, 
Le  renon  d'un  esgaré. 
Qu'est  devenu  ma  mignonne, 
En  attendant  la  grâce, 
En  elle  n'ay  plus  de  fiance. 
En  plainctz  et  pleurs,  je  prens 

congé. 
Tire  toy  là,  Guillot, 
Amours  m'ont  faict  desplaisir, 
La  patiance  du  Maure, 
Les  soupirs  du  polin. 
Je  ne  sçay  pas  pourquoy, 


Chasteaubriant, 

Beure  fraiz. 

Elle  s'en  va, 

La  ducate. 

Hors  de  soulcy, 

Fortune, 

L'alemande, 

Les  pensées  de  ma  dame. 

Pensés  tous  la  peur, 

Belle,  à  grand  tort. 

Je  ne  sçay  pas  pourquoy, 

Helas  !  que  vous  a  faict  mon 
cueur. 

Hé  Dieu  !  quelle  femme  j'a- 
voye, 

L'heure  est  venue  de  me  plain- 
dre. 

Mon  cueur  sera  d'aymer. 

Qui  est  bon  a  ma  sembtance, 

Il  est  en  bonne  heure  né, 

De  doleur  de  l'escuyer, 

La  douleur  de  la  charte, 

Le  grand  Alemant, 

Pour  avoir  faict  au  gré  de 
mon  amy, 

Les  manteaulx  jaulnes. 

Le  moût  de  la  vigne, 

Toute  semblable, 

Cremonne, 

La  mercière, 

La  tripière. 

Mes  enffans. 

Par  faulx  semblant, 

La  valantinoise, 

Fortune  à  tort, 

Testimonium, 

Calabre, 

L'estrac, 


196 


VA  R I  A  N  T  E  s 


Faisons  la,  faisons, 

Noire  et  tannée, 

La  belle  Françoise, 

C'est  une  pensée, 

O  loyal  espoir. 

C'est  mon  plaisir, 

Biscaye, 

La  doulourouse. 

Ce  que  sçavez, 

Qu'il  est  bon, 

Le  petit  helas, 

A  mon  retour, 

Je  ne  fay  plus, 

Paouvres  gensdarme; 

Le  faulcheron, 

Ce  n'est  pas  jeu, 

Beaulté, 

Tegratiroine, 

Patience, 

Navarre, 

Jac  Bourdaing, 

Rouhault  le  fort. 

Noblesse, 

Tout  au  rebours, 

Cauldas, 

C'est  mon  mal, 

Diilcis  arnica^ 

Le  chault, 

Les  chasteaulx, 

La  girofflée, 

Vaz  an  moy. 

Jurez  le  prix, 

La  nuyt, 

A  Dieu  m'envoys. 

Bon  gouvernement, 

Mi  sonnet, 


Amours, 
Espérance, 
Robinet, 
Triste  plaisir, 
Rigoron,  pirouy, 
L'oyselet, 
Pampelune, 
Hz  ont  menti, 
Ma  joye. 
Ma  cousine. 
Elle  revient, 
A  la  moictié, 
Tous  les  biens, 
Ce  qu'il  vous  plairra, 
Puys  qu'en  amour    suys  mal- 
heureux, 
A  la  verdure. 
Sur  toutes  les  couleurs. 
En  la  bonne  heure. 
Or  faict  il  bon  aymer. 
Mes  plaisans  champtz, 
Mon  joly  cueur. 
Bon  pied,  bon  oeil, 
Hau,  bergère,  m'amye, 
La  tisserande, 
La  pavane, 

Hely,  pourtant  si  estes  belle, 
La  marguerite. 
Or  faict  il  bon, 
La  laine, 
Le  temps  passé. 
Le  joly  boys, 
L'heure  vient. 
Le  plus  dolent. 
Touche  luy  l'anticaille, 
Les  hayes. 


Encores  les  veiz-je  danser   aux  chansons  de  Poictou,  die- 


VARIANTES 


197 


tes  par  un  fallût  de  Sainct-Messant,  or  ung  grand  baislant 
de  Partenay  le  Vieil. 

Notez,  beuveurs,  que  tout  alloit  de  hait,  et  se  faisoient 
bien  valoir  les  gentils  fallotz  avecques  leurs  jambes  de  boys. 
Sus  la  fin  fut  apporté  vin  de  coucher,  avecques  belles  mous- 
ches  enculades,  et  feut  cryé  largesse,  de  par  la  royne, 
moyennant  une  boette  de  petasinne.  Lors  la  royne  nous  oc- 
troya le  choix  d'une  de  ses  Lanternes  pour  nostre  conduicte, 
telle  qu'il  nous  plairoit.  Par  nous  futssieue  et  choisie  la  mye 
du  grand  M.  P.  Lamy,  laquelle  j'avois  autresffoys  congneue 
à  bonnes  enseignes.  Elle  pareillement  me  recongnoissoit,  et 
nous  sembla  plus  divine,  plus  hilique,  plus  docte,  plus  saige, 
plus  diserte,  plus  humaine,  plus  débonnaire  et  plus  ydoine 
que  autre  qui  fut  en  la  compaignye  pour  nostre  conduicte. 
Remercians  bien  humblement  la  dame  royne,  feusmes  ac- 
compaignez  jusques  à  nostre  nauf  par  sept  jeunes  fallotz  bal- 
ladins,  ja  luysant  la  claire  Diane.  Au  départir  du  palais,  je 
ouys  la  voix  d'un  grand  fallot  à  jambe  torte,  disant  que  un 
bonsoir  vault  mieulx  que  autant  de  bons  matins  qu'il  y  a  eu 
de  chastaignes  en  farce  d'oye  depuys  le  déluge  de  Ogigés, 
voulant  donner  entendre  qu'il  n'est  bonne  chère  que  de 
nuyt,  lorsque  lanternes  sont  en  place,  accompaignées  de 
leurs  gentils  fallotz.  Telles  chères  le  soleil  ne  peult  veoir  de 
bon  œil,  tesmoing  Jupiter,  lorsqu'il  coucha  avecq  Alcmene, 
mère  d'Hercules,  il  le  feit  cacher  deux  jours,  car  peu  de- 
vant il  avoit  descouvert  le  larcin  de  Mars  et  de  Venus. 

Chapitre  XLIII,  page  171,  ligne  27  :  «monte  jusques  à  la 
mer  de  vostre  monde  »  termine  ce  chapitre,  qui  est  coupé 
en  deux  dans  le  manuscrit;  la  seconde  partie  est  intitulée  : 
«  Comment  l'eau  de  la  Fontaine  rendoit  goust  de  vin  selon 
l'imagination  des  beuveurs.  Chap...   »  el  commence  ainsi  : 

«  Puis  commenda  estre  hanaps,  tasses  et  goubeletz  pré- 
sentez, d'or,  d'argent,  de  cristallin,  de  porceline,  et  feusmes 
gracieusement  invitez  à  boyre  de  la  liqueur  sourdante  d'icelle 
fontaine,  ce  que  feismes  tresvolontiers.  Car,  pour  plaine- 
ment  vous  advertir...  » 

Même  chapitre  (XLIII),  page  172,  lignes  17-18:  «  le  boyre 


98 


VARIANTES 


dessus    coule    pour    descendre...  »    Le    manuscrit    porte    : 

«  Non  éspoulmons  par  l'artère  inegualle,  comme  a  esté  l'op- 
pinion  du  bon  Platon,  Plutarque,  Macrobe  et  aultres,  mais 
en  l'estomatz  par  le  sesophage.  » 

Chapitre  XLVIII,  page  i88,  ligne  7,  à  partir  de  «...  et 
compagnie  d'homme  »,  voici  comment  le  livre  se  termine 
dans  le  manuscrit  : 

«  Ainsi,  entre  les  Perses,  Zoroastes  print  Arismaspe  pour 
compaignon  de  toute  sa  misterieuse  philosophie  ;  Hermès  le 
Tresmegiste,  entre  les  Egyptiens,  eut  Esculapius  ;  Orpheus 
en  Thrace  eut  Muse  ;  illecques  aussi  Aglaophemus  eut  Pyta- 
gore  ;  entre  les  Athéniens  Platon  eut  premièrement  Dyon  de 
Syracuse  en  Cicille,  lequel  defunct,  print  secondement  Xeno- 
crates;  Appolonius  eut  Damis.  Quant  doncques  voz  philoso- 
phes, Dieu  guyde,  accompaignens  à  quelque  claire  Lanterne, 
se  adonneront  à  songneusement  rechercher  et  investiger, 
comme  est  le  naturel  des  humains  (et  de  ceste  qualité  sont 
Hesrodothe  et  Homère,  appeliez  alpheste,  c'est  à  dire  re- 
chercheurs et  inventeurs),  trouveront  vray  estre  la  responce 
faicte  par  le  saige  Talés  à  Amasis,  roy  des  Egiptiens,  quant, 
par  luy  interrogé  en  quelle  chose  plus  estoit  de  prudence, 
respondit  :  «  On  temps.  »  Car  par  temps  ont  esté  et  par 
temps  seront  toutes  choses  latentes  inventées,  et  c'est  la 
cause  pourquoy  les  antiens  ont  appelé  Saturne,  le  Temps, 
père  de  Vérité,  et  Vérité  fille  du  Temps.  Infaliblement  aussi 
trouveront  tout  le  sçavoir  et  d'eulx  et  de  leurs  prédécesseurs 
à  peine  estre  la  minime  partie  de  ce  qui  est,  et  ne  le  sçavent. 
De  ces  troys  oires,  que  présentement  je  vous  livre,  vous  en 
prendrés  jugement,  congnoissance,  comme  dict  le  proverbe  : 
(I  Aux  oncles  le  lyon.  »  Par  la  raréfaction  de  nostre  eaue 
dedans  enclose,  intervenant  la  chaleur  des  corps  supperieurs 
et  ferveur  de  la  mer  sallée,  ainsi  qu'est  la  naturelle  transmu- 
tation des  elemens,  vous  sera  air  dedans  tressallubre  engen- 
dré, lequel  de  vent  clair,  serain,  delicieulx,  vous  servira,  car 
vent  n'est  que  air  flottant  et  undoyant.  Cestuy  vent  moyen- 
nant,  yrez  à  droicle   routte  sans  terre   prendre  si  vouliez. 


VARIANTES 


99 


jusques  au  port  de  Olonne  en  Talmondois^  en  laschant  à 
travers  voz  velles,  par  ce  petit  soubspiral  d'or  que  y  voyés  ap- 
posé, comme  une  fleute,  aultant  que  penserez,  pour  tout  ou 
lanternent  naviger,  à  tousjours  en  plaisir  et  seureté,  sans 
dangier  ne  tempeste.  De  ce  ne  doubtez,  et  ne  pensez  la 
terapeste  yssir  et  procéder  du  vent  :  le  vent  vient  de  la  tem- 
peste excitée  du  bas  de  l'abisme.  Ne  pensez  aussi  la  pluye 
venir  par  impotence  des  vertus  retentives  des  cieulxet  gravité 
des  nues  suspendues  :  elle  vient  par  évocation  des  soubzter- 
rennes  régions,  comme,  par  évocation  des  corps  supérieurs, 
elle  de  bas  en  haut  estoit  imperceptiblement  tirée,  et  vous  le 
tesmongne  le  Roy  Prophète,  chantant  et  disant  que  l'abisme 
invocque  l'abisme.  Des  troyes  oyres,  les  deux  sont  pleines  de 
l'eaue  susdite,  la  tierce  est  extraicte  du  puys  des  saiges  In- 
diens, lequel  on  nomme  le  tonneau  des  Brachmanes. 

Trouverez  davantaige  voz  naufz  bien  duement  pourveues 
de  tout  ce  qu'il  vous  pourroit  estre  utille  et  nécessaire  pour 
le  reste  de  vostre  mesnaige.  Ce  pendant  que  icy  avez  séjourné, 
je  y  ay  faict  ordre  tresbon  donner.  Allez,  amys,  en  gayetté 
d'esprit,  et  portés  ceste  lettre  à  vostre  roy  Gargantua,  le  sa- 
luez de  par  nous,  ensemble  les  princes  et  officiers  de  sa 
noble  court.  » 

Ces  motz  parachevez,  elle  nous  bailla  des  lettres  closes  et 
scellées,  et  nous,  après  action  de  grâces  immortelles,  feist 
yssir  par  une  porte  adjacente  à  la  chapelle,  où  la  Bacbuc  les 
semonnoit  de  proposer  questions  aultant  deux  foys  qu'est 
hault  le  mont  Olympe.  Par  ung  païs  plain  de  toutes  délices, 
plaisant,  tempéré  plus  que  Tempe  en  Thessalye,  salubre  plus 
que  celle  partie  d'Egipte  laquelle  a  son  aspect  vers  Libye, 
irrigé  et  verdoyant  plus  que  Thermiscrie,  fertille  plus  que 
celle  partie  du  mont  Thaure  laquelle  a  son  aspect  veis 
Aquilon,  plus  que  l'isle  Hiperborrée  en  la  mer  judaïque, 
plus  que  Caligés  on  mont  Caspit,  flairant,  serain  et  gratieulx 
autant  qu'est  le  païs  de  Touraine,  en  fin  trouvasmes  noz  na 
vires  au  port. 


GLOSSAIRE-INDEX 


A,  avec. 

A   bas,  ici-bas. 

Abbegesse,  abbesse. 

Aben-Ezra,  rabbin,  commen- 
tateur de  la  Bible. 

Aberkeids ,  vilifiés  ,  en  alle- 
mand, 

Abestin  (Lin),  asbeste.  Voyez 
Asbeston. 

Abhorrent,  éloigné,  qui  fait 
horreur,  impie. 

Abhorryz,  abhorrés. 

Abila,  montagne  d'Afrique  au 
détroit  de  Gibraltar. 

Abiron,  nom  d'un  diable. 

Abordée  (De  prime),  de  prime 
abord. 

Aboth,  prophètes,  de  l'hébreu  ? 

Abrier,  mettre  à  l'abri. 

Abriconner,  tromper. 

Abscond,  absconce,  caché,  in- 
accessible, profond. 

Absterger,  nettoyer, 

Absîracteur,  qui  extrait,  sépare, 


isole,  distille. 

Abundant  (D'),  de  plus. 

Acamas,  infatigable,  du  grec. 

Acarations,  confrontations. 

Accapaye,  mets-toi  à  la  cape  ; 
ne  porte  que  très-peu  de 
voile  (Jal). 

Acclamper,  planter. 

Acconcepoir,  atteindre. 

Accoubler,  accoupler. 

Accoursiers  ,  commentateurs 
d'Accurse. 

Accurse(F.),  jurisconsulte  flo- 
rentin du  XIF  siècle. 

Acertainé,  renseigné  d'une  fa- 
çon certaine. 

AcHATES,  ami  d'Énée. 

AcHORiE,  pays  imaginaire,  pays 
n'existant  pas,  du  grec. 

Aconcepvoir,  atteindre. 

Acravanté,  écrasé. 

Acresté,  qui  redresse  la  crête, 
qui  fait  le  fier. 

AcRisius,  père  deDanaé. 

26 


GLOSSAIRE-INDEX 


Acromion  (Os),  apophyse  dj 
l'omoplate. 

Acroué,  accroupi. 

Aculler,  déraciner. 

Acut,  agu,  aiguisé,  fin,  aigu, 
du  latin  acutus. 

Adamastor,  géant. 

Additainens  mammillaires, 
bouts  des  mamelles,  du  la- 
tin additamenta. 

Adenes,  glandes. 

Adiantos ,  non  humide,  en 
grec. 

Adiantum,  la  capillaire. 

Adjouda  my,  aidez-moi,  en  li- 
mousin. 

Adrian  Villart  ,  "Willaert,  mu- 
sicien belge  du  XVI^  siècle. 

Adscript,  inscrit. 

Advers,  ennemi,  opposé. 

vEacus,  Eaque,  l'un  des  trois 
juges  à  l'entrée  de   l'enfer. 

vEditue,  sacristain,  du  latin 
sediluus. 

iEMiLiAN,  itmilianus,  rhéteur 
grec. 

y£olipyle,  porte  d'Éole.  Voir 
ce  mot  dans  la  Briefve  Dé- 
claration, à  1.1  suite  du 
livre  IV,  page  296. 

/Egipanes,  Egipans,  sorte  de 
satyre. 

itcEON,  géant. 

/Egylops,  graminée.  On  croit 
que  l'aegylops  a,  par  des 
modifications  successives  , 
donné  naissance  au  froment. 

A^quiparer,  mettre  sur  le  même 
rang. 

Aeromantie  ,      divination     par 


AesleSj  JEsles,    ailes. 

jEthiopis,   espèce  de  fucus. 

Affaictée,  terme  de  fauconne- 
rie, apprivoisée. 

Affecter,  désirer  avec  inquié- 
tude. 

Affections,  passions. 

Affené,  garni  de  foin,  rassasié. 

Affier,  affirmer,  greffer. 

Affiert,    a  rapport. 

Affiner,  tromper  finement. 

Affoler,  affoller,  rendre  fou  ; 
blesser,  maltraiter. 

Afriquanes,  les  bêtes  féroces  pri- 
ses en  Afrique. 

Agalloche,  substance  végétale 
balsamique  connue  sous  le 
nom  de  bois  d'aloès. 

Agarene,  en  arabe,  descendant 
d'Agar. 

Agathias,  poëte  et  historien 
grec  des  VF  et  VIF  siècles. 

Agatho,  géant. 

Agathocles,  tyran  de  Syra- 
cuse. 

Agelaste,  qui  ne  rit  point,  du 
grec. 

Agenor,  père  d'Europe. 

Aggeres,  digues. 

Agios,  saint,  en  grec. 

Agiotate,  très-saint,  superlatif 
grec. 

Agiots,  choses  saintes. 

Agrené,  garni  de  grain,  rassa- 
sié. 

Agricola,  musicien  des  Pays- 
Bas  du  XVe  siècle. 

Agrie,  ou  plutôt  Agnie,  fon- 
taine d'Arcadie. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Agrimenseur,  mesureur  de 
champs,  arpenteur,  du  latin 
ager  et  mensor. 

Agu.  V.  Acut. 

Agua,  regarde  ;  est  employé 
dans  le  même  sens  dans 
Pathelin. 

Aguars  (Oiseaux),  hagards,  oi- 
seaux pris  trop  âgés  pour 
être  dressés. 

Agueilky  Agueillette,  aiguille, 
aiguillette. 

AguyoM, vent  doux  et  favorable. 

Ahan,  effroi. 

Aguilanneuf,  au  gui  l'an  neuf, 
le  premier  jour  de  l'année. 

Aguille  de  Virgile,  clocher  soi- 
disant  bâti  par  Virgile  à 
Rome. 

Aignevillot,  aiguillot,  gond  fixé 
au  gouvernail. 

Aigresi,  verjus. 

A fgtmrfe  (Faire),  faire  de  l'eau. 

Aigueillettes ,  aiguillettes.  V. 
Aguilles,  Aguillettes. 

Aiguillette  borgne,  aiguillette 
ferrée  d'un  seul  bout. 

Aiguosité,  partie  aqueuse. 

Ains,  mais,  mais  bien;  pen- 
dant. 

Aire,  grand  flacon  ;  coffre.  V. 
Oire. 

AisGNEjAisgnes,  arrondissement 
d'Angoulème,  Charente. 

Aisgué  (Vin),  vin  mêlé   d'eau. 

Aisses,  ais,  planchettes  de  bois. 

Aisseuil  septentrional,  l'essieu 
sept.,   le  pôle  arctique. 

Alaire  ou  Allaire,   musicien. 

Alanus,  Alain  de  Lisle,  auteur 


d'un  traité  des  Paraboles. 

Alateré,  faut-il  lire  a  latere, 
titre  donne  à  certains  légats 
du  pape? 

Albert  le  Grand,  moin-e  jaco- 
bin, philosophe  scolastique 
du  XIIF  siècle. 

Alberti  (Leo-Battista),  archi- 
tecte florentin  du  XV  siècle. 

Albian  Camat,  blanc  sacris- 
tain, en  hébreu. 

Albrans,  hallebrans,  canards 
sauvages. 

Alcibiadion,  la  vipérine  com- 
mune. 

Alcman,  poète  grec  du  VIP 
siècle  avant  J.-C. 

AlcofribasNasier,  anagramme 
de  Rabelais. 

Alecretz,  corsets  de  fer. 

Alectryomantie,  divination  par 
un  coq. 

Aies,  ailes. 

Aleuromantie,  divination  par 
la  farine. 

Alexander  Myndius,  philoso- 
phe grec  du  IIF  siècle. 

Alexandre,  jurisconsulte  ita- 
lien. 

Alexicacos,  qui  éloigne  !e  mal, 
du  grec.  C'est  un  des  sur- 
noms d'Hercule. 

Alezan  ioustade,  alezan  brîjlé. 

Algamala,  Algamana,  Algv.a- 
mala,  amalgame;  nom  du 
mercure  chez  les  alchimis- 
tes. 

Algorisme,  calcul. 

Algousan,  argousin. 

Alibantes,  morts,  du  grec. 


204 


GLOSSAIRE-INDEX 


Alibitz  forains,  mauvaises  chi- 
canes. 

Alicacabut,  fruit  de  l'alkékenge. 

Alidada,  alidade,  règle  qui  sert 
à  déterminer  la  direction  des 
objets. 

Aliptes,  garçons  de  bains,  du 
latin  aliptge. 

AJkatim,  Alkatin,  mot  arabe. 
D'après  le  texte,  ce  serait  le 
coxis,  et  plus  loin  le  péri- 
toine. 

Allebouter,  grappiller. 

Alliaco  (De),  Pierre  d'Ailly, 
théologien  du  XV^  siècle. 

Allianciers,  faiseurs  de  jeux, 
d'alliances  de  mots. 

Alliboron  (Maistre),  sorcier, 
diable. 

Allouvy,  qui  a  une  faim  de 
loup,  affamé. 

AllumelUs,  lames  d'épée. 

Alluz,  boire,  en  allemand. 

A/me,  nourricière,  du  latin 
aima. 

AlmicantaraihjAlrnucantharat, 
cercle  astronomique  paral- 
lèle à  l'horizon. 

Almyrodes,  salés. 

Aloe,  géant. 

AloVdes  ,  Otus  et  Ephialte, 
géants  ,  descendants  d'A- 
loeus. 

Alopecuros ,  plante  de  la  fa- 
mille des  graminées. 

Alphitoniancie  ,  divination  par 
la  farine  d'orge. 

Altère,  artère. 

Alun  de  plume,  sulfate  d'alu- 
mine en  poudre. 


Alvares  (Piètre),  Pedro  Alva- 
res  Cabrai,  voyageur  por- 
tugais du  XVI^  siècle. 

Alyasum  ;  est-ce  un  ail,  al- 
lium  ? 

Amadeans,  ordre  religieux  fon- 
dé par  Amédée  VIII  de  Sa- 
voie. 

Amaurotes,  inconnus,  obscurs. 

Ambezars,  Ambezas,  les  deux 
as,  aux  dez. 

Ambouchouoir,  embauchoir. 

Ambrun,  charpente  de  toit. 

Amerine  saule,  variété  de  saule 
qui  passait  pour  antiaphro- 
disiaque. 

Ammomus,  philosophe  éclec- 
tique du  V^  siècle. 

Amoderer,  réduir. 

Amodier,  déterminer,  fixer. 

Amodunt,  a  modo,  sine  modo, 
sans  forme. 

Amorabond,  amoureux. 

Amorabaquine,  danse  turque. 

Amphiaraus  ,  fils  d'Apollon, 
interprète  des  songes. 

Amphicyrces,  amphicyrtes,  du 
grec,  arrondi  aux  trois 
quarts.  «  État  où  se  trouve 
la  lune  le  onzième  jour  du 
mois  quand  elle  croît,  et  le 
dix-neuvième  quand  elle  dé- 
croît. »    (Le  Duchat.) 

Amure,  cordage  qui  fixe  une 
voile  par  en  bas. 

Amy  (Pierre),  cordelier  de  Fon- 
tenay-le-Comte,  ami  de  Ra- 
belais. 

Anacampserotes ,  herbe  qui, 
d'après  Pline,    fait   revenir 


GLOSSAIRE-INDEX 


:o5 


l'amour  passé. 

Anachite,  nom  d'un  diamant 
qui  était  regardé  comme  un 
talisman. 

Anagnostes,  lecteur,  du  grec. 
Le  lecteur  de  la  dédicace  du 
IV«^  livre  était  Pierre  du 
Chastel,  évêque  de  Tulle. 

ANARCHE,sans  pouvoir, du  grec. 

A/ia/o/e(Tour),tour  de  l'Orient. 

Anatomies,  dissections. 

Anaxagoras  ,  philosophe  de 
l'école  ionienne,  cinq  siè- 
cles avant  J.-C. 

André  (Jo.),  Giovanni  Andréa, 
jurisconsulte  italien  du  XIV'= 
siècle. 

Anerudutes  ;  ce  nom  fait  partie 
des  animaux  venimeux  énu- 
mérés  par  Eustène  au  cha- 
pitre Lxiv  du  IV^  livre,  et 
empruntés,  pour  la  plupart, 
à  Aristote  et  à  Pline  ;  il  y  a  là 
des  reptiles,  des  insectes,  des 
animaux  fantastiques,  etc., 
dont  il  est  impossible  d'ar- 
river à  expliquer  le  nom  par 
un  équivalent  moderne. 

Aneth,  anis  ou  fenouil. 

Angarier,  Engarier,  tourmen- 
ter, contrarier. 

Angaries,  Anguaries,  Engaries, 
tourments,  vexations,  in- 
justices, oppression. 

Angelotz,  monnaie  frappée  sous 
Philippe  de   Valois. 

Anglicquetnentj  à  l'anglaise. 

AnguoLinages  ;  ce  mot  est  ex- 
pliqué dans  la  BrUfvt  Dé- 
claration,   à    la     suite    du 


IV^  livre,  page  298. 

Angustie,  angoisse,  anxiété. 

Animant,  subst.,  animal. 

Anonchaly ,  rendu  nonchalant. 

Ansées,  vases  à  anses. 

Anseride  (Plume),  plume  d'oie, 
anas  anser. 

Antan,  Van  passé,  auparavant. 

Antée,  géant. 

Anthromantie,  divination  par 
les   entrailles  d'un  homme. 

Antibust,    le  devant   du  buste. 

Anticthone,  antipode,  du  grec. 

Antifortunal,  contre  le  mau- 
vais temps. 

Antigone,  changée  en  cigogne 
par  Junon. 

Antiphon,  sophiste  et  orateur 
athénien  du  IV^  siècle  avant 
J.^C. 

Antiphysie,  antinature,  contre 
nature,  du   grec. 

Antiquaille,  ancienne  danse. 

Antiquaille  (Sonner  1'),  parler 
de  choses  anciennes,  ou 
jouer  l'air  de  l'Antiquaille. 

Antiquaire,  antique,  ancien. 

Antonoinatic,  adj.,  d'antono- 
mase, sorte  de  synecdoque 
qui  consiste  à  prendre  un  nom 
commun  pour  un  nom  pro- 
pre, ou  un  nom  propre  pour 
un  nom  commun. 

Apedeftes  ou  Apedeutes,  igno- 
rants, du  grec  ;  c'est  ici 
appliqué  aux  magistrats  de 
la  cour  des  comptes. 

Apert,  à  découvert,  apertus. 

A/3er//ses d'armes,  faits  d'armes. 

Aplane,    ciel  des  étoiles 'fixes, 


;o6 


GLOSSAIRE-INDEX 


du  grec. 

Apollo,  salle  d'Apollon,  chez 
Lucullus. 

Apone  (Fontaine  de),  à  Albano, 
près  de  Padoue. 

Aporrheticques,  douleurs ,  qui 
doutent. 

Apostoles,  apôtres. 

Aposîoles,  lettres  demandées 
au  juge  pour  qu'il  renvoie 
l'affaire  qu'il  a  jugée  à  une 
juridiction  supérieure. 

Apotheque,  magasin,  boutique, 
du  grec. 

Apoiherapie,  exercice  hygiéni- 
que, du   grec. 

Apotrophées  ,  détournant  les 
maléfices,  du  grec. 

Appeaulx,    appels,  en  justice. 

Appellations  ,  révision  des 
comptes. 

Applausenunl ,  applaudisse- 
ment. 

Appareil  (Haut),  armure  com- 
plète. 

Appianus  ,  historien  grec  du 
11^  siècle. 

Appigrets,  profits  illicites,  grap- 
pillage. 

Appoincté  ,  arrangé  ,  accom- 
modé. 

Apposées  (Viandes),  mises  sur 
table. 

Appoulle,  Apulie. 

Apoyer,  Appoyer,  appuyer. 

Appous,  acolytes. 

Appréhension,  compréhension. 

Aprivoiser,  acclimater. 

Aquileie,  Aquila,  ville  de  l'A- 
bruzze  supérieure. 


Aranthas,  géant. 

Arbalestes  de  passe,  grosses 
arbalètes. 

Arbre,  mât. 

Arc  à  jallet,  arbalète. 

Arcadelt,  musicien  des  XV*-' 
et  XVie  siècles. 

Arceau  Guabeau,  localité  du 
Chinonais. 

Archadian,  Arcadien. 

Archasdarpenins,  voudrait  dire 
étudiant,  en  hébreu? 

Archiiriclin,  majordome. 

Ardillon  (Antoine),  abbé  de 
Fontenay-le-Comte. 

Aremotis,  au  loin,  éloigné. 

Arer,  labourer  ;  parcourir. 

.1res  me^js  (Tout),  en  gascon, 
tout  de  suite. 

Argathyles ,  oiseaux  fantasti- 
ques. 

Argentangine,  angine  payée  à 
Démosthène  par  les  ambas- 
sadeurs milésiens  pour  qu'il 
ne  parle  pas.  Voir  la  Bne/'i'e 
Déclaration,  à  la  suite  du 
IV*'  livre,  page  298. 

Argentier,  nom  propre  de 
VAnthologie,  traduit  par  Ra- 
belais. 

Arges,  lumière  blanche  de  la 
foudre,  éclairs. 

Argiere,  Alger. 

Argives,  Argiens. 

Arguer,  argumenter. 

Argut,  subtil. 

Argy,  Argis, Arrondissement  de 
Châteauroux,  Indre. 

Argyropile,  Arguropoulo,  hel- 
léniste du  XV^  siècle. 


GLOSSAIRE-INDEX 


20' 


Arietant,  faisant  le  bélier. 

Arimanian  (Daemon),  Ahri- 
mane,  principe  du  mal,  en 
Perse. 

Arimaspians  ou  PiENS,  peuples 
du  Nord  dont  parlent  Pline 
et  Hérodote,  et  qui  n'avaient, 
disent-ils,  qu'un  œil. 

Ariphron,  poëte,  né  àSicyone. 

Aristarchus  ,  philosophe  de 
Samos,  vivait  3oo  ans  avant 
J.-C. 

Aristarchus  de  Sole,  gram- 
mairien grec  du  IF  siècle 
avant  J.-C. 

Aristodice  ,  nom  grec  em- 
prunté à  l'Anthologie. 

Aristophanes  ,  grammairien 
grec  du  III^  siècle  avant 
J.-C. 

Arinet  de  Platon,  casque  qui 
rendait  invisible. 

Armoisij  Armoisy,  étoffe  de 
soie. 

Armoisine,  de  taffetas. 

Arin,  airain. 

Aromatisant ,  sentant  les  épices. 

Arondelle,  hirondelle. 

Aroy,  charrue. 

Arraper,  saisir. 

Arresser,  dresser. 

Arroy,  train,  équipage. 

Ars,  arcs. 

Artachée,  Artacaeas,  géant. 

Artemidorus  Daldianus.  Ar- 
témidore,  écrivain  grec  du 
IF  siècle. 

Artemon^  écrivain  néàMllet. 

Artemon,  mât  d'artimon. 

Ariice  (Tour),  tour  arctique,  du 


Nord. 

Articuler,  faire  le  procès. 

Artiens,  étudiants  es  arts. 

Arulettes,  sillons. 

Asarotum,  mosaïque,  du  grec. 

Asbeston,  asbeste  ,  amiante; 
c'est  un  silicate  de  magnésie. 

Asçavanté,   informé,    instruit. 

Ascites,  hydropisies. 

Asnerie,  l'Asinaria,  comédie  de 
Plaute. 

AsoPE,  personnification  d'un 
fleuve  de  Béotie. 

Aspharage,  gosier. 

Asprettes,  un  peu  âpres. 

Assaphis,  gens  de  basse  con- 
dition, du  grec. 

Assay,  essai. 

Assere,  d'acier. 

Asserer,  aiguiser ,  armer  de 
pointes  de  fer  ;  affermir  ; 
prendre,  saisir. 

Assertivement  ,  catégorique- 
ment. 

AssiER  (François  de  Genouillac, 
seigneur  d'),  tué  à  la  ba- 
taille de  Cérisoles. 

Assimentées,  épaissies  comme 
du  ciment. 

Assimenty,  bouché. 

AssuERE,  Assuérus. 

AsTAROST,  nom  de  diable. 

Astipulateurs,  défenseurs. 

Astipulation,  approbation. 

Astragalomantie,  divination  par 

les  osselets,  astragales. 
AsTROPHiLE,  le  pilote  aimé  des 

astres. 
Asturciers,  fauconniers. 
Ataves,  aïeux. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Até  ,  divinité  grecque  qui 
pousse  à  l'erreur. 

A.thanatos,  immortel,  en  grec. 

Athen^us,  Athénée,  grammai- 
rien grec  du  IF  siècle. 

Athineus,  Athénée,  mathéma- 
ticien grec  du  llh'  siècle 
avant  J.-C. 

A  tout,  avec. 

Aires,  foyers,  dans  le  sens  de 
maison. 

Atrophts,  atrophiés. 

Altediation,  ennui. 

Attempier,  tenter. 

Attrempé  (Temps),  temps  doux. 

Aube  des  mousches,  l'instant  le 
plus  chaud  de  la  journée. 

Aube  du  bast,  le  bord  de  de- 
vant du  bât. 

Aubeliere,  muselière  de  cou- 
leur blanche. 

Aubers,  Haubergeons,  cottes  de 
mailles. 

Aubert,  argent. 

Aubier  (Franc),  osier. 

AuCTOLiA,  mère  d'Ulysse. 

Audiance,  audition,  ouïe. 

Aulcunemeni,  un  peu,  quelque 
peu. 

Auliques,  de  cour. 

Aultelissiers,  tapissiers  de  hau- 
telisse. 

Aumusse,  peau  de  martre  ou 
de  petit-gris  que  les  cha- 
noines et  les  chantres  por- 
tent sur  le  bras  quand  ils 
vont  à  l'office  (Littré).  Bon- 
net fourré.  " 

Aurande,  fleurs  d'oranger. 

Aureilles  de  Bourbonnoys,  lon- 


gues oreilles. 

AuRELiANS,  Orléans. 

AuRiDiE,  prophétesse  nommé 
par  Tacite. 

Auriflue,  qui   fait   couler  l'or. 

Auripeaux,  mal  d'oreille. 

Ausou,  saindoux. 

Autant  (D');  boire  d'autant  à 
I  un  chascun,  c'est  tenir  tète  à 
j  tous  ceux  qui  boivent,  boire 
!        autant  qu'eux. 

AuxERRE,  ou  Dauxerre,  mu- 
sicien. 

Avalisque  Sathanas,  retire-toi, 
Satan,  en  provençal. 

Avaller,  tomber,  abaisser,  des- 
cendre, manger  (ce  qu'on 
boit  et  mange  descend  par 
l'œsophage  dans  l'estomac); 
abattre. 

Avalluer,  mettre  en  valeur. 

Avangtr,  avancer. 

Aveiglé,  aveuglé. 

Averlans,  gaillards,  fanfarons, 
tapageurs. 

AvERROïs,  Averroës,  célèbre 
médecin  arabe  du  XIF  siè- 
cle.* 

Apes,  aïeux. 

AvicENNE,  ou  Abou-ibn-Sina, 
philosophe  et  médecin  arabe 
des  Xc  et  XF  siècles. 

Avives  (Males)^  engorgement 
de  glandes  du  cou  chez  les 
chevaux. 

Avoir.  Cet  infinitif,  employé 
seul  au  commencement  d'une 
phrase,  signifie  toujours  : 
après  avoir.  Il  y  a  dans  Ra- 
belais d'autres  infinitifs  em- 


GLOSSAIRE-INDEX 


ployés  avec  le  même  sens 
mais  ils  sont  très-rares. 

Avoistre,  enfant  adultérin. 

Avoler,  voler,  aller  vite. 

Axinoinantie,  divination  parla 
cognée, 

Azetnine,  azziminina,  sorte  de 
damasquinure  appliquée  sur- 
tout aux  armes  et  aux  ar- 
mures. 

Azes  guayes,  zagaies,  lances. 

Azimuth,  cercle  astronomique 
vertical  à  l'horizon. 

Babines,  lèvres. 

Babou  (Faire  la),  faire  la  ni- 
que, narguer.  C'est  propre- 
ment le  bruit  que  les  nour- 
rices produisent  en  faisant 
passer  rapidement  leur  doigt 
sur  leurs  lèvres  pour  amuser 
les  petits  enfants. 

Babouyneries,  singeries. 

Bac,  baquet. 

Bac  (De  queue  et  de).  Faut -il 
de  queue  et  de  bec,  ou  de 
cap,  à  égale  distance  de  la 
queue  à  la  tête  ? 

Bacabery  l'aisné,  auteur  de  la 
fabrique  de   Rabelais. 

Bacbuc,  personnification  de  la 
bouteille  en  hébreu. 

Baccane  (Lac),  lac  Baccano,  au 
N.-O.  de  Rome. 

Bacchides,  bacchantes. 

Bacces,  baies,  graines.  V.  Bague. 

Bacchelier,  jeune  garçon. 

Bachelettes ,  aimables  jeunes 
filles. 

Bàdebec,  niaise,  ensaintongeais. 
Rabelais,   V. 


Badelaire,  épée  à  lame  large, 

courte  et  recourbée. 
Badelorié,  recourbé. 
Badeloury,   géant. 
Badigoinces,    babines,    lèvres, 

mâchoires. 
Baguaige,    bague,    bagage,    du 

bas  latin  baga,  sac. 
Bague,   baie,   du    latin   bacca. 

V.  Bacces. 
Bail,  bai,  rouge  brun. 
Bailler  le  moine,  c'est  attacher 
aux  pieds  de  quelqu'un  qui 
dort  une    corde    qu'on  tire 
pour  lui  faire  peur.V.  Moine. 
Baisler,  bâiller. 
Baissiere,  la  lie,  ce  qui  est  au 

bas  du  tonneau  vidé. 
Bal  solistime   des  canes,    bruit 
que  font  les  canes  en  man- 
geant. 
Balais,  balay,  rubis  balais. 
Balane,  gland. 
Balde  de  Ubaldis,  jurisconsulte 

italien  du  XV^  siècle. 
Balle    (Pain),   pain  où  reste  la 
balle  ou  enveloppe  du  grain. 
Balleruc,  Balaruc,  eaux  ther- 
males, arr.  de  Montpellier. 
Hérault. 
Balloter,  aller  aux  voix. 
Bandouille  (Jousse),  probable- 
ment Jean  Cheradame,  pro- 
fesseur de  grec  de  l'Univer- 
sité, à  la  famille  duquel  ap- 
partenait le  prieuré  de  Ban- 
douille (Burgaud). 
Bandouillers,  bandits,  brigands. 
Banerol,  porteur  de  bannière 
Banier,  crieur  de  ban. 


2  10 


GLOSSAIRE-INDEX 


Baririj  d'éléphant,  du  latin  bar- 
rus. 
Barrier,  se   dit   du  cri  des  élé- 
phants. 
Baralipton, forme  de  syllogisme. 
Baratter,  remuer   comme   avec 
une  baratte  à   heure,  hous- 
piller. 
Barbatia  ,    Andréa    Barbazio , 
jurisconsulte  italien  du  XV'^ 
siècle. 
Barbe  (En),  en  face,  en  avant 

de,  devant. 
Barbe  de  Jupiter,  plante  vulné- 
raire. 
Barboire,  mascarade  où  l'on  se 
déguisait     avec     de     fausses 
barbes,  du  bas  latin  barba- 
toria . 
Barbotine,  armoise. 
Barbute,  capuce  de  moine,  ca- 
goule, casque  à  fourrure. 
Barde,  armure  de  cheval. 
Bardocuculkz,  encapuchonnés. 
Barraige,  droit  de  passage. 
Barrault,     mesure     languedo- 
cienne des   liquides,  de  près 
de  5  2  litres. 
Barraux,  petits  barils. 
Barretade,  salut  de  la  barrette, 

du  bonnet. 
Bartachim,     Bertachin,     Jean 
de  Bertachino,  jurisconsulte 
italien. 
Bartolus,     Bartole,    juriscon- 
sulte italien  de  XlVe  siècle. 
Baschatz,  pachas. 
Basché,  arrondissement  deChi- 

non,  Indre-et-Loire. 
Baschb  (Le  seigneur).  Un  Per-   | 


rot  de  Basché  alla  en  Italie 
par  ordre  de  Charles  VIII. 
Bazilicz,  canons  un  peu  longs. 
Basic-,  bailler.  V.  Baisler. 
Basme,  baume,  parfum. 
Bassarides,  bacchantes. 
Baston,   arme,    terme    généri- 
que. 
Batail,  battant  de  cloche. 
Baudement,   agréablement. 
5aurf[(/fe,  lavette  de  toile;  bau- 
druche. 
Bauffrer,  manger  avec  avidité. 
Bauffrures,  grandes  mangeail- 

les. 
Baulevres,  mâchoires. 
Baulkvre,  tour  de  la  bouche. 
Baurach,     borax,     borate     de 

soude. 
Bauracineuses,  de  la  nature  du 

borax. 
Bavière,  visière  du  casque  ;  ba- 
vette. 
Baye,  béante. 

Bazacle  lés   Toloze    (Moulin 
du).  Ce  moulin  existe  encore 
à  Toulouse. 
Bazelic,  bazilic,  pièce  de  canon. 
Barizel,  barigel,  chef  de  sbires. 
Beaugears,  fréquentant  les  bau- 
ges. 
Becars,  nom  d'une  espèce  d'oie. 
Bêchée,   becquée 
Beclïiuni,  béchion,  pas  d'âne. 
Beda  (Noël),  principal  du  col- 
lège de   Montaigu. 
Bedaines,  boulets  de  canon  en 

pierre. 
Bcdaud,  ami. 
Bedon,  petit  ventre,  nom  d'à- 


GLOSSAIRE-INDEX 


mitie. 

Bedondaine,  ventre,  gros  ven- 
tre. 

Bedouault,  blaireau. 

Bedouaux,  petits  veaux. 

Bée  (gueule),  gueule  béante. 
V.  Baye. 

Beffier,  bafouer. 

Been,  racine  du  silène-been 
commun. 

Bejaune,  jeune  sot  ;  au  propre, 
jeune  oiseau  qui  a  encore 
les  commissures  du  bec 
jaunes. 

Belima,  rien,  en  hébreu. 

Belin  (Regnauld),  nom  de  ber- 
ger de  quelque  conte  popu- 
laire. 

Beliner,  mystifier,  tromper. 

Belistrandie ,  sottise,  coquinerie. 

Belistrandiers,  mendiants,  bélî- 
tres,  gueux,  vagabonds. 

Belutement,  examen  minutieux. 

Bénéfice,  bienfait. 

Benistre,  benoist,  bénir,  béni. 

Benoistier,  bénitier. 

Berkj  racine  du  ginseng,  qui 
a  l'aspect  de  l'ambre  jaune 
et  passait  pour  aphrodisia- 
que. 

Bernes j  mantelets  à  capuchon. 

Berose,  historien  chaldéen  du 
IVc  siècle  avant  J.-C. 

Bers,  berceau. 

Besaguë  Tenedie,  hache  de 
Ténédos,  hache  à  deux 
tranchants,  besaiguë.  V.  Be- 
zague. 

Besc/i,  vent  du  S.-O.,  Libeccio. 

Bessains,  bassins 


Bessarion  (Jean),  helléniste  du 
XVe  siècle. 

Bessé,  arr.  de  Saumur,  Maine- 
et-Loire. 

Besser  boys,  abaisser  les  lances. 

Bessons,  jumeaux. 

Bette,  boisson,  action  de  boire. 

Betune,  Bithynie. 

Beufîes,  buffles. 

Beurre  (Tour  de),  tour  bâtie 
avec  l'argent  donné  pour 
avoir  la  permission  de  man- 
ger du  beurre  en  carême 
(Burgaud). 

Beurs,  burs,  moines  vêtus  de 
bure. 

Beusse,  bourg  et  rivière,  près 
de  Loudun. 

Beuvette,  action  de  boire,  bu- 
verie. 

Beuvreaux,  buveurs. 

Bezagues,  besaiguës,  outils  de 
de  charpentier  taillant  par 
les  deux  bouts.  V.  Besaguë. 

Bezans  d'or,  monnaie  frappée 
à  Byzance  sous  les  empereurs 
chrétiens. 

BiART,  Béarn. 

BiEAROYs,  Vivarais. 

Bicane,  nom  d'un  cépage. 

Bière  (La  forêt  de).  Les  com- 
mentateurs ne  sont  pas  d'ac- 
cord et  ne  savent  s'il  s'agit 
d'une  forêt  sur  les  bords  de 
la  Bièvre,  ou  de  la  forêt  de 
Fontainebleau. 

Bigearre,  bizarre. 

Bigot  (Guillaume),  professeur 
de  philosophie  à  Tubinge,  au 
XVP  siècle. 


2  I  2 


GLOSSAIRE-INDEX 


Billart,  bûche,  bille  de  bois. 

Bilks  vizécs,  balles  soufflées. 

Billonneurs,  qui  font  de  la 
monnaie  de  billon,  faux- 
monnayeurs. 

Bipartient,  part.,  se  divisant  en 
deux  parties. 

Biscarié,  maladif. 

Bischarsj  jeunes  daims, 

Biscle,  bigle,  qui  louche  en 
dedans. 

Bisouars,  vêtus  d'étoffes  grises, 
porte-balles. 

Bistorié,  qui  a  des  coups  de 
bistouri. 

Bitars,  variété  d'outardes. 

Biterne  (Diable  de),  juron. 

Biton,  bitous,  pièce  de  bois  à 
laquelle  on  amarre  les  cor- 
dages à  bord  d'un  navire. 

Blanc,  petite  monnaie. 

Blanchée,  ce  qu'on  avait  pour 
un  blanc. 

Blanchei,  étoffe  blanche,  dou- 
blure de  laine  blanche. 

Blandureau  (Pomme  de),  pom- 
me blanche  et  dure. 

Blason  {Le)  des  couleurs,  par 
Sicile,  imprimé  d'abord  sous 
le  titre  de  :  Le  Blason  des 
armes. 

Blemmies,  peuples  sans  têtes, 
qui  ont  les  yeux  et  la  bou- 
che sur  le  sternum. 

Bobeliné,  rapiécé. 

Bobelins,  chaussures  grossières, 
savates. 

BoissoNNÉ,  Jean  de  Boyssone, 
jurisconsulte  du  XVI''  siècle. 

Bolides,  plomb  de  la  sonde 


BoLiYORAX,  géant. 
Bolines,  boulines,  cordages. 
Bonache,     bonace,     calme    en 

mer. 
Bonases   de  Pseonie,    espèce  de 

buffle. 
Bondes  de  Hercules^  les  colon- 
nes d'Hercule. 
Bondon,  bonde. 
BoNivET,  château  près  de  Chà- 

tellerault,     commencé     par 

l'amiral  de  ce  nom. 
Bonne-Dée,    bonne  déesse,   du 

latin  bona  dea. 
Bonnes-Nouvelles  (Notre-Da- 
me de),  près  d'Orléans. 
Bonnette,  voile  supplémentaire. 
Bonnetz  (Du  temps  des  haults), 

à  la  vieille  mode. 
Bononus,    proclamé    empereur 

par    l'armée     du    Rhin    et 

vaincu  par  Probus,  se  pendit. 
Bordes,   bordieux,  maisons  des 

champs. 
Botanomancie,   divination    par 

les  plantes. 
Botes  d'olif,  tonneaux  d'huile. 
BotineurSj  moines  qui  portaient 

des  bottes. 
Botte,   bote,  tonneau. 
Botte  Sainct-BertoU ,   la   grande 

tonne  qui  est  à  Bologne. 
Bouc,  bouche. 
Bouc  (De  broc  en),  de  broche 

en  bouche,  immédiatement. 
Boucaiges,  bocages,  bois. 
Boucal,  bocal,  vase. 
Boucler,   bouclier. 
Boucler     à    la     bergamasque, 

mettre     une      ceinture      de 


GLOSSAI RE-lNDEX 


chasteté. 

BoucleZj  fermés  avec  un  cade- 
nas. 

Bouclus,  tranchée. 

Boucon,  bouchée.  Ly  boucon 
de  Lombard,  les  bouchées 
empoisonnées. 

Bouconi,  poison,  de  l'italien 
boccone. 

Boucque  du  hault  ventre,  le 
creux  de  l'estomac. 

Boucquer,  baiser  de  force. 

Boudinalle  (Fressure),  de  bou- 
din. 

BouffaigCj  bouffage,  chose  à 
manger. 

Bouger,  partir. 

Bougette,  bourse. 

Bougres,  bougrins,  hétérodoxes, 
hérétiques. 

Bougrino,  petit  bougre. 

Bougrisque,  à  la  bougre. 

BouGUiER  (Guy) ,  contempo- 
rain de  Rabelais  à  Mont- 
pellier. 

Boulas,  bouleau. 

Bouline,  l'un  des  cordages  d'un 
navire. 

Boulingues ,  boulines,  petites 
voiles  hautes. 

BouLOiGNE,  Bologne. 

BouRBONNENCY,Bourbon-Lancy, 
arr.  de  Charonnes,  Saône- 
et-Loire. 

Bourdes.  Est-ce  Le  Bourdet,  arr. 
de  Niort,  Deux-Sèvres? 

Boure,  Bura,  où  était  un  ora- 
cle d'Hercule. 

Bourgeoys  (Frère  Jan),  corde- 
lierdelafinduXIVe  siècle. 


Bourgueil,  arr.  de  Chinon,  In- 
dre-et-Loire, avait  une  ab- 
baye de  bénédictins. 

Bourlet,  bourrelet,  ancienne 
coiffure  des  docteurs. 

Bourne,  borne. 

Bourrabaquin,  flacon  garni  de 
cuir. 

Bourrabaquiniere  (Nauf),  na- 
vire qui  avait  pour  enseigne 
un  bouriabaquin. 

Bourraches,  bouteilles  de  cuir. 

Bourrachous,  ivrogne. 

Bourreau,  bureau. 

Bourré  (François;;  faisait  par- 
tie de  la  maison  de  Du  Bel- 
lay. 

Bourt,  bord. 

Boussin,  morceau. 

Boutargues,  poutargues,  cerve- 
las d'oeufs  de  poisson. 

Boutavent,  boutevent,    soufflet. 

Boutée,  boutade. 

Boutées  (A),  par  troupes. 

Bouteiller,  musicien  français 
du  XVP  siècle. 

Bouteillon,  grand  buveur,  de 
l'italien  bottiglione. 

Bouzine,  cornemuse. 

Bo-je,  bourreau,  de  l'italien 
boja. 

Boyers,  bouvier. 

Boyre,  courant  d'eau. 

Boyte,  provision  de  vin  pour 
l'année. 

Boyteau ,  petite  botte ,  petit 
tonneau. 

Bracque.  Est-ce  un  jeu  de 
paume  du  faubourg  Saint- 
Marceau   ou  le  carrefour  de 


214 


GLOSSAIRE-INDEX 


Bracque,  aujourd'hui  place 
de  l'Estrapade  ? 

Bragmard ,  bracquemart,  bâ- 
ton, épée  courte. 

Braginarder ,  mener  joyeuse 
vie, 

Braguart,  élégant,  pimpant, 
coquet. 

Brague,  cordage;  braguette. 

Bragues  avalades,  culottes  tom- 
bantes. 

Braguette,  pochette  entre  les 
deux  jambes  du  haut-de- 
chausses  ;  quelquefois  le  con- 
tenu de   la  braguette. 

Braguettodyiej  habitant  de  la 
braguette. 

Brain,  un  brin,  un  peu. 

Braisler,  braire. 

Bramer,  brasmer,  crier. 

Brancquars,  vergues. 

Brandes,  broussailles. 

Brandif,  brandissant. 

Brandi fz  (Tous),  tout  brandi, 
tout  de  go,  tout  d'une  pièce. 

Branc  ou  brand  d'acier,  épée 
à  large  lame. 

Branchier,  nom  général  des 
oiseaux  de  proie. 

Bransler,  brandir. 

Brassai,   bra;sart. 

Brassée,  embrassade. 

Brassisers,  bâtons. 

Braye,  culotte  ;  toile  goudron- 
née. 

Braver  (Jamet),  pilote  célèbre 
du  XVF  siècle. 

Brayer,  broyer. 

Brayes  (Faulses),  murs  exté- 
rieurs de  fortifications. 


Braze,   braise  allumée. 

Bréchet,  le  sternum,  os  de 
la  poitrine  où  aboutissent 
les  côtes  par  devant. 

Bregerac,  Bergerac,  chef-lieu 
d'arr.,  Dordogne. 

Bregmatis  (Os),  ou  bregmati- 
ques,  partie  antérieure  du 
crâne,   sinciput. 

Brehaigne,  stérile. 

Brehemont,  arr.  de  Chinon, 
Indre-et-Loire. 

Bren,  merde. 

Brenasserie,  se  rappeler  le  sens 
du  mot  bren. 

Breneux,  brenoux,  merdeux. 

Brésil  incarnat,  bois  du  Brésil, 
fourni  par  les  Cxsalpinia 
echinata  et  tinctoria,  légu- 
mineuses. 

Bresser,  bercer. 

Bressiner,  tirer  le  cordage  qui 
sert  à  hisîer  une  voile. 

Bretesque  (A  la),  comme  les 
Bretons. 

Breton  '^Vin),  vin  du  cépage 
Chinonais  Le  Breton. 

Breton  Villandry,  Claude  le 
Breton,  seigneur  de  Villan- 
dry, secrétaire  des  rois 
François  F""  et  Henri  II. 

Breusse,  vase  à  boire. 

Bréviaire,  flacon  en  forme  de 
livre  de  messe. 

Briare,  Briarée,  géant. 

Briber,  boire  et  manger  avec 
avidité. 

Bricot  (Guillaume),  péniten- 
cier de  Notre-Dame  au 
XVIc  siècle. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Brief  (De),  bientôt. 
BriffauLv,  frères  quêteurs,  gou- 
lus,    gourmands,     gens     de 
grand  appétit. 
Briguandines,  armure. 
BrimbaleurSj    sonneurs  de  clo- 
ches. 
Brimballer,  se  remuer,  s'agiter, 

sonner  les  cloches. 
Brimballatoyre,    propre   à   être 

brimballé,  remué,  agité. 
Brimbelettes,  gâteaux  recs. 
Brinde,  vase  à  boire. 
Brindiere   (Nauf),  navire  qui  a 

pour  enseigne  une  brinde. 
Bringuenarilles,  géant. 
Brisnns.    «   Etat   de  la  lune   le 
quatrième     jour     du     mois 
quand  elle  c?oît,  et  le  vingt- 
sixième  quand  elle  décroît.» 
(Le  Duchat.) 
Brismarg  d'algotbric. . .  C'est  du 
lanternoys,    langage  de  fan- 
taisie. 
Brizepaille ,     d'auprès    Sainct- 
Genou  (Venir  de),  se  dit,  en 
Languedoc  et  en  Dauphiné, 
d'une  femme  débauchée. 
Brocadium    juris,    recueil    de 
droite   Brocardia  juris,    dont 
Brid'oye  fait  un  juge. 
Broc,  broche. 

Broc  en  bouc  (De),    de  broche 
en  bouche,  immédiatement. 
Brocards,  maximes  de  droit. 
Brosse  ^^La),   arr.   de   Saumur, 

Maine-et-Loire. 
Brouet,      le     Broglio,     grande 

place  à  Milan. 
Brumel,    musicien  flamand   du 


XVe  siècle. 
Brushant  de  Mommiere,  géant. 
Bruslefer,  géant. 
Bruslefer  (Etienne^,    cordelier 
parisien  du  XV^  siècle. 

Brusq,  âpre  ;  vin  âpre,  de  l'ita 
lien  brusco. 

Bruyer,  géant. 

Bruyer,  musicien. 

Bruyre,  faire  du  bruit. 

BubeletteSj  petites  gouttes. 

BuDÉ  (Guillaume),  érudit  con- 
temporain de  Rabelais. 

Buées,    lessives  ;     la    buée,    le 
linge  qui  a  passé  à  la  lessive. 

Buffer,  souffler. 

Buffeter,  boire  à  même  au  ton- 
neau. (Littré.) 

Buglosse,  buglose. 

Bulletin,  patente  de  santé. 

BuLLou,  de  la  maison  de  Du 
Bellay. 

BuourSj  butors. 

Bur,  de  couleur  grise;  toge  bure, 
toge  d'étofîe  grise. 

Bureau,  grosse  étoffe  de  laine. 

Burgotz,  moines  vêtus  de  bure. 

Buro/2,  cabane. 

Bursal,  qui  est  relatif  à  l'im- 
pôt. 

BuscH,  La  Tête-de-Buch,  arr. 
de  Bordeaux,  Gironde. 

Busche  (Bachelier  en).  On  ap- 
pellerait en  Poitou  et  en 
Saintonge  bûche  les  bâtons 
tracés  par  ceux  qui  commen- 
cent le  rude  apprentissage 
de  l'écriture.  Le  mot  bache- 
lier en  bûche  aurait  alors  un 
sens  ironique. 


GLOSSAIRE- INDEX 


Bussart,  tonneau. 

BustarinSj  ventrue. 

Bustuaire,  du  bûcher. 

Bustuaires  (larves),  larves  rô- 
dant autour  des  tombes. 

BuTROT,  Buthrole,  ville  d'Epire. 

BuzANÇAY,  Busançais,  arr.  de 
Châteauroux,  Indre. 

Byssines  (Paroles),  paroles 
douces  flatteuses,  du  latin 
byssus,  lin  le  plus  fin. 

Bytures,  oiseaux  fantastiques. 

C,  lettre  par  laquelle  Brid'oye 
déîigne  le  Code  romain. 

Cababezacé,  mis  en  panier  et 
en  besace. 

Cabasser,  amasser. 

Cabires  (Dieux),  divinités  phé- 
niciennes. 

Cabirotades,  grillades  de  che- 
vreau ;  allusion  aux  dieux 
cabires. 

Cabirotz,  chevreaux. 

Cabourne,   sorte   de   chapeau. 

Cabre,  chèvre. 

Cabus,  subst.,  choux  pommés; 
et  adj. ,  pommés. 

Cace,  Cacus,  géant. 

Cachekt,  demi-masque,  loup. 
Faut-il  lire  cacheiaid? 

Cacoethe,  difficile  à  guérir,  du 
grec. 

CacqueroleSj  CacqueroUiere,  co-. 
limaçons,     colimaçonnière, 
l'un  des  revenus  de  Panurge. 

Cacquerotier,  homme  à  doigts 
crochus. 

Cacquesangue,  Caquesangue, 
flux  de  sang. 


Cadeac,  musicien  français. 

Cadouyn,  chef-lieu  de  canton 
de  l'arrondissement  de  Ber- 
gerac, Dordogne,  où  se 
conserve  un  saint  suaire. 

Cagar,  chier. 

Cagaux,  Cagotz,  moines  men- 
diants. 

Cahuaillej  canaille. 

Cahuet,  bout,  pointe  ;  en  par- 
ticulier, bout  du  capuchon. 

Caiche,  queue. 

Caignard,  sale  recoin,  chenil. 

Calabrisme,   genre  de  danse. 

CaillebotteSj  lait  caillé. 

Cailles  coyphées,  jeunes  femmes 
en  gaîté. 

Caillette,  fou  de  Louis  XII  et 
de  François  I*'". 

Caisgne,  chienne. 

Ca/aer  (Tour),  tour  du  bel  air. 

Calamité,  aimant,  l'aiguille  de 
la  boussole,  la  boussole. 

Calaihe,  corbeille,  du  grec. 

Calfreter,  rembourrer. 

Calibes  (Acier  de),  acier  trempé 
dans  le  Chalibs,  fleuve  des 
Celtiberes. 

Calicules,  calices. 

Caliges,  chaussures. 

Callafater,  calfater. 

Callaischre,  Grec  mort  en  mer 
dont  ['Anthologie  cite  les 
épitaphes. 

Coller,  caler,  plier. 

Callianax,  médecin  grec  anté- 
rieur à  J.-C. 

CALLiMACHE.nom  grec  emprunté 
à  VAnthologie. 

Calloier.  Ce  mol  serait   formé 


GLOSSAIRE-INDEX 


de  deux  mots  grecs,  et  signi- 
fierait :  beau  moine,  ou 
bon  prêtre. 

Calpe,  montagne  d'Espagne  au 
détroit  de  Gibraltar. 

Calumniateur  (Le),  le  diable. 

Camarine,  ou  Camerine.  V. 
Palus. 

Camelin,  musicien. 

Camelin,  allure  du  chameau. 

Catnelopardales,  doit  être  une 
sorte  de  panthère. 

Camille,  reine  des  Volsques. 

Camille,  messager,  serviteur, 
surnom  de  Mercure. 

Camisade,  attaque  inattendue. 

Campane,  campanelle,  clo- 
che, clochette,  du  latin  cam- 
pana. 

Canabasser,  canabasserie,  exa- 
miner minutieusement,  exa- 
men minutieux. 

Canarre  (Ilesde),  îles  Canaries. 

Cancre,  crabe. 

Candé,  arr.  de  Blois,  Loir-et- 
Cher. 

Cancelleresques  (Lettres),  lettres 
émanant  des  chancelleries. 

Cane  (Faire  la),  avoir  peur, 
caner. 

Canne,  mesure  de  longueur. 

Canon  (Casse  en),  en  bâtori  ; 
on  dit  encore  souffre  en 
canon. 

Canonge  la  carte,  Canonica 
charta,  papier  canonique, 
papier  fort. 

Canore,  adj.,  sonore;  subst., 
chanteur. 

Canteperdris,    nom    de    lieu  ; 


doit     être    dans    l'Hérault, 
près  de  Montpellier. 

Canthare,  vase  à  boire. 

Cap  de  Sainct-Arnaud...  Voici 
la  traduction  de  M.  Bur- 
gaud  : 

«  Tête  de  Saint-Arnaud, 
qui  es-tu,  toi  qui  me  réveil- 
les ?  Que  l'ivresse  te  retourne  ! 
Oh  !  saint  Sévère,  patron  de 
la  Gascogne,  je  dormais  si 
bien  quand  ce  taquin  est 
venu  me  réveiller  !  » 

Cap  en  houlle,  l'avant  du  na- 
vire à  la  lame. 

Cap  et  les  basses,  le  cap  et  les 
bas-fonds. 

Capable  (Escuelle),  de  grande 
capacité. 

Capella  (Martianus),  gram- 
mairien latin  du  V^  siècle. 

Capilamens,  filets,  ligne  fine. 

Capito  (Atteius),  jurisconsulte 
romain  du  F^  siècle  avant 
J.-C. 

Capitoly,  capitole. 

Capitonner  (Se),  se  couvrir  la 
tête. 

Capnomantie,  divination  par  la 
fumée. 

Capo  Melio,  le  cap  Malio. 

Cappassonnez,  caparaçonnés. 

Cappe,  manteau, 

Cappelines,  sorte  de  casque. 

Cappiettement,   furtivement. 

CaprimulgeSj  oiseaux  qui  tet- 
tent  les  chèvres. 

Caps,  chefs,  capitaines,  du  la- 
tin caput. 

Capse,  coffret. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Capter,  prendre. 

Capulaire,  corde. 

Capiissionnaire,  qui  a  un  ca- 
puce. 

Caputions,  porteurs  de  capu- 
ces,    capucins. 

CaqueroUe,  écaille,  coquille. 
V.  Cacquerolles. 

Caracque,  carracque,  sorte  de 
navire. 

Caradoths,  énigmes. 

Carbonnades,  grillades. 

Carcan,  collier. 

Cardiacque  (Passion), souffrance 
du  cœur. 

Cardinalizer,  rendre  rouge. 

Carine,  carène. 

Carmaigne,  Caramanie. 

Carmes,  vers. 

Caroles,  danses  en  rond. 

Carolus,  monnaie  de  Char- 
les VIII. 

Caros,  carous  (Faire),  boire  à 
l'allemande. 

Carpalim,  vif,  alerte,  du  grec. 

Carpasie,  ville  de  l'île  de  Chy- 
pre. 

Carpasien  (Lin),  asbeste, 
amiante.  V.  Asbeston. 

Carpentras,  Elzéar  Genêt,  né 
à  Carpentras,  musicien  du 
XVF  siècle. 

Carp/o/j,carpillon,  petite caipe. 

Carracons,  caraques,  espèce 
de  navire. 

Carreau,  trait,  flèche. 

Carreau,  carré. 

Carreleure  de  ventre,  raccom- 
modage de  ventre,  raan- 
geaille. 


Cartasonnes,  licornes. 

Cartier  (Jacques),  navigateur 
malouin  du  XVF  siècle. 

Caruel  (Hans) ,  personnage 
qu'on  retrouve  dans  l'Arioste 
et  la  Fontaine. 

Carymary,  carymara ,  juron 
burlesque  de  la  fabrique  de 
Rabelais. 

Case,  maison. 

Caseiforme,  en  forme  de  fro- 
mage. 

Caspies,  caspiens. 

Casquets,  casques. 

Cassade  (L'isle  de),  l'île  de  la 
Tromperie. 

Casse  escoute,  haler  une  écoute 
avec  force. 

Cassemuzeaulx,  sorte  de  petits 
gâteaux  durs. 

Casserons,  casseroles,  poêlons  ; 
c'est  aussi  le  nom  d'une  es- 
pèce de  poulpe. 

Cassidoine,  calcédoine. 

Cassines,  maison  de  campagne. 

Castamena,  ville  d'Asie. 

Castanes,  châtaignier. 

Castel  (Le),  cabaret  parisien. 

Castilliers,  ou  Châtelliers,  ab- 
baye du  diocèse  de  Poitiers. 

Caston,  chaton. 

Castor,  étoile  de  la  constella- 
tion des  Gémeaux  ;  feu  saint 
Elme. 

Castoreum,  sécrétion  qui  se 
trouve  dans  une  poche  à 
l'anus  du  castor. 

Castes,  chastes. 

(Castro  (De),  jurisconsulte  ita- 
lien du  XVe  siècle. 


GLOSSAIRE- INDEX 


2  19 


Catadupes,  cataractes,  du  grec. 

Cataglyphe,  ciselure,  du  grec. 

Catarates,  maudits,  du  grec. 

Catay  (Le),  la  Chine. 

Categides,  tempêtes,  du  grec. 

Catenat,  cathenat,  cadenas. 

Caterve,  bande. 

Catharactes,  qui  brisent,  du 
grec. 

Cathedrant,  siégeant  en  chaire. 

Cathene,  chaîne. 

Catoblepes,  animaux  fantasti- 
ques. 

Catoptromaniie,  divination  par 
un  miroir. 

Caudict,  tige. 

Caiild,  rusé,  cautus. 

CAULDAUREiL(Frai),  frère  Chau- 
deoreille,  moine  de  la  façon 
de  Rabelais. 

Caules  emb'  olif,  choux  mari- 
nés  à  Thuile. 

Cauponizer,  boire. 

Cauquemarre,  quelque  animal 
rare  et  curieux. 

Cavalliers,  talus  où  l'on  met 
de  l'artillerie. 

Cavayn,  caveau. 

Cave  paincte  (La),  dépendance 
de  la  maison  de  Rabelais  à 
Chinon. 

Caveche ,  tète,  de  l'espagnol 
cabeça. 

Caviatz,  caviar,  œufs  de  pois- 
son dans  la  saumure. 

Caynon,  Chinon  ,  nommée 
Caino  par  Grégoire  de  Tours . 

CEE,  géant. 

Ceincts,  cordeliers. 

Ceincture  ardente  (La),  l'équa- 


teur,  la  zone  torride. 

Celeume,  chant  rhythmé  pour 
encourager  les  matelots  ; 
chants  d'allégresse,  du  grec. 

Celles,  arr.  de  Melle,  Deux- 
Sèvres. 

Celoces,  petits  navires  légers. 

CeniadeSj  faons. 

Cen,  ce  en. 

Cenomanique,  du  pays  des  Cé- 
noraans,  les  Manceaux. 

Censorin,  censeur. 

Centonifïques,  faiseurs  de  cen- 
tons. 

Centumvirale  (Court) ,  Cour 
composée  de  cent  juges. 

Centurie,  centaine. 

Cèpes,  cephes,  animaux  fantas- 
tiques. 

Cephaleonomantie ,  divination 
par  la  tète  d'un  âne. 

Cepola  (Barthélémy),  juriscon- 
sulte véronais. 

Cercelles,  sarcelles. 

Cerclé,  sarclé,  arraché. 

Cercopitheces,  cercopiteques,  sin 
ges  à  queue. 

CeRCU,     dict     BOURGUEMAISTRE, 

personnage  de  la  maison  de 
Du  Bellay. 

Cere,  cire. 

Cerfouettes,  petite  binette,  ou- 
til de  jardinage. 

Cerge,  serge. 

Cerites,  habitants  de  Ceres, 
ville  de  Tuscie  (Toscane), 
ou  Étrurie. 

Cerne,  cercle. 

Cernophore,  genre  de  danse. 

Cerons,   cirons. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Cerq,  île  deSerk,  dans  l'archi- 
pel anglo-normand. 

Certon,  musicien  français  du 
XVie  siècle. 

Ctrulé,  bleu,  du  latin  cœru/e«s. 

Ctsinim,  serviteurs,  de  l'hé- 
breu ? 

Ctssateur,  cessant  de  faire 
quelque   chose. 

Cestrin,   succin,   ambre  jaune. 

Cesves,  sève. 

Chachanin,  serviteur,  de  l'hé- 
breu x? 

Chaffourer,  barbouiller,  salir, 
tacher. 

Chaire,  siège  à  bras. 

Chaisne,  chêne. 

Chaisnon,  Chinon,  chef-lieu 
d'an.,  Indre-et-Loire. 

Chaiton,  armenian.  L'Armé- 
nien Hayton,  voyageur  du 
XIIF  siècle. 

Challans,  mauvaises  pratiques. 

Chalbroth,  géant. 

ChMit,  bois  de  lit. 

Challer,  écaler. 

Chamarre,  robe  de  cérémonie. 

Chambrier,  Joachim  Camera- 
rius,  érudit  du  XVF  siècle. 

Chambourg,  château  de  Chani- 
bord,  commencé  en  i5  36 
par  François  F"". 

Champier  (Symphorien),  méde- 
cin lyonnais  du  XVF  siècle. 

ChampiSj  enfant  trouvé. 

Chaneph,  hypocrisie,  en  hé- 
breu. 

Chanteau,  morceau  ;  quartier 
de  lune. 

Chantelle,  en  Bourbonnais, arr. 


de  Gannat^  Allier. 

Chantepleure,  arrosoir. 

Chanu,  à  cheveux  blancs. 

Chapifou,  jeu  de  Colin-Mail- 
lard. 

Chaplis,  coups;  bruit  des 
masses  d'armes  s'entre-cho- 
quant. 

Chapoter,  racler. 

Chappart,  qui  s'échappe. 

Chappe  du  ciel.  On  dit  encore  : 
la  calotte  des  cieux. 

Chappelle,  alambic. 

Chappl-ys  (Le  capitaine)  et  son 
facteur  Alcofribas.  Sont-ce 
Rabelais  et  son  ami  Claude 
Chappuys,  garde  des  livres 
de  François  I^""? 

Charazie,  pays  de  Charax,  en 
Asie, 

Chardonnetie.  La  chardonnette, 
dont  on  se  sert  dans  quel- 
ques localités  pour  faire 
cailler  le  lait,  est  la  fleur  de 
l'artichaut. 

Chardriers,  chardonnerets. 

Charesses,  caresses. 

Chareté,  masque. 

Charisteres  ,  chants  d'actions 
de  grâces,  du  grec. 

Charités,  les  grâces. 

Charmois  (Charles),  Charles 
Carmoy,  peintre  du  XVF 
siècle,  qui  a  travaillé  à 
Fontainebleau. 

Charnier,  lieu  où  l'on  conserve 
les  viandes  salées. 

Charrantons,  charançons. 

Charte,  alphabet. 

Charles,  cartes. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Chasteau^Le  ,  cabaret  parisien. 

Chat  de  mars^  martre. 

Cliatouille,  lamproie. 

Charmâtes ,  trous  profonds , 
gouffres. 

Chauffourer,  égratigner. 

Chault  (Me),  m'importe. 

Chaumeny,  moisi. 

Chausse,  cône  d'étoffe  feutrée 
pour  filtrer  les  liquides. 

Chauver  des  aureilles,  remuer, 
dresser,    baisser  les  oreilles. 

Chauvigny,  Chavigny,  Chavi- 
NY,  arr.  de  Vendôme,  Loir- 
et-Cher. 

Cheli,  gâteau,  en  hébreu. 

Chélidoine,  hirondelle,  du 
grec;  c'est  un  nom  de  na- 
vire. 

Chelimins ,  rêveries,  de  l'hé- 
breu. 

Chemant  (François  Erault,  sei- 
gneur de),  président  au  par- 
lement de  Turin. 

Chemnis,  île  d'Egypte  célèbre 
par  un  temple  d'Apollon. 

Chenevé,  chènevis,  qui  passait 
pour  antiaphrodisiaque. 

Chenin,  nom  d'un  cépage. 

Chère  lye ,  chère  joyeuse, 
liesse. 

Cherme,  charme. 

Chesaulx ,  habitations  de  pay- 
sans. 

Chesil ,  nom  hébraïque  d'O- 
rion,  constellation  des  tem- 
pêtes. 

Chesinins,  forts,   de   l'hébreu? 

Cheutes,  tombées. 

Chevauche,  bien,  profit. 


Chevaulx  (Isle  des),  île  d'Inch- 

keith,  sur  la  côte  d'Ecosse. 
Chevêche,  chouette. 
Chevecier^  celui  qui  a  soin  du 

matériel  de  l'église. 
Cheveu    de  Venus,    capillaire. 
Chevreter ,     faire    la    chèvre, 

s'impatienter. 
Chevrotin,   outre   de   peau   de 

chevreau. 
Chiabrena,  minauderie. 
Chiabrener  ,    faire    l'aimable , 

minauder. 
Chichart,  chiche. 
Chiliandres    (Naufz),     navires 

portant  mille  hommes. 
Chippes,   navires,   de   l'anglais 

ship . 
Chiquanous,   gens  de  chicane. 
Chirotnantie ,     divination    par 

les  lignes  de  la  main. 
Chironacte,  à  main  prenante, 

du  grec. 
Chocquer,  se  battre. 
Charomantie ,    divination    par 

les  porcs. 
Choine,  ou  Choesne,  pain  blanc 

délicat. 
Choie,   Cholere,   colère  ;   bile, 

du  grec. 
Chorme,  chiourme,  l'équipage 

de  rameurs  d'un  navire. 
CHOR.EBUS ,   fils    d'un    roi    de 

Thrace,   amant   de  Cassan- 

dre,  qui  fut  tué  au  siège  de 

Troie. 
Chorographie ,    description    de 

pays. 
Chose,   Chouzé-sur-Loire,  ar- 

rond.  de  Chinon,   Indre-et- 


GLOSSAIRE-INDEX 


Loire. 

Chronique,  maladie  chronique. 

Chrysippus,  philosophe  stoïcien 
du  IP  siècle  avant  J.-C. 

Cibotz,  ciboules. 

Cil,  celui,  celui-là. 

Cimasultes,  contours  sinueux. 

CiNAYS ,  Cinais ,  arrond.  de 
Chinon,  Indre-et-Loire. 

Cincinnatule,  prisé. 

Cinamone,  cinnamoine ,  can- 
nelle. 

Circumbilivagination  ,  tour- 
noiement. 

Circuinbilivaginer ,  tourner. 

Civadiere,  voile  attachée  sous 
le  mât  de  beaupré. 

Clabault,  aboyant. 

Claquedens,  gueux,  qui  souffre 
du  froid. 

Claudin,  Claude  de  Sermizy, 
musicien  du  XVI^  siècle. 

Claustrier  (Moine)  ^  moine 
cloîtré. 

Claveaux,  espèce  de  hame- 
çons. 

Clavelé,  mouton  qui  a  la  cla- 
velée;  Rabelais  l'applique 
aux  hérétiques. 

Claver,  fermer. 

Claveure  ,  serrure  ,  fermoir  , 
clef. 

Clavier,  serrure. 

Cleanthe,  stoïcien  du  III«  siè- 
cle avant  J.-C. 

Clémentines,  décrétâtes  de  Clé- 
ment V. 

Cleon  DE  Daulie,  cité  par  Plu- 
tarque  pour  n'avoir  jamais 
rêvé. 


Clerberg  (Henry},  contempo- 
rain de  Rabelais. 

Cleromaniie,  divination  par  le 
sort. 

Clicquer,  claquer. 

Clicqueites,  crécelles. 

Climatere,  âge  climaterique, 
âge  d'un  homme  qui  est  un 
multiple  de  7  ou  de  9. 

Clouatier,  cloutier. 

Clouer,  réunir. 

Ciousbraneau  (Le),  le  derrière; 
c'était  le  nom  d'une  partie 
fort  sale  de  l'Université. 

Clyinenos,  plante  de  la  famille 
des  euphorbiacées. 

Cobbir,  bosseler. 

C0CCAIE  (Merlin),  poëme  ma- 
caronique  de  Théophile  Fo- 
lengo. 

Coccognide,  fruit  du  garou. 

Cocquassier,  marchand  d'œufs. 

Cocqueinart,  marmite,  chau- 
dron. 

Cocquecigrue,  animal  fantasti- 
que. 

CoDERETZ,  Cauterets. 

Codices,  cahiers. 

Ccelivages,  tirés  du  ciel. 

Canaires  (Lois),  lois  limitant 
le  luxe  de  la  table. 

Coguk,  cagoule,  capuchon. 

CoHUAU,  de  la  maison  du  car- 
dinal Du  Bellay. 

Coinci,  agréable,  propret.  V. 
Cointe. 

CoiNGNAUFOND  (Abbaye  de). 
Abbaye  de  la  fabrique  de 
Rabelais.  L'édition  origi- 
nale porte  Fonthevrault. 


GLOSSAIRE-INDEX 


CoiNGNET  (Pierre  du),  Pierre 
de  Cugnières,  avocat  du 
XIV^  siècle,  qui  eut  de 
grands  démêlés  avec  le  clergé. 

CoingMt,  petit  coin. 

Cointe,  mignonne.   V.  Coinct. 

Coiraux,  boeufs  gras. 

Coissins,  coussin,  oreiller. 

Col,  cole,  colle,  bourrasque, 
coup  de  vent,  tempête,  ou- 
ragan. 

CoLDREAULx  (Les),  Village  du 
Chinonais. 

Collauder,  vanter. 

Colligence,  colliguance,  chose 
qui  réunit;  lien,  relation, 
rapport. 

CoLLiNET,  serait  Jacques  Col- 
lin,  d'Auxerre. 

Colocasie,  colocase. 

Colocynthe,  coloquinte. 

C0L0NGES-LÉS-R0YAUX,C0Ulan- 

ges-sur-l'Autize,  arr.  de 
Niort,  Deux-Sèvres. 

Colymbades  (Olives),  olives 
confites  dans  l'huile,  du 
grec. 

Combrecelle,  action  de  se  bais- 
ser pour  recevoir  quelqu'un 
sur  son  dos  (Le  Duchat)  ; 
comble,  selle,  monture  (Bur- 
gaud). 

Comicque  (Le) ,  Térence  dans 
VEunuque. 

Comité,  compagnon,  du  latin 
cornes;  surveillant  des  galé- 
riens. 

Comment,  commentaire. 

Commissure  lambdoïde,  suture 
du  crâne. 


Commissure  sagittale,  suture  du 
crâne  en  forme  de  flèche. 

Compacture,  assemblage. 

Compaing,  compagnon. 

Companage ,  ce  qui  se  mange 
avec  le  pain,  cum  pane. 

Compère  ,  musicien  du  XV 
siècle. 

Competer,  convenir  à,  s'appli- 
quer à,  appartenir  à,  s'ac- 
corder avec. 

Compites,  carrefours. 

Complainctz,  plaintes. 

Compost,  comput ,  livre  pour 
calculer  les  époques  du  ca- 
lendrier. 

Compouste,  compote. 

Compte  romanicque,  calendrier 
romain. 

Compulsoire,  qui  pousse  à. 

Conare,  glande  pinéale. 

Conche,  conque. 

Concilipetes,  qui  vont  au  con- 
cile. 

Concion,  contion,  discours. 

Conclusion,  fermeture. 

Concoction,  digestion. 

Concoctrice  (Vertu),  force  qui 
fait  digérer. 

Concords,  qui  est  d'accord, 
qui  s'équilibre. 

Conculqué,  foulé  aux  pieds. 

Concussion,  concution ,  com- 
motion, secousse. 

CoNDEMNATiON,  pays  où  l'on 
condamne. 

Condempner,  condamner. 

Condieux ,  dieux  en  même 
temps  qu'un  autre  dieu,  ses 
confrères. 


224 


GLOSSAIRE-INDEX 


Condignac,  cotignac,  gelée  de 
coins.  V.  Cotoniat. 

Condigne,  digne. 

Conduist,  conduisit. 

Confahidation,  conversation. 

Confalonnier ,   porte-enseigne. 

Confalorij  confanon,  gonfanon, 
enseigne,  étendard. 

Confermer,  confirmer,  affermir. 

Conformer,  confirmer. 

Connilz,  connins,  connis,  la- 
pins. 

Connubiales,  conjugales. 

Conopée,  lit  de  repos  à  rideaux. 

CoNSENTiNois,  habitants  de  Co- 
senza. 

Consequemmentj  ensuite. 

Conserve  (En),  en  compagnie  ; 
on  dit  encore  de  deux  navi- 
res qu'ils  naviguent  de  con- 
serve, quand  ils  suivent  la 
même  route. 

CoNsiLiON,  Jacques  Consilium, 
musicien  du  XVI^  siècle. 

Consolde,  consoude. 

Consonnantes,  consonnes. 

Consonner,  concorder,  s'accor- 
der, sonner  avec. 

CoNSTANTio  Festi,  OU  Festa, 
musicien  romain  des  XV«  et 
XVie  siècles. 

Contaminer,  souiller. 

Co/i/emperer, tempérer,adoucir. 

Contempnement,contemnement, 
mépris. 

Contempner,  contemner,  mé- 
priser. 

Contemptible,  méprisable. 

Contendent,  soutenant. 

Contendens,    prétendants ,  exi- 


geants. 

Contrehastier,  landiers ,  che- 
nets à  crans  pour  y  mettre 
les  broches. 

Contremont,  en  l'air. 

Controverses,   controversées. 

Contumelies,  injures. 

Contunder,  écraser. 

Convenir,  se  réunir,  se  rassem- 
bler. 

Conventz,  couvents. 

Copie,  abondance,  du  latin  co- 
pia. 

Copieux ,  mauvais  plaisants  ; 
abondants,  prodigues. 

Coqu,  coucou. 

Coquarde  (Bonnet  à  la),  sorte 
de  bonnet  très-lourd,  garni 
de  rubans. 

Coquart,  niais. 

Coquasses,  cocquasses,  petit  pot 
de  terre  allant  au  feu  pour 
faire  chauffer  l'eau  ;  chau- 
drons. 

Coqueluche,  capuchon. 

Coquemars,  pots. 

Coquillons,   encapuchonnés. 

Coquins,  mendiants. 

Corbeuf,  corne  de  bœuf,  juron. 

Cor  bieu^  juron, 

CoRAXiENs,  peuple  de  la  Col- 
chide. 

Corbigeaux ,  cormorans. 

Corbiner,  dérober. 

Cordaces,  danses  lascives. 

Cordouan,  cuir  de  Cordoue. 

Corme,  cidre  de  cormes. 

Cormier  (La  plante  du  grand), 
le  cru,  le  cépage. 

Cornabons   (La   journée    des). 


GLOSSAIRE-INDEX 


faut-il  lire  cornabous  ?  la 
journée  des  cornets  à  bou- 
quin, la  journée  où  l'on  fit 
un  grand  tapage, 
Cornaboux,  cornets  à  bou- 
quin. 
Cornélius  (Alexander),  Poly- 
histor,  philosophe,  géogra- 
phe et  historien  du  pr  siè- 
cle. 

Cornette,   cravate. 

CoRNiBus  (De),  Des  Cornes, 
Pierre  Cornu,  prédicateur 
contemporain  de  Rabelais. 

Cornucopie,  corne  d'abondance, 
du  latin  cornucopia. 

Coronal  (Os),  os  frontal. 

Coronale  (Joincture),  jointure 
de»  deux  parties  de  l'os 
frontal  ou  coronal. 

CoRONE,  Cyrène,  en  Afrique. 

Coronie,  corniche. 

Coronopous,  coronope,  plante. 

Corpe  degalline,  corps  de  poule, 
juron  italien. 

Corpore,  corps. 

Corratières,  courtières. 

Correct,  adv.,  correctement. 

Corrugation,  contraction. 

Corruptele,  corruption. 

CorsecqueSj  javelots  à  grosse 
tête. 

Corsique,  corse. 

Corybantier,  dormir  les  yeux 
ouverts,  comme  les  cory- 
bantes  veillant  sur  Jupiter 
enfant. 

CoRYTUS,  le  mari  d'Electre. 

Coscinomantie,  divination  par 
un  crible. 

Rabelais.  V. 


Coscossons    et   coscotons   à     la 

mauresque,  couscoussou. 
Coscoté,  tacheté. 
Coscotons,  caillots  de  lait. 
Cosses,  anneaux  où  passent  les 
cordages  d'un  navire  ;  M.  Jal 
dit  qu'il  faut  lire  costes  (cô- 
tes) du  navire. 
Cosson,    nom  vulgaire    donné 
aux  larves   du  bruchus  pisi, 
ou  6.  fabz,  qui  vivent  dans 
les   semences  farineuses  ali- 
mentaires,  pois,  fèves,  len- 
tilles, etc. 
Cotoniat,    cotignac,    gelée    de 

coing.  V.  Condignac. 
CoTiRAL  (Henry),  serait  Henry- 
Corneille  Agrippa,    suivant 
Johanneau. 
Cotonner,    garnir     de     coton, 

bourrer  de  vivres. 
Cotte  hardie,  grande  robe  tail- 
tée  droite  et  fermée  comme 
un  fourreau  (Quicherat). 
Cotteurs,  commentateurs. 
Cotylédons,    orifices    extrêmes 
des  veines  et  artères  mens- 
truelles. (Paré.) 
Cotyles,  ancienne  mesure  d'un 

peu  plus  de  six  litres. 
Couane,  couenne. 
Couble,    coublement,     couple, 

accouplement. 
Coubte,    coubtée,   coude,  cou- 
dée. 
Coucher  en  chapon,  se  coucher 
de  bonne  heure,  comme  les 
poules. 
Coucourde,   gourde. 
Coudinac,  coudignac,  cotignac. 


22t 


GLOSSAIRE-INDEX 


V.  Condignac  et  cotoniat. 

Coue,  couetz,  amures  (Jal). 

Couillaris,  grosses  pièces  de 
canon. 

Couillevrines,   coulevrines. 

Coul,  col,  cou. 

CouLAiNES,  lieu  près  de  Chinon. 

CouLDRAY  (Le),  lieu  planté  de 
coudriers,  le  Coudray,  arr. 
de  Saumur,  Maine-et-Loire. 

Couller,  brandir. 

Coupe  guorgée,  coupe  testée, 
gorge  coupée,  tête  coupée. 

Coupelaud,  coupelle,  creuset  à 
éprouver  les  métaux. 

Coupes,  couppes,  bassins,  pla- 
teaux de  balances. 

Couppiers,  écuyers  tranchants. 

Coural,  corail. 

Courbassée,  toute  courbée. 

CouRCAiLLET,  ami  de  Panurge. 

Courtes,  courges  ;  courlis. 

Courmaran,  cormoran. 

Courquaillet,  appeau  à  cailles. 

Courracteurs,  correcteurs  des 
comptes. 

Courraies,   courroies. 

Courrait,  gros  verrou. 

Courratiere,  courtière,  entre- 
metteuse. 

Coursie.  V.  Coursouoir. 

Coursouoir,  coursie ,  coursière 
(Jal),  passage  entre  la  proue 
et  la  poupe  du  navire. 

Courtault,  cheval  ramassé,  d'é- 
paisse encolure. 

Courtil,  jardin  clos  autour 
d'une  maison. 

CouscoiL  (Adam),  cordelier  de 
la  façon  de  Rabelais. 


Coussons,  goussets  de  manches 
de  chemise. 

Couste  et  vaille,  quels  qu'en 
soient  le  prix  et  la  valeur, 
coûte  que  coûte. 

Coustiers,  côtiers  ;  qui  mettent 
à  côté. 

Coustieres,  haubans. 

Coustrets,   cottrets. 

Coustrets  (  Porteurs  de) ,  por- 
teurs de  hotte,  portefaix. 

Coy,  tranquille,  non  troublé, 
non  agité. 

Coyphe,  coiffe. 

Coylte,  courte-pointe. 

Coz,  pierre  à  repasser. 

Cradots^  brèmes. 

Crxpalocomes,  cris  d'ivresse,  du 
grec. 

Craine,  crâne. 

Cramoisi;  est  employé  comme 
superlatif. 

Cramoisine,  belle  étoffe. 

Crapaudine,crapauldine, pierre 
précieuse  d'un  gris  brunâtre, 
qui  se  trouvait,  dit-on,  dans 
la  tète  d'un  crapaud, 

Cratyle,  titre  d'un  dialogue  de 
Platon. 

Cravans,  oies  sauvages. 

Gravant,  arr.  de  Chinon,  In- 
dre-et-Loire. 

Créance,  témoignage. 

Credentiers^  dégustateurs^  es- 
sayeurs de  mets. 

Cremasteres,  muscle  des  testi- 
cules. 

Cremere  (Le  fleuve),  aujour- 
d'hui Valea,  rivière  d'Étrurie. 

Crenequin,    outil    à  tendre  les 


GLOSSAIRE-INDEX 


27 


arbalètes. 

Crespelu,  crêpé,  frisé. 

Crevailles,  festins  où  l'on  man- 
ge à  en  crever  ;  faire  sa  cre- 
vaille,  mourir. 

Creziou,  creuset;  godet  de 
lampe. 

Cristallin,   cristal. 

Critiquer,  diminuer. 

Critolaus,  philosophe  péripa- 
téticien  de  Phasélisen  Lydie. 

Crocquenotaire,  protonotaire, 
V.  Crote  notaire. 

Crocutes,  animaux  fantastiques. 

Croql'ignolles,  ville  delà  géo- 
graphie de  Rabelais. 

Crotaphique  (Artère) ,  artère 
temporale. 

Crote  notaire,  protonotaire  V. 
Crocquenotaire. 

Crotesque  (En),  comme  la  pein- 
ture des  grottes. 

Croue,  écrou. 

Croulay,  cou  Croulé  (près  de 
Chinon),  où  il  y  avait  un 
couvent  de  cordeliers,  » 
(Burgaud.) 

Croustelevés,  ayant  des  mala- 
dies de  peau  dont  les  croûte^ 
s'enlèvent. 

Croustelle,  arr.  de  Poitiers, 
Vienne. 

Crue,  croc,  crochet. 

Cruon,  cruchon. 

Crustumenies  (Poyres),  poires 
de  Crustumenum,  en  Tos- 
cane. • 

Cryere  (Tour),  tour  froide. 

Cucrocutes,  animaux  fantasti- 
ques. 


Cueilleroyent  (Se  y),  s'y  réuni- 
roient. 

Cueur  (Bas),  moindre  qualité. 

Cuider,  cuyder,  croire,  penser. 

Cuisse  dorée  (Le  philosophe  à  la) , 
Pythagore. 

Cuisse  heronniere ,  cuisse  de 
héron,  cuisse  maigre. 

Cuiites,  cuissons. 

Culices,  cousins. 

CuLLETANT  (Frère  Artus),  moine 
de  la  façon  de  Rabelais. 

Culpelê,   singe. 

Cultans,  rendant  un  culte. 

CuNAULT  (Notre-Dame  de), 
prieuré  de  l'Anjou,  arr.  de 
Sauraur,  Maine-et-Loire. 

Cures,  excréments,  en  faucon- 
nerie. 

CuRTius,  jurisconsulte  fîa.mand. 

CusANUs,  CusANE,  le  Cardinal 
Nicolas  Crebs,  de  Cusa,  ma- 
thématicien du  XV^  siècle, 
qui  avait  prophétisé  la  fin 
du  monde. 

Custodes,  gardes,  du  latin  cus- 
tos. 

Cuticule,  surface. 

Cuve  le  Vénus,  chardon  ""à  fou- 
lon; Pline  l'appelle  Vene- 
ris  labrum. 

Cyerce,went  d'ouest-nord-ouest. 

Cymbales,  sonnettes,  clochettes. 

Cynamolges,  oiseaux  fantasti- 
ques. 

Cynara,  l'artichaut. 

Cynes,  arbres  à  fibres  textiles. 

Cynocéphales,  animaux  à  tète 
de  chien,  du  grec. 

Czà,  çà. 


:8 


GLOSSAIRE- INDEX 


Dactyle,  datte. 

Dadvantaige,  de  plus. 

DaemonSj  génies. 

Daguenets,  petites  dagues. 

Dail,  faux. 

Daire,  Darie,  Darius. 

Damerj  surpasser. 

Damis  ,  compagnon  d'Apollo- 
nius de  Tyane. 

Damostrate  ,  philosophe  de 
l'antiquité. 

Dangiers  palatins,  surveillants 
au  service  des  maris  jaloux. 

Danouble,  Danube. 

Dar,  Dard,  petit  poisson  blanc 
à  nageoires  rougeâtres. 

Dardelles,  petites  javelines. 

Darie,  Daire,  Darius. 

Daril,  nom  d'une  forme  de 
syllogisme. 

Barioles,  gâteaux  à  la  crème 
cuite. 

Dast,  Dax,  chef-lieu  d'arr., 
Landes. 

Datan,  nom  d'un  diable. 

Dateur,  distributeur,  dispen- 
sateur. 

Dauber,  Daubber,  frapper  fort; 
encore  usité  chez  les  éco- 
liers. 

Davantau,  tablier. 

Daviet,  davier,  pince-levier  à 
l'usage  des  dentistes. 

Davus,  esclave  dans  VAndriennc 
de  Térence. 

Dea,  interjection. 

Déambuler,  promener. 

Débarquer  d'un  lieu,  s'enfuir. 

Debezilkr,  briser,  mettre  en 
pièces. 


Debitis  (Millort).  Signifie-t-il  : 
Milord  qui  a  des  dettes? 

Débouter,  repousser. 

Debradé,  qui  avait  le  bras  dé- 
mis. 

DÈCE  (Philippe),  Decio,  juris- 
consulte italien  des  XV^  et 
XVP  siècles. 

Deceinpedale,  de  dix  pieds. 

Décliner,  éviter. 

Decours,  courant,  cours;  dan- 
gers. 

Decreiales,  constitutions  pon- 
tificales. 

Decretaliarche ,  souverain  des 
Décr étales,  le  pape. 

Decretalicides,  Decretalictones, 
tueurs  de  Décrétales. 

Decretalifuges ,  qui  fuient  les 
Décrétales. 

Decretalipotens,    docteur    très-- 
fort  sur  les  Décrétales. 

Decumane,  dixième,  dix  fois, 
gros  comme  dix;  c'était  le 
nom  d'une  légion  romaine, 

Deduyt  (En  voir  le),  voir  ce 
qui  en  résulte. 

Déesse  soubsterraine ,  Proser- 
pine. 

Defaucillé,  démis  à  l'os  focile. 
V.  ce  mot. 

Deffourrer,  enlever  la  fourrure. 

Défiance,  défi. 

Defleuher,  dégrafer. 

Degourt,  dispos,  joyeux. 

Degout,  écoulement,  ce  qui  dé- 
goutte; le  jus  d'une  viande. 

Degouziller,  boire  très-vite. 

Deguast,  dégât. 

Deguaster,  détruire. 


GLOSSAIRE-INDEX 


De  hayt,  adj.,  gai,  joyeux,  vif. 
De   hayt,    adv.,    gaiement    et 

vivement, 
Deject,  abattu. 
De    la    Fage  ,     musicien    du 

XVe  siècle. 
De    la    Rue  ,   musicien   belge 

du  commencement  du  XVI" 

siècle. 
Delphinium,  pied  d'alouette. 
Demande  (J'en),   j'en  appelle. 
Démarcher,  s'en  aller. 
Demigre  (Je),  je  me  rends. 
Demiourgon,  Demogorgon,  le 

génie  de  la  terre,  en  mau- 
vaise part. 
DeModis  signifîcaiidi,  ouvrage 

de  Jean  de  Garlande. 
Demonax  ,   qui  vécut   près  de 

cent  ans. 
Demouller,  déformer. 
Demy-ostade ,    étoffe    à    poils 

demi-longs. 
Demye  alaine{A),  à  la  moitié. 
Denare,    denier,     argent,    de 

l'ital.  danaro. 
Dendromalache ,     arbre ,    bois 

tendre,  du  grec. 
Denigement,  Deniger,  déniche- 

ment,  dénicher. 
Départ,  séparation. 
Département,  Départie,  départ. 
Départir,  partir,  fuir;  séparer, 

partager,  donner  une  part  ; 

disposer. 
Depescher   (S'en),    s'en  débar- 
rasser à  la  hâte. 
Dépiter,  maudire. 
Depopulé,  dépeuplé. 
Déporter  (Se),  s'écarter. 


Déporter  [S' en] ,  s'en  aller,  s'en 
abstenir;  s'en  rapporter  à. 

Deposcher,  tirer  du  sac ,  de  la 
poche. 

Dépravez,  défigurés,  altérés. 

Deprisement,  mépris.  V.  Des- 
pris. 

Dercé,  fontaine  de  Dircé,  en 
Arcadie. 

Der  Guasconguer  thut  schich... 
C'est  du  vieux  allemand  ; 
M.  Burgaud  traduit  :  «  Le 
Gascon  se  flatte  de  se  battre 
avec  n'importe  qui,  mais  il 
est  plus  enclin  à  voler  :  ainsi 
donc,  chères  femmes,  veillez 
aux  bagages.  » 

Desarroy,  meslée,  bataille  en 
désordre. 

Descœuvrer,  découvrir. 

Desconfite  gigantale,  déconfi- 
ture des  géants. 

Desconfort,  découragement. 

Descrouller,  désarticuler. 

Desemparer,  supprimer. 

Deservy,  mérité. 

Desgonder,  faire  sortir  des 
gonds,   déboîter. 

Dés  huy,  dès  aujourd'huy. 

Desincornifistibuié,   démanché. 

Desinens,  finissant. 

Désister,  renoncer. 

Desyuc/zer  (Au), au  réveil, quand 
les  poules  cessent  de  jucher. 

Deslocher,  désarticuler. 

Desnier,  refuser. 

Despendre,  dépenser. 

Despiter,  défier. 

Desporter  (Se),  V.  Déporter. 

Despris,  Despriser,  mépris,  mé- 


23o 


GLOSSAIRE-INDEX 


priser. 

Despurner,  cracher. 

Desracher,  desrocher,  arracher. 

Desrayé,  hors  du  chemin. 

Desroter,  délier, 

Dessay,  André  de  Montalem- 
bert,  sieur  de  Dessé,  qui 
commandait  le  corps  fran- 
çais envoyé  au  secours  des 
Écossais  contre  les  Anglais, 
en  I 549. 

Dessirer,  déchirer. 

Destituer,  priver. 

Destorses,  détours. 

Desultoyres  (Chevaux),  che- 
vaux sur  lesquels  on  sautait. 

Detravé,  échappé,  qui  a  rompu 
ses  entraves. 

Detricho aères,  dévidoirs. 

Deu  Colas,  faillon,  par  saint 
Nicolas,  compagnon,  en 
lorrain. 

Deult,  chagrine,  blesse,  dolet. 

Dévaler,  devaller,  descendre. 

Dei'allée,  descente. 

Deviniere  (La),  propriété  de 
Rabelais,  entre  Chinon  et 
Lerné. 

Devis,  gré,  convenance. 

Devise,  enseigne. 

Devise  de  Monsieur  l'Admirai  : 
Festina  lente. 

Dévotion  (  Horrificque)  ,  un 
vœu  effrayant. 

Dez  (Hors  tous  ,  en  dehors  de 
tout  hasard. 

Diableteau,   petit  diable. 

Diableteau  de  choeur,  diable 
jeune  comme  un  enfant  de 
chœur. 


DiA  Cyenes,   près  Syène,  ville 

de  la  Haute-Egypte. 
Diainent    en     table,     diamant 

taillé  à  surface  plane. 
Diamerdis  (Poudre    de),  pou- 
dre d'excréments  desséchés. 
Diaphragme,  muscle  très-large 

et  très-mince  qui  sépare   la 

poitrine  de  l'abdomen. 
Diarhomes  (Climat),  climat  de 

Rome? 
Diastolicque,    mouvement     de 

dilatation. 
Diatyposes,  inventions,  du  grec. 
Diavol,  diable. 
Dicastes,  juges,  du  grec. 
Dicou,  dites,  en  limousin. 
Dict,  édicté. 
Dictaine,   plante  de   la  famille 

des  labiées. 
Dicte,    montagne   de   l'île    de 

Candie. 
Diecule,  jour. 
Diesble,  diable. 
Diète,   diette ,   manière    de    se 

nourrir,  façon  de  vivre. 
Dieu  seas  (A),  adieu,  bonjour, 

en  provençal. 
Diffame,  perte  de  réputation. 
Diipetes,   aspirant    aux   dieux, 

allant  vers  les  dieux. 
Dilicule,  point  du  jour. 
Diliger,  aimer,  chérir,  du  latin 

diligere. 
Dille,  fosset.   V.  Donzil. 
Dimions,  illusions. 
Dimittons,  remettons,  du  latin 

dimittimus. 
Dîna,    en    Lycie ,    célèbre   par 

un  oracle  d'Apollon. 


GLOSSAIRE-INDEX 


3 


Diole,  diable. 

DiocLiDES,  nom  grec  emprunté 
à  ['Anthologie. 

Diphthere,  peau  de  la  chèvre 
Amallhée. 

DipsodeSj  altérés,  du  grec. 

Direption,  action  de  mettre  en 
pièces,  de  déchirer. 

Dis,  Pluton,  dieu  des  richesses 
souterraines. 

Disceder,  éloigner. 

Discepier,  discuter. 

Discession,  départ. 

Disciplines,  études. 

Discrasiée,  dyscrasié,  de  mau- 
vaise constitution,  de  mau- 
vaise  complexion,  du  grec. 

Discrétion,  discernement. 

Dissolu,  dissipé,  dissout,  ré- 
solu. 

DiVE  (La),  petite  rivière  du  Poi- 
tou ,  marécageuse  et  non 
navigable. 

Doctrine,  ensemble  d'études. 

Doctrinal,  Doctrinale  pt^erorum, 
par  Alexandre  de  Villedieu. 

Dodeliner,  balancer  doucement 
la  tête  de  droite  à  gauche 
et  de  gauche  à  droite. 

Dodeliner  (Se),  être  pour  soi 
aux  petits  soins. 

Dodine,  sauce  à  l'oignon. 

Doint,  donner. 

Dominotier,  fabricant  d'images 
et  de  cartes  à  jouer. 

Dommaine  (Hault),  le  royaume 
des  cieux. 

DoNAT,  vElius  Donatus,  gram- 
mairien du  IV^  siècle,  auteur 
d'une  grammaire  latine,   et 


par  suite  la  grammaire  elle- 
même. 

Dont,  d'où. 

DoRBELLis,  cordelier  angevin  du 
XVe  siècle. 

Dorcades,  espèce  de  chevreuil. 

Dorelot,   enfant   gâté,  dorloté. 

DoRiBus  (Maistrej ,  P.  Doré, 
jacobin,  ou  Matthieu  d'Orry, 
dominicain. 

Doriphages,  mangeurs  de  pré- 
sents, du  grec. 

DoRis  (Michel),  Espagnol. 

Doublet,  musicien. 

Doublet,  terme  de  trictrac. 

Doubler,  douter,  redouter. 

Doué,  arr.  de  Saumur,  Maine- 
et-Loire. 

Dours,  douz,  dos. 

Douzains,  pièce  de  douze  de- 
niers. 

Douzil,  fosset.  V.  Dille. 

Doyac  (Jean),  ingénieur  qui 
construisit  le  pont  Notre- 
Dame,  à  Paris,  et  passe  pour 
avoir  fait  franchir  les  Alpes 
à  l'artillerie  de  Charles  VIII. 

Doye,   mesure  de  capacité. 

Draconneaulx,  vers  de  la  cuisse. 

Dragées,  épices  données  aux 
gens  de  loi. 

Drapeaulx  (Vieux),  vieux  chif- 
fons. 

Dronos  (Donner),  donner  des 
coups,  en  languedocien. 

Dropace,  épilatoire. 

Drouet.  Serait-ce  Heroët? 

Du  Bellay  (Guillaume),  l'un 
des  frères  du  cardinal,  grand 
capitaine  et  écrivain. 


GLOSSAI  RE-INDEX 


Duir,  duyr,  convenir,  plaire. 

Duisantj  convenable. 

Dulie,  culte  de  vénération  qu'on 

rend  aux  saints. 
Dumet,  dumtté,  duvet,  duveté. 
Du   MoLLiN,   ou  Du  Moulin  , 

musicien  français. 
Duple,  double,  du  latin  duplex. 
DuppCj  huppe,  oiseau. 
Du  tout,  tout  à  fait. 
Dyas,  deux. 
D'Ynarius,  Dinarius? 

Eales,  animaux  fantastiques. 

Eau  ardente,  eau-de-vie. 

Eau  beniste  de  cave,  vin. 

Eau  d'ange,  eau  de  myrte. 

Eau  de  naphe ,  eau  de  fleur 
d'orange. 

Eau  gringorienne,  eau  bénite, 
dont  Grégoire  le  Grand  gé- 
néralisa l'usage. 

Eccius  ou  EcKius,  théologien 
allemand,  adversaire  de  Lu- 
ther. 

ECHEPHRON,  ayant  du  bon  sens, 
du  grec. 

Echineis ,  echeneis  rémora , 
poisson.  V.  Remore. 

Echines  poignans,  enveloppes 
piquantes. 

Edonides,  bacchantes. 

Efferée,   sauvage. 

Effiancé,  fiancé. 

Effructé,  dépouillé  de  fruit. 

Ef rené, ne  supportant  pas  le  frein. 

Egenes,  pauvres. 

Egesta,  fille  d'un  prince  troyen 
qui  se  livra  au  fleuve  Cri- 
sinus  changé  en  chien. 


Egipanes,  egipans,  moitié  hom- 
mes, moitié  boucs. 

Egiuchus,  qui  tient  l'égide,  du 
grec. 

Egnatins,  ordre  religieux. 

Ela,  note  la  plus  haute  de  la 
gamme. 

Elaiodes,  huileux,  du  grec. 

Elanes,  les  Landes. 

Electre,  ambre,  du  grec. 

Eleeniosynes,  aumônes,  du  grec. 

Eleichie,  en  forme  de  poire,  du 
grec. 

Elianus,  Elien,  naturaliste  du 
me  siècle. 

Elicies,  éclairs,  du  grec. 

Elixo.  Est-ce  élixir? 

Eluer,  laver,  du  latin  eluere. 

Elutian,  épuré,  du  latin  e/uere. 

Ernbavieré,  ayant  une  bavette. 

Emblée  (A  1'),  en  cachette. 

Embourrer,  engrosser. 

Embrunché,  recouvert,  fait  de 
branches 

Eniburelucocquer,  embarrasser, 
emmitoufler,  entortiller. 

£m6ofr,s'imboire,  s'approprier. 

Embut,  entonnoir. 

EmininSj  espèces,  de  l'hé- 
breu ? 

Emmelie,  genre  de  danse. 

Empaletocqué,  enveloppé. 

Empans,  mesures  de  longueur. 

Empantophlé,  enfermé  dans 
une  enveloppe. 

Empas,  entraves. 

Empeger,  empeiger,  empêtrer, 
prendre  au  piège. 

Empescher,  sommer,  contrain- 
dre; embarrasser, mettre  dans 


GLOSSAIRE-INDEX 


i33 


l'embarras. 

Emploicter,  employer. 

Emunderj  nettoyer. 

En,  au. 

Enasé,  sans  nez. 

Enay,  géant. 

Enay,  l'abbaye  d'Ainay,  à 
Lyon. 

Encarrer,  engraver. 

Enclaver,  enfiler  ;  clôturer. 

Enclins,  penchés,  inclinés. 

Encochcr,  attacher. 

Encyliglotte,  anciloglosse,  vul- 
gairement le  filet,  du  grec. 

Endenteléj  endenté. 

Endouayré,  gratifié. 

Endousseure,  arête,  crête  d'un 
toit. 

Enduire,  digérer,  terme  de  fau- 
connerie. 

Eneoremes,  nuages  floconneux 
dans  l'urine,  du  grec. 

Enfermier,  infirmier. 

Engarier,  engaries.  V.  Anga- 
rier,  angaries. 

Engastrimythes,  ceux  qui  par- 
lent du  ventre,  du  grec  ; 
ventriloques,  du  latin. 

Engin,  moyen,  outil,  appareil, 
stratagème,  adresse. 

Engipponné,  enjuponné,  por- 
tant robe. 

Engolevent,  géant. 

Engoulevezinemassez,  froissés, 
foulés. 

Engoullé,  mis  dans  la  bouche. 

Engourdely,  engourdi. 

Engroneland,  Groenland, 
Groënlandais. 

Engrouin  (Mal),  mauvaise  for- 


tune. 
Enguainnant      (Frère)  ,     frère 

mettant  en  gaîne. 
Engys,  proche,  du  grec  • 
Enig,  sans,  en  allemand. 
Enilins,  serviteurs  de  la  Quinte, 

de  l'hébreu? 
Enite  (Je  me),  je  m'efforce. 
Ennasin,    ennasé,   camus  ;    ne 

serait-ce  pas  plutôt  en-nasé, 

à  long  nez? 
Ennicroché,  accroché. 
Enrimer,  enrhumer. 
Ensagir,  devenir  sage. 
Entaknté,  disposé,  prêt  à. 
Entelechie,  perfection  intérieure, 

du  grec. 
Entendant,  intendant. 
Entendouoire,    compréhension, 

intelligence. 
Entommer,  entamer. 
Entommericque  (Mer),  du  nom 

de   frère  Jean    des    Entom- 

meures. 
Entommeures,    entailles;  frère 

Jean   est    proprement    Jean 

des  Entailles. 
Entouillé,  sali. 
Entreillizé,  entremêlé. 
Entronificqué,  qui  est  dans. 
Enyo,   nom   grec   de   Bellone, 

déesse  de  la  guerre. 
Eone,  éon,  bois  dont  était  fait 

le  navire  Argos. 
Epagon,  poulie  (Jal). 
Epanalepse,  répétition  de  mots, 

du  grec. 
Epaticque,  qui  tient  au  foie,  du 

grec. 
Ephectique,  a  le  même  sens  que 

3o 


234 


GLOSSAIRE-INDEX 


le  mot  pyrrhonien  qui  suit  : 
qui  ne  dit  jamais  ni  oui  ni 
non,  qui  doute  toujours. 

Ephemerum,    plante  inconnue. 

Epicenaire,  frivole. 

Epidemiale,  épidémique, 

Epiglotide,  épiglotte. 

Epilenie,  chant  de  vendanges, 
du  grec. 

Epinicies,  chant  de  victoire, 
du  grec. 

Episemasies,  manifestations,  du 
grec. 

Epistemon,  savant,  du  grec. 

Epithersés,  grammairien  grec, 
maître  de  Plutarque. 

Epxnons,  cris  d'ivresse,  du 
grec. 

Eraige,  héritage;  race. 

Eresné,   éreinté. 

Ergo  ghic,  conclusion  d'un 
raisonnement  qui,  en  réalité, 
ne  conclut  pas. 

Ergotz,  arguments  d'ergoteurs. 

Erre  (Grand),  vivement,  grand 
train. 

Erres,  direction. 

Erres,  en  vénerie,  les  excré- 
ments laissés  par  un  animal 
sur  son  chemin. 

Eruce,  roquette. 

Eruyté,  qui  n'entre  plus  en  rut, 

Erynge,  eryngion,  chardon- 
Roland,  ou  roulant,  pani- 
caut. 

Eryon,  géant. 

Eryx,  géant. 

Es,  aux,  dans  les,  sur  les. 

Esbanoit,  épanouit. 

Escafignon,  escarpin. 


Escalle,  écaille. 

Escamper,  fuir,  décamper. 

Escanioula,  pompe  à  bord 
d'une  galère  (Jal). 

Escarques,  valets,  de  l'alle- 
mand. 

Eschalleur  de  noys ,  écaieur 
de  noix. 

Eschallons,  échelons. 

Eschaloté,  écalé  comme  une 
noix. 

Escharboiter,  éparpiller,  four- 
gonner. 

Eschenaulx,  chéneaux,  conduits 
d'eau. 

Eschervis,  chervi,  girole. 

Esclaffer,  éclater. 

Esclotz,  sabots  ;  sandales  de 
moine  ;  désigne  parfois  le 
moine  lui-même. 

Escorcher   le  renard,  vomir. 

Escorter,  écorcher. 

Escorné,  triste. 

Escornifler,  affronter. 

Escors,  escorts,  adroits,  dispos. 

Escot  (Parlons  par),  parlons 
chacun  à  notre  tour. 

Escriptoire,  endroit  où  l'on 
écrit,  bureau. 

Escrouller,  secouer. 

Escuelles  (Aller  par),  servir 
abondamment. 

Esculée,  écuellée. 

Esculler,  écraser. 

Escurieux,  écureuils. 

Escuz  au  sabot,  pièces  de  mon- 
naie de  la  façon  de  Rabe- 
lais. 

Escuz  au  soleil,  monnaie  d'oi 
de  Louis  XI. 


GLOSSAIRE-INDEX 


35 


Escuz  du  palais,  jetons. 

Esgous,  sale. 

Esguasser,  agacer  ;  dégoûter. 

Esgue  orbe,  jument  borgne,  du 
latin  equa  orha. 

Eslargir,  faire  des  largesses. 

Esmeut,  fiente  de  bête  sauvage. 

Esmeutir,  esmoutir,  émouvoir  ; 
par  extension  avoir  besoin 
d'aller  à  la  selle,  cacare, 
évacuer. 

Esmorche,  amorce  ;  ordure  lais- 
sée  après  un   nettoyage. 

Esmouchail,  chasse-mouches. 

Esmoucheter,  moucheter,  orner 
de  broderies. 

EsoPET,  Ésope. 

Esparer  (S'),  s'éclaircir,  de 
l'italien  spararsi. 

Espartir,  répartir,  répandre. 

Esparvkrs  de  Montagu,  poux. 
Le  collège  de  Montaigu 
était  renommé  pour  sa  sa- 
leté. 

Espaultrer,  luxer  les  épaules. 

Espaves,  hors  d'usage. 

Espelan,  éperlan. 

Esperruquancluzelubelouzerlrelu 
paralysé. 

Espices,  épices;  cadeaux  que 
l'on  faisait  aux  juges  pour 
se  les  rendre  favorables,  et 
qui,  dans  l'origine,  étaient 
réellement  des  épices  ;  a 
souvent  le  sens  de  gâteaux, 
confitures,  dragées,  sucre- 
ries. 

Espies,  espions. 

Espine  de  Saint-Fiacre  (V). 
Était  conservée  dans  la  cathé- 


drale de  Meaux. 

Espiner,  piquer. 

Espingarderie,  machine  de 
guerre. 

Espouilleresse,  chercheuse  de 
poux. 

Esquames,  écailles, 

Esquarrer,  tailler. 

Esquels,  auxquels. 

Esquinanche,  esquinanci^. 

Esrafflade,  égratignure. 

Esrener,  éreinter,  fatiguer. 

Essors  (Oiseaux),  oiseaux  qui 
s'échappent  facilement. 

Essuer,    essuyer. 

Essueil,  essieu. 

EsTABLES,  village  des  environs 
de  Poitiers. 

Estait,  nom  d'un  cordage. 

Estaincts,  asphyxiés. 

Estamet,  étamine. 

EsTRANGouRRE  (Pays  d')  ;  c'est 
pour  Le  Duchat  l'East-En- 
gland,  une  des  heptarchies 
de  l'Angleterre^  sous  les 
rois  saxons. 

Estanterol,  pilier  de  bois  sup- 
portant la  poupe  d'une  ga- 
lère (Jal). 

Estaphe,  étrier. 

Esteuf,  balle. 

Estiomené,  rongé. 

Estivallet^  chaussure  d'été. 

Estoc,  épée,  bâton,  pointe. 

Estoille  poussiniere,  monnaie 
de  l'invention  de  Rabelais. 

Estommis,  vaincus. 

Estonnemens,  événements  éton- 
nants. 

Esiorce,  effort. 


36 


GLOSSAIRE-INDEX 


Estouper,  boucher. 

Eslradiotz,  stradiotes,  troupes 
mercenaires  vêtues  à  la  tur- 
que, 

EsTRELiNS,  Esthoniens,  habitants 
des  villes  anséatiques. 

Estrene  (En  bonne),  sous  de 
bons  auspices. 

Estrif,  danger,  embarras,  si- 
tuation embarrassante ,  in- 
quiétude. 

Estrindore,  sorte  de  danse. 

Estrippé,  crevé,  déchiré. 

Estrh'iers,  estrivkres,  étriers, 

EsTROCZ  (Bois  d'),  en  Poitou. 

EsTROiCT  DE  Sibylle,  le  détroit 
de  Séville,  de  Gibraltar. 

Estronspicinî,  divination  par 
les  fèces. 

Esveigkz,  éveillés. 

Esvantoirs,  évantails. 

EthiopiSj  herbe  qui  ouvre  les 
portes. 

Etion,  géant. 

EuBOiENs,  habitants  de  l'Eubée. 

EucLiDES,  mathématicien  grec 
du  IJI^  siècle  avant  J.-C. 

EuDEMON,  bon  génie,  du  grec. 

El'Gube,  ville  de  l'Ombrie. 

Euhyades,   bacchantes. 

Eumetrides  (La  pierre),  pierre 
précieuse  citée  par  Pline. 

Euphorbe,  euphorbium,  résine 
irritante  tirée  d'un  arbris- 
seau cactoïde  de  la  famille 
des  euphorbiacées. 

Euphorion,  poète  grec  du  IIF 
siècle  avant  J.-C. 

Eupolis,  nom  grec  emprunté  à 
VAnlhologie. 


EuRYCLES,  ventriloque  athénien 
dont  parle  Aristophane. 

EuRiSTHEUs,  Eurysthée,  rival 
d'Hercule. 

EusTATHius,  de  Constantinople, 
archevêque  du  XII®  siècle, 
commentateur  d'Homère. 

EusTHENES,  fort,  robuste,  du 
grec. 

EuTYCHE,  fortuné,   du  grec. 

Evangile,  bonne  nouvelle,  du 
grec. 

Evangiles  de  boys,  tables  à 
jouer. 

Evantes,  bacchantes. 

Everseurs,  destructeurs. 

Eversions,  renversements. 

Euig,  avec,  allemand. 

Eviré,  privé  de  forces. 

Excequer,  exécuter. 

Exclusive,  exclusivement. 

Excolé,  écoulé. 

Exempiiles,  postiches. 

Exenterer,  arracher  les  entrail- 
les, du  grec. 

Exeques,  obsèques. 

Exercite,  armée,  du  latin  exer- 
citus. 

Exhauste,  vidé. 

Eximé,  amaigri. 

Exinaniz,  épuisés. 

Existimation,   réputation. 

Exiture,   sortie. 

Expiration,  respiration. 

Expediens,  prompts. 

Expédiez,  entraînés,  disposés. 

Expoly,   poli. 

Exponibles  (Les)  de  M.  Haulte- 
chaussade.  Titre  d'ouvrage 
et  auteur  inventés  par  Rabe- 


GLOSSAIRE-INDEX 


:37 


lais. 
Extispicine,    divination  par  les 

entrailles  des  victimes. 
Extoignoit,  éteignait. 
Extoller,  rehausser,  vanter. 
Extrandzer,  mettre  hors. 
Extravagantes ,      constitutions 

postérieures    aux    premières 

collections  de  Décrétales,  du 

latin  Constitutiones  qusevaga- 

bantur  extra. 
Extravaguant,     qui    déborde, 

qui  coule  dehors  du  vase. 
Exule,  qui  sort,  qui  s'en  va. 

Fabrile  (Art),  l'art  du  forge- 
ron. 

Facet,  livre  de  morale  familière. 

Faciende,  chose  à  faire. 

Facultatule,  faculté. 

Fadas,  sot. 

FadrinSj  jeunes  matelots. 

Faguenat,  puanteur. 

Faignoit  (Se),  faisait  le  fai- 
néant. 

Failly,  disparu. 

Faindre  (Se),  se  ménager. 

Fallaces,  tromperies,  finesses 
de  la  discussion. 

Falot,  gai  compagnon. 

Falourdin,  géant. 

Fanfarer',  parader. 

Faiïtesque.  Est-ce  une  courti- 
sane? L'italien  fantesca  veut 
dire  chambrière. 

Far  de  mal' encontre,  phare  de 
malheur. 

Faratz,  tas,  assemblage. 

Farce  magistrale,  assaisonne- 
ment de  haut  goût  et  abon- 


dant. 

Fardeau  (Le)  de  Sainct-Chris- 
tofle,  le  Christ. 

Farfadetz,  esprits  follets  ;  le 
plus  souvent  moines. 

Farfelu,  gonflé,  gras,  replet. 

Faribroth,  géant. 

Fasché  de  ialeures,  fatigué  de 
viandes  salées. 

Fasques,  petites  boîtes,  étuis. 

Fatuel,  qui  prédit  l'avenir,  du 
lat.  fatum. 

Fauciles,  les  deux  os  de  l'a- 
vant bras. 

Faulcon,  faulconneaulx,  petit 
canon,  petits  faulcons. 

Faulseres,  faussaires, 

Faultier,  qui  fait  des  fautes. 

Fauveau,  de  couleur  fauve. 

Faverolles,  arr.  de  Blois,  Loir- 
et-Cher. 

Favorer,  faire  silence,  du  lat. 
f avère  linguis. 

Faye,  foie. 

Faye  (  Le  chemin  de),  chemin 
contourné  par  lequel  on 
monte  à  Faye- la-Vineuse, 
arr.  de  Chinon,  Indre-et- 
Loire. 

Faseolz,  haricots,  du  lat.  pha- 
seolus. 

Fenabregue.  Le  Duchat  dit  que 
c'est  le  nom  qu'on  donne 
en  Languedoc  à  l'alisier. 
Ne  serait-ce  pas  une  altéra 
tion  du  mot  fenugrec,  sé- 
né grain  ? 

Fenestré,  attaché  à  cordons 
croisés. 

Fenoil,  fenouil. 


i38 


GLOSSAIRE-INDEX 


Fercuks,  plateaux  de  balance. 

FeriaUj  férié. 

Fcrics,  fêtes;  ferks  esuriales^ 
fêtes  où  l'on  doit  jeûner,  du 
lat.   esuriaks. 

Fernelj  anneau  de  corde  qui 
maintient  l'aviron  à  bord 
d'une  galère  (Jal). 

Feronia,  déesse  des  forêts. 

Ferragus,  géant. 

Ferrandat  (Henri),  juriscon- 
sulte nivernais  du  XVI<^  siè- 
cle. 

Ferrate  (Chemin  de  la),  che- 
min entre  Tours  et  Limoges. 

Ferrais  (Pieds),  pieds  chaussés 
de  galoches. 

FerreaUj  fer,  lame. 

Ferrement,  tout  instrument  ou 
outil  tranchant  en  fer. 

Ferremens  de  la  inesse,  orne- 
ments religieux. 

FerrkreSj  grands  flacons,  bou- 
teilles de  cuir. 

Ferron.  Est  ce  Arnold  Ferron, 
conseiller  au  Parlement  de 
Bordeaux? 

Fers,  ferrets. 

Ferulacée,  qui  ressemble  à  une 
férule  (ombellifères),  d'où 
l'on  extrait  une  résine  fétide 
connue  sous  le  nom  d'Assa- 
fatida. 

Fessée,  Fascée,  divisée.  La 
fasce  est  une  pièce  en  for- 
me de  barre  horizontale  pla- 
cée    sur  le  milieu  de  l'écu. 

Fessepinte,  héros  de  roman, 
grand  buveur. 

Feston  Dkne,  Fête-Dieu. 


Feuillades,  feuillées. 

Feurre,  paille. 

Feustré,  jonché. 

Fevin,  musicien  Orléanais  du 
XVe  siècle. 

ff,  lettres  par  lesquelles  Bri- 
d'oye  désigne  le  Digeste. 

Fiant,  fien,  fumier. 

Fktil,  de  terre  cuite,  du  latin 
flctilis. 

Fierabras,  géant. 

Fkreté,   hardiesse. 

Fkrs,  nom  d'un  cépage. 

Fkulx,  enfants,  en  picard. 

Figue  (Faire  la),  se  moquer, 
far  le  fiche,  montrer  le  bout 
du  pouce  entre  le  médius 
et  l'index. 

Figues  dioures,  figues  d'or, 
provençal. 

Filopendoks,  contre-poids. 

Fins,  frontières. 

Fins  maritimes,  côtes. 

Flacce.  Horace,  Quintus  Ho- 
ratius   Flaccus. 

Flacque,  flasque. 

Flagitiose,  vicieux,  du  lat.  fla- 
gitiosus. 

Flammivomes,  vomisseurs  de 
flammes,  épithète  appliquée 
aux  chevaux  du  Soleil. 

Flancquegées,  flanquées,  italia- 
nisme de  fiancheggiate. 

Flasque,  bouteille,  de  l'ita- 
lien fiasco. 

Fkurins,  florins. 

Fleury  (François),  érudit  du 
XVI«  siècle. 

Fleute,  tuyau  qui  part  du  cha- 
piteau d'un  alambic. 


GLOSSAIRE-INDEX 


:39 


Fleutes  d'Alkmant,  instrument 
de  la  musique  militaire  alle- 
mande. 

Floc,  Flocquars,  houppe. 

Flocqutr,  flotter  au  vent. 

Flocquetz,  freluquets. 

Flouins,  petits  navires  à  voiles 
et  à  rames. 

Florale,   genre  de  danse. 

FluXj  terme  de  jeu. 

Focile,  le  cubitus,  os  de  l'avant- 
bras,  pris  pour  l'avant-bras. 

Foillouze,  bourse. 

Foin  en  corne  (Avoir  du),  être 
désigné  à  la  moquerie.  On 
mettait  du  foin  aux  cornes 
des  animaux  méchants. 

FoLENGo  (Théophile),  bénédic- 
tin mantouan,  auteur  de 
{"Histoire  macaronique  de 
Merlin  Coccaïe,  que  Rabe- 
lais connaissait  bien  et  à 
laquelle  il  a  fait  plus  d'un 
emprunt. 

Folfré,  rendu  fou. 

Folliant,  faisant  le  fou,  jouant, 
folâtrant. 

Follie  Guobelin,  la  manufac- 
ture de  tapisseries  de  Gilles 
Gobelin,  aujourd'hui  les 
Gobelins. 

Foncé,  ayant  des  fonds. 

Fonde,  fronde. 

Fondrillons,  ramassis  de  chan- 
vre de  rebut  sur  quoi  on 
pelotonne  le  fîl. 

Fons  cabalin,  l'Hippocrène, 
fontaine  du   cheval  Pégase. 

FoNSBETON,  pays  de  la  fabrique 
de  Rabelais. 


FoNTAiNE-LE-CoNTE,  Fontenay- 
le-Comte,  chef  lieu  d'arr., 
Vendée. 

Forbe,   fourbe,  tromperie. 

Force  (Toute),  de  toute  façon. 

Forces,  forts  ciseaux  à  ressort, 
sans  charnières. 

Forcettes,  petites  forces,  petites 
cisailles. 

Forcez,  forçats. 

Forclus,  exclus. 

Forest  (La)  de  l'Académie,  les 
jardins  d'Académus  à  Athè- 
nes^ où  l'on  discutait  en  li- 
berté. 

Forfant,  mauvais  sujet,  forban. 

Forissoient,  Forissu,  faisaient 
sortir,   sorti. 

Fort,  l'endroit  le  plus  épais 
d'un  bois. 

Forteresse,  force. 

Fortunal,  tempête,  de  l'ita- 
lien fortunale. 

Fortune  (De),  par  un  heureux 
hasard. 

Fortunes,  bonheurs,  prospéri- 
tés, succès. 

Fou,  Foug,  arr.  de  Toul, 
Meurthe. 

Fouace,  galette  tourangelle, 
poitevine   ou  saintongeaise. 

Fougent,  fouillent. 

Fougons,  cuisines  de  navire. 

Fouillouse,  poche. 

Foullouaires,  fouloirs. 

Foulque,  poule  d'eau. 

Fouquet,  foucquet,  jeu  où  l'on 
éteignait  une  lumière  en 
soufflant  par  les  narines. 

Fourche  fière,   fourche  ferrée, 


240 


GLOSSAIRE- INDEX 


lance  avec  une  fourche. 

Fourchez  là,  arrêtez -vous  là. 

Fourmay  (Je  complainte,  je 
portai  plainte. 

Fourneasmes  {Onques  puis  ne) 
nous.  M.  Burgaud  explique 
cette  locution,  dont  il  cite 
un  autre  exemple,  comme 
marquant  la  perfection  d'une 
chose,  qu'il  n'est  plus  be- 
soin de  remettre  au  four. 

FouRQUES  Les)  d'Augsbourg, 
les  Fugger,  riches  négo- 
ciants dont  la  fortune  était 
proverbiale. 

FoussCj  fosse, 

FouTASNON,  géant. 

Fouteau,  hêtre. 

FouTiGNAN,  Frontignan,  arr.  de 
Montpellier,  Hérault. 

Fouzil,  fuzil,  briquet  à  pierre. 

FoyneSj  fouines. 

Foyrad,     foirard. 

Foys,  fais,  de  faire. 

Fraires,  frayres,  fraises. 

Francarchierus  de  Bagnolet. 
Le  Franc-Archier  de  Bagno- 
let est  un  filou  renommé. 
On  imprime  à  la  suite  du 
Villon  une  pièce  :  Monolo- 
gue du  Franc-Arcliier  de 
Baignolet. 

Francolys,  francolins,  oiseaux. 

Francs  Gontiers,  habitants  des 
forêts. 

Francs-Taulpins,  Franctopins, 
Milices  campagnardes,  ar- 
chers irréguliers. 

Frapars,  épithète  de  moine. 

Frapin,  Lucas  Le  Moyne,  curé 


de  Saint-Georges  d'Angers, 
a  composé  et  publié  des 
noëls  poitevins. 

Frarie,  confrérie. 

Frayer,  subvenir. 

Fredons  Frères  ,  frères  fredon- 
nant, les  moines  qui  mar- 
monnent des  prières  et  des 
chants  d'église. 

Frelore,  Bigoth  (Tout  est)!  tout 
est  perdu,  bon  Dieu!  de 
l'allemand. 

Fressurade,  embrassade. 

Freusser,  froisser,  rompre. 

Frezes  Febves  ,  fèves  décorti- 
quées. 

Friandeaulx,  gourmands. 

Friperie,  fripperie,  friponnerie. 

Fripesaulce,  marmiton. 

Friquenelles,  jeunes  andouilles. 

Friscades,  boissons  fraîches. 

Frisque,  tout  éveillé,  tout  gail- 
lard. 

Frize,  étoffe  grossière. 

Frizons,  pots  à  boisson  à  bord 
des  navires. 

Fronde,  furoncle. 

Fronton.  Est  ce  Frontin,  l'au  - 
teur  des  Straiagemata^ 

Fructices,  arbrisseaux  annuels. 

Fruition,  jouissance. 

Fulciz,  soutenus,  du  lat.  fulciti. 

Funges,  champignons,  du  lat. 
fungus. 

Furt,  vol. 

Fust,  bois. 

Fastaye,  futaie. 

Fustes,  navire  à  rames  (Jal  . 

Futeur,  futur. 

Fy,  foy. 


GLOSSAIRE-INDEX 


241 


Gabbara,  géant  arabe. 

Gabeler  (Se),  se  moquer. 

Gabies,  cages  ;  hunes  d'un  mât. 

Gabriel  (Maistre),  Gabriel  Ta- 
phenon,  médecin. 

Gagate^  jais  oujayet.  V.  Gayet. 

Galaffre,  géant. 

Galbanum,  résine  du  Bubon 
galbanum. 

Galehaut,  géant. 

Galen,  Galenl's,  Galien,  célè- 
bre médecin  grec  du  11^  siè- 
cle. 

Galerne  (Vent  de),  vent  du 
N.-O. 

Galland  (Pierre) ,  recteur  de 
l'Université  de  Paris  et  pro- 
fesseur du  Collège  Royal  au 
XVP  siècle. 

Gallefreté jCaUaté,  goudronné. 
V.  Guallef retiers. 

Galler,  gauler,  frapper  à  coups 
de  gaule. 

Galleverdine,  cape.  V.  Gual- 
vardine. 

Galliers,  galeux.  V.  Gualliers. 

Gallochler,  sabotier. 

Galls,  Gaulois,  Français. 

Gais,  Galli  ou  Corybantes. 

Gama  ut,  note  la  plus  basse  de 
la  gamme. 

Cambres,  Gambie. 

Gammares,  homards,  du  latin 
cammarus. 

Game  (Entra  en  la  haulte),  se 
mit  à  songer  sérieusement. 

Ganabin,  larron,  en  hébreu? 

Ganarriens,  habitants  des  îles 
Canaries. 

Ganivet,  canif. 

Rabelais.  V. 


Ganyvetieres,  marchandes  de 
canifs,  marchandes  des  rues. 

Garaniers  (Chats) ,  chats  sau- 
vages, qui  mangent  les  lapins 
de  garenne. 

Garbin,  vent  du  S.-O.,  de 
l'italien  garbino. 

Gargamelle,  gorge. 

Garon,  garum,  assaisonnement 
sur  lequel  Rabelais  a  fait 
une  pièce  de  vers  latins. 

Garré,  bariolé. 

Gastrolatres ,  adorateurs  du 
ventre,   du  grec. 

Gastromancie,  divination  par 
ventriloquie. 

Gaubregeux,   qui  se  goberge. 

Gaudebillaux,  tripes  de  bœufs 
gras. 

Gaudez,  réjouissons-nous,  gau- 
deamus,  commencement 
d'antienne. 

Gaudisserie,  réjouissance. 

Gaultier,  Gautier,  mauvais 
plaisant. 

Gaultier  (Bon),  bon  vivant. 

Gausc/ziere  (Raquette),  raquette 
faite  pour  être  tenue  de  la 
main  gauche. 

Gavion,  gosier, 

Gayet,  jayet,  jais.  V.  Gagate. 

Gayetier,  sonneur  de  corne- 
muse. 

Gayoffe,  géant. 

Gays,  geais. 

Gaza  (Théodorus),  philologue 
byzantin  du  XV^  siècle. 

Gebarim,  coqs ,  en  hébreu  ; 
peut-être  les  Français,  Galli. 

Geber,  alchimiste  et  mathéma- 

3i 


242 


GLOSSAIRE-INDEX 


ticien  arabe  du  1X<^  siècle. 

Gehainer,  tourmenter. 

Geheignoyt,  geignait. 

Géhenne^  lieu  de  supplice^  du 
latin  gehenna. 

Gelasim,  pays  où  l'on  rit ,  du 
grec. 

Gelines,  poules. 

Gelones,  Tartares. 

Gemmagog,  géant. 

Gendre,  Jean  Le  Gendre,  mu- 
sicien parisien  du  XVP  siè- 
cle. 

Geneliabin ,  miel  rosat ,  en 
arabe. 

Generaulx  (Messieurs  les),  les 
magistrats  de  la  Cour  des 
Aides. 

Genêt,  cheval  d'Espagne. 

Genethliaque,  horoscope  tiré  à 
la  naissance  d'un  individu. 

Genevoys,  les  habitants  de 
Gênes,  de  l'italien  Genova. 

Gentj  gens,  braves. 

Geoffroy,  à  la  grand'dent,  de 
Lusignan,  qui  fit  brûler 
l'abbaye  de  Maillezais. 

Géoinantie,  divination  par  la 
terre. 

Gergeau,  Jargeau,  arr.  d'Or- 
léans, Loiret. 

Germain  de  Brie,  ami  de  Ra- 
belais. 

Gerson  (J.)>  chancelier  de 
l'Université,  théologien  du 
XlV-XVe  siècle. 

Gestes,  actions,  choses  faites. 

Giborins,  forts,  robustes,  de 
l'hébreu? 

Gilbathar,  Gylbàthar,  Gibral- 


Gippon  (Le  moule  du)  ;  le 
moule  du  jupon ,  c'est  l'es- 
tomac, le  ventre. 

Girard  (Charles),  de  la  maison 
de  Du  Bellay. 

Girardine,  espèce  de  râle. 

Glands,  boulets  de  canon. 

Glaterons,  glouterons,  boutons 
aspérulés  de  la  bardane. 

Glaz,  glace. 

Glenay,  Glennay,  arr.  de 
Bressuire,  Deux-Sèvres. 

Glimpes,  flambeaux. 

Glirons,  loirs. 

Gloux,  Gloute,  Glouite,  glou- 
ton, gloutonne. 

Gluber,  peler. 

GlyphoLioires ,  canonnières  en 
sureau. 

Gnatho,  gourmand  de  l'anti- 
quité. 

Gnaver,  s'efforcer. 

Gocourte  (Kohe),  demi-longue, 
descendant  à  mi-jambe. 

Godale,  boisson,  probablement 
bonne  bière,  good  aie. 

Godalle,  débauche. 

Godemarre ,  marmite  ?  gros 
ventre. 

Goguelus,  mauvais  plaisants. 

Gogues ,  médicaments  purga- 
tifs. 

Goitrou,  Guoytrouz,   goitreux. 

GoLFARiN,  neveu  imaginaire  de 
Mahomet. 

GoMBERT,  musicien  belge  du 
XVI°  siècle. 

Gonnelle,  robe,  de  l'italien 
gonella. 


GLOSSAIRE-INDEX 


MÎ 


Gorgery,  gorgerin. 

Gorgias,  gorgiasement,  brave, 
bien  mis,  pimpant,  fierot, 
qui  se  rengorge  ;  avec  osten- 
tation, avec  braverie. 

GossampineSj  cotonniers. 

GotSj  moines,  cafards. 

Gottis,  gothique. 

Goud  fallût,  pour  goodfdlow, 
bon  compagnon  ;  falot  dé- 
signe aussi  une  lumière  au 
bout  d'un  bâton. 

Gouet,  serpette. 

Gougt,  femme  ou  fille, 

Goaimphe,  coin  de  bois. 

Gourmander ,  manger  avec 
gourmandise. 

Gourmanderies ,  Gourman- 
deurs,  commanderies,  com- 
mandeurs. 

Gourretz  ,  Gitoretz ,  gorets  , 
porcs. 

Gourrkr,  bien  mis,  arrogant, 
fier. 

Gourrier  (Palefroy),  beau  che- 
val. 

Goussets,  partie  de  l'armure  en 
haut  du  bras. 

Gozal,  pigeon,  en  hébreu. 

GrabeaUj    examen    minutieux. 

Grabeler,  grabeleurs,  étudier, 
examiner,  discuter;  gens  qui 
épluchent  tout,  qui  exami- 
nent minutieusement. 

Grain,  pas,  point;  négation, 
du  latin  granum. 

Graisler,  griller. 

Grampes,  crampes. 

Grandmont,  seigneurie  près 
de  Chinon. 


Graphides,  images. 

Grapper,  grappiller. 

Gratelles  (Prince  de),  prince 
des  démangeaisons ,  prince 
de  Galles. 

Gratuité,  reconnaissance. 

Grave,  grève. 

Graver,  Gravir,  grimper. 

Gravot,  commune  de  Bour- 
gueil,  arr.  de  Chinon,  Indre- 
et-Loire. 

Grefves ,  Grèves  ,  jambards  , 
cuissards  ;  le  devant  des 
jambes.  V.  Griefves. 

Gregeoys,  Grégeois,  Gregoys, 
grecs. 

Greigneur,  plus  grand,  du  latin 
grandior. 

Grene,  Grené,  graine,  en  graine. 

Grever,  peiner,  faire  de  la  peine, 
charger. 

Greziller,  griller,  briàler. 

Grezillons,  petits  chapelets? 

Griays,  chagrin. 

Gribouillis,  nom  de  diable. 

Grief,  adj . , 'douloureux;  subst. , 
dommage. 

Griefves ,  grègues ,  grèves  , 
haut-de-chausses.  V.  Gref- 
ves. 

Grilgoth,  nom  de  diable. 

Grillotier,  marchand  de  cerises. 

Grimaulx,  écoliers  des  basses 
classes. 

Gringotter,  chanter. 

Gringuenaudes ,  gringuenau- 
diers,  ordures,  restes  ;  indi- 
vidus malpropres. 

Griphons,  greffiers. 

Grippeminaulx,  gens  de  justice. 


144 


GLOSSAIRE-INDEX 


Grisler,  Grlsles,    griller;  grils. 

Grishmtnt,  grésillement,  bruit 
de  ce  qui  brûle  en  pétillant. 

Grivolées,  grivelées,  tachetées 
comme  les  grives, 

Grizelles,  enfléchures  des  hau- 
bans (Jal). 

GrobiSj  important. 

Groisse,  grossesse. 

Grolle,  corneille;  en  poitevin, 
le  point  noir  qui  est  au  mi- 
lieu de  la  carte  blanche  du 
but,  au  tir  à  l'arbalète. 

Grollier  (Noyer) ,  noyer  à 
grosses  noix  que  peuvent  en- 
tamer les  grolles. 

GruppadeSj  groupe  de  nuages 
noirs. 

Gruppemens,  griffements. 

Grupper  ,  saisir  ,  accrocher  , 
griffer. 

Gri/yers,  soldats  mercenaires 
originaires  de  la  vallée  de 
Gruyère. 

GrypheSj  griffons,  oiseaux  fan- 
tastiques. 

Grsphon,  Gryphus,  petit  poëme 
d'Ausone. 

Gryson  (Pierre  de),  grès? 

Guahan    caban. 

Guabarriers,  meneurs  degabar- 
res. 

GuabeUr.  V.  Gabeler. 

Guabet ,  flamme,  pavillon  du 
haut  d'un  mât  fJal). 

GuADAiGNE,  Thomas  de  Gua- 
dagne,  financier  du  XVF  siè- 
cle. 

Gualée,  galère. 

Gualentir ,     rendre     souples. 


dispos. 
GuaUrne ,    galerne,    vent    du 

N.-E. 
Gualimaffrée,  pot-pourri. 
Gualimard,   GualUmart,  Gali- 

mard ,     étui    à    mettre   les 

plumes,  encrier. 
Guaîinottes,  gelinotes. 
Guallefretiers ,      Gallefretiers  , 

gredins,  vauriens,  racailles, 

matelots,   calfats,   goudron- 

neurs  de  navires. 
Guciler,  gratter,  étriller;  rire, 

plaisanter,  faire  bombance. 
Guallicr,  tout  gaillard;  vaurien. 
Gualoise,  Gualloise,  jeune  fille 

qui  mène  joyeuse  vie,  femme 

plus  que  galante. 
Gualot,  galop. 
Gualous,  galeux. 
Gualvardine,  jaquette.  V.  Gal- 

lei-erdine. 
Guambayer,  gambader. 
Guarani,  garant,  cordage  d'un 

palan  (Jal). 
Guarbin,  vent  doux  du   S.-O. 
Guareserre,  action  de  se  mettre 

sur  ses  gardes. 
Guargoulks,  bruits   et  cloches 

faits  en  soufflant  dans  l'eau 

avec  un  chalumeau. 
Guarguareon,  la  luette. 
Guarigues,  Giiarrigues,  plaines 

incultes,   broussailles,   lan- 
des, bruyères. 
Guarot,  Guarrot,  trait   d'arba- 
lète, flèche. 
Guaroux,  loups-garoux. 
Guarres,  bigarrées. 
GuASCoiGNE ,     Matthieu     Gas- 


GLOSSAIRE-INDEX 


cogne,  musicien  du  com- 
mencement du  XVP  siècle. 

Guast,  dégât,  ravage. 

Guatie,  hune  de  guet  (Jal), 

Guavasche,  sale. 

Guaviet,  gosier. 

Guedofle,  Guedoufîe ,  flacon 
couvert  de  cuir. 

Guementer  (Se),  s'informer  avec 
anxiété. 

Guenaulx,  Guenaux,  gueux. 

GuENET  (La  dive  Oye),  oie  qui 
figure  dans  la  légende  de 
Saint- Guennolé  (Burgaud). 

Giierdonner,  Gaerdonneur,  ré- 
compenser; qui  récompense. 

Gucspin ,  piquant,  au  figuré, 
comme  une  guêpe  ;  surnom 
des  Orléanais. 

Gueules,  couleur  rouge  en 
blason. 

Gueux  de  l'hostiaire,  mendiants 
de  porte  en  porte. 

Guildirij  cheval  hongre. 

Guillaume  sans  paour,  héros 
de  roman. 

GuiLLOT ,  Guillaume ,  taver- 
nier  célèbre  à  Amiens  au 
XVP  siècle. 

GuiLLOT  le  Songeur,  person- 
nage populaire. 

Guilverdons,  capuchons. 

Guimaux  (Prés),  prés  fauchés 
deux  fois  par  an. 

Guinder  (Se),  s'enlever. 

GuiNGUOLFus.  Gengoulfest  un 
saint  breton. 

Guinguoys  (De),  de  travers. 

Guisarmes,  armes  piquant  des 
des  deux  bouts. 


Gumenes,    cables   des    ancres, 

cordages  (Jal). 
GuoBELiN-  V.  FolUe. 
Guodebillaux,  tripes  de  bœufs 

gras. 
Guodetz,  gobelets. 
Guogue,  farce,  au  propre  et  au 

figuré;  boyaux;  musette. 
Guoguelu,  personnage  ridicule; 

railleur,  farceur. 
Guo/ Wronneurs,  goudronneurs. 
GuoLGOTZ  Rays.  Serait  l'amiral 

turc  Dragus  Rays. 
Guorgeriz,  gorgerins,  partie  de 

l'armure   qui   protégeait    la 

gorge. 
Guorges  (Sur  leurs),  bien  gor- 

bigés,  en  repus. 
Guorgias.  V.  Gorgias. 
Guorre  (La  Grande),  la  grande 

truie,  femme  débauchée. 
Guourneau,   gournal,    rouget. 
Guoyons^  goujons. 
Guoytrouz.  V.  Goitrou. 
GuYERCHAROis  (Le  seigneurdu), 

seigneur    de    la    Guerche, 

arr.    de    Loches ,    Indre-et- 
Loire. 
Guy    de   Flandres,    plâtre    de 

Flandre,  du  latin  gypsuin. 
GuynetteSj  espèce  de  poule. 
Gylles  (Pierre),  d'Alby,  natu- 
raliste du  XVP  siècle. 
Gymnaste,     maître    dans     les 

exercices  corporels,  du  grec. 
Gyrer^  tourner. 
Gyrognomonique ,  circulaire 
Gyromantie,  divination  par  le 

tournoiement  de  cercles. 


246 


GLOSSAIRE-INDEX 


Habaliné,  ahuri. 

Habille,  alerte. 

Hacquebuter,  hacquebutes,  ar- 
quebuser;  arquebuses. 

HacquebutierSj  porteurs  de  hac- 
quebutes, fortes  arquebuses 
qu'on  appuyait  sur  une 
fourchette  pour  les  tirer. 

Hacquelebac,  géant. 

Hagarene  (Langue),  langue 
arabe. 

Halian,  haan,  fatigue  (onoma- 
topée). 

Hailz,  ail. 

HaimSj  hameçon. 

Haire,  jeune  cerf  de  un  à  deux 
ans. 

Halcret,  cotte  de  mailles  en  fer 
forgé,  dur  habit. 

Ha/e^interjection  :  courage!  va! 

Hali  Abbas,  médecin  persan 
du  X^  siècle. 

Halleboter,  grappiller. 

Hallebrené,  harassé  ;  languis- 
sant ;  qui  a  perdu  des  plu- 
mes; mal  étrillé,  mal  pei- 
gné. 

Halot,  cercle  autour  de  la  lune, 
annonçant  la  pluie. 

Hanicroches,  crochets. 

HanicrochemenSj  embarras,  em- 
pêchements, obstacles. 

HanebanCj  hannebane,  jusquia- 
me  noire. 

Hannuiers,  habitants  du  Hai- 
naut. 

Hanttr,  enter,   greffer. 

Hapelopins,    preneurs  de  bons 

morceaux. 
Happelourdc,     pierre     fausse; 


tromperie. 

Happemousche,  géant. 

Happesouppes,  cuillers  à  pren- 
dre la  soupe  dans  le  bouil- 
lon. 

Haraniers,  mangeurs  de  ha- 
rengs fumés. 

Harborins,  pensées. 

Hardeau,  grand  et  mince. 

Harpailleur,  gueux  des  campa- 
gnes (Nicot;. 

Harry  bourriquet ja\\on%,  bourri 
que. 

Hasch,  ehasch,  grenhenhasch, 
onomatopée  de  la  toux. 

Haschantj  fendant  l'air. 

Hastereaux,  brochette  de  mor- 
ceaux de  foie  et  de  lard  al- 
ternés. 

Hastille,  abats,  entrailles  de 
porc. 

Haubdon,  houblon. 

Haulser  le  temps,  boire  (Littré). 

Haultechaussade  (M.),  auteur 
inventé  par    Rabelais. 

Haultelissiers ,  tapissiers  de 
haute  lisse. 

H.ivetz,  crochets. 

Hayre,  supplice,  haire. 

Hayt  (De   bon).  V.  De  hayt. 

Hayte  (Qui  plus  leur),  qui  leur 
convient  le  mieux. 

Hé  paovret  iou  te  esquinerio... 

Voici  la  traduction  de  M.  Bur- 
gaux  :  «  Hé  !  malheureux  ! 
je  t'éreinterais,  maintenant 
que  je  suis  bien  reposé.  Va- 
t'en  un  peu  dormir  comme 
moi  ;  après  cela  nous  nous 
battrons.» 


GLOSSAIRE-INDEX 


247 


Heaulme,  barre  du  gouvernail. 

Hchdomades,  semaines . 

HÉBRARD  de  Béthune,  auteur 
du  Grsecismus. 

Hebrus,  fleuve  de  Thrace. 

Hecale,  vieille  femme  de  l'At- 
tique  dévouée   à  Thésée. 

Hectique,  étique. 

Hegronneaux,  petits  hérons. 

Hélène,  météore,  feu  Sainl- 
Elme. 

Helepolides,  machines  de  siège. 

Heliodorus  ,  mathématicien 
grec  du  11^  siècle. 

Helxine,  pariétaire. 

Hemicraines,  migraines,  du 
grec. 

Hemiole,  nombre  qui  contient 
un  nombre  plus  la  moitié 
de  ce  nombre. 

Henilles,  contes. 

Henricus,  monnaie  d'or  de 
Henri  II. 

Heouses,  yeuses,  chênes  verts. 

Heptaphone,  à  sept  voix,  por- 
tique d'Olympie  où  un  écho 
répétait  sept  fois  un  mot. 

Her,  Hers,  monsieur,  mes- 
sieurs. 

Her  der  Tyfel,  Teufel,  M.  le 
diable,  en  allemand. 

Heraclides,  architecte  né  à 
Tarente, 

Heracleotain,  d'Héraclée. 

Heraclitus,  Heraclite  l'obscur, 
philosophe  grec;  vivait  cinq 
cents  ans  avant  J.-C. 

Herbault,  personnification  de 
l'indigence. 

Herbe  aux  charpentiers,  achil- 


lée  millefeuilles. 

Herbée,  couchée  dans  l'herbe. 

Herberger,  demeurer. 

Herbiers,  botanistes. 

Hercules  gaulloys  ;  il  sédui- 
sait par  son  éloquence. 

Hergneux,  qui  a  une  hernie. 

Herm,  île  de  l'archipel  anglo- 
normand. 

Hermès  Trismegistus,  Mercure 
trois  fois  très-grand.  Un 
Grec  néo-platonicien  a 
écrit  sous  ce  nom. 

Hermodactyles,  tubercules  d'un 
blanc  jaunâtre  au  dehors, 
blanc  au  dedans,  ressem- 
blant aux  bulbes  du  colchi- 
que. On  les  attribue  au  col- 
chicuni  variegatum. 

Hermolaus  Barbarus,  savant 
vénitien  du  XV^  siècle. 

Herophilus,  Hérophile,  méde- 
cin grec;  vivait  en  820 
avant  J.-C. 

Herper,  ramper. 

Herpe,  harpe. 

Herselez,  habitués  à  discuter. 

Hersoir,  hier  soir. 

Herte,  guet. 

Hervé,  de  Porzmoguer,  célè- 
bre marin  breton. 

Hesdin,  musicien. 

Hespailliers,  hespaliers,  ra- 
meurs. 

Hesperie  (Tour),  tour  du  Cou- 
chant. 

Hesperus,  Vesper,  l'étoile  du 
soir. 

Heur,  bonheur,  bonne  chance. 

Heurt,   attaque.   V.   Hourd   et 


248 


GLOSSAIRE-INDEX 


Hurte. 

Heurteur,  musicien  touran- 
geau du  XVP  siècle. 

HiBERNiE,   Irlande. 

Hieracia,  piloselle,  oreille  de 
souris. 

Hillot,  mon  fils,  en  gascon. 

Himantopodes,  qui  marchent 
comme  des  serpents,  du 
grec. 

HiPPES,  Hippone. 

HiPPOLYTUs,  jurisconsulte  ita- 
lien. 

HiPPONAX,  poète  satirique  grec. 

HiPPOTHADÉE.  Serait  Guillaume 
Pavie,  docteur  en  Sorbonne. 

HiPPOTHADÉE,  compagnon  He 
Pantagruel.  Ce  nom  signi- 
fie apôtre  à  cheval,  du  grec.. 

Hippuris,  prêle,  queue  de  che- 
val. 

HiRCANE  (Mer),  partie  de  la 
mer  Caspienne. 

HiRCus  ou  Œnopion,  fils  d'A- 
pollon, qui  eut  un  fils  sans 
femme:  c'est  Orion. 

Hobin,  allure  du  bidet. 

HoBRETHZ,  Jacques  Hobrecht, 
musicien  hollandais  du  XV« 
siècle. 

HocsTRATEM    (  Jacobus  ) .     V. 

HOOGSTRATEM. 

Hxmorrutts,   hémorrhoïdes. 

Hoguines,  parties  de  l'armure 
entre  le  corps  et  les  jam- 
bes. 

Holos,  hélas  ! 

HoMMEFLEUR,  Honflcur. 

Homocentricalenunt,  autour  du 
même  centre. 


Hondrespondres,  hommes  pe- 
sant cent  livres,  hundred 
pounds. 

HooGSTRATEN  (Jacobus)^  jaco- 
bin  brabançon  du  XVl**  siè- 
cle. 

Horche,  bâbord,  la  gauche 
du  navire,  de  l'italien  orza. 

Hord,  hordous,  sale. 

HoRDOux  (Maistre),  gras,  cou- 
vert de  graisse  ,  le  chef  des 
cuisiniers. 

Hoschepoi,  pot-pourri. 

Hostarde,  outarde. 

Hostiatement,  à  la  porte  des 
maisons. 

Houltaige,  otage. 

Hourdj  hoart,  bataille,  choc, 
attaque,  coup.  V.  Hturt  et 
Hurte. 

Housé,  houzé,  botté,  crotté. 

Houseaux,  houztaulx,  hautes 
guêtres  en  cuir,  sans  pieds, 
qui  protégeaient  les  jambes 
contre  la  crotte. 

Housée  de  pluye,  une  battue 
de  pluie,  une  forte  ondée. 

Houssepailleur,  houssepaillier, 
marmiton. 

Houst,  houx. 

Houster,  ôter.  enlever,  déro- 
ber. 

Hugrement,  rudement. 

HuGUTio,  Hugutius,  auteur 
d'une  grammaire. 

Huillier,  marchand  d'huile. 

Humer,  boire  à  grand'lampée  ; 
hunierie. 

Hurneux,  buveur. 

HuMEVESNE   (Le  seigneur  de), 


GLOSSAIRE-INDEX 


249 


de  aspire-vesse. 
HuoN  DE  Bordeaux,  héros   de 

roman. 
Hurte,  heurt,  coup. 
HuRTALY,   géant  contemporain 

du   déluge. 
Hurtis,  hurtys,  le   heurtement, 

le  choc. 
Huscher  en  paulme,  crier  dans 

ses  mains. 
HussÉ,  Houssay,  arr.    de  Ven- 
dôme, Loir-et-Cher? 
Hutaudeaux,  chapons. 
Huy,  aujourd'hui. 
HuymeSj  Huismes,  arr.  de  Chi- 

non,   Indre-et-Loire. 
Hydrargyre,  mercure,  métal. 
Hydries,  pots  à  eau. 
Hydromantiej     divination    par 

l'eau. 
HymantopodeSj  qui  a  les  pieds 

en  forme  de  courroies. 
Hyoscyame,  jusquiame. 
Eypencmkn,  venteux,  du  grec. 

littéralement  :  sous-vent. 
Hypocritique,  feinte. 
Hypogée,  souterrain,   du  grec. 
Hypophetes,    qui    parlent    des 

choses  passées,  du  grec. 
HyposargueSj  hydropiques. 
Hypostases,   sédiments    d'acide 

urique. 

lambicque,    genre  de  danse. 

Ibices,  boucs  sauvages. 

Ihides,  ibis. 

ICAROMENiPPE,  le  philosophe 
Ménippe,  ainsi  surnommé 
par  Lucien  pour  avoir  voulu 
se  faire  des  ailes. 


ICARUS,  père  d'Erigone.  C'est 
sa  chienne  Méra,  et  non 
son  chien,  qui  devint  la 
constellation  qu'on  appela 
la  Canicule. 

IcELON,   ministre  du  Sommeil. 

Ichthyomancie,  divination  par 
les  poissons, 

Icosimyxe  (lanterne),  lanterne 
à  vingt  becs,  du  grec. 

Idée,  image,  du  grec. 

IdoiiHj  propre  à,  approprié  à, 
du  lat.  idoneus.  V.  Ydoine. 

Ignave,  lâche,  du  lat    ignavus. 

Il,  lui. 

Illucescer,  briller. 

Image,  cachet  (Burgaud). 

Immutation,  changement. 

Imola,  jurisconsulte  italien. 

Impendente,  très-prochaine. 

Imperit,  inhabile,  ignorant,  du 
lat.  imperitus. 

Impétrer,  obtenir. 

Impotence,  Impotent,  impuis- 
sance, impuissant. 

Impotentes,  qui  ôtent  les  forces. 

Impropere,  honte. 

Incaguant,  souillant. 

Incautement,  imprudemment. 

Incentricquer,  concentrer. 

Inclyte,  illustre. 

Inconsumptible,  incombustible. 

Incornifistibuler,  faire  entrer. 

Inculquer,  enfoncer. 

Indagn^,  grossier,  impuissant. 

Indalgos,  idalgos. 

Indemnez,  francs  de  droits. 

Indice  (Doigt),  l'index. 

Indicque,  indienne. 

Indie,  Inde. 

32 


5o 


GLOSSAIRE-INDEX 


Inertes  (Maistres)  ,   maîtres  es 

arts,  in  artibus. 
Infauste,  néfaste. 
Infinable,  infini. 
Infractions,  déchirements. 
Infringibk,     qu'on     ne    peut 

rompre. 
Ingénieux,  ingénieurs. 
Inhiber,  défendre. 
Inian,  juron. 

Inigo  'Frai),  Ignace  de  Loyola. 
Initians,   commençants. 
Inquinamens,   souillures. 
Insculpé,   sculpté,  gravé. 
Inse,   verbe  à  l'impér.,  hisse. 
Insail,   drisse  qui  sert  à  hisser 

les  voiles  (Jal). 
Instablée,   établie,   installée. 
Instant,   exigeant,  pressant. 
Instaurateurs,        rétablisseurs, 

restaurateurs. 
Instauré,     rétabli,     renouvelé, 

restitué. 
Instituer,  instruire. 
Instrophiez,   entremêlés. 
Instruez,  impér.,  instruisez. 
Instrument,  matériel. 
Intendictz,  relation  de  faits  dont 

on  doit  faire  la  preuve. 
Intentement,  avec  attention. 
Intenter,  tenter. 
Intention,  tension  d'esprit. 
Interbastez,  piqués. 
Interestz,  dommages. 
Interinées,  achevées,  parfaites. 
Interminée,    appliquée. 
Internition,  entre-tuerie. 
Intrade,  rente,  revenu,  del'it. 

intrata. 
Intrans,   délégués  des  facultés. 


Intrinquées,  embrouillées. 

Inviser,  visiter. 

lo,  je,  moi,  italien. 

Iota  (Un),  le  moins  possible; 
l'iota  est  la  plus  petite  des 
lettres  grecques. 

lo  ti  ringratio,  bel  messere... 
«  Je  te  remercie,  beau  sei- 
gneur; ainsi  faisant,  tu  me 
as  espargné  le  coiit  d'un 
cly stère.  « 

Irrision,  moquerie,  dérision. 

Irrorant,  mouillant. 

Irus,  mendiant,  dans  l'Odyssée. 

IsABELLA,  ville  des  Canaries. 

7sc/ue,  sciatique,  du  grec. 

Ischiatiques.  V.  Isciatiques. 

Ischies,  hanches,  du  grec. 

Isciatique,  goutte,  rhumatisme 
sciatique  ;  Isciatiques,  nerfs 
sciatiques. 

Isiaces,  Isiaques,  prêtres  vêtus 
de  blanc,  prêtres  d'Isis. 

ISLE-BOUCARD,     ISLE-BOUCHART, 

arr.  de  Chinon,  Indre-et- 
Loire. 

Isthme,  orifice  qui  fait  com- 
muniquer la  cavité  buccale 
avec  le  pharynx. 

Ithybole,  homme  bien  fait, 
droit,  du  grec. 

Ithymbons,  danses  bachiques. 

Ithyphalle,  image  sacrée  du 
phallus  en  érection. 

Itys,  changée  en  oiseau  par 
Jupiter. 

lynges,  philtres,  charmes,  du 
grec. 

Jacquemart,  marteau  de  potte, 


GLOSSAIRE-INDEX 


25 


d'horloge. 

Jacques  Bonshoms,  paysans. 

Jacquet  Bercan,  Jacques  ou 
Giachetto  Berchèm,  musi- 
cien flamand  du  XVI^  siècle. 

Jadauiz,  Jadaux,  paniers^ 
écuelles. 

Jadeau  de.  VergnCj  écuelle  de 
bois. 

Jalousie,  balustrade  qui  fer- 
mait la  galère  à  la  poupe. 
(Jal). 

Jambe-torte,  épithète  de  Vul- 
cain,  qui  était  boiteux. 

Jambet  (Le  curé  de),  Rabe- 
lais lui-même. 

Jamblicque,  philosophe  du  IV*^ 
siècle. 

Jambus,  qui  ont  de  grandes 
jambes, 

Jan,  terme  de  trictrac. 

Janequin,  Clément  Jannequin, 
musicien  du  XVI^  siècle. 

JanspilV hommes,  variante  plai- 
sante de  gentilshommes. 

Japhes,  Jaffa. 

Jargonner,  Jargonnoys,  balbu- 
tier ;  les  premiers  mots  d'un 
enfant. 

Jartier,  jarretière. 

Jason,  Giasone  del  Maïno, 
jurisconsulte  italien  du  XV^ 
siècle. 

Jau,  coq. 

Jaulne  et  verd  (livrée  de),  livrée 
des  fous  au  moyen  âge. 

Javart,  maladie   des  chevaux. 

Javotin,  ou  Jacotin,  musicien 
français. 

Jazeran,   jaseron,    chaîne  d'or 


à  fins  anneaux. 

Jazerans,  cottes  à  très-petites 
mailles. 

Jecabots,  abstractions. 

Jects,  Jectz,  lanières  de  cuir 
qu'on  attachait  aux  pattes 
des  oiseaux  de  chasse,  du 
lat.  jacti. 

Jectigaiion,  remuement  ner- 
veux, mouvement  convulsif. 

Jejiine,  à  jeun. 

Joan  (Seigny),  le  seigneur 
Jean,   fou  du  XIV^  siècle. 

JoBELiN  Bridé,  nom  forgé  par 
Rabelais,  avec  le  sens  de 
niais,  nigaud. 

Joncades,  petites  crèmes  parfu- 
mées. 

JosQuiN  DES  Prez,  musicien 
français  du  XV^  siècle. 

Joussaulme  (Guillaume),  le 
marchand  de  drap  dans 
Pathelin. 

Jouste,  Jouxte,  près  de,  au- 
près de;  suivant,  conformé- 
ment à. 

Jovetian,  Jovial,  de  Jupiter. 

Jovio  (Paulo),  Paul  Jove,  his- 
torien et  géographe  du  XVF 
siècle. 

Joyeulx,  bouffon  de  roi. 

Jubés,  crinières. 

Jules  second,  le  pape  Jules  TI, 
qui  fut  en  guerre  avec 
Louis  XII. 

Jumelles,  deux  pièces  de  bois 
pareilles  dans    un  pressoir. 

Jupiter-Philios,  Jupiter  protec- 
teur de  l'amitié. 

Jupiter  Pierre,   le  pape,  suc- 


GLOSSAIRE-INDEX 


cesseur  de  saint  Pierre. 
Jus,  à  bas. 

KiMY,  David  Kimchi,  rabbin, 
commentateur  de  la  Bible, 
des  XIF  et  XIIF  siècles. 

Kyne,  chien,  du  grec. 

Kyrielles,  Kyrie,  oraisons. 

La  Basmette,  abbaye  près  d'An- 
gers. 

Labeo  (Antistius),  jurisconsulte 
romain. 

Labeurer,  travailler. 

Lachrima  -  Christi ,  larme  du 
Christ,  nomd'un  vin  célèbre 
récolté  au  bas  du  Vésuve. 

Lactantius  (Firmianus),  auteur 
latin  du  III^  siècle. 

La  FayeMoniau.  La  Foye  Mon- 
jault,  arr.  de  Niort,  Deux- 
Sèvres. 

Ladres,  lépreux. 

Lagona  edatera,  en  basque,  ca- 
marade à  boire. 

Laicter,  teter. 

Laignel(Co1  de),cold'Agnello, 
au  pied  du  mont  Viso? 

Laise  (Grande),  grande  mesure. 

Laissas  aquaio ,  en  limousin, 
laissez  cela. 

Laisse,  fiente  de  bête  sauvage. 

Laize,  largeur. 

Lamah  hazabthani ,  derniers 
mots  du  Christ  sur  la  croix. 

Lamballe,  ville  de  l'arr.  de 
Saint  -  Brieuc  ,  Côtes- du- 
Nord,  renommée  pour  son 
parchemin. 

Lamies,    sorcières   représentées 


avec  une  tête  de  femme  et 
un  corps  de  serpent. 

La  Motte,  arr.  de  Melle, Deux- 
Sèvres. 

Lamines,  armures  formées  de 
lames  imbriquées. 

Lampreons,  lamproies. 

ia/jcepesarfes^anspessades, sous- 
officiers. 

Lanciz,  foudre, 

Lancy,  esquinancie. 

Landerousse,  nom  de  lieu  forgé 
par  Rabelais. 

Landier,  grand  chenet. 

Landores,  Landorez,  endormis. 

Landrivelj  andrivel,  gros  cor- 
dage (Jal). 

Laneret,  oiseau  de  proie. 

Lanes,  landes. 

Lango,  nom  moderne  de  l'île 
de  Cos,  où  naquit  Hippo- 
crate. 

Langrauff  d'Esse,  le  Landgrave 
de  Hesse. 

Langres,  chef-lieu  d'arrond., 
Haute-Marne. 

Languegoth,  le  Languedoc. 

Langues,  nations. 

Lanier,  espèce  de  faucon. 

Laniftcque,  qui  produit  la  laine. 

Lans  tringue ,  en  allemand, 
pays,  bois  ! 

Lansquenette,  de  lansquenet. 

Lanterné,  amaigri. 

Lanternier,  marchand  de  lan- 
ternes, cafard. 

Lanier nois  (Pays  de),  pays  des 
lanternes,  des  lumières. 

Lanternoys,  langage  Imaginaire. 

La  part,  partout  où. 


GLOSSAIRE-INDEX 


53 


Lapatlïium  acutum,  ou   Lapa- 

thum,  patience  aquatique. 
Lappia,  Laponie. 
Laps,  chute. 
Larege,  mélèze. 
Larisse,  lance;  suivant  M.  Mo- 
land,  il  faudrait  lire  Sarisse. 
Larmiers,  corps  en  forte  saillie 
pour    empêcher      les    eaux 
de    couler     le     long     d'un 
mur. 
La  Roche  Clermauld,  arr.  de 

Chinon,  Indre-et-Loire. 
Larrix,  mélèze. 
Lasanon,    Lazanon,   bassin   de 

chaise  percée. 
Lasanophore ,  porteur  de  lasa- 

non,  du  grec. 
Lascaris,  érudit  grec  contem- 
porain et  ami  de  Rabelais. 
Lassez,  croisés. 
Lassas,  là-dessus,  là-haut. 
Late,  largeur. 
Latial,  latin. 
Latinicome ,  latin. 
Latrialement ,    avec    culte    de 

latrie. 
Latrie,  culte  d'adoration  qu'on 

doit  à  Dieu. 
Laurence   (Tante),    tante   du 

drapier  dans  Pathelin. 
Laurette    (Notre-Dame   de), 

près  d'Angers. 
Laurezay  ou  Jaurezay,  village 

du  Poitou. 
Lavailies,  eaux  de  vaisselle. 
Lavedan,  cheval  du  pays  de  ce 

nom,  en  Bigorre. 
Layz,  frères  lais. 
Léans,  céans,  ici,  là. 


Lecanoniantie,  divination  par 
la  vue  d'une  image  dans  un 
vase  d'eau. 

Lectieres,  litières. 

Legugé, monastère  aux  environs 
de  Poitiers. 

Leive  (Anthoine  de),  général 
de  Charles-Quint. 

Lelapes,  tempêtes,  du  grec. 

Le  Maire  (Jean),  poëte  et  his- 
torien, de  Belges  en  Hainaut. 

Lemovicque,  limousin. 

Lémures,  esprits  du  mal  ;  âmes 
des  morts. 

Lendole.  V.  Dar. 

Lenou  (Notre- Dame -de -la-), 
entre  Chinon  et   Richelieu. 

Lentisce,  lentisque. 

Léon,  lion. 

Leonicus,  auteur  vénitien  du 
XVP  siècle. 

Leonides,  poëte  grec  de  ['An- 
thologie. 

Lernb,  arr.  de  Chinon,  Indre- 
et-Loire. 

Leschars,  gourmands. 

Leschart,  avare. 

Lesche,  partie. 

Letrain,  lutrin. 

Leuce,  blanc. 

Leurier,  laurier. 

Leurre,  morceau  de  cuir  qui 
servait  à  rappeler  les  faucons. 

Le  Veneur-Carrouges  (Jean), 
évêque  de  Lisieux,  fait  car- 
dinal en  I  533,  gastronome. 

Lever  guerre,  faire  la  guerre. 

Lexif,  suc  blanc  du  figuier. 

Lez,  proche  de,  le  long  de. 

Lheritier  ,    musicien    français 


:54 


GLOSSAIRE-INDEX 


du  XVie  siècle. 

Libanomantie ,  divination  par 
l'encens. 

Libentissiment,  de  très-bon  gré. 

Libères  (Personnes),  de  condi- 
tion libre,  non  serves. 

Librairie,  bibliothèque. 

Libiirnicques,  petits  navires  à 
marche  rapide. 

Licence,  autorisation. 

Licentier,  donner  licence,  per- 
mettre. 

Lichecasse,  lécheur  de  casse... 
La  casse  serait  le  vase  qu'on 
met  sous  le  rôti  pour  en 
recevoir  le  jus?   Marmiton. 

Lifreloffres,  ignorants  ;  grands 
buveurs. 

Lignade  (Faire),  faire^  prendre 
du  bois. 

Ligneare  (En  forme),  en  forme 
de  potence  ;  marche  des  ca- 
valiers aux  échecs  (Burgaud). 

LiGRE,  Ligré,  arr.  de  Chinon, 
Indre-et-Loire. 

Liguombeau,  Bernard  l'hermite, 
crustacé. 

LiGUSTiQUE  (La  mer),  le  golfe 
de  Gênes. 

Limacial,  de  limace. 

Limessourdes,  gens  en  dessous. 

LiMOUs,  Limoux,  Aude. 

Linceux ,  pluriel  de  linceul, 
draps  de  lit. 

Linostolies,  robes  de  lin,  du 
grec. 

LiPARA,  aujourd'hui  Lipari,  îles 
Éoliennes. 

Lipothymie  défaillance,  éva- 
nouissement, du  grec. 


Lippée,  bouchée,  repas  de  bons 
morceaux. 

Liron,  loir. 

Lithontripon,  casse-pierre,  du 
grec. 

Livesche ,  livêche,  ache  des 
montagnes. 

Livier,  levier. 

Livrée  à  une  noce,  rubans  aux 
couleurs  de  la  mariée,  que 
les  invités  se  partagent  et 
portent. 

Liz,  lisse,  poli. 

Lizart,  lézard. 

Lize,  compacte. 

Lo,   lof,  vent. 

Locale,  poche. 

Locupkter,  enrichir. 

Locustes,  sauterelles. 

Lodier,  courte-pointe. 

LoGROiNE,  Logrono,  en  Espa- 
gne? 

LoNGYS,  géant. 

Lopiner,  mettre  en  menus  mor- 
ceaux ;  examiner  en  détail  ; 
goûter,  faire  une   collation. 

Loppin,  morceau  ;  on  dit  encore 
un  lopin  de  terre. 

Loqueteux,  en  loques,  dégue- 
nillé. 

Los,  louange. 

Lourche,  sorte  de  jeu. 

Louschetz,  louchetz,  serait  une 
étoffe  de  laine. 

Lourdoys ,  lourdeau.  A  mon 
lourdoys,  h  ma  façon  ,  naï- 
vement. 

Lourpidor} ,  y'ieWle  au  pied  bot, 
dont  la  rencontre  est  de 
mauvais  augure. 


GLOSSAIRE-INDEX 


255 


LouzEFOUGEROusE,  La  Loge- 
Fougereuse,  arr.  de  Fonte- 
nay-le-Comte,  Vendée. 

Loyer  consigné ,  récompense 
assurée. 

LoYSET,  musicien  du  XV^ siècle. 

Lubin  (Frère),  un  moine. 

Lubine^  espèce  de  bar,  poisson. 

Luc,  luth. 

Lucestre  (Balles  de),  balles  de 
Leicester? 

Lucifer,  Tétoile  porte-lumière, 
la  planète  de  Vénus. 

Lucifuges,  qui  fuient  la  lumière. 

Lucullian  (Marbre),  marbre 
tiré  de  l'île  de  Milo,  très- 
employé  par  Lucullus. 

Ludificatoyres,  trompeurs. 

Luettes,  jeu  de  cartes  du  Poitou. 

LuGA,  ville  d'Asie. 

LuLLE, LuLLius, Raymond  LuUe, 
alchimiste  du  XIIl»  siècle. 

Lunaria  major,  lunaire,  herbe 
à  la  lune. 

Lunettes  des  Princes,  Recueil  de 
vers  de  Jean  Meschinot, 
poëte  du  XV®  siècle. 

Lupi,  musicien. 

LusiGNAN,  arrond.  de  Poitiers, 
Vienne. 

Lussonnoys,\e  diocèse  de  Luçon. 

Luter,  joindre. 

Lutz,  petits  navires. 

Lybistides,  de  Libye. 

Lycambe.  Se  pendit  à  cause  de 
vers  qu'Archiloque  avait  faits 
contre  lui. 

Lycaon,  animal  fantastique  dont 
parle  Pline. 

Lychaon  patepelu,  que  Jupiter 


changea  en  loup  après  avoir 
séduit  sa  fille. 

Lychnion,  mèche  de  lampe,  du 
grec. 

Lychnobiens,  peuple  vivant  de 
lanternes  ou  de  phares, 
comme  le  dit  le  texte. 

Lycisque  orgoose,  chienne  en 
chaleur. 

Lycoptalmie,  œil  de  loup,  pierre 
dure. 

Lycus,  tyran  de  Thèbes,  qui 
voulut  séduire  Mégare. 

Lye  (Chère),  vie  joyeuse. 

Lyra  (Nicolas  de),  juif  con- 
verti du  XIV®  siècle,  domi- 
nicain, commentateur  de  la 
Bible. 

Lyripipié,  en  forme  de  bonnet 
doctoral. 

Lyripipion,  chaperon  des  doc- 
teurs de  Sorbonne. 

Lysidices,  nom  grec  emprunté 
à  V Anthologie. 

Ma  dia,  juron  :  Non,  par  Jupi- 
ter? 

Mabrun,  géant. 

Macé  Pelosse  (Frère),  moine 
de  la  fabrique  de  Rabelais. 

Macle,  macre,  châtaigne  d'eau. 

Macrxons,  ou  Macreons,  gens 
qui  vivent  longuement,  du 
grec. 

Macrobe,  à  longue  vie,  du  grec. 

Madourré,  fainéant;  maladroit. 

Magdaleon  d'entraict,  masse 
emplastique  maniée  entre 
les  mains. 

Magdeleine  (La),  cabaret  pari- 


56 


GLOSSAIRE-INDEX 


sien. 

Mage, ad).,  plus  grande,  major. 

Magnigoule,  grande  gueule. 

Magotz,  géants. 

Maguelet  (Huille  de),  huile 
tirée  des  semences  du  cera- 
sus  mahaleb. 

Mahom,  Mahon,   Mahomet. 

Maignans,  vers  à  soie. 

Maigre,  nom  de  la  sèche  sur 
les  côtes  de  Saintonge. 

Maillard  (Olivier),  frère  mi- 
neur, prédicat.  deLouisXI, 
célèbre  par  la  singularité 
de  ses  sermons. 

Maillart,  musicien. 

Maille,  musicien. 

Maille,  monnaie  valant  un 
demi-denier. 

Maillezays,  Mailiezais,  arr. 
de  Fontenay-le-Comte,  Ven- 
dée. 

Mailly  le  Borgne,  commissaire 
de  l'artillerie. 

Maiorici,  de  la  maison  de  Du 
Bellay. 

Maison  du  Ciel,  constellations 
sous  lesquelles  un  person- 
nage est  né. 

Maistral,  mistral,  vent  du 
N.  O. 

Maistralle,  grande  voile  (Jai), 

Majeurs,  Majores,  ancêtres  ; 
plus  âgés. 

Major  (Jean),  contemporain 
de  Rabelais,  principal  du 
collège  de  Montaigu. 

Malader-je,  maladrerie. 

Malandré,  lépreux. 

Malchus,  Malcus,   l'épée  avec 


laquelle  saint  Pierre  coupa 
l'oreille  à  Malchus. 

Maie  guarde,  mégarde. 

Maie  heure  (En  la),  par  mal- 
heur. 

Maies,  malles,  coffres,  bagages. 

Maléfique,  porte-malheur. 

Malengroin,   mauvais  vouloir. 

Maies  mules,  engelures  au 
talon,  engelures  d'un  mau- 
vais  caractère. 

Malesuade,-  mauvaise  conseil- 
lère. 

Maleites,  maillettes,  œillets  où 
passent  les  cordes  des  voiles. 

Malivole,  de  mauvaises  inten- 
tions, qui  veut  du  mal, 
malveillant. 

Malogranatum,  pomme  de 
grenade,  fruit  du  grenadier. 

Mal  Sainct  Eutrope,  maladie 
épidémique,  sorte  de  peste. 

Malvedis,  niaravédis,  monnaie 
espagnole. 

Mal  vouluz,  ceux  à  qui  on 
veut  du  mal. 

Mammallement ,  adverbe  forgé 
avec  le  mot  mammelle. 

Mammone,  le  démon  des  ri- 
chesses. 

Manche,  pourboire,  gratifica- 
tion, de  l'ital.  manda. 

Manche  de  la  paroece,  le  clo- 
cher de  l'église. 

Manchicourt,  musicien  du 
XVF  siècle. 

Manchons,  manchettes. 

Mancipée,  prise  en  possession. 

Mancippe,  esclave. 

Mandés  (Ile  de),    ile  dont  les 


GLOSSAIRE-INDEX 


5' 


femmes  adoraient  Pan  et  le 
bouc. 
Mandousianes,  épées  larges. 
Mandragore;  passait  non-seule- 
ment   pour   antiaphrodisia- 
que, mais  encore  jouait  un 
grand  rôle  dans  les  sortilèges. 
Manduce,   en  lat.  Manducus, 
espèce    de    Croquemitaine, 
de  tnanducare,  manger. 
Manequins,  ornement  en  forme 

de  panier  plein  de  fleurs. 
Manillier,  marguillier. 
Maquerelle  (Isle),  île  dans  la 
Seine,  en  bas   de  Paris,  qui 
s'est  depuis  appelée  l'île  des 
Cygnes,  et    qui   a    fini    par 
être  réunie  à  la  rive  gauche. 
Marais  (Charles),  médecin  de 
Lyon,      contemporain      de 
Rabelais. 
Marault,   musicien. 
Marc  Paule,  Vénitien,  Marco 
Polo,     voyageur    du    XIII^ 
siècle. 
Marcellus  (Donatus),    méde- 
cin du  XVF  siècle. 
Marcellus  Empiricus,  médecin 

du  IVe  siècle. 
Marché    vieulx,    village     du 

Chinonnais. 
Marchettes,  touches  d'un   cla- 
vier. 
Marchez,    Marques,     dizaines 

d'un  chapelet. 
Marforio,    restes   en  marbre 
d'une    statue    de   fleuve    à 
Rome,  sur  laquelle  on  affi- 
chait des  épigrammes. 
Marguerite,     perle,     du     lat. 

Rabelais.  V. 


margarita. 
Marlottes,  mantelets  d'été. 
Marmiteux,  mendiants  piteux. 
Marmotret,  Mammotrectus,  ti- 
tre  d'un  Abrégé  de  morale 
à  l'usage  des  écoliers. 
Marotus  du  Lac,  auteur  de  la 

fabrique  de   Rabelais. 
Marpault,  palefrenier. 
Marpesian  (Le  roc),  le  mont 
Marpesus,     dans     l'île     de 
Paros. 
Marques,  V.  Marchez. 
Marrabais,   marrabeise,  rené- 
gat, mauresque. 
Marrane,   mécréant. 
Marranisés,  infidèles,    impies. 
Marres,     Mar  roches,    Marro- 
chons,     binettes,     pioches, 
outils  de  jardinage. 
Marsupies,  bourses. 
Martin  de   Cambray,    le    ja- 
quemart    de    l'horloge     de 
Cambrai. 
Martiner,  boire  comme  on  boit 

à  la  Saint-Martin. 
Martingualle    (Chausses  àla\ 
chausses    dont    le    derrière 
s'abattait;  on  en  fait  encore 
aux  petits  garçons. 
Mas,  pièce  de  terre. 
Mascarer,  barbouiller. 
Maschefain,  géant. 
Maschefains,    insatiables. 
Mascherable,       mangeur      de 

raves. 
Massiteres      pétrisseurs,      mâ- 

cheurs. 
Massorethz,  interprètes  et  glos- 
sateurs  de   l'Ancien  Testa - 

33 


i58 


GLOSSAIRE-INDEX 


ment. 

Massuau  (Claude),  traducteur  ; 
faisait  partie  de  la  maison  de 
Guillaume  du  Bellay. 

MASUEL;serait  Claude  Massuau . 

Mat,  fou,  de  l'ital.  matto. 

Matabrune,  personnage  de  la 
chanson  de  geste  Le  Cheva- 
lier au  Cygne. 

Matafain,  pâte  indigeste. 

MatagotSj  vieux  drôles;  fana- 
tiques. 

Matagrabolisé,hou\eversé ,  pré- 
occupé. 

Matagraholiser,  apprendre  à 
grand'peine. 

Matagrabolisme,  hypocrisie. 

Mateologiens,  qui  font  des  dis- 
cours mutiles,  du  grec. 

Mateotechnie,  étude  d'une 
science  inutile,  du  grec. 

Matraz,  trait  d'arbalète;  ma- 
telas. 

Matute,  du  matin. 

Mau  de  pipe  vous  byre,  gascon: 
le  mal  de  tonneau  vous 
retourne. 

Mau  de  terre,  mal  de  terre, 
épilepsie. 

Maugis,  enchanteur  dans  les 
Quatre  Fils  Aymon. 

Maugré,  malgré. 

Maujoin,  par  opposition  à  ben- 
join. 

Maujoinct,  mal  joint. 

Maulevrier  le  Boyteux  ,  le 
mari  de  Diane  de  Poitiers, 
Louis  de  Brézé,  comte  de 
Maulevrier. 

Maulgouvert,    se     gouvernant 


Maulubec  (gascon),  ulcère,  mal 
de  jambe. 

Maulvys,  mauviettes. 

Maumusson,  arr.  d'Ancenis, 
Loire-Inférieure. 

Maunettes,  mal  nettes,  sale;. 

Maydenbourg,  Magdebourg. 

Mebins,  intelligents,  del'hébr.? 

Me^ha,  La  Mecque. 

Medamothi,  nom  d'un  pays 
imaginaire  :  aucun  lieu,  nulle 
part. 

Meden,  pays  imaginaire. 

Medere,  Madère. 

Mediastinc,  continuation  de  la 
plèvre. 

Medulare  (Os),  os  à  moelle, 
médullaire. 

MeduUes,  moelle. 

Megiste,  très-grand,  du  grec. 

Mejane,  Conire-Mejane,  voile 
d'artimon  et  de  contre-arti- 
mon (Jal). 

Mêla  (Pomponius),  géographe 
latin  du  l^'  siècle. 

Melancholier,  attrister,  fâcher. 

Melinde,  en  Afrique. 

Melli,  Meliiia,  en  Afrique. 

Mcllifîue,  douce  comme  du 
miel. 

Melze,  mélèze. 

Mémorial,  chose  qu'on  n'ou- 
blie pas. 

Memoriallement,  adverbe  de 
mémorial. 

Menades,  bacchantes  en  fureur. 

Men  cm}!,  mon  ami,  en  lorrain. 

Menthicores,  animaux  fantasti- 
ques. 


GLOSSAIRE-INDEX 


59 


Menu  (Du),  menues  volailles 
de  basse-cour. 

Menuail  (Duc  de),  duc  de  pe- 
tites gens. 

Mephitis,  déesse  du  mauvais 
air. 

Meratre,  marâtre. 

Mercuriale  (Eau),  eau  lustrale 
ou  eau  bénite. 

Merdé  (Par  la),  juron,  par  la 
Mère  de  Dieu. 

Merdigues,  juron,  Mère  de 
Dieu. 

Mere-goutte,  premier  vin  tiré 
du  pressoir. 

Meretricules,  courtisanes. 

Merluz,  Merlus,  merluche, 
morue  sèche. 

Mervant,  Mervent,  arr.  de 
Fontenay-le-Comte,  Vendée. 

Merville  (Le  Seigneur  de), 
seigneur  de  la  fabrique  de 
Rabelais. 

Mesa,  moyenne. 

Mesaraïcques  (Veines),  veines 
du  mésentère. 

Mesembrine  (  Porte  ,  Tour  ) , 
Porte,  Tour  du  midi. 

Mesescrire,  écrire  du  mal. 

Meshaing,  malechance,  insuc- 
cès ,  souffrance ,  malheur, 
chagrin,  infirmité. 

Meshaigner,  affliger,  tourmen- 
ter. 

Mesles,  Nèfles. 

Mesnagerie  (La),  de  Caton, 
l'art  du  ménage  ,  le  traité 
De  Re  rustica. 

Mesnagerie,  soins  de  la  basse- 
cour,  de  la  ferme;  écono- 


mie domestique. 

Mesoùan,  cette  année. 

Mespris,  méprise. 

Messe  seiche,  messe  dite  sans  la 
consécration. 

Mes^/Va/Z/es, fêtes  de  la  moisson. 

Mestiviers,  moissonneurs. 

Met,  la  huche  où  l'on  pétrit 
le  pain  ;  cuve  où  tombe  le 
vin  qui  découle  du  pressoir. 

Metalepsis,  métalepse  ;  d'après 
Dumarsais,  figure  par  la- 
quelle on  prend  l'antécédent 
pour  le  conséquent,  ou  le 
conséquent  pour  l'antécé- 
dent. 

Metaphrenes,  aponévrose  du 
diaphragme. 

Mete,  borne,  limite,  du  latin 
ineia. 

Melhanesiens,  habitants  de  Mé- 
thène,  près  de  Trézène. 

Metifs,  métis. 

Metopomantie,  divination  par 
les  lignes  du  front. 

Metoscopie,  aspect  du  front. 

Mètre,  vers. 

Metrodorus,  philosophe  grec. 

Meung,  arr.  d'Orléans,  Loiret  ; 
ce  sont  les  habitants  qu'on 
appelait  Asnes  de  Meung. 

Meusnier,  espèce  d'ablette. 

Meuvoir  armes,  mouvoir,  faire 
la  guerre. 

Mezarims,  médecins  des  en- 
trailles. 

Mezeaulx,  Mezeaux,  arr,  de 
Poitiers,  Vienne. 

Michelots,  Micquelots,  pèlerins; 
on  donnait  en  particulier  ce 


260 


GLOSSAIRE-INDEX 


nom  à  ceux  qui  se  rendaient 
au  mont  Saint-Micliel  ;  par- 
tisans. 

Micraines,  Migraines,  grenade 
d'artillerie. 

Microcosme,  petit  monde,  du 
grec. 

MiDY,  musicien. 

Mignotize,  gentillesse. 

Migraine,  mi-graine,  sorte  de 
teinture,  V.  Micraine. 

Miliaires  (Bornes),  mesure  ro- 
maine indiquant  un  espace 
de  1 ,000  pas. 

Millesouldiers,  soldats. 

Millet,  musicien. 

M/'/our^mylord,  monseigneur. 

Mimallones,  bacchantes. 

Mimallonides,  prêtresses  de 
Bacchus. 

Minere,  minière,  mine. 

Minorative,  minoratif,  purga- 
tif léger. 

Minot,  mesure  de  près  de  40 
litres . 

Minutait,  petite. 

Mirach,  mot  arabe,  partie  du 
ventre. 

Miraclifîque,  faiseur  de  mira- 
cles. 

Miralliers,  miroitiers. 

MlREBALAlS,     MlRABALAYS,    Mi- 

rebeau ,    arr.     de    Poitiers, 

Vienne. 
MiRELANGAULT,  géant. 
MiREVAULX,  Mireval,    arr.    de 

Montpellier,  Hérault. 
Missayr,  messire. 
Missicque,  de  la  messe. 
Mistes,  Mystes,  mystères. 


Mitouard,  matou. 
Mitouflez,  Emmitouflez,  enve- 
loppés. 
Mixarchagevas,  nom  donné  par 
lesArgiens  à  l'étoile  Castor. 

Mna  dies ,  corruption  parlée 
de  bona  dies,  bon  jour. 

Mocitelle,  hoche-queue,  passe- 
reau. 

Mocque,  Mocquette,  moquerie. 

Modal,  suivant  la  mode. 

Mode  que  (De),  de  sorte  que, 
de  façon  que. 

Moine  (Avoir  le),  être  attrapé. 
Le  moine  était  un  instru- 
ment destiné  à  réchauffer  le 
lit  en  temps  froid,  et  la 
substitution  de  la  neige  ou 
de  la  glace  au  feu,  dans  le 
moine,  était  une  plaisanterie 
très-pratiquée. 

Moine  Bailler  le),  porter  mal- 
heur. 

Moins  de  mon  plus  (Le),  le  plus 
que  je  pourrai. 

Mo/sso/?n/ers(Chevreaulx),  che- 
vreaux de  redevance. 

Molares,  molaires. 

Moler,  larguer,  4àcher  (Jal). 

Moles,  meules. 

Mo/es^e^  fâcheux,  du  latin  mo- 
lesius. 

Montions,  travaux  de  siège. 

MoUice,  mollesse,  douceur. 

Molossicque ,  genre  de  danse. 

MOMMORILLON.MONSMORILLON, 

Montmorillon,ch.-lieu  d'arr. 

de  la  Vienne. 
Monettes,  qui  avertissent. 
Mongas,  genre  de  danse. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Monochordion ,  instrument  de 
musique  à  une  seule  corde, 
du  grec. 

Monochordiser  des  doigts,  imi- 
ter le  mouvement  des  doigts 
sur  un  instrument  à  une 
seule  corde. 

Monopes,  animaux  à  un  pied, 
du  grec. 

Monopole,  contrarié. 

Mons  Jovis,  proéminence  sur 
les  doigts. 

MONSMORILLON.  V.  MOMMO- 
RILLON. 

McTNSLEHERY,  Montlhéry,  arr. 
de  Corbeil,  Seine-et-Oise. 

Monstkr^  monastère,  église. 

Monstre,  cortège,  procession. 

Monstre  (Chien  de),  chien  qui 
montre,  chien  d'arrêt. 

MoNTRiBLE  (Pont  du),  pont  du 
Mont-Terrible,  pont  imagi- 
naire. 

Mont  (A),  en  haut. 

Montaison,  se  dit  du  vin  qui 
commence  à  fermenter,  à 
monter  dans  la  cuve. 

MoNTARGENTAN,  Porto  di  Tela- 
mone,  en  Toscane. 

MoNTEViEiLLE,  héros  de  roman. 

Montigenes,  nés  dans  les  mon- 
tagnes. 

Montjoye,  entassement,  mon- 
ceau, amas. 

MoNTSOREAU,  arr.  de  Saumur, 

Maine-et-Loire. 
Morales,      musicien   espagnol 

du  XVie  siècle. 
Morcrocassebezassevezassegrig  - 
ueliguoscopapopondrilléjCon- 


tusionné,  blessé. 
Morderegrippi.piotabirofreluch- 

amburelurecoquehirintimpa- 

nemens,  coups. 
Moret,  suc  du  maurei  ou  mau- 

rette,  baie  noire  de  l'airelle 

ou  myrtille. 
Mor/îai7/€r,  manger  goulijment. 
Morguan,  Morgan,  géant. 
Morgue   (La  fée; ,    Morgane, 

sœur  d'Obéron  et  d'Artus. 
Morgue,  regard  sévère. 
Morgue  (Bonne),  bon  visage. 
Moriginer,  soumettre. 
Morisque,    danse    mauresque  ; 

Mauresque;  nom  d'une  voile. 
Morné,  émoussé  (Littré). 
Morosophe,  ïou  sage,  du  grec. 
Morpain,  musicien  du  XVI^  siè- 
cle. 
Morpiaille,  pediculus  pubis. 
Morguaguoqfuasse'jfoulé.froissé, 

blessé. 
Morrambouzevezengouzequoq  - 

uemorguatasacbacguevezine- 

maffressé,  l'œil,  poché  l'œil. 
Mort  beuf  (Par  la),  juron. 
Mort  beuf  de   boys    (Par  la), 

juron. 
Mortier,    sorte    de    bonnet    de 

magistrat. 
Mortifiez,  en  forme  de  mortier. 
Mosmerie,  mascarade. 
Mouchet,  émouchoir. 
Mouee,  une  volée,  une  quantité, 
Moufpes,  mitaines;  bouffissures. 
Moule,  Moulle  d'un  bonnet,  la 

tête. 
Moulle,  caractère  moulé,   ca- 
ractère    d'imprimerie.     On 


:62 


GLOSSAIRE-INDEX 


dit  encore  :    Il   sait   lire    la 

lettre  moulée. 
Moulinet,  petit  moulin. 
Moulu,  musicien. 
MoulueSj  morues. 
Mourions,  morions,  casques. 
Mourre,  visage. 
Mourre,  jeu   italien  où   il  faut 

dire  vite  le  nombre  de  doigts 

restés  fermés  aux  deux  mains 

de  son  adversaire. 
Mourrins,   musaraignes,   petits 

rats     mangeurs    de  blé,  du 

latin  nius,  mûris. 
MouscHE  (Maistre),  nom  d'un 

charlatan;  type  de  l'homme 

adroit. 
Mouschenez,  mouchoir. 
Mousche  bovine,  taon, 
Mouschet,  chasse-mouches. 
Moussines,   branches  de  vigne 

avec  les  raisins. 
Moust  de  vin,  vin  doux. 
Moustardier,  jeu    de   mot   sur 

moult  tardier,qui  tarde  beau- 
coup. 
Moustardois,  le  pays  de  la  mou- 
tarde. 
Moutons    à    la    grand    laine, 

monnaie  d'or  de  saint  Louis 
'à  Charles  VII. 
Mo uv ans  {Nous),  nousexcitant. 
Mouvons   (Qtie)  toute   pierre, 

que   nous  remuyions   toute 

pierre,    que   nous   essayions 

de  tout. 
Moyeux    d'eufz.     Prononcez  : 

meyeux  ;   c'est-à-dire  :   mi 

lieux,  les  jaunes. 
Moyneaux,  guérites  mobiles. 


Mucer,  Musser,  cacher. 

Mugueter,  faire  la  cour,  cour- 
tiser. 

Muguttz,  galants. 

Mules,  engelures.  V.  Maies 
mules. 

Muliebre,  de  femme. 

Muliebrité,  état  de  femme. 

Mulle  (La),  cabaret  parisien. 

Munde,  pur,  du  latin  mundus. 

MuNiCAN,  Munich? 

MuRMAULT,  peut-être  J.Mur- 
mellius,  professeur  du  XVI^ 
siècle. 

Musaffiz,  Musaphiz,  docteurs 
de  la  loi  musulmane. 

Musimones,  béliers? 

Musser.  V.  Mucer. 

Mut,  muet, 

Mutue,  mutuelle. 

Myault,  onomatopée  burles- 
que, pour  exprimer  des 
pleurs. 

Mylasea,  destinée  à  la  meule, 
farineuse. 

Myoust,  mi-août. 

My rallier,  miroitier. 

Myres,  médecins. 

Myrebeau,  Mirebeau,  arr.  de 
Poitiers,  Vienne. 

Myrelingays  en  Myrelingues, 
pays  de  la  fabrique  de  Ra- 
belais. 

Myriandres  (Naufz),  navires 
portant  dix  mille  hommes, 
du  grec. 

Myrobalans,  Myrobolans  em- 
blicz,  fruit  du  Myrobolanus 
citrina,  de  la  grosseur  d'une 
petite  olive,  et  dont  la  cou- 


GLOSSAIRE-INDEX 


263 


leur  varie  du  noir  au  jaune. 

Mysota,  myosotis,  ne  m'oubliez 
pas. 

M)is'agogf<es^prêtres, prêtresses. 

Mystes,  prêtres  initiés  aux  mys- 
tères. 

Nacelles,  vases  de  métal. 

Naïfve,  véritable,  naturelle. 

Naphe,  fleur  d'oranger. 

Naquets,  mendiants. 

Narsay,  village  du  Chinon- 
nais. 

Nasitord,  cresson  alénois. 

Nasturtium,  cresson  de  fon- 
taine. 

Natatoires,  bains  où  l'on  peut 
nager. 

Nau,  nau,  nau,  refrain  d'un 
noël  poitevin. 

Nature  quite,  anagramme  de 
Jean  Turquet,  ami  de  Rabe- 
lais. 

Nauchiers,  navigateurs, 

Naufj   navire. 

Naufz  oner  aires,  navires  de 
transport. 

Nausiclete,  célèbre  par  ses 
navires^  du  grec. 

Naute,  pilote. 

Navrer,   blesser. 

Nays,  Nesde?  arr.de  Poitiers, 
Vienne. 

Nazardes,  coups  sur  le  nez. 

Nazarder,  taper  sur  le  nez. 

Nazdecabre,  nez  de  chèvre. 

Neares,    animaux  fantastiques. 

Nearins,  nom  hébreu  (?)  d'un 
serviteur  de  la  Quinte. 

Nebulon,    mauvais  garnement, 


du  latin  nebulo. 
Necromantie,     divination     par 

l'évocation  d'un  mort. 
Nedibins,   serviteurs,  de    l'hé- 
breu ? 
Neemanins,   puissants,  de  l'hé- 
breu? 

Nercins,  adolescents,  de  l'hé- 
breu ? 

Nemains,  serviteurs,  de  l'hé- 
breu? 

Nembroth,  Nemrod,  géant. 

Nephelibates,  peuple  qui  mar- 
che au  milieu  des  nuages, 
du  grec. 

Nephrocatarticon,  qui  dégage 
les  reins,  du  grec. 

Neric,  Néris,  arr.  de  Mont- 
luçon,  Allier. 

Nettiz,  nettoyés,  rendus  nets. 

Nettre-Dene,  Notre-Dame. 

NiANTO  (Francesco  di)  le  Thus- 
can,  auteur  de  la  fabrique 
de  Rabelais. 

Nicander  (Jovien)  de  Colo- 
phon,  médecin  et  poète  grec 
du  IP  siècle  avant  J.-C, 
auteur  d'un  traité  sur  les 
serpents. 

Nicatisme,  genre   de   danse. 

Nice,  propret. 

Nicquenocque,   chiquenaude. 

Nieblé,  gâté. 

Nobles  à  la  rose,  monnaie 
d'Edouard  III  d'Angleterre. 

Noisettes,  petites  noises,  petites 
querelles. 

Noix  de  pin,  pommes  de  pin. 

Noizille,  noisette. 

Nonacris,  fontaine  en  Béotie. 


264 


GLOSSAIRE-INDEX 


NoNNAiN  (Le  pont  de  la),  an- 
cien pont  de  Chinon. 

Nosocome^  hôpital,  du  grec. 

Notable,  chose  à  noter. 

Notice,  connaissance. 

Nou,  Noud,  nœud. 

NouAiLLÉ,  arr.  de  Poitiers, 
Vienne. 

Noverce,  seconde  femme  de 
père,  du  latin  noverca. 

Noyer  (Balthasar),  contempo- 
rain de  Rabelais  à  Mont- 
pellier. 

Noyrettes,  jeunes  noyers. 

Nully,  aucun. 

NuMENius,  philosophe  grec  du 
II*^  siècle. 

Nyctimene,  changée  en  hibou 
par  Minerve. 

Nymphsea  heraclia,  nénufar, 
qui  passait  pour  antiaphro- 
disiaque. 

Obelices,  obélisques,  obélisques; 
aiguilles,  aiguillettes. 

Obeliscolychnies ,  obélisques 
surmontés  d'un  phare;  sol- 
dats portant  un  falot  au 
bout  d'une  lance,  du  grec. 

Obelies,  oublies,  plaisirs. 

Obelon.  V.  Haubelon. 

Objectes,  mises  devant. 

Oblecter  (S'),  se  réjouir. 

Obrizé,  affiné. 

Obsister,  s'opposer,  faire  ob- 
stacle. 

Obstestans,  prenant  à  témoin. 

Obtempérer,  se  soumettre. 

06/ur6cr,  troubler  ;  interpréter 
les  choses  du  mauvais  côté. 


Ocieux,  oisifs,  oiseux,  pares- 
seux, du  latin  otiosus. 

OcKAM,  théologien  anglais  du 
XVe  siècle. 

Oconcevoir,  atteindre. 

Odes  (Ile  d'),  île  des  Chemins, 
du  grec. 

Odet,  cardinal  de  Chastillon  ; 
était  le  frère  aîné  de  l'ami- 
ral Coligny. 

Œdipodicque,  qui  a  les  pieds 
enflés,  du  grec. 

Œil  de  Jupiter,  plante.  Est-ce 
la  matricaire,  dite  aussi  œil 
de  soleil  ? 

ŒnOPION.    V.    HiRCUS. 

Œstre  junonicque,  taon,  oes- 
trum,  que  Junon  envoya 
s'acharner  après  lo,  changée 
en  vache  par  Jupiter. 

Œtyle,  ville  de  Laconie. 

Œuvres,  travaux. 

Offendre,  attaquer,     défendre. 

Office,  devoir,  du  latin  officium. 

Officiai,  pot  à  uriner. 

Offot,  géant. 

Og,  géant,  roi  de  Basan. 

Ogier  le  Dannoys,  l'un  des 
douze  pairs. 

Ogygies,  bacchantes. 

Ohabé  (Le  roii;  suivant  M.  Sar- 
dou,  ce  serait  un  mot  hé- 
breu signifiant  :  l'ami,  le 
chéri. 

Oince,  once,  anima!  du  genre 
chat  ;  lynx. 

Oinces,  articulations  des  doigts 
qui  font  saillie  quand  le 
poing  est  fermé. 

Oinsestre  (La  marquise  de),  de 


GLOSSAIRE-INDEX 


265 


Winchester. 

OirCj  vase.  V.  Aire. 

Oiseau  de  masson,  instrument 
à  l'aide  duquel  les  maçons 
transportent  le  mortier  sur 
leurs  épaules. 

Oizillets,  petits  oiseaux. 

Olcam,  Ockam,  théologien  an- 
glais du  XIV^  siècle. 

Olif,  huile. 

Olif  enlycaleil  (languedocien), 
huile  dans  la  lampe. 

Olimpicoles,  habitants  du  ciel. 

Olive  {V),  maison  à  Chinon. 

Ollzegan,  Jean  Ockeghem,  ou 
Olkegan,  musicien  du  XV^ 
siècle, 

Olone,  Olonne,  arr.  des  Sa- 
bles, Vendée. 

Oltroy,  action  d'octroyer. 

Olus  atrum.  Daps  Pline,  serait 
une  espèce  d'ache?  Dans 
Plaute,  ce  serait,  d'après  les 
traducteurs,  des  épinards. 

Omniforme,  qui  prend  toutes 
les  formes. 

Omnigene,  qui  engendre  tout. 

Omnijuge,  qui  juge  tout. 

On,  au,  dans. 

Onagrier,  allure  de  l'âne  sau- 
vage, onagre. 

Oncle  (Un  vieux), un  vieux  papa, 
un  vieux  bonhomme. 

Onestes,  nom  grec  emprunté 
à  V Anthologie. 

Onirocrite,  interprète  des  son- 
ges, 

Oniropole,  qui  interprète  ses 
songes. 

Onocrotale,    palmipède,    péli- 


can; âne;  oiseau  fantasti- 
que qui  imite  le  braiment 
de  l'âne. 

Onomatomantie,  divination 
par  les  lettres  du  nom  de 
celui  qui  interroge. 

On  quel,  en  ce  ;  pendant  le- 
quel. 

Onymantie,  divination  par 
l'ongle  enduit  de  cire. 

Onys,  Aunis. 

Onzay,  Onzain  (?),  arr.  de 
Blois,  Loir-et-Cher. 

O  O  (Les  benoists  saincts),  an- 
tiennes de  Noël,  qui  com- 
mencent toutes  par  un  O  : 
O  Sapientia,  etc. 

Opérer,  travailler. 

Ophyres,  serpents  fantastiques. 

Ophite,  Ophyte,  serpentine, 
pierre  dure,  du  grec, 

Opignerée,  ornée. 

Opistographes,  écritures,  pa- 
piers écrits. 

Oppianus,  Oppien,  pcëte  grec 
du  ne  siècle. 

Oppiler,  boucher,  fermer, 
clore. 

Opprimer,  écraser,  accabler, 
combler. 

Oppugner,  assiéger,  combat- 
tre. 

Opter,  souhaiter. 

Oranges,   oiseaux, 

Orbellis  (Nicolas  de),  corde- 
lier  du  XV^  siècle. 

Orchades,  navires. 

Orche,  a  gauche,  bâbord, 

Orchis,  orchis  mascula,  dont 
le    petit     tubercule    passait 

34 


t66 


GLOSSAIRE-INDEX 


pour  antiaphrodisiaque,  tan- 
dis que  le  gros  devait  pro- 
duire l'effet  contraire. 
Ord,  sale. 

Ordre  (11  n'y  a),  cela  va  mal. 
Ordres,  rangs. 

Orée,   entrée,  bord,  commen- 
cement. 
Oreille,   anse  de  vase. 
Ores,     actuellement,    mainte- 
nant, dès  lors. 
Organes,  instruments  de  musi- 
que. 
Orgeau,   barre    du   gouvernail 

(Jal). 
Orgues,  orge. 
Orgues  (Dire  d'),  parler  com- 

un  oracle. 
Oribasius,    Oribase,    de    Per- 
game,    médecin    et  ami  de 
Julien. 
Oribus  (Poudre  d'),  poudre  de 

résine. 
Oriflamhe,Orifîant,  oriflamme. 
Oriflans,  éléphants. 
Origes,  gazelles  unicornes. 
Orlando     furioso,    poëme    de 

l'Arioste. 
Orobrinche,  ers,  légumineuse. 
Oromédon,  géant. 
Orque,    hourque,     navire     de 

transport. 
Orthies,    chants   de    mort,  du 

grec. 
Ortuinus  Gratius,  lîardouin 
de  Graetz,  docteur  de  Colo- 
gne du  XVI'"  siècle. 
Orus  Apollon,  ou  Horapollon, 
grammairien  grec  du  IV'-  siè- 
cle. 


Osawiiere    (Croix),     croix    au 

pied  de  laquelle  on  chante 

Hosanna    le   dimanche     des 

Rameaux. 

Oscines,  oiseaux  qui  prédisent 

l'avenir  par  leur  chant. 
Oscitation,  action  de  bâiller. 
OssE,  le  mont  Ossa  en  Thessa- 

lie. 
Ost,  Oust,  armée,  camp. 
Ostade,  étoffe  à  longs  poils. 
Ostarde,  Otarde,  outarde. 
Otacustes,  espions,  du  grec, 
Othe,  géant. 
Ou,  dans  le. 
Ouailles,  moutons. 
Oultrés,    gonflés,    gros  comme 

des  outres. 
OuZ/roy,  octroi,  chose  octroyée. 
Oultroyer,  octroyer,  donner. 
Ous,  os. 
Oust.  V.  Ost. 
Ouster,  ôter. 
Outre,    au   delà;    Rabelais  en 

fait  un  pays. 
Ouvert,  nu,  découvert. 
Ouvrouoir,     ouvroir,     lieu    de 

travail,   boutique. 
Ouzeaulx.  V.  Houseaux. 
Oxydraces,  Oxydraques,  peu- 
ples de  l'Inde. 
Oyre,  outre. 
Ozillons,  petits  oiseaux. 

Pacolel,  cheval  de  bois  en- 
chanté ,  dans  Vakntin  et 
Orson. 

Faction,  traité. 

Paele,  Palle,  manteau,  du  lat. 
palUuni. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Paelles,  poêles. 

Paeslon^  poêlon. 

Paeone,  pivoine. 

Paffuz,  armes  tranchantes. 

Pagine,  page. 

Pagnier,  musicien. 

Pailles^  poêles. 

Pal,  pieu. 

Palatj  Palatin,  ^ahis,  qui  tient 
au  palais. 

Palices  (Les  deux),  jumeaux 
enfantés  par  Jupiter  et  la 
nymphe  Thalie. 

Palingenesie,  régénération. 

Paliniocie,  renaissance,  nou- 
velle naissance. 

Palle.  V.  Paele. 

Palle,  chaton  de  bague. 

Palle,  Pale,  pelle. 

Palletoqué,  bien  vêtu. 

Palluau,  arr.  des  Sables,  Ven- 
dée. 

Palmes,  palmiers. 

Palodes  ou  Pelodes,  port  d'É- 
pire. 

Palude.  Palus,  Paluz,  marais. 

Palus  Camarine  ou  Cainerine, 
marais  fangeux  en  Sicile. 

Palys,  barrière. 

Pamphile,  Pamphylie. 

Pampillette,  Papillette,  petite 
houppe  de  soie,  paillettes. 

Pamyle,  femme  thébaine  à  qui 
une  voix  avait  prophétisé  la 
naissance  d'Osiris. 

Panacea.  Est-ce  V Arnica  mon- 
tana,  qu'on  nommait  Pana- 
cea Lapsorum  ? 

Panaciée,  panacée,  remède 
universel. 


Pane,  panne,  roulis  d'un  na- 
vire (Jal). 

Panerotz,  paniers. 

Panes,  pans,  satyres. 

Panicault,  chardon  Roland. 

Panice,  panique. 

Panigon,  du  latin  paniculus, 
petit  pain,  ou  du  grec  -rràv 
zixo'yj,  toute  image. 

Panomphée,  qui  rend  à  tous 
des  oracles. 

Panorme,  Panormitan,  Niccolo 
Tedeschi,  dit  Panorrnitano, 
canoniste  italien  du  XIV^ 
siècle. 

Panouere,  pannetière. 

Pantagruelisme,  gaieté  philoso- 
phique. 

Pantagruelistes,  bons  vivants 
intelligents. 

Pantarches,  Pantarques,  regis- 
tres, actes,  papiers. 

Pantharbe ,  pierre  précieuse 
indienne. 

Pantheologie,  toute   théologie. 

Pantophle,  mule,  pantoufle. 

Pantodiables,  tout-diables,  dia- 
bles de  toutes  les  façons. 

Pantagruelion,  le  chanvre. 

Panurge,  qui  fait  tout,  du  grec. 

Panzoust,  Panzoult,  arr.  de 
Chinon,  Indre-et-Loire. 

Pao  cap  de  bious...  Voici  la 
traduction  que  donne  de  ce 
discours  M.  Burgaud  : 

«  Tête  bœuf,  mes  petits, 
que  l'ivresse  vous  roule  à 
terre  !  Maintenant  que  j'ai 
perdu  mes  vingt-quatre  va- 
chettes, je  n'en  donnerai  que 


:68 


GLOSSAIRE-INDEX 


mieux  des  coups  de  griffes, 
de  poings  et  taloches.  Y  a- 
t-i!  quelqu'un  de  vous  autres 
qui  veuille  se  battre  avec 
moi  de  franc  jeu?  » 

Paoul,  Paul. 

Paour,  peur. 

Paouvre,  pauvre. 

Papefîgues,  ceux  qui  font  la 
figue  au  pape,  qui  se  mo- 
quent de  lui. 

Papefil,  nom  d'une  voile  (Jal). 

Papegay,  Papeguay, perroquet. 

Papelard,  hypocrite. 

Papeligosse,  pays  où  l'on  se 
moque  du  pape, 

Paperat,  papier. 

Papier  baptistère,  registre  des 
actes  de  baptême,  seul  état 
civil  alors. 

Papillette.  V.  Pampillette. 

Papiinanes,  ceux  qui  ont  la 
manie  du  pape,  qui  en  sont 
les  partisans  absolus. 

Papimanie,  papisme  exagéré. 

Papinian,  Papinien,  juriscon- 
sulte romain  du  IF  siècle. 

Pappes,  duvets. 

Parabolains,  infirmiers. 

Paradis  (Graines  de),  semences 
de  VAinomum  grana  para- 
disi. 

Paradoxe,  adj.,  paradoxale. 

Paragon,  Parangon,  modèle, 
comparaison. 

Parangonner,  comparer. 

Paranomasie ,  Paronomasic , 
ressemblance  entre  des  mots 
de  différentes  langues.  On 
appelle  paronomase  le  rap- 


prochement dans  la  même 
phrase  de  mots  dont  le  son 
est  à  peu  près  semblable, 
mais  dont  le  sens  est  différent. 

Paranymphe,  conducteur,  in- 
troducteur. 

Parasanges,  Parasangues,  me- 
sure itinéraire  des  anciens 
Persans, évaluée  à  3,75o  pas. 

Parasine,  poix-résine. 

Paras^afes,  conduits  séminifères. 

Par  autant,  par  ce  que. 

Parces,  les  Parques. 

Parceux,  perçus. 

Para,  léopard. 

Pardoinner,  pardonner. 

Pardonnaires ,  Pardonneurs, 
vendeurs  d'indulgences. 

Pardonnigere,  porteur  d'indul- 
gences. 

Pardons,  indulgences;  lieu  de 
pèlerinage  où  l'on  va  pour 
gagner  des  indulgences,  des 
pardons. 

Parement,  garniture. 

Parez,  accouplés. 

Parfaict,  Parfait,  fait  accom- 
pli, achevé,  fini. 

Parfond,  profond. 

Par  forcer,  forcer. 

Par  forcer  (Se),  s'efforcer. 

Parguoys,  Perguois,  du  Perche. 

Parien,  de  Paros. 

PARiLLÉ,Parilly,  arr.de  Chinon, 
Indre-et-Loire. 

Pariser,  appareiller,  rendre  pa- 
reil. 

Parlouoire  aux  bourgeoys , 
grande  salle  d'hôtel  de  ville. 

Parodelles,  fromages  ronds. 


GLOSSAIRE-INDEX 


269 


ParpaillonSj  Parpaillos,  papil- 
lons, mécréants. 

Parragonner,  comparer. 

Pars    Les),  le  rudiment. 

Parsus,  par  surplus,  au  surplus. 

Part,  partie,  lieu,  où. 

Part  (La),  le  parti. 

Partement,  départ. 

Parthenay,  ch.-lieu  d'arr.  des 
Deux-Sèvres. 

Parthenay-le-Vieulx,  rasé  en 
i486  par  les  troupes  de 
Charles  VIII. 

Parthisanes,  pertuisanes. 

Partir,  diviser,  partager,  faire 
les  parts. 

Partuys,  pertuis,  trou. 

Pasadouz  (provençal),  flèche. 

Pasle,  pelle. 

Pasquenade,  panais. 

Pasques  de  soles,  Pâques  du 
soleil,  du  dimanche;  juron, 

Pasquillu5,doctor  marmoreus, 
Pasquin,  restes  d'une  statue 
de  marbre,  au  coin  d'une 
rue  de  Rome,  sur  laquelle 
on  affichait  des  épigrammes. 
V.  Marforio. 

Passato  el  pericolo,  gabato  el 
santo ,  passé  le  danger, 
moqué  est  le  saint. 

Passavantus,  Jacques  Passa- 
vant, moine  florentin. 

Passelourdin,  rocher  près  de 
Poitiers. 

Passe  sans  flux,  terme  de  jeu 
de  cartes,  pas  de  résultat;  je 
m'en  prive. 

Passereau,  musicien. 

Passevolan,    pièce    de    canon 


d'origine  italienne. 
Passion   de    Saulmur,  mystère 

de  la  Passion,  joué  à   Sau- 

mur  en  i  534. 
Past,  pâture,  repas. 
Pastophores,  prêtres  égyptiens. 
Patacz,    patars,    monnaie    de 

cuivre. 
Patays.   Est-ce  Pantays,  court 

d'haleine  ? 
Pâté,  pattu. 
Patelin,    jargon;    allusion    au 

langage  de  Pathelin. 
Patelinage,  farce  dans  le  genre 

de  la  Farce  de  Pathelin. 
Patelineux,   imitateur  de    Pa- 
thelin. 
Patelinoys,  langage  de  Pathelin. 
Patenostres,  chapelets. 
Patenostre  du  cinge,  grimace. 
Patent,  visible;  sans  nuages. 
Patespelues,  hypocrites  qui  font 

patte  de  velours. 
Patience,  plante  employée  pour 

les  ladres,  contre  la  lèpre. 
Patrocinations,  longs  discours. 
Patrociner,  parler  longuement. 
Patroiller ,    piétiner     dans    la 

boue. 
Pau,  pieu. 
Pautillé,      Pautilé,     Potillé, 

village  du  Chinonnais. 
Pavaniers,  qui  dansent  la  pa- 
vane. 
Pavée  d'Andouilles  (Rue).    La 

rue   Saint-André-des-Arts  a 

porté  ce  nom. 
Pavoys,  grands  boucliers. 
Paxes,  îles  de  Paxos. 
Pean,  surnom  d'Apollon. 


lyo 


GLOSSAIRE-INDEX 


Peaultraille,  canaille. 

Peautre,  barre  du  gouvernail. 

Pecile,  varié,  du  grec. 

Pecune,  argent. 

Pédales  (Doubles),  saut  des 
quatre  pieds. 

Pedané,  qui  va  à  pied;  qui 
reste  debout. 

PîDAUCQUE  (La  royne),  per- 
sonnage aux  pieds  d'oie, 
légendaire  à  Toulouse. 

Peder,  péter. 

Pegiiad,  pot  de  vin. 

Pelaudans  (Se),  s'arrachant  les 
poils,  se  battant. 

Pelauder,  battre;  user  la  peau 
à  force  de  la  battre. 

Pé  lé  quau  Dé!  par  le  corps 
Dieu  !  juron  poitevin. 

Pèlerin  (Faire  un),  faire  vœu 
d'envoyer  quelqu'un  en  pè- 
lerinage. 

Pelei,  petit  poil, 

Pellaaderies,  membranes. 

Pellican,  pélican,  pince  à  bec 
à  l'usage  des  dentistes. 

Penader,  sauter, danser,  piaffer. 

Penaillon,  déguenillé. 

Penard,  grand  poignard. 

Pendilloche,   pendelocque. 

Pendre,  dépendre. 

Pêne  de  nez,  l'arête  du  nez. 

Peneau,  penon,  flamme  du 
haut  du  mât. 

Pener,  peiner. 

Penet,  musicien. 

Peneux,  tout  honteux. 

Penie  (Dame),  pauvreté,  du 
grec. 

Penier,  panier. 


Pennades,  coups  de  pieds  de 
derrière. 

Pennage,  Pennaige,  plumage. 

Pennes,  plumes. 

Pensaroys,  le  pays  des  pensées. 

Pensement,  inquiétude,  pensée. 

Pensile,  suspendu. 

Pentaphyllon,  potentille  ram- 
pante. 

Pephages,  animaux  fantastiques 

Perannité,  éternité. 

Peratre,  parâtre. 

Perazons,  chevaliers,  de  l'hé- 
breu? 

Perdonnances,  façons  de  gagner 
des  pardons, des  indulgences, 

Perdrier  (Jan),  contemporain 
de  Rabelais  à   Montpellier. 

Perdurante,  durant. 

Perefamiles,  père  de  famille. 

Peregn/zs, voyageurs,  étrangers. 

Pereilleux,  périlleux. 

Pères,  moines. 

Perforaminé,  piqué. 

Perguois.  V.  Parguoys. 

Perichairie,  grande  joie, 

Periclymenos.  Ce  serait  le  chè- 
vrefeuille. 

Perigot,  le  Périgord, 

Perigrinité,  action  de  voyager, 

Periller,  périr. 

Périt,  habile,  du  lat.  peritus. 

Perlas  Isles  de  ' ,  iles  aux  perles. 

Perples,  compliqués. 

Pers,  bleu  foncé,  bleu  noirâtre. 

Persephone,  Proserpine, 

Perser,  franchir. 

Perses,  Persée. 

Persicque,  de  Perse  ;  espèce  de 
danse. 


GLOSSAIRE-INDEX 


PersicqueSj  Persiguiere,  persi- 
caire  poivrée,  piment  d'eau. 

Perspectif,  qui  peut  percevoir. 

Pertuisé,  troué. 

Pesinunt  ,  Pessimonte  ,  en 
Phrygie. 

Peslier,  poêlier. 

Petault  (Le  roy),  héros  de 
quelque  conte  populaire. 

Petauristique,  de  danseurs  de 
corde,  du  grec. 

Petrocil,  persil. 

Petron,  Pétrone? 

Petron,  philosophe  sicilien. 

Petrus  Alexandrinus,  com- 
mentateur d'Hippocrate. 

Petrux  (Os),  le  rocher,  partie 
de  l'os  temporal. 

Peuple,  peuplier,  populus. 

Pevier,  pierrier. 

Phabetor,  ministre  du  Sommeil. 

Phalarices ,  javelots  porte- 
flamme. 

Phaleré,  harnaché,  capara- 
çonné. 

Phantasie,  fantaisie. 

Phantasmes,  Phantasmes,  fan- 
tômes. 

Phantasus,  ministre  du  Som- 
meil. 

Pharingues,  pharynx. 

Phaseols,  haricots,  du  latin 
phaseolus. 

Phébol,  île  du  golfe  arabique. 

Phée,  résolu  par  le  destin. 

Phée  (adj.),  enchantée. 

Phengite,  transparente. 

Philautie,  amour  de  soi,  amour- 
propre,  du  grec. 

Philippus,  monnaie  d'or. 


Philippus  (Tournoy),un  sol  ou 
douze  deniers. 

rHiLOCORus,  historien  et  poëte 
athénien. 

Philo groholizez,  perplexes. 

PHiLOLAiis,  philosophe  de  Cro- 
tone  ;  vivait  400  ans  avant 
J.-C. 

Philophanes,  qui  aime  à  se 
faire  voir,  du  grec. 

Philotheamon,  qui  aime  à  voir, 
du  grec. 

Philostrate,  auteur  de  la  vie 
d'Apollonius  de  Tyane. 

PiiiLOTOME,  qui  aime  à  couper, 
nom  d'un  maître  d'hôtel,  du 
grec. 

Philoxenus,  gourmand  de  l'an- 
tiquité. 

Phlebotomie,  saignée,  du  grec. 

Phlosque,  bouteille,  de  l'ital. 
fiasco. 

PhreneSj  aponévroses  du  dia- 
phragme. 

Phrixus  et  Helle,  enfants  du 
roi  de  Thèbes  Athamas, 
furent  transportés  en  Col- 
chide  par  un  bélier  dont  la 
toison  devint  la  toison  d'or. 

Phrontiste,  vigilant,  du  grec. 

Phrontistere,  lieu  d'études,  de 
veilles,  du  grec. 

Phrygie,  genre  de  danse. 

Phryson,  cheval  de  frise. 

P/î//ijnas/s,maladie  pédiculaire , 
du  grec. 

Physetere,  baleine,  cachalot. 

Physon,  l'un  des  quatre  fleuves 
qui  sortaient  du  paradis. 

Piboles,  flageolets. 


2  7  2 


GLOSSAIRE-INDEX 


Pication,  emploi  de  la  poix. 
Picote,  petite  vérole. 

PiCQUET  (Trilman).  Il  y  a  eu  a 
Montpellier  une  famille  de 
médecins  de  ce  nom. 
PiCROCHOLE,     bile    amère^     du 
grec. 

Picus  MiRANDULA,  Pic  de  la 
Mirandoie,  omniscient  du 
XVe  siècle. 

Fiez  mars,  pivers,  picus  mar- 
tius,  oiseau. 

Pie  second,  ^Eneas  Sylvius, 
pape,  qui  publia  des  livres 
de  géographie. 

Pieça,  depuis  longtemps. 

Pièce,  morceau. 

Pièce  (En),  en  aucune  façon. 

PiEDEBOYS,   médecin    d'Angers. 

Pierre  levée,  pierre  druidique 
près  de  Poitiers. 

Piéton  (Foi  de),  foi  d'homme 
qui  va  à  pied,  parodie  de  : 
Foi  de  chevalier. 

PiETRO  (Don)  de  Castille  ;  est- 
ce  Pierre  le  Cruel,  est-ce 
l'infant  de  Castille,  frère 
d'Alphonse  V? 

Pifre,  gourmand  ;  fifre. 

Pigne,pigner,^e.\gnQ,  peigner. 

Pile    Sainct-Marc,     monument 
carré    de     près  de    3o    mè- 
tres,   d'origine    inconnue,   à 
3  kilomètres  de  Saint-Mars, 
près  de  Langeais. 

Pilettes,  ornements  de  bonnets. 

Pille  (Amusez  à  la),  jouant  à 
la  balle. 

Pille,  nade,  jocque,  fore,  ter- 
mes du  jeu  des  dés. 


Pille  à  mil,  mortier  à  millet. 

Pillemaille,  maillet  au  jeu  du 
mail. 

Pillotizer,  bâtir  sur  pilotis. 

Pilât,  pilote. 

Pinard,   petite  monnaie. 

Pinart,  gaillard. 

Pinastre,  pin  sauvage. 

Pineau,  nom  d'un  cépage. 

Pingres,  petites  billes  d'ivoire. 

Pinne,  arête. 

Piolé,  bariolé. 

Pioller,  piailler,  criailler. 

Pion.  V.  Pyon. 

Piot,  Pyot,  pot  ;  la  boisson 
par  excellence. 

Pippe,  mesure  de  liquide  dont 
le  contenu  varie  suivant  les 
pays. 

Piraticque,  piraterie. 

Piscantine,  eau  rougie. 

Pisioletz,  poignards  de  Pistoie; 
gens  nés  à  Pistoie. 

Pistons,  pilons. 

Pistrines,   meunerie?. 

Pital,  bassin  de  chaise  percée, 
de  l'ital.  pitale. 

Pithe,  petite  monnaie,  le 
quart  d'un  denier. 

Pithies,  buvettes,  du  grec. 

Pitoyable,  pieux. 

Pivars.  V.   Picz  Mars. 

Placiades  (Fulgentius),  gram- 
mairien arabe  du  IV    siècle. 

Plaincts,  plaintes. 

Planté,  abondance. 

Planudes  (Max),  écrivain  grec 
du  XIVc  siècle. 

Plasmateur,  créateur  de  for- 
mes, du  grec. 


GLOSSAIRE-INDEX 


3 


Plasmature,  forme. 

Plataine,  plateau,  ou  plutôt 
platane  d'or  que  Pythius 
aurait  donné  à  Darius. 

Playdoyens,  plaideurs. 

Plegeray,  provoquerai  à  boire. 

Pleiger  guaillard,  lutter  à  qui 
boira  le  plus. 

Plombin,  Piombino,  en  Tos- 
cane. 

Plonge  (Au),  en  plongeant, 

Plotin,  philosophe  grec  du 
me  siècle. 

Plumailj  aileron  de  volaille 
qui  a  conservé  ses  plumes, 
et  sert  à  enlever  la  poussière; 
la  volaille  elle-même. 

Plumart,  plumet. 

Poche,  cuiller  à  servir  le  po- 
tage. 

Poche,  Pochée,  sac. 

Pochecullieres,  oiseaux  d'eau. 

Podagres,  goutteux. 

Podestat,  gouverneur. 

Page,  à  droite,  tribord. 

Poictral,  poitrail. 

Poiltronité,  poltronité^  poltron- 
nerie. 

Poiltrons,  poltrons;  paresseux. 

Poinct,  Poincture,  Poindre,  pi- 
que, piqiàre,  piquer. 

Poine,  peine. 

Poisant,  pesant 

Poisles,  poêles. 

Poitry,  pétri. 

Pote,  plie  ;  poisson  plat. 

PoLiTiAN,  Ange  de  Ambroginis, 
dit  Poliziano,  érudit  et  poëte 
italien  du  XV^  siècle. 

PoLLUX  (Julius),   écrivain  grec 

Rabelais.  V. 


du  11^  siècle. 

PoLYDAMAS,  devin  célèbre  dans 
l'antiquité. 

Polymyxe  (Lanterne),  lanterne 
à  plusieurs  becs,  du  grec. 

PoLYPHiLE.  Hypnerotomachia 
Polyphili  :  Venise,  Aide  Ma- 
nuce,  1499,  in-folio.  L'au- 
teur est  Fr.  Colonna. 

Polypragmon,  curieux,  indis- 
cret, du  grec. 

PoLYSTYLO,  Abdere,  dans  l'anti- 
quité. 

Pomme  de  Pin  (La),  cabaret 
parisien. 

PoMPEÏE  Plautine,  épouse  de 
l'empereur  Julien. 

Pomper,  faire  le  fier. 

Pompettes,  verrues,  boutons 
rouges  et  luisants;  pom- 
pons. 

Ponant,  Ponent,  couchant. 

Poncires,  variété  du  citronnier 
de   Médie. 

Pond,   pondu. 

PoNEROPOLE,  ville  des  mé- 
chants, du  grec. 

Ponnent,  Ponnus,  pondent, 
pondus. 

PoNOCRATEs,  homme  laborieux, 
du  grec. 

Pont-Alais  (Jean  de),  auteur 
et  acteur  de  farces,  morali- 
tés et  sotties. 

Pont- aux -Meusniers,  ancien 
pont  de  Paris. 

Pont-de-Clam  ^  village  du 
Chinonnais. 

Pontal,  planche  sur  laquelle 
on  va  du  navire  à  terre  (Jal). 

35 


274 


GLOSSAIRE-INDEX 


PoNTiNER,  le  sonneur  de  corne 
des  Suisses  à  Marignan. 

PoNZAUGES,  Pouzauges,  arr. 
de  Fontenay-le-Comte,  Ven- 
dée. 

Popismes  (Petits),  mouvements 
élégants  de  voltige. 

PoR£,  Porus,  géant. 

PoRPHYRio,  géant. 

PoRPHYRius,  Porphyre,  écrivain 
grec  du  III^   siècle. 

Porter  (Se),  se  comporter. 

Portai,  portail. 

Portecole,  le  souffleur  pendant 
la  représentation  d'un  mys- 
tère. 

Portement,  santé,  manière  de 
se  porter. 

PortenteSj  choses  prodigieuses, 
du  lat.  portenta. 

PoRT-HuAUX,  village  sur  l'In- 
dre,  au   nord-est   de     Chi 
non. 

Porto  SANCTO,peîite île  Madère. 

Portoueriere  (Nauf),  navire  qui 
a  pour  enseigne  une  Por- 
touere,  hotte  de  vendangeur. 

Portouoire,  portuoir,  hotte  de 
vendangeur. 

Portri,  pourtour. 

Portugualoys,  portugais. 

PoRUS,  dieu  de  l'abondance. 

Poser  (Se),  se  reposer. 

PossiDONius,  philosophe  syrien. 

Possouer,  enfonçoir,  qui  sert  à 
enfoncer. 

Poste,  poteau. 

Pot  à  plume,  pot  o\X  l'on 
garde  les  plumes  des  volail- 
les jusqu'à  ce  qu'il  y  en  ait 


assez  pour  faire  un  lit. 

Pot  pourry,  plat  composé  de 
viandes  et  de  légumes  divers 
mêlés  ensemble. 

Poiatif,  buveur. 

Potet,  petit  vase,  petit  pot. 

PoîingLies,  buveries. 

Pouacres,  hérons  ;  podagres. 

PoLidrebif,  poudre  de  bœuf. 

Poulain,  deux  fortes  charpen- 
tes, réunies  par  de  courtes 
traverses,  sur  lesquellesglisse 
la  pièce  de  vin  qu'on  des- 
cend en  cave. 

Poukmart,  gros  fîl,  ficelle. 

Poullains  grenez  en  laratouere. 
M.  Burgand  voit  là  des  ra- 
tières à  poulie. 

Poulie  (Courir  la),  marauder. 

Poulies  de  Inde,  dindes,  din- 
dons. 

Poulpre,  poulpe,  mollusque. 

Poultre,  jeune  jument. 

Poupié,  pourpier. 

Pourreaux^  poireaux. 

Pourrée,  poirée,  bette. 

Pourtant,  ainsi  donc,  c'est 
pourquoi,   à  cause  de  cela. 

Pourtraire,  peindre,  dessiner, 
représenter,  faire  le  portrait. 

Poussavant,  jeu. 

Poussé  (Vin),  vin  fermenté. 

Poussinierc  (L'étoile),  les  Pléia- 
des. 

Poutargues.  V.  Boutargues. 

Pouvoir  (ellipse),  pouvoir  tenir. 

Poy,  peu. 

Poyer,  payer. 

Poyzars,  tiges  des  pois. 

Pracontal     (Her),    proconsul 


GLOSSAIRE-INDEX 


2^5 


de  la  fabrique  de  Rabelais. 
Prsesagir,  présager. 

Prseveid,  prévit. 

Przvieigne,  prévienne. 

Prassine,  verte,  du  lat,  prasina. 

Praye,  proie. 

Pncation,  prière. 

Preceptions ,  enseignements , 
préceptes. 

PreclarCj  célèbre,  du  lat.  prae- 
clarus. 

PrecLiles,  prières. 

Predicantes  (Les),  les  Haran- 
gueuses d'Aristophane. 

Prefation,  préface,  chose  mise 
en  avant. 

Prefix,  fixé  d'avance. 

Pregustes,  goûtant  d'avance, 
dégustateurs. 

Prelations,  prélatures. 

Premier,  adverbe,  première- 
ment. 

Preneur  de  taulpes,  attrapeur 
d'imbéciles.  Les  taupes  pas- 
sent pour  aveugles. 

Prescriptz,  préceptes. 

Presle,  prèle,  queue  de  che- 
val. 

Pressouer,  pressoir. 

Presteres,  orages,  du  grec. 

Prestjan,  souverain  oriental 
légendaire  au   moyen  âge. 

Prestolant,  attendant. 

Prestolans,  juges  de  village. 

Preu,  profit. 

Preude,  honnête,  prude  dans 
le  bon  sens. 

Prieras  (Sylvestre),  jacobin  du 
XVP  siècle. 

Prime  face,  première  vue. 


Prime  vere,  le  printemps,  pri 
ma  vera. 

Primeve,  ancien,  du  premier 
âge. 

Primipile,  centurion  de  la 
première  compagnie  de  la 
cohorte. 

Prindrent,  Prins,  Prinse,  pri- 
rent, pris^  prise. 

Prioris,  musicien  du  commen- 
cement du  XVP  siècle. 

Priour,  prieur. 

Friving,  beau-fils,  du  latin 
privignus. 

Probation  (L'an  de),  l'année 
d'épreuves. 

Proboscide,  trompe,  du  grec. 

Procéder  oultre,  passer  outre. 

Prochain,  proche  parent. 

Prochaines,  près  de,  proches. 

Prochas,  Prochatz,  pourchas, 
poursuite. 

Proclus,  poëte  et  philosophe 
byzantin  du  V^  siècle. 

Procultous,  procureurs. 

Procurer,  rechercher. 

Prodenou,  palan. 

Prcetides,  filles  de  Prœtus,  af- 
folées par  Junon. 

Proficiat,  bienvenue,  terme 
ecclésiastique. 

Profiterolle,  espèce  de  gâteau. 

Progné,  changée  en  hirondelle. 

Progrez,  marches,  progressus. 

Prolepsie,  objection  prévue,  du 
grec. 

Promoconde,  dispensateur  éco- 
nome. 

Promotion,  instigation. 

Promovens,  prenant  l'initiative. 


.76 


GLOSSAIRE-INDEX 


Propenser,  méditer. 

Prophylactique,   préservative. 

Propouser,  tenir  un   propos. 

Prore,  proue. 

Proscrire,  adjuger  en  vente 
publique. 

Prosopopée,  déguisement,  du 
grec. 

Protervie,  sacrifice  pour  rendre 
un  voyage  heureux. 

Protodiables,  diables  de  pre- 
mier rang. 

Prototype,  modèle. 

Protraictj  dessin,   portrait. 

Protraire.  V.  Pourtraire. 

Prou,  beaucoup. 

Prouffiter,  profiter. 

Proust  (François),  de  la  mai- 
son de  Du  Bellay. 

Provent,  pourvu. 

Proximes,  proches,  du  latin 
proximus. 

Psoloentes,  foudres,  du  grec. 

Psycogonie,  procréation  de 
l'âme,  du  grec. 

Psylion,  plantain  des  sables. 

Ptissane,  tisane. 

Pudendes,  parties  sexuelles. 

Punays,  puant. 

Pungitive,  poignante. 

Puputz,  huppes. 

Purée  septembrale,  le  vin.  On 
vendange  généralement  en 
septembre. 

Putherbes  (Les  Enraigez).  Les 
enragés  partisans  de  Puits- 
Herbault,  moine  qui  a  dif- 
famé Rabelais. 

PuY  (Le).  Est-ce  le  Puy-Notre- 
Dame ,     arr.     de     Saumur, 


Maine-et-Loire  ? 
Pymion,  pays  des  Pygmées. 
Pyon,  simple   soldat;  la  pièce 

des  échecs  qui  a    le   moins 

de  valeur  ;  buveur. 
Pyreicus,    peintre   dont   parle 

Pline. 
Pyromantie,   divination   par  le 

feu. 
Pyrope,  escarboucle. 
Pyrricque,  genre  de  danse. 

Quaderne,   quaterne,   les  deux 

quatre  aux  dés. 
Quadrannier,  de  quatre  ans. 
Quadrivies,      carrefours,       du 

latin  quadrii'icC. 
Qitanard,  canard. 
Qiiand  est   de   moi,     quant   à 

moi. 
Quand    Israël    hors    d'Egypte 

sortit,  ce  vers  est  de  Marot. 
QuANDÉ,  Candé,  arr.  de  Blois, 

Loir-et-Cher. 
Qiiants,    Quaniz,   combien. 
Qiiaquerolles.    V.    Caquerolles. 
Qj.iare  ?  quia,  pourquoi  ?  parce 

que. 
QuARESME  PRENANT,  C'est  ici  la 

personnification  du  carême, 

et  non  le  mardi  gras  seule- 
ment. 
Quarreaux,   traits  d'arbalète. 
Qj.tarres,  carats. 
Quarreleure,  semelle. 
Quarroy,  carrefour. 
Quart,  quatrième. 
Quartiers  brisans,  quartiers  de 

lune. 
Quatridien,  de  quatre  jours. 


GLOSSAIRE-INDEX 


277 


Quecas,  noix. 

QueconqueSj  quelconque. 

Qathcue,  queue  ;  cul-de-Iampe. 

Quelle  part,  où. 

Quemin  (picard),  chemin. 

QuENELAULT, médecin  normand. 

QuenoilleSj  quenouilles. 

Quentin  (Jan),  contemporain 
de  Rabelais  à  Montpellier, 
que  Le  Duchat  croit  être  le 
même  que  Giovanni  Quin- 
tiani,  médecin   italien. 

Querelans,  cherchant  querelle; 
questionnant. 

Querelle,  demande. 

QueritanSj  demandants. 

Quiers,  cherche. 

Queux,  cuisiniers. 

Queux  (Maistre),  intendant 
des  cuisines. 

Quid  est,  quest-ce  que  ?  titre 
d'un  livre  de  classe  du  XVI« 
siècle,  par  demandes  et  par 
réponses. 

Quidditatif,  qui  est  en  soi- 
même. 

Quiète,  en  repos,  du  lat.  quietus. 

Qui  ha,  si  parle,  que  celui 
qui  a  quelque  chose  à  dire 
parle. 

Quinault  (Faire),  faire  camus, 
forcer  à  s'avouer  battu. 

Quine,  les  deux  cinq  aux  dés. 

QuiNQUENAYS,  vignoblc  près 
de  Chinon,  d'après  Le  Du- 
chat. 

Quinquenelle,  rien,  en  poite- 
vin. 

Quinquenelles,  délai  de  cinq 
ans  accordé  à  un   débiteur 


pour  payer  ses  dettes. 

Quint,  Quinte,  cinquième. 

Quinte,  alchimie. 

Quintaine,  exercice  militaire 
qui  consiste  à  frapper  de  la 
lance  un  mannequin  ou  un 
poteau. 

Quinterne,   guitare. 

Quintessence,  cinquième  es- 
sence, propriété  par  excel- 
lence des  choses. 

Quintessentiaux,  tireurs  de 
quintessence,  alchimistes. 

QyiNTus  Calaber,  Quintus  de 
Smyrne,  poète  grec  du  V^  ou 
du  Vl^  siècle. 

Quitte  (M.  le),  monsieur  sans 
dettes. 

Quotté,  noté. 

Quoy.  V.  Coy. 

Raballe,  ratissoire. 

Rabanistes,  porteurs  de  rabats  ; 
rabbinistes. 

Rabbes,  raves. 

Rabiz,  rabbins. 

Rabouliere,  Raboulliere,  ter- 
rier du  lapin,  recoins  de  ce 
terrier. 

Rabrebans,  grand  seigneur,  de 
l'hébreu? 

Rachapter,  racheter. 

Raclet,  professeur  de  droit  à 
Dôle. 

Racleresse  de  verdet,  éplucheuse 
de  légumes  (Burgaud).  Le 
vert-de-gris  s'appelle  verdet; 
serait-ce  :  nettoyeuse  de 
chaudrons,  racleuse  de  vert- 
de-gris? 


2^8 


GLOSSAIRE-INDEX 


Racquedenare,  Racledenier. 

Radz,   rangs. 

Ragletorelz,  frotteurs,  racleurs 
de  la  peau,  dans  les   bains. 

Ragot,  capitaine  des  gueux. 

Raillons,  fers  du  bout  des  ja- 
velots, des  flèches. 

RairCj  raser. 

Raislier,  associer. 

Ramasse,  discipline. 

Rambades,  pavillons  construits 
à  la  proue  d'une  galère  (Jal). 

Ramberges,  navires  dont  la 
marche  est  rapide  (Jal). 

Rameau,  Pierre  La  Ramée,  dit 
Ramus,  philosophe,  gram- 
mairien, philologue  du  XVF 
siècle. 

Ramenttvoir,  rappeler,  se  sou- 
venir. 

Raminagrobis.  Ce  serait  Guil- 
laume du  Boys,  dit  Crétin, 
poëte  du  XVl^  siècle.  Le 
rondeau  Prenez-la  se  trouve, 
avec  des  variantes,  dans  les 
poésies  de  Crétin. 

Ramons,  petits  balais  de  cui- 
sine. 

Rançon,  crochet,  pique,  halle- 
barde, grappin,  dard  acéré. 

Ramparer  (Se),  se  réparer,  se 
remettre  en  ^tat. 

Ranco  (De),  de  main  en  main, 
avec  ordre. 

Ranes,  rainettes,  grenouilles. 

Rane  gyrine,  gyrin,  têtard, 
grenouille  sous  sa  première 
forme. 

Rapallus,  nom  de  diable. 

Rapars,  moines  rapaces. 


Raphe,  jeu  à  coups  de  poing. 

Rasettes,  os  du  poignet. 

Rasouer,  rasoir. 

Rassoie,  rendu  sot;  aussi  sot 
que  possible. 

Rat  (Gros),  grosse  bévue, 
grosse  erreur. 

Rataconneur,  raccommodeur, 
rapetasseur. 

Râtelle,  rate. 

Ratepenade,  chauve-souris. 

Ratifier,  affirmer. 

Ratiocination,  Ratiociner,  rai- 
sonnement, raisonner. 

Rational,  raisonnant. 

Ratouere,  ratière. 

Ratz,  détroits  ;  sables. 

Ravasseur,  rêvasseur, 

Ravelins,  tranchées. 

Real,  espèce  d'esturgeon. 

Realement,  réellement. 

Rebatz,  esprits  follets. 

Rebec,  violon  à  trois  cordes. 

Rebecquer,  rebiffer. 

Rebidaines,  Rebindaines  (A 
jambes),  les  jambes  relevées," 
les  quatre  fers  en  l'air. 

Rebouscher,  s'émousser,  se  re- 
courber. 

Rebousse,  revêche. 

Rebras,  retroussis,  repli. 

Rebraz  (Double),  double  re- 
pli ;  cette  expression  veut 
dire  le  plus  possible. 

Rebrassit,  retroussa. 

Rébus,  façons  de  parler  parti- 
culières. 

Recepvent,  reçoivent. 

Recesses,  retraites. 

Record  'Être)  ou  recors,  se  sou- 


GLOSSAIRE-INDEX 


79 


venir. 

Receler  par  cœur,  réciter. 

Recollez  (Les  joueurs),  ayant 
repassé  leurs  rôles. 

Recompense,  reconnaissance. 

Record,  avertissement. 

Recordation,  souvenir. 

Recourser,  rebrousser,  retrous- 
ser. 

Recouvert,  recouvré. 

Recouvrer,  obtenir,  avoir. 

Recouvreur,  couvreur. 

Recreuz,  vaincus. 

Recueil,  Receuil,  accueil. 

Recuillir,  recueillir,  accueillir. 

Reculorum  (A),  à  l'écart, 

Recutitz,  circoncis. 

Redame  (Je),  j'aime. 

Rédiger,  réduire. 

Reduyt  à  mémoire,  rappela. 

Réfection,  repas. 

Refuis,  repoussés. 

Refuyent  (Se),  se  sauvent, 
s'éloignent. 

Regilian,  Quintus  Nonus  Re- 
gilianus,  Dace  d'origine, 
général  sous  Vespasien,  élu 
empereur  par  ses  soldats. 

Régis  (Pierre),  prédicateur  du 
XVie  siècle. 

Regnard,  renard. 

Regnault  de  Montauban, 
personnage  des  Quatre  Fils 
Aymon. 

Regoubillonner  ,Reguoubilloner , 
faire  le  réveillon. 

Regualles,  tuyaux  d'orgue. 

Reigletz,  filets  dorés. 

Relenteur,  odeur  de  relant,  de 
moisi,  de  renfermé. 


Relés,  relais. 

Religion,  maison  de  religieux, 
couvent. 

Remembrer ,  rappeler. 

Remémorer,  se  rappeler. 

Remolquer,  remorquer. 

Remore,  Echeneis  rémora,  pe- 
tit poisson  qui  s'attache  aux 
navires  à  l'aide  d'un  appa- 
reil à  succion,  mais  qui  n'en 
retarde  en  rien  la  marche. 

Remoytie,  moite. 

Remparer  (Se),  se  fortifier,  se 
mettre  derrière  des  remparts. 

Renaguer,  renier,  du  latin  re- 
negare. 

Rendouer,  le  Rendoir,  là  où  les 
actions  sont  punies  ou  ré- 
compensées. 

Reniguebieu,  renie-Dieu. 

Renier,  jurer. 

Repaire,  fiente  de  bête  sauvage. 

Repaisaille,  Repaissaille,  repas. 

Réparation  de  dessoubz  le  nez, 
ce  qu'on  mange. 

Repceoyt,  Repceu,  reçoit,  reçu. 

Repetacé,  rapiécé. 

Repeter,  demander  de  nouveau, 
réclamer. 

Repous,  Repouser,  repos,  palier; 
reposer. 

Requamé,  brodé,  niellé,  da- 
masquiné. 

Requiesce,   repose, 

Resjeuner,  Ressieuner,  Ressiner, 
faire  collation,  goûter. 

Resolution,  solution. 

Resplendentes,  resplendissantes. 

Response,  raiponce. 

Ressaleument,  re-salut,  re-salu- 


!8( 


GLOSSAIRE-INDEX 


ment,  nouveau  salut. 

Resserrer j  reprendre. 

Restes,  loisirs. 

Restile,  qui  rapporte  tous  les 
ans^  du  latin  restilis. 

Restrinctif,  astringent. 

Resudante,  suante. 

Resveiglay  (Me),  me  réveillai. 

Retaillaiz,  eunuques. 

Retaillatz  marranes,  renégats 
circoncis.  V.  Marranes. 

Retaillons,  morceaux  de  drap. 

Retepenade,  chauve-souris,  en 
languedocien. 

Retirant,  ressemblant. 

Retirante,  attenante. 

Retombe,  Retumbe,\3ise  à  boire. 

Retornant,  revenant, 

Retouble,  champ  fauché, 
chaume. 

Retraict,  cabinet  d'aisances. 

Retraict  du  guoubelet,  l'office, 
l'endroit  où  l'on  serrait  le 
service  de  table. 

Retraict  lignagier,  droit  qu'a- 
vait un  membre  de  la  lignée 
de  reprendre  un  héritage  à 
celui  qui  l'avait  acheté.  Ici 
retrait  signifie  latrines. 

Reuchlin,  théologien  du  XV!" 
siècle. 

Révélation  (La),  l'Apocalypse. 

Revenu  de  queue,  dont  la 
queue  a  repoussé,  ou  qui  a 
perdu  la  queue  ? 

Révérence,   respect. 

Revocquer,  Révoquer,  ramener, 
rappeler,  enlever,  faire  reve- 
nir. 

Revocquer  en  recordation,  rap- 


peler à  la  mémoire. 

Rez,  ras,  rasés. 

Rhabarbe,  rhubarbe. 

Rhagadies,    rhagades,  fissures. 

Rhizotome,  coupeur  de  raci- 
nes, du  grec. 

Rhodigina  (Jacoba),  femme 
ventriloque. 

Rhombe  girante,  toupie,  ou 
plutôt  sabot  tournant  sous 
les  coups  de  fouet  que  lui 
applique  le  joueur. 

Ribaudaille,  péjoratif  de  ri- 
baud. 

Ribaulx,  vauriens, 

Ribleur,  coureur  de  nuit, 

Ribon,  ribaine,  bon  gré,  mal 
gré. 

Ricasser,  sourire,  rire  sous 
cape. 

RiCHARDFORT,  Jean  Richafort, 
musicien  belge  du  XV^  siè- 
cle. 

Richinant,  rechignant. 

Ricqueracques,  ulcère  du  fon- 
dement. 

Ridde,  monnaie  d'or. 

RiFLANDOuiLLE,  géant  imagi- 
naire. 

Rigoller,  RigouUer,  rire  joyeu- 
sement^ se  réjouir. 

Rillé,  Rislé,  rillettes,  conserves 
de  fragments  de  porc;  celles 
de  Tours  sont  particulière- 
ment célèbres. 

Rimasseurs,  rimailleurs. 

Rimer,  se  dit,  en  saintongeais, 
d'un  aliment  qui  s'attache 
au  fond  du  vase  où  on  le 
fait    cuire  ;    d'où  :  «   As-tu 


GLOSSAIRE-INDEX 


:8: 


pnns  au  pot,  veu  que  tu 
rimesdesja?   » 

RiOLE  (La).  La  Réole,  chef- 
lieu  d'arr.,  Gironde  . 

Riolé,  rayé,  bariolé. 

Riottes,  disputes  de  peu  d'im- 
portance. 

Riparographe,  qui  écrit  sur  des 
riens. 

RiPHÉES  (Montsj,  monts  hyper- 
boréens. 

Ripperie^  escroquerie. 

Rislé.  V.  Rillé. 

Risses j  hérissons. 

RivAU  (Le),  village  du  Chi- 
nonnais  ;  est-ce  le  même  que 
Rivière  ? 

Riveran,  passeur  en  bateau. 

Rivereaux,  gaffes,  crochets 
de  bateliers. 

Rivière,  La  Rivière^  arr.  de 
Chinon,  Indre-et-Loire,  où 
il  y  avait  un  pèlerinage  re- 
nommé. 

Robbe  (Bonne),  commère  ave- 
nante  de  toutes   les  façons. 

Robbe  (En),  à  la  dérobée. 

Robber,  dérober,  voler. 

Robbes,  tout  le  bagage  d'un 
voyageur,  de  l'italien  ro66a. 

Robert  le  Diable,  ancien  ro- 
man populaire. 

Robinet  (François),  contem- 
porain de  Rabelais  à  Mont- 
pellier. 

RoBOASTE,  géant. 

Roc,  Rocques,  la  tour,  aux 
échecs. 

Roche-Clermauld  (La),  arr. 
de  Chinon,   Indre-et-Loire. 


RocHE-PosAY  (Jean-Châtai- 
gner,  seigneur  de  la),  maî- 
tre d'hôtel  de  François  l^'^ 
et  de  Henri  II. 

RocHE-PosAY  (La),  arr.  de 
Châtellerault,  Vienne. 

Roches-Sainct-Paoul,  arr.  de 
Vendôme,  Loir-et-Cher. 

Rocquette  Tarpeïe,  petite  ro- 
che Tarpéienne. 

Rocquettes  de  cheminées,  for- 
tin; les  cheminées  sont  les 
forteresses  des  andouilles 
qu'on  y  fume. 

RoDiLARDus,  Ronge-lard. 

RoDOGiNE  (Jacobe),  ou  Rodi- 
gine,  femme  ventriloque 
italienne. 

Rogue,  bélier  dont  les  cornes 
commencent  à  pousser. 

Roigneux,  qui  a  la  rogne,  la 
gale  invétérée. 

Romain  (Ludovic),  Louis  de 
Verthema,/)afnz/o  romane, 
voyageur  du  XV^  siècle. 

Romanicque  (A  la),  à  la  ro- 
maine. 

Romicoles,  habitants  de  Rome. 

Romipetes,  Romivages,  pèle- 
rins allant  à  Rome. 

Rondelle,  bouclier  rond. 

RoNDiBiLis  (Maistre)  ;  serait 
Guillaume  Rondelet,  méde- 
cin que  Rabelais  connut  à 
Montpellier. 

Ronfle,  le  point,  dans  un  an- 
cien jeu  de  cartes. 

Rongneurs,  rogneurs. 

RosATA  (Albéricde),  juriscon- 
sulte bergamasque. 

36 


282 


GLOSSAIRE-INDEX 


Rostocosto  (italien),  rôti  cuit. 

Rotans,  tournans,  du  latin 
rotare. 

Rotte,  liens,  osier, 

Rouaisons,  rogations. 

Rouart,  bourreau  qui  roue. 

RouBON,  musicien. 

Rouelle,  petite  roue,  rondelle. 

Rouer,  faire  la  roue. 

RouiLLAC,  bourg  de  grande 
renommée  gastronomique, 
arr.  d'Angoulême,  Cha- 
rente. 

Roupieuse,  qui  a  la  roupie  au 
nez. 

Roupt,  Roupie,  rompu  ;  rup- 
ture, cassure  ;  déroute. 

Rousseau,  François  Roussel, 
ou  Rossello,  musicien  ita- 
lien du  XVP  siècle. 

Roussin,  cheval  entier,  cour- 
taud. 

Roust,    Rousties,    rôt,  rôties. 

Route,  déroute. 

RouzÉE,  Cyprien  de  Rore,  ou 
van  Roor,  musicien  flamand 
du  XVie  siècle. 

Royaulx,  monnaie  d'or  de 
Philippe  le  Bel. 

RoYDDiMET  (Dom),  Roide-y- 
met,  nom  forgé  par  Rabe- 
lais. 

Rozuins,  princes,  de  l'hé- 
breu ? 

Ruach,  vent,  esprit,  en  hé- 
breu. 

Ruant,   faisant  descendre. 

Rubette,  graissât,  grenouille 
verte  dont  le  sang,  dans 
l'antiquité,     était     regardé 


comme  vénéneux  ;  Pline  en 
parle. 

Ruer,  se  précipiter. 

Ruez,  renversés. 

Rugient,  rugissent. 

Rugient,  part,  prés.,  rugis- 
sant. 

Rustrement,  vigoureusement, 
solidement. 

Rustrie,  Rusterie,  grossièreté  ; 
tête  de  mouton. 

Ruysseau  qui  passe  à  Saint- 
Victor,  la  Bièvre. 

Ruyt,  rut. 

S.  P.  Qi  R.,  Senatus  populus- 
que  romanus,  le  Sénat  et  le 
peuple  romain. 

Sabbot,  sabot,  espèce  de  tou- 
pie que  les  enfants  font  tour- 
ner à  coups  d'un  fouet  de 
peau  d'anguille. 

Sabée,  en  Arabie. 

Sabez  quey,  hillots  (gascon), 
savez-vous,  mes  enfants. 

Sabine,  sabinier. 

Sable,  noir,  en  blason. 

Sabourre,  lest  de  navire,  du 
lat.   saburra. 

Sabourre,  Saburé,  plein,  empli, 
chargé,  lesté,  saturé,  rassa- 
sié. 

Saccade  'Bailler  la),  donner  une 
forte  secousse. 

Sacmenter,  mettre  en  pièces, 
mettre  à  sac. 

Sacqueboutte,  instrument  à 
vent. 

Sacquer,  frapper. 

Sacquer  l'espée,  tirer  l'épée  du 


GLOSSAIRE-INDEX 


t83 


fourreau. 

Sacre,  oiseau  dressé  pour  la 
chasse. 

Sacre,   sacrée. 

Sacre  (La  fête  du),  la  fête  du 
Saint-Sacrement,  la  Fête- 
Dieu. 

Sacrée,   consacrée. 

Sacrificule,  prêtre. 

Sades,  gracieuses,  douces. 

Saffrettes,  piquantes,  agaçan- 
tes, appétissantes. 

Sagamions,  administrateurs,  de 
l'hébreu? 

Sagane,  sorcière. 

Sage,  Saie,  Saye,  Sayon,  vête- 
ment court. 

Sagettesj  flèches,  du  lat.  sa- 
gittse. 

Sagres,   port  portugais. 

Saie,  Saye.  V.  Sage. 

Saingelais,  Mellin  de  Saint- 
Geiais,  poëte  français  du 
XVie  siècle. 

Sainct  Adauras,  saint  en  l'air. 

Sainct-Aubin  du  Cormier  (La 
journée  de).  C'est  à  Saint 
Aubin  du  Cormier,  arr.  de 
Fougères,  Ille- et- Vilaine  , 
quese  livra  une  bataille  entre 
Charles  VIII  et  le  duc  de 
Bretagne,  le  28  juillet  1484. 

Sainct-Ayl,  Saint-Ay  (pronon- 
cez Saint-Y),  arrond.  d'Or- 
léans, Loiret. 

Sainct  Alipentin^  saint  de  la 
fabrique  de  Rabelais. 

Sainct  Babolin,  ou  saint  Babo- 
lein,  premier  abbé  de  Saint- 
Maur-les-Fossés,    au     VIF 


siècle. 

Sainct  Balletrou,  saint  de  la 
fabrique  de  Rabelais. 

Sainct  Clouaud,   saint  Cloud. 

Sainct-Espain,  Saint-Espain, 
arr.  de  Chinon,  Indre-et- 
Loire. 

Sainct-Florent,  abbaye  de 
bénédictins,  arr.  de  Saumur, 
Maine-et-Loire. 

Sainct  François  le  Jeune, 
saint  François  de   Paule. 

Sainct-François  (Mal),  parce 
que  les  disciples  de  saint 
François  faisaient  vœu  de 
pauvreté. 

Sainct  Goderan,  saint  poi- 
tevin. 

Sainct-jacques  ;  est-ce  Saint- 
Jacques-des-Guérets,  arr. 
de  Vendôme,  Loir-et-Cher? 

Sainct-Jago,  de  Bressuire, 
Saint-Jacques. 

Sainct -Jan  de  la  Palisse, 
Saint  Jean,  dans  l'Apoca- 
lypse. 

Sainct-Jean  Decollaz,  saint 
Jean  Baptiste,  qui  fut  dé- 
collé. 

Sainct  Joan,  saint  Jean. 

Sainct-Louant,  Sainlouand  , 
prieuré  du  diocèse  de  Tours, 
arr.  de  Chinon ,  Indre-et- 
Loire. 

Sainct  Ligaire;  est-ce  S.  Li- 
goire,  S.  Ligorius,  qui  se 
fête  le  i  3  septembre? 

Sainct-Mahieu  ,  cap  sablon- 
neux non  loin  de  Brest. 

Sainct-Maixent,  arr.deNiort, 


284 


GLOSSAIRE-INDEX 


Deux-Sèvres, 

Sainct  Nicolas  (Les  exemples 
de),  sa  légende. 

Sainct  Sang  breguoy,  Sainsam- 
breguoy,  saint  sang  de 
Dieu,  juron. 

Sainct-Olary,  abbaye  de  la 
fabrique   de   Rabelais, 

Sainct  Picault,  saint  martyrisé 
à  Nicée. 

Sainct  RiGOMÉ,  saint  Rigomer, 
Poitevin. 

Sainct  Sébastian, Saint-Sébas- 
tien, arr.  de  Nantes,  Loire- 
Inférieure. 

Sainct-Sever,  Saint-Sever, 
chef-lieu  d'arr.  des  Landes. 

Sainct  Treignan,  Écossais. 

Saincte  Geltrude,  sainte 
Gertrude. 

Salade,  espèce  de  casque. 

Salel  (Hugues),  abbé  de 
Saint-Chéron,  ami  de  Clé- 
ment Marot,  auteur  du 
dizain  qui  précède  le  livre 
II. 

Saleures,    salaisons. 

Salkbrenaux,  Sallebreneux, 
sales  ;  littéralement,  sales 
merdeux  (bren). 

Sallet.  V.  Salel  (Hugues). 

Salses,   salées. 

SaluernCj  grand  vase  à  boire. 

Salutz  d'or,  monnaie  de 
Charles  VI. 

Salvation,  salut;  état  de  sal- 
vation  :   état  de  grâce. 

Sahations,  répliques  juridi- 
ques. 

Salvernes,    coupes. 


Samagarie,  contrée  d'Asie. 

Sambreguoyj  Sambroguoy ,  ju- 
ron. V.  Sainct  sang  breguoy. 

Samosatoys  (Le  philosophe), 
Lucien,  de  Samosate,  écri- 
vain du  IP  siècle. 

Sam-malo,  Saint-Malo. 

Sanctimoniales,  nonnes,  reli- 
gieuses. 

Sandrin,  ou  Sandryn,  musi- 
cien. 

Sang  de  Mars,  plante;  est-ce  la 
sanguinaire? 

Sanglerons,  petits  sangliers, 
marcassins. 

SangloLitir,   avoir  le  hoquet. 

Sangreal,  Sang  greal,  le  sang 
du  Christ;  le  Saint  Gréai, 
ou  Graal,  est  le  plat  qui  re- 
çut le  sang  du  Christ. 

Sangdedez,  petites  épées. 

Sanguifier,  transformer  en 
sang. 

Sanie,  pus  mal  élaboré. 

Sanie  des  oreilles,  cérumen. 

Sanità  et  guadain,  Messer, 
santé  et  gain,  Messire. 

Sanmaieu,  saint  Matthieu,  en 
breton. 

Sansay,  Sansais,  arr.  de  Niort, 
Deux-Sèvres. 

Sa/i/o/jj'cçue, absinthe  maritime. 

Santorons,  santons,  sorte  de 
moines  mahométans. 

Sanxi,  donné  sanction,  ac- 
cepté. 

Saphran,  bonnet  jaune  des 
banqueroutiers. 

Saphran,  safran,  pistil  du  cro- 
cus saiivus. 


GLOSSAIRE-INDEX 


■M 


Saporta  (Antoine),  docteur  en 
médecine  de  Montpellier, 
mort  en  i  SyS, 

Sarabroth, géant. 

Sarbataine,  sarbacane. 

Sardaine,  la  Sardaigne  ;  une 
sardine. 

Sarge,  serge. 

Sarins,  gardiens,  de  l'hébreu? 

Sarpe,  serpent.   V.  Serpe. 

Sarrabovites,  religieux  égyp- 
tiens de  vie  déréglée, 

Satalie,  dans  la  Pamphylie, 
en  Asie. 

Satin  (Pays  de),  pays  ovl  la 
vie  est  douce  et  agréable  ; 
pays  des  tapisseries. 

Saulgrenée,  fricassée,  rata- 
touille, macédoine  de  légu  - 
mes. 

Saulieu,  arr.  de  Semur,  Côte- 
d'Or. 

Saullaye,  Sauloye,  Saulsaye, 
terrain  planté  de  saules. 

Saulmates.   V.  Saumades. 

Saulmones,  saumons. 

Saulmur,  Saumur,  chef-lieu 
d'arr.,   Maine  et-Loire. 

Saulnier,  marchand  de  sel. 

Saulvement,  Saulveté,  sécurité, 
salut. 

Saumades,  Saumates,  viandes 
salées. 

Saussignac;  peut-être  Sausse- 
nac,  arr.  d'Albi,  Tarn?  Il 
y  a  un  Saussignac-Razac, 
arr.  de  Bergerac,  Dordogne. 

Savasta,  en  Asie. 

Savorados,  os  qu'on  met  dans 
la  marmite  pour  donner  de 


la  saveur  au  bouillon. 

Saye,  soie. 

Saye,  Sayon.  V.  Sage. 

Scale,  Scalle,   escale. 

ScALiGER  (Jules-César),  philo- 
sophe et  médecin  du  XVI^ 
siècle.  Rabelais  mourut  en 
I  5  5  3 ,  et  le  livre  de  Scaliger 
auquel  il  est  fait  allusion 
dans  le  V"^  livre  est  de 
i557. 

Scammonie,  Scammonnée  colo- 
phoniacque,  de  Colophon, 
en  Asie  Mineure;  résine 
fournie  par   la  scammonée. 

Scandai,  corde  de  la  sonde 
(Jal). 

Scaputions,  capuchons. 

Scatophages,  mangeurs  de  dé- 
jections. 

Scelle,  Selle  persée,  chaise  per- 
cée. 

Scendaux,  enveloppes  de  reli- 
ques? Sendal,  ou  cendal, 
étoffe  de  soie  légère. 

Sceur,  Sceureté,  siàr,  assuré  ; 
sûreté,  assurance,  certitude. 

Schedules,  cédules. 

Scybale,  excrément  endurci, 
du  grec. 

Scintille,  subst.,  étincelle,  fai- 
ble apparence. 

Sciomantie,  divination  par 
l'ombre   d'un  mort. 

Sclirrhotiques,  qui  ont  des 
squirrhes. 

Scordion,  Scordon,  german- 
drée  aquatique. 

Scorpions,  espèce  de  fléaux  de 
guerre . 


(86 


GLOSSAIRE-INDEX 


Scotines,  ténébreuses,  du  grec, 
ou  parallusion  à  J.  Scot. 

ScoTUS,  Duns  Scot,  le  Docteur 
Subtil. 

Scripteurs,    écrivains. 

ScuRRON,  Jean  Schyron,  mé- 
decin de  Montpellier. 

ScythropeSj  lugubres,  du  grec. 

Sebaste,  respectable,  vénéra- 
ble, du  grec. 

Sechabots,  escarbots,  scarabées. 

Secundaca^sécuridaque, plante. 

Seder,   apaiser,   du  lat.  sedare. 

Segré,  chef-lieu  d'arr.  de 
Maine-et  Loire. 

Seguin,  musicien. 

Seigner  (Se),  se  signer,  faire  le 
signe  de  la  croix. 

Seille,  seigle. 

Seillaux,  SeilleauXj  Seilks^ 
seaux. 

Seine,  réseau. 

Séjour,  loisir,  repos,  inoccupa- 
tion. 

Séjourner,    reposer,  tarder. 

Sela,  affirmation,  en  hébreu. 

Selande,  Zélande. 

Seleucides  (Oizeaux),  oiseaux 
envoyés  par  Jupiter  pour 
détruire  les  sauterelles. 

Seleucus,  mathématicien  ro- 
main du  I*^""  siècle. 

Semaise,  broc  en  bois. 

Sembler,  ressembler. 

Semervé,  Semarvé;  est-ce 
Semerville,  arr.  de  Blois, 
Loir-et-Cher? 

Semonce,  demande. 

Semondre,  ordonner,  inviter. 

Senaire,  de  six  pieds. 


Senege,  Sénégal. 

Senestre,  gauche. 

Senogues,  médicaments  pur- 
gatifs. 

Senoys,  de  Sienne. 

Sentement,  sentiment. 

Sententier,  rendre  des  senten- 
ces, des  arrêts. 

Sequenie,  Sequenye,  souque- 
nille. 

Sequente,  suivante. 

Sequane,  la  Seine,  du  lat.  5e- 
quana. 

Seraph,  monnaie  d'or  orien- 
tale. 

Serapion  d'.'^scalon ,  auteur 
d'un  livre  sur  les  songes. 

Sercleurs,  sarcleurs. 

Seres,  probablement  les  Chi- 
nois. 

Sergent,  huissier. 

Serpe  Dieu,  serpent  de  Dieu, 
juron. 

Serper,  lever. 

Serpentine,  pièce  de  canon. 

Serpillière,  tablier. 

Serpoullet,  serpolet. 

Serrail,  palais,  château,  habi- 
tation, chez  soi. 

Serrargent,  jeu  de  mots,  pour 
sergent . 

Sert,  le  premier  service  à  table. 

Sertorianes  (Guerres),  guerres 
de  Sertorius. 

Serra/eur,  sauveur,  Jésus-Christ. 

Server,  observer. 

Sesolfiez,  troublés. 

Seuil,  entrée  du  port. 

Seuillé,  abbaye  de  bénédictins 
près    de  Chinon  ;    Seuilly- 


GLOSSAIRE-INDEX 


7 


l'Abbaye,  arr.  de  Chinon , 
Indre-et-Loire. 

Sexterée,  setier. 

Sexte-Essence,  essence  superla- 
tive, la  quintessence  étant  le 
dernier  résultat  de  l'analyse 
des  alchimistes. 

Seyer,  scier,  couper  le  blé  à  la 
faucille. 

Sij  si  bien  que,  pourtant. 

Sicinnie,  Sicinnistes,  genre  de 
danse,   danseurs. 

Siderite  (Pierre),  aimant. 

Sidoine,  Sidon,  en  Phénicie. 

SiGEiLMES,  en  Libye. 

Sigillaiif,  à  sceau. 

Signamment^  notamment. 

Signé,  signalé,  tracé. 

Simulachre,  statue. 

Simulte,  haine. 

Sinapiser,  moutarder,  assaison- 
ner,  saupoudrer. 

SiNAYS,  Sinaï. 

Sinon,  Grec  rusé  au  siège  de 
Troie. 

Sinopien,  de  Sinope,  en  Ana- 
tolie. 

SinopUj  vert,  en  blason. 

Sions,  tourbillons. 

Siphach,  la  plèvre,  en  arabe. 

Siriace  (Mer),  mer  de  Syrie. 

S/roc/i,  siroco,  vent  du  sud-est. 

Sisame,  sésame. 

Siticines,  chantres  des  obsèques. 

Smach  ;  Rabelais  l'oppose  à 
brusq,  qui  signifie  âpre. 

Smilax,  esquine,  plante. 

Smyrnium,  maceron,  plante. 

Sobresse,  sobriété. 

Socialement,    à   la  façon  d'un 


ami. 
SoHiER,  musicien  du  XVje  siè- 
cle. 
Soingneusej  inquiétante. 
Solas.  V.  Soûlas. 
Soleretz,  Sollerets,  armures  des 

pieds. 
Solier,  plancher. 
SoLiN,     Caius    Julius  Solinus, 

compilateur  latin. 
Solu,  résolu. 
Solue  (Oraison),  manière   libre 

de  parler,   prose ,    du  latin 

oratio  soluta. 
Solvables,  payables. 
SomateSj   corps,  membres,   du 

grec. 
Sommade,    charge  d'une  bête 

de  somme. 
Sommer,  additionner,   faire  la 

somme. 
Sommier    d'orgue,     coffre    où 

s'emmagasine    l'air    envoyé 

par  les  soufflets. 
Somnial,  tiré  des  songes. 
Sones,  sonnez,  les  deux  six  aux 

dés. 
SoNGECREUX,  auteur  supposé  de 

livres  facétieux. 
Sonnant,  chantant. 
Sonnet,  petit  son. 
Sophie,  la  mosquée  de  Sainte- 
Sophie. 
SoPHRONÉ,   sage,    prudent,    du 

grec. 
SopoLis,  nom  grec  emprunté  à 

l'Anthologie. 
SoRANus,    Éphésien ,   médecin 

grec  ;  exerçait  à  Alexandrie 

au  IP  siècle. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Sorbonicoles,   qui  fréquentent^ 

qui  honorent  la  Sorbonne. 
Soretz,  saurs. 
Sororité,  lien  de  sœur. 
Sort  principal^  le  capital. 
SoRTiBRANT,     de     Conimbres , 

géant. 
Sotrins,  gouverneurs,  de  l'hé- 
breu ? 
Soubarbade,  muselière. 
Soubastement,  soubassement. 
Soubdan,  soudan. 
Soubelin,  souverain,  martre  zi- 
beline. 
Soubrequart,    quatrième   com- 
plémentaire. 
Soubsecretain,  sous-sacristain. 
Soubstraicte  (Vin    de),  dernier 

vin  tiré  du  pressoir. 
Soucilles,  sourcils. 
Soudant,  soutenant. 
SouEVE,  Souabe. 
Soufflegan,  suffragant. 
SouiCE,   SouissE,  Suisse. 
Souillartde  cuysine,  marmiton. 
Soûlas,  soulagement,  consola- 
tion,   joie,    plaisir,    du  lat. 
solatium. 
Soulcil,  souci. 
Souldre,  résoudre. 
Souloir,     avoir    coutume,     du 

lat.  sokre. 
Soupes   de  primes,  tranches  de 
pain  garnies  de  fromage  ou 
de  gras  de  bœuf. 
Soupiz,  frippés. 
Sourdre,  naître,  jaillir. 
Soutte ,     soute,     emplacement 
destiné  à  serrer,  à  bord  des 
navires,  les  provisions,  soit 


de  guerre^  soit  de  bouche. 
Soui'ieigne,  souvienne. 
Spadonicque,  rendu  stérile,  du 

lat.  spado. 
Spagitides  (Artères),  artères  du 

cou. 
Spagnola,  Espagne. 
Spatule,  épaule. 
Spectable,  visible;  regardable, 
méritant  d'être  regardé,  beau 
à  voir. 
Speculaire,  réfléchissant  la  lu- 
mière. 
Speculance,  action  de  réfléchir 

la  lumière. 
Sperme    d'emeraulde  ;   doit-on 
lire  presme  ou  prime  d'éme- 
raude? 
Sphaceler ,      meurtrir,      gan- 
grener. 
Spliengitide;  M.  Burgaud  pro- 
pose de  Vire phengiiide,  trans- 
parente. 
Sphragitide  (Terre),  terre  sigil- 
lée,   marquée    d'un  sceau  ; 
substance  alumineuse  rosée, 
employée    autrefois   comme 
astringent. 
Sphynges ,     animaux      fantas- 
tiques. 
Spica  celtica,  grande   lavande. 
Spirer,  respirer. 
Spirale,  petit  canon. 
Spodizateurs,  pulvérisateurs. 
Spondyles,  vertèbres. 
Sporades,  îles  de  la  Manche. 
Spyrathe,  crotte  de  chèvre. 
Squinanche,  esquinancie. 
Squinanthi,  résine  du  Calamus 
draco. 


GLOSSAIRE-INDEX 


289 


SS  (Allonger  les),  en  faire  des 

ff ,  falsifier  les  comptes,  faire 

Tdes  francs  (ff)  avec  les  sols  (ss) . 

Stade,  mesure  grecque  de  i  2  5 

pas. 
Stamboucqs,   bouquetins. 
Stères,  animaux  fantastiques. 
Sternomantes,  ceux  qui  parlent 
de  la  poitrine,  du  sternum, 
du  grec. 
Sternomantie,  divination  parle 

sternum. 
Stichomantie   sibylline,  divina- 
tion par  des  vers  de  la  Si- 
bylle. 
Stipe,  monnaie, 
Stocfisé,  réduit  à  l'état  de  mo- 
rue sèche,  stockfish. 
Stœchas,  lavande. 
Strain,  strass,  faux  diamant. 
Strossy  (Philippe;,  Strozzi,  né- 
gociant, père  de  Pierre,  ma- 
réchal de  France  au  service 
de  Henri  II. 
Stryges,  oiseaux  fantastiques. 
Style,  petite  baguette  pointue, 

stylet . 
Stymphalides,    oiseaux  du  lac 
de  Stymphale,  tués  par  Her- 
cule. 
Stypticité,  astringence. 
Subit,  adv.,  subitement. 
Subler,  Sublet,  siffler,  sifflet. 
Submirmillant,  murmurant. 
Subside,  aide,  secours. 
Substantifique,  substantiel. 
Succéder,  arriverheureusement. 
Succès  (Par),  successivement. 
Successitres,   successeurs  au  fé- 
minin. 

Rabelais.  V. 


Suèdes  ;  il  faudrait  lire  Sueves. 

Suffrages,  prières. 

Suffrages     (Menus),      petites 

prières. 
Sugser,  sucer,  vider. 
Suidas,    lexicographe   grec  du 

X«  siècle. 
Suille  {Queste^,  quête  du  porc, 

faite  à  Noël  par  le  curé. 
Sulz,  Suzeau,  sureau. 
Supellis,  surplis. 
Super coquelicantieux ,    surpas- 
sant tous  ceux  qui  ont  porté 
le  bonnet  de  fou. 
Supereroger,  répandre. 
Supererogation    (De),     d'excé- 
dant. 
Super gurgiter,  regorger. 
Supernel,  suprême. 
Suppied,     sous-pieds ,    pédales 

d'orgues. 
Supports,     Suppous,     suppôts, 

soutiens,  défenseurs. 
SuRAiNE  Orangiers  de),  dans  le 
V^  livre.  Le  ms.  porte Sa«- 
Reme  ;  serait-ce  San-Remo  ? 
Surgeoit ,  survenait,  surgissait. 
SuRiE,  Syrie. 
Surot,  maladie  au  canon  d'un 

cheval. 
Susanné,  suranné. 
SuTOR,  Pierre  Cousturier,  doc- 
teur de  Sorbonne. 
Suzeau.  V.  Sulz. 
Suzat  (Vinaigre),   vinaigre   de 

sureau. 
SwEDEN-RiCH,  la  Suède. 
Sycoinantie,  divination   par   le 

figuier. 
Sycophage,  mangeur  de  figues, 

37 


290 


GLOSSAIRE-INDEX 


du  grec. 

Sylvestre  de  Prierio  ,  jacobin 
du  XVP  siècle. 

Symmeterye,  symétrie. 

Symmistes,  complices,  inities 
aux  mêmes  mystères. 

Symptomates,  symptômes. 

Synapizer.  V.  Sinapiser. 

Synecdochique,  synecdoche,  es- 
pèce de  métonymie  en  vertu 
de  laquelle  on  donne  une 
signification  particulière  à  un 
mot  qui,  dans  le  sens  pro- 
pre, a  une  signification  plus 
générale. 

Synesius,  écrivain  grec  du 
IVe  siècle. 

Syslolicque,  mouvement  de  con- 
traction. 

Tabachins,  serviteurs,  cuisi- 
niers, de  l'hébreu? 

Tabellaires,  lettres,  messages. 

ra6mn(Laict;,lait  préparé  pour 
les  émaciés,  du  lat.  tabès. 

Tabide,  atteint  de  consomp- 
tion, du  lat.  tabès. 

Table  (Seconde),  second  ser- 
vice. 

Tabliers,  échiquiers. 

Taboureurs,  joueurs  de  tam- 
bours; amants  heureux. 

Taprobaniens,  habitants  de  la 
Taprobane,  l'île  de  Ceyian. 

Tabus,  soucis,  tourments. 

Tabus  (Fagoteurs),  chercheurs 
de  querelles,  faiseurs  de  ta- 
page. 

Tabuster,  tourmenter. 

Tac,  nom  d'une  maladie  con- 


tagieuse du  XV^  siècle. 

Taces,  tasses. 

Tacquin;  il  n'y  a  pas  là  de  pro- 
fession, il  n'y  a  qu'une  as- 
sonance à  Tarquin. 

Tacuin,  taquin,  avare,  truand. 

Tadournes,  canards  sauvages. 

Tafetas  (Vin  de],  vin  doux  à 
boire  ;  on  dit  encore  d'une 
boisson  agréable  :  C'est  un 
velours. 

Taillebacon,  taille-jambon,  de 
l'anglais  bacon. 

TAiLLEBOuRG^arr.  deSaint-Jean- 
d'Angéiy,  Charente- Infé- 
rieure. 

Taille-viej  coupe  la  voie,  de 
l'it.  taglia  via. 

Taillon,  morceau,  tranche. 

Taillon,  petite  taille,  petit  im- 
pôt. 

Tain,  arr.  de  Valence,  Drôme. 

Talares  (Robes)  ,  robes  qui 
descendent  très-bas. 

Talemouse,  espèce  de  pâtis- 
serie ;  celles  de  Saint  Denis 
sont  encore  célèbres. 

Taies,  osselets,  dés. 

Taluer,  donner  du  talus,  delà 
pente  ;  solidifier. 

Talvassiers ,  hâbleurs,  gens 
grossiers. 

Tamarin,  c'est  la  pulpe  du 
tamarindus  indica. 

Tanné,  couleur  de  tan,  cou- 
leur foncée. 

Tanquart,  grand  pot  à  bière. 

Tant  jazer,  c'est  trop  parler. 

Tapinois  (Isie  de),  île  des  mi- 
sérables. 


GLOSSAIRE-INDEX 


:9I 


Tappecoue  (Frère  Etienne),  cor- 
delier  de  la  fabrique  de 
Rabelais. 

Taprobana,  l'île  de  Ceylan. 

Tarabinj  Tarabas,  formule  de 
conjuration  devenue  une 
plaisanterie. 

Tarande,  animal  fantastique 
dont  parlent  ^lien  et  Pline. 

Tare,  tache. 

Targon,  estragon. 

Tartaretus  (Petrus) ,  Pierre  Tar- 
taret,  docteur  en  Sorbonne 
du  XVie  siècle. 

Tartes,  Tartres,  Tartares. 

Tartre,  tertre. 

Tartre  borbonnoise,  tarte  bour- 
bonnaise, assemblage  de  sa- 
leté, bouse  de  vache. 

Tassettes,  cuissards. 

Tatin  fUn',  un  peu. 

Tauchie  (Ouvrage  de),damas- 
quinure  (Littré). 

Tauchié,  damasquiné. 

Taulpetiers,  ennemis  de  la  lu- 
mière. 

Taureau  !Le  gros)  de  Berne, 
Pontiner,  le  sonneur  de  corne 
des  Suisses,  qui  fut  tué  à 
Marignan. 

Tedieux,  ennuyeux,  du  lat. 
tssdium. 

Teils,  tilleuls. 

Teleniabin,  marine,   en  arabe. 

Telephiuin,  plante,  telephe. 

Tellumon,  le  génie  des  forces 
de  la  terre. 

Temperie,  Temperye,  saison 
tempérée;  modération. 

Tempeste     (Pierre),     principal 


très-sévère  du  collège  de 
Monlaigu,  au  XVl*^  siècle. 

Temple j  tempe. 

Templettes,  bijoux  pour  orner 
la  tête. 

Tempter ,  Temptation,  tenter, 
tentation. 

Tenare,  la  porte  de  l'enfer. 

Tenaud,  frère  Jean  Thenaud, 
suivant  M.  Burgaud. 

Tenebrions,  esprits  des  ténè- 
bres. 

Teneur,  continuité. 

Tenissiez,  tinssiez. 

Tenites,  divinités  du  sort. 

Tephramantie,  divination  par 
la  cendre. 

Tereus,  qui  fut  changé  en 
épervier. 

Teriere,  tarière. 

Termes,  Paul  de  Thermes,  qui 
commandait  le  corps  fran- 
çais envoyé  au  secours  des 
Écossais  contre  les  Anglais, 
en  1  549. 

Terminer,  déterminer. 

Terne,  les  deux  trois,  aux  dés. 

Terreistreité,  faculté  d'être  ter- 
restre. 

Terriene,  terre  à  terre. 

Terriens,  de  la  terre. 

Terrigoles,  oiseaux. 

Terse,  frotté,  poli,  du  lat. 
tersus. 

Tesmoin  (Pierre),  Pierre  Mar- 
tyr, Milanais,  auteur  d'ou- 
vrages sur  l'Amérique. 

Tesniere,  tanière. 

Tesseré,  marqueté,  du  lat.  tes~ 
seratus. 


GLOSSAIRE-INDEX 


Tesson j  l'arbre  d'un  pressoir. 

Testament,  la  tête  et  l'esprit, 
du  lat.  testa  et  mens. 

Teston,  monnaie. 

Testonner,  faire  la  toilette  de 
la  tête,  soigner  la  tête,  coif- 
fer, peigner. 

Testonneurs,  coiffeurs. 

TestZj  écorce  dure. 

Tétrade,  nombre  de  quatre, 
du  giec. 

Tetradiqae,  à  quatre  parties. 

Tetragone,  à  quatre  côtés. 

Teiricque,  Tetrique,  de  mau- 
vaise humeur, brusque, maus- 
sade. 

Teucrion,  germandrée. 

Tezez,  tondus. 

Thacor,  fie  au  fondement,  en 
hébreu. 

Thalamege,  navire  de  luxe 
garni  de  lits. 

Thalames,  ville  de  Laconie. 

Thalasse,  mer,  du  grec;  Rabe- 
lais en  fait  le  nom  d'un 
port. 

Thalmondoys.Talmontois,  par- 
tie de  la  Vendée. 

Thamous,  nom  du  dieu  Pan 
chez  les  Égyptiens. 

Thaumaste,  admirateur,  du 
grec. 

Thebizonde,  Trébizonde. 

Theleme  ,  libre  arbitre,  qui 
agit  à  son  gré,  du  grec. 

Theodolet,  interlocuteur  d'un 
dialogue    contre    le    paga 
nisme. 

Theomaches,  combattant  les 
dieux,  du  grec. 


Theon;  il  y  a  deux  mathéma- 
ticiens grecs  de  ce  nom, 
l'un  du  Il<^,  l'autre  du 
IVe  siècle. 

Theophraste,  naturaliste  grec 
du  IIl^  siècle  avant  J.-C. 

Theos,  Dieu,  en  grec. 

Therapeutice,  thérapeutique. 

Theriacle,  thériaque,  médica- 
ment polypharmaceutique 
que  vendaient  jadis  les  char- 
latans. 

Theriacleiirs,  vendeurs  de  thé- 
riaque, charlatans  des  rues. 

Thermanstrie,  genre  de  danse. 

Thesaur,  Thesor,  trésor, 

Thibaut  l'Aignelet,  le  berger, 
dans  la  farce  de  Pathelin. 

Thielles,  bourrasques,  du  grec. 

Thlasié,  Thlibié,  rendu  stérile. 

Thoës,  animal  fantastique  dont 
parle  Pline. 

Tholouse,  Toulouse. 

Thomas,  estomac. 

Thomas  l'Anglois,  Thomas 
Becket,  archevêque  de  Can- 
torbery. 

Thohu  et  BoHU  (Iles  de),  îles 
désertes  et  incultes,  en  hébr.? 

Thracie,  genre  de  danse. 

Threisses,  de  Thrace. 

Thuscan,  toscan,   bon    italien. 

Thyades,  prêtresses  de  Bac- 
chus,  bacchantes. 

Thymbré,  timbré,  surmonté, 
terme  de  blason. 

Thynnuncules,  oiseaux  fantas- 
tiques. 

Tierce,  troisième. 

Tiercelet    d'autour,     mâle    de 


GLOSSAIRE-INDEX 


93 


faucon,  l'oiseau  volant  par 
excellence.  Rabelais  en  fait 
souvent  le  signe  du  super- 
latif ou  de  l'augmentatif  : 
Tiercelet  de  diable,  de  Job, 
de  menteiies,  plus  que  dia- 
ble, plus  patient  que  Job, 
menteur  par  excellence. 
Tiercin,  troisième  partie. 
TiMARE,  nom  grec  emprunté  à 

l'Anthologie. 
Timbous,  tambourins. 
Timbre,    auge   de    pierre,    en 
poitevin.  Les  limonadiers  ap- 
pellent encore  timbre  le  coffre 
en  bois  doublé  de  plomb  où 
ils    mettent    leurs    boissons 
à  rafraîchir. 
TiMOCLES,  nom  grec  emprunté 

à  V Anthologie. 
TiMOTHE,  musicien  grec. 
Timper,  faire  sonner. 
Tinel,  office,  salle  à  manger. 
Tintalorisé,  refrogné. 
Tintamarres,  grands  bruits. 
TiNTEViLLE  ;  ce  serait  François 
d'interville,     évêque   d'Au- 
xerre  au  XVI^  siècle. 
Tintouins,  tintements,  ennuis. 
Tirados,  cordage. 
TiRAQUEAu  (André),   juriscon- 
sulte, ami  de  Rabelais. 
Tirefond,  outil  de  tonnelier, 
r/re/ar/go^  (Boire  à)  ,boire  beau- 
coup, tant  qu'on  veut  ;  boire 
comme   ceux   qui   tirent    la 
Rigaud,   nom   d'une  grosse 
cloche  de  Rouen  ? 
Tirelupin,  mauvais  garnement. 
TiRESiAS,  devin,  prophète,  dans 


Homère. 
Tirez  ailleurs,  éloignez-vous. 
Tissât iers,  tisseurs  de  rubans. 
Titanes,  géants,  fils  de  Titan. 
TiTE,  géant. 

Tmesis,  tmèse,  figure  qui  con- 
siste  à   couper  un  mot  en 
deux. 
ToLETE,  Tolède. 
ToLLET,  contemporain  de  Ra- 
belais à  Montpellier. 
Tollir,  enlever. 
Tollu   de  vie,    enlevé  de   vie, 

mort. 
ToLMERE    Le  capitaine),   hardi, 

du  grec. 
Tonnelle,   panneau  à   perdrix. 
Tonnine,  thon. 
Tonnoire,  tonnerre. 
Topiaire     Ouvrage),     ouvrage 
imitant   les  plantes,   les  ar- 
bres. 
Topicqueur,     raisonneur,     so- 
phiste. 
Topiques,  arguments. 
Toranglés,  à  facettes. 
Torche   lorne.    Torche   lorgne, 
à  tort  et  à  travers,  au  hasard. 
Torcoulx,   hypocrites,    de   l'it. 

Coin  torti.   V.   Tortycolly. 
Tormens    bellicques,   machines 

de  guerre. 
Tortre,  tordre. 
Tortycolly,   hypocrite,   de  l'it. 

collo  torto.  V.  Torcoulx. 
Tostade        Alezan  ,       alezan 

brûlé. 
Totage,     Toiaige,    le   tout,  le 

total. 
Tou,  Toul,  Meurthe, 


'94 


GLOSSAIRE-INDEX 


TouARS,  Thouars,  arrond.  de 
Bressuire,  Deux-Sèvres. 

Touche,  bouquet  de  bois  ; 
haute  futaie. 

Touquas  grou  (limousin),  ne 
frappez  pas,  ne  touchez  pas. 

Toupon,   bouchon  de  verre. 

Tour,  cabestan. 

Tourbe,  foule,    du   lat.   turba. 

Touretz  de  nez,  demi-masque 
de  dame. 

Tournay,   tournoi. 

Tourte,  pain  grossier. 

TouscHERONDE  ;  il  y  a  un  Jean 
de  Touscheronde  greffier  du 
Parlement  au  XVF  siècle. 

Tousdis,  tous  les  jours,  tou- 
jours. 

Toussissoient,  toussaient. 

Toust,  tôt. 

Tout  (A),  avec. 

Tout  (Du),  tout  à  fait. 

Touzelle,  blé  à  épis  sans  bar- 
bes. 

Trabut,  mesure  de  terrain, 
une    perche. 

Trac,  train,  équipages  de 
guerre. 

Tractement,   traitement. 

Traicte  (Mal),  mal  faite. 

Traictz,   cordages. 

Traîne,  traîneau,  chariot;  en 
saintongeais,    une  poutre. 

Traîneau  (Le),  village  du  Chi- 
nonnais. 

Traire,  tracer,  tirer,  tirer  de 
l'arc. 

Tramail,   filet  de  pêche. 

Trancheplume,  canif. 

Trancliit,  trancha. 


Trançon.    V.  Transon. 

Transcender,  surpasser. 

TranscouUer,  couler  à  travers. 

Transfreter,  traverser. 

Transgloutiz,  engloutis. 

Tra/js/a^er,  transférer,  traduire. 

Transmontane,  Trasmontane, 
la  tramontane,  vent  du  N. 

Transmué,  transformé. 

Transon,  Trançon,  tranche, 
morceau,  fragment,  tron- 
çon. 

Transonner,  couper  en  tran- 
sons,  en  morceaux. 

Transpontin,  strapontin,  ta- 
bouret. 

Transpontins ,  ceux  d'au  delà 
les  mers. 

Transsumpt,  part,  passé,  imi- 
té, transcrit;  subst.,  trans- 
cription, copie. 

Trappe,   trapu. 

Traquenard,  allure  qui  tient 
de  l'amble  et  du  trot. 

Trasmontane.  V.  Transmon^ 
tane. 

Traverseur  des  voies  périlleu- 
ses. Jean  Bouchet  a  pris  ce 
titre  dans  ses  ouvrages,  pu- 
bliés au  commencement  du 
XVI°  siècle. 

Trefeuil,  herbe  à  trois  feuilles, 
trèfle. 

Tregeniers,  charretiers,  mule- 
tiers. 

Trejectaires,  saltimbanques  des 
rues. 

Trepelu,  poilu,  moisi,  pleutre, 
mal  soigné  ;  très-peu  lu, 
appliqué  à  un  livre. 


GLOSSAIRE-INDEX 


,95 


Trepignemampenillorifrizonou- 
fressuré,    bousculé,    froissé. 
Trepoit,  piétinait. 
Tresmegiste,    Trimegiste,    trois 

fois  très  grand,  du  grec. 
Trespassé,    outre-passé. 
Trestous,    superlatif    de   tous, 

très-tous. 
Tréteau,    trépied. 
TreuffïeSj   Treufles,   les  trèfles, 

dans  les  cartes  à  jouer. 
TriaSj  trois. 

Triballe,  Triballement,  remue- 
ment, ballottement. 
Triballer,  remuer,  balloter. 
Tribard,  Tribart,  bâton. 
Tribars,    tripes,  gras-double. 
Triboulet,    fou  de  Louis  XII 

et  de  François  W. 
Tribunian,   de   Tribonien,  cé- 
lèbre jurisconsulte. 
Triscaciste,  trois  fois  très-mau- 
vaise, du  grec. 
Trieterides,  bacchantes. 
Trigone,    à  trois   côtés,  trian- 
gle. 
Trigone  (Pile),  jeu  de  balle  à 

trois. 
Tringuer,  boire,  trinquer. 
Trinquamelle,  tranche-amande. 
Trinquamolk,  fanfaron. 
T rinqueb aller ,    remuer    conti- 
nuellement. 
Trinquenailles,  vauriens. 
Trinquet,     mât     de     misaine, 

voile  de  misaine. 
Trinquet  de  gable,  grand  hu- 
nier. 
Trinquet  de  prore,   petit    hu- 
nier. 


Trlorlz  fredonnizez ,  trihori, 
danse  chantée    des  Bretons. 

Trlou,  tréou,  voile  de  fortune. 

Tripier,  trépied. 

Tripoléon.  V.   Teucrlon. 

Trippa  (Her).  Les  commenta- 
teurs veulent  que  ce  soit 
Henri-Corneille  Agrippa  de 
Nettesheim,  médecin-philo- 
sophe du  XVP  siècle. 

Trisulce  (Excommunication), 
trois  foi»  fulminée. 

Trlsulque,     divisée     en     trois 

pointes. 
Trivulce    (Jean-Jacques),  Mi- 
lanais, maréchal  de  France 
sous   Louis  XII  et  François 

Trochlles,  roitelets. 
Trochistz,     trochisques,    petits 
cônes  médicamenteux. 

Troge-Pompone,  Trogue-Pom- 
pée,  historien  latin  du  F^ 
siècle. 

Troglodyte,  habitant  des  ca- 
vernes. 

Troigne,   trogne. 

Trombe,  espèce  de  toupie. 

Tropditieux,  trop  d'iceux , 
de  ceux-là,  gens  dont  il  y  a 
de  trop. 

Trophonius  (La  fosse  de)  : 
Trophonius,  fils  d'Erginus 
ou  d'Apollon,  rendait  des 
oiacles  dans  un  antre. 

Tropologlque,  faiseur  de  tro- 
pes. 

Troppeaux,  troupeaux. 

Trotigner,  trottiner. 

Trou,  trognon. 


296 


GLOSSAIRE-INDEX 


Trou  de  Sainct-Patrice,  caverne 
située   dans   une    petite   île 
du  lac   Dearn,  en  Irlande, 
connue   aussi   sous   le   nom 
de   Purgatoire  de  Saint-Pa- 
trice. 
Trou  de  hize,  anus. 
Trou,    Tron  de  lentisce,  cure- 
dent  en  bois  de  lentisque. 
Trouillogan  ;  serait  Ramus  ou 

Pierre  Galland. 
Trousque  (gascon),    trousse. 
Troys  cens  troys,  jeu  de  cartes, 
Trunc,  coups. 
Trupher,  railler,    se   moquer, 

plaisanter, 
Trut   avant,   mot  employé  en 
Saintonge   pour    faire   aller 
les  ânes  plus  vite. 
Truye,  tour  de  bois,  machine 

de  guerre. 
Tubilustre,    fête  de  la  consé- 
cration   des   trompettes    du 
temple,  chez  les  Romains. 
Tuhule,    petit  tube,    du    latin 

tubulus. 
Tucquet,  tertre, 

TuDiTANiE,    province    d'Espa- 
gne, aujourd'hui  l'Andalou- 
sie, 
Tufe,  pierre  tendre. 
Tuition,  siireté,  du  latin  tueri. 
TuNic,  Tunis. 
TuNSTAL,     Cuthbert    Tonstal, 

mathématicien  anglais, • 
Tupins,  pots  de  terre. 
Turbine,  orage. 
TuRPENAY,      abbaye    près    de 

Chinon. 
TuRPiN  (Les  Fables  de),  chroni 


que  de  Charlemagne  attri- 
buée faussement  à  cet  évê- 
que. 

Turquoys,  de  Turquie. 

Tuscan,  Tusque,  Toscan. 

Thyanien  (Le  philosophe), 
Apollonius  de  Tyane. 

Tymbons,  tambours  de  basque. 

Tympanes,  tympans  ;  sorte  de 
tambour. 

Tympanistes,  Tympanites,  hy- 
dropiques, qui  ont  la  peau 
tendue  comme  un  tambour. 

Typhoc,  géant. 

Typhones,  typhons,  trombes, 

Tyranson,  gibier  d'eau, 

Tyrouer,  flacon  en  forme  de 
livre,  le  bréviaire  de  frère 
Jean, 

Tyrofageux,  mangeur  de  fro- 
mage. 

Tyromantie,  divination  par  le 
fromage, 

Tyrsigere,  porte-thyrse,  du  grec. 

UcALEGON^  non  aidant,  du 
grec, 

Udem,  pays  imaginaire, 

Vligineux,  marécageux. 

Ulisbonne,  Lisbonne. 

Ulement,  hurlement,  du  latin 
ululatus. 

Ulle,  quelque, 

Uller,  hurler. 

Ulmeau,  ormeau,  du  latin  ul- 
mus. 

Ulpian,  Ulpien,  Domitius  Ul- 
pianus  ,  jurisconsulte  ro- 
main de  la  fin  du  II"  siècle. 

Umbilicares,  ombilicales. 


GLOSSAIRE-INDEX 


297 


Undiculations,  ondulations. 

Unguicule,  ongle. 

Unicorne,  licorne. 

Unicque  (L'],  le  pape. 

Union,  perle,  du  latin  unio. 

Unzain,  monnaie  de  onze  de- 
niers. 

Uranopete,  qui  aspire ,  qui  va 
au  ciel,  du  grec. 

Urbe,  ville,  du  latin  urbs. 

Ureniller,  est-ce  un  diminutif 
d'uriner? 

Ures,  taureaux  noirs,  du  latin 
urus. 

Uretacque ,  Utacque,  fausse 
amure  (Jal). 

Ursin,  d'ours. 

Usance,  usage,  coutume,  ha- 
bitude. 

Un,  pays  imaginaire. 

Vache  (Pays  de) ,  plat  pays , 
pays  de  plaines. 

Vacqiie,  vacant. 

Vagines,  enveloppes. 

Valachè,  Valachie. 

Valbringue  (Robert).  C'est, 
suivant  Le  Duchat,  Jean 
François  de  La  Roque^  sieur 
de  Roberval,  grand  naviga- 
teur picard  du  XVI*^  siècle. 

Valée  (Briend) ,  seigneur  du 
Douhet ,  dans  les  environs 
de  Saintes ,  jurisconsulte 
ami  de  Rabelais  et  protec- 
teur de  Scaliger. 

Valentiennes ,  roulis  (Jal); 
dans  le  texte  il  signifie  évi- 
demment courir  des  bordées. 

Vandare  (Othoman),  médecin. 


VanereauXj  vanneaux. 

Vaporament,  vapeur. 

Varenes,  ou  Varennes,  arr. 
de  Loches,  Indre-et-Loire  ; 
ou  arr.  de  Saumur,  Maine- 
et-Loire. 

Vascons,  Gascons. 

Vasquint,  basquine,  jupe. 

Vastadours,  terrassiers. 

Vaticiner,  prophétiser. 

Vaticinateur,  Vaticinatrice,  ora- 
cle, prophète,  devin. 

Vaticinateurs  memphiticques, 
devins  de  Memphis. 

Vaubreton,  Le  Veau-Breton, 
arr.  de  Chinon,  Indre-et- 
Loire. 

Vaugaudry;  est-ce  Vaugondy, 
arr.deTours,  Indre-et-Loire? 

Vaultres,  Veaultrez,  vautrais, 
chiens  courants,  chiens  de 
chasse. 

Vaurillon,  théologien  con- 
temporain de  Rabelais. 

Vauvert  (Diable),  maison  de 
Vauvert  où  le  diable  reve- 
nait, rue  d'Enfer. 

Veautrez.  V.  Vaultres. 

Vede  (Gué  ou  bois  de),  près 
de  Chinon. 

Vedeaulx,  bedeaux. 

Vefves,  veuves. 

Végéter,  vivifier. 

Veguade  (Quelque),  quelque 
coup. 

Veid,  Veit,  v\\.;jeveiz,  je  vis; 
vous  veistez,  vous  vîtes. 

Veigler,  veiller. 

Vejoves,  anti-Jupiter,  dieux 
malfaisants. 

38 


GLOSSAIRE-INDEX 


Vêle,  Velle,  voile. 

Velenailles,  repos  à  l'occasion 
d'une  vache  qui  a  vêlé;  pa- 
rodie de  relevailles. 

Vellication,  pincement. 

Velotiers,  veloutiers. 

Velous,  velours. 

Venation,  chasse. 

Vendangeret  (Panier),  panier 
de  vendangeur. 

Vendiquer,  revendiquer. 

Venefiques,  empoisonneuses, 
du  latin  veneficse. 

Venelle,  ruelle  du  lit. 

Vent  grec,  vent  du  nord-est. 

Ventir,  vanner. 

Ventres  à  poulaine,  gros  ven- 
tres pointus. 

Ventre  heuf.  Ventre  beuf  de 
boys,  jurons. 

Ventre  guoy,   juron. 

Ventre  Sainct-Quenet,  juron. 

Ventrée,  grossesse  des  bêtes. 

Ventrose,  enflure  du  ventre. 

Venuste,  plein  de  charmes. 

Verbasce,  bouillon  blanc,  mo- 
lène. 

Verbenicque,  de  la  nature  de 
la  verveine. 

Verbocination,  langage. 

Verd,  tapis  de  table  de  jeu. 

Verd  du  diable,  les  dés  ;  on 
ne  prend  pas  le  diable  sans 
vert,  sans  dés. 

Verd  et  bleu,  juron. 
Verdcoquin,  ver-coquin,  nom 
vulgaire  des  larves  du  rliyn- 
chites  bacchus,  de  Veumolpe 
pitis,  de  la  pyrale,  qui  tou- 
tes vivent  sur  la  vigne;  du 


cœnure,  helminthe  qui  se 
développe  dans  la  tête  du 
mouton  et  lui  donne  le 
vertige.  Au  figuré,  vertige, 
ou  simplement  fantaisie. 

Ver  de,  verte. 

Verdelot^  musicien  belge  du 
XVie  siècle. 

Verdugale,  Verdugualle,  jupon 
bouffant. 

Verduns,  épées  courtes  fabri- 
quées à  Verdun. 

Vere  (Prime),  commencement 
du  printemps. 

Verge  d'or,  anneau  d'or,  ba- 
gue. 

Vergne,  aulne,  aune.  Tran- 
choir de  vergne,  planchette 
d'aulne. 

Vergouigne,  vergogne,  honte. 

Ver  if  or  me,  vrai. 

Verisimile,  vraisemblable. 

Verines,  Vernis,  vers  intesti- 
naux, vermine. 

Vermont,  musicien  du  XVP 
siècle. 

Vernacule,  vulgaire^  du  pays. 

Verrassée,  verrée,  plein  un 
verre. 

Verron,  arr.  de  Chinon,  Indre- 
et-Loire. 

Versalles  (Lettres),  majuscules 
qui  commencent  les  vers. 

Verse,    petite  pièce  d'artillerie. 

Verser  à  l'école,  allei  à  l'école. 

Versure  (Faire),  faire  un  nou- 
veau créancier  pour  en 
payer  un  ancien. 

Vertoilz,  boutons  qui  terminent 
les  fuseaux. 


GLOSSAIRE-INDEX 


299 


Vertueux,  courageux. 

Vertus  beuf  de  boys,  d'aultre 
que  d'un  petit  poisson,  d'un 
petit  poisson,  de  froc.  Dieu, 
guoy,  jurons. 

Vervaine,  verveine,  verbena 
officinalis,  Veneris  vena  ;  on 
lui  attribuait  une  vertu  fé- 
condante. 

Vervecine  de  mouton,  du  latin 
vervex. 

Vervelles,  anneaux  qu'on  met 
aux  pattes  des  oiseaux  de 
chasse,  avec  le  nom  et  les 
armes  de  leur  propriétaire. 

Vesner,  vesser. 

Vesquist,  vécut. 

Vessaille,  vile  multitude. 

Vesten  nord-est,  vent  soufflant 
de  l'ouest  au  nord-est. 

Vestibousier,  porteur  d'une 
veste  sale. 

Vestz  (picard),  va-t'en. 

Veu  de  Charrous  (Le),  statue 
de  bois  honorée  dans  le 
monastère  de  Charroux, 
arr.  de  Civray,   Vienne. 

Veute  figure,  en  figure  vue,  en 
présence. 

Veux,  vœux. 

Vezarde,  venette. 

Veze,  cornemuse,  outre. 

Viande,  en  général  toute  sub- 
stance alimentaire. 

Viander,  cacare,  fienter. 

Vicinité,  voisinage. 

Victeur,  vamqueur. 

Victorial,  victorieux. 

VicTRUvE,  Vitruve,  Marcus 
"Vitruvius  Pollio,    architecte 


romain  de  la  fin  du  F'  siè- 
cle avant  J.-C. 

Vie,  chemin,  du  latin  via. 

Vielleux,  joueur  de  vielle. 

Vienne,  chef-lieu  d'arr.,  Isère. 

Vierge  qui  se  rebrasse,  la  vierge 
qui  se  retrousse,  Sainte-Ma- 
rie l'Égyptienne? 

Vietzdazes  (provençal  ,  visages 
d'ânes. 

Vignolat  (Syrop),  vin. 

ViGORis,  musicien. 

Villanie,  villenie,  violence, 
vilaine  action. 

ViLLANOVANus  (Frauçois),  au- 
teur contemporain  de  Ra- 
belais. 

ViLLAUMERE  (La)  ;  est-ce  La 
Ville-aux-Dames,  arr.  de 
Tours,  Indre-et-Loire  ? 

Villaticque,  villageois,  rustique. 

ViLLEBRENiN,  Villebemin,  arr. 
de  Châteauroux,  Indre. 

Villeneuve  la  Guyart  Jac- 
ques d'Aunay,  seigneur  de), 
neveu  de  Du  Bellay. 

ViLLiERS,  Pierre  Vuillers,  mu- 
sicien du  XVIi-'  siècle. 

Vimeres,  tempêtes,  calamités, 
ouragans. 

Vin  (Donner  le),  donner  un 
pourboire. 

Vin  Clementin,  vin  d'une  vigne 
que  Clément  V  possédait 
près  de  Bordeaux. 

Vin  du  ya^e^pourboire  du  valet. 

Vinaige,  vinage,  distribution 
de  vin. 

Vindrent,  vinrent. 

Violiers,  pots  à  fleurs. 


3( 


GLOSSAIRE-INDEX 


Viroletj  flèche,  fer  de  flèche. 

Virollet,  moulin  d'enfant. 

Visif,  qui  peut  voir. 

Vistempenard,  Visiemptnarde, 
tête  de  loup,  plumeau  à 
long  manche. 

Vistempenardé,  aménagé,  pro- 
pre, nettoyé. 

ViTDEGRAiN,  géant. 

ViteXj  gattilier,  vitex  agnus- 
castus,  plante  qui  passait 
pour  antiaphrodisiaque. 

Vitrice,  second  mari  de  la 
mère,  du  latin  vitricus. 

Vitupère,  honte. 

Vituperéj  blâmé. 

VivoNNE,  arr.  de  Poitiers, 
Vienne. 

Vocales,  voyelles. 

Vociter,  nommer. 

Voerre,  Voirre,  verre. 

Voira,  Voirons,  verra,  verrons. 

Voix  (Les),  les  mots. 

Volains,  armes. 

VoLATERAN,  Raffaele  Mafîei, 
de  Volterre,  géographe. 

Vole,  paume  de  la  main. 

Volerie  (La  ,  endroit  où  se 
tenaient  les  anges  dans  la 
représentation  d'un  mys- 
tère. 

Voiler,  franchir  ;  chasser  au 
faucon. 

Vollerie,  chasse  avec  des  fau- 
cons. 

Volontaires,  navires  marchant 
à  volonté. 

Volter,  tourner. 

Vomiter,  vomir. 

Vorages      gouffres,     du    latin 


vorago. 

Votes,  vœux. 

Vouant,  Vovant,  Vouvant, 
arr.  de  Fontenay-le-Comte, 
Vendée. 

Vouge,  manche  d'arme,  d'ou- 
til ;  bâton,  épieu. 

Voulent,  veulent,  voulant. 

Voulsist,  Voulzist,  vouliit. 

Voy  le  cy,  le  voici. 

Voy  vous  là,  vous  voilà. 

Voyagier,  voyageur. 

Voyez-cy,  voici. 

Voy  s  (Je],  je  vais. 

Voyirer  (Se),  se  vautrer. 

Vraybis,  vraiment,  certaine- 
ment. 

Vraybis,  vrai  Dieu,  juron. 

Vray  bot,  juron. 

Vrilonner,  enrouler. 

Vueil  (Le),  le  vouloir,  la  vo- 
lonté. 

VuiTEMBERG,  Wurtenberg. 

Vulgue,  le  vulgaire. 

Xenocrites,  nom  grec  em- 
prunté à  l'Anthologie. 

Xenomanes,  qui  aime  les  étran- 
gers, les  pays  étrangers,  du 
grec. 

XoNOPHiLE,  musicien  grec,  qui 
vécut,  dit  Pline,   io5  ans. 

Y  grégeois,  Y  grec. 

Ydoine,     propre    à,    du    latin 

idoneus. 
Yre,  colère,  du  latin  ira. 
Yssues,  sorties  en  armes. 
Yvraye,  ivraie. 


GLOSSAIRE-INDEX 


3oi 


Zachée,  publicain  converti, 
dont  parle  saint  Luc,  cha- 
pitre XIX. 

Zalas  !  hélas 

Zaphran.  V.  Saphran. 

Zencle,  cheval  dont  les  taches 
ont  la  forme  de  faux. 


Zinzembre,  gingembre. 
Zinziberine  (Pouldre),   poudre 

de  gingembre. 
Zivette,  civette. 
Zoophore,   frise  avec  animaux 

sculptés;    porte-animal,    du 
gec. 


TABLE 

DU    LIVRE    CINQUIÈME 


Pages. 
Prologue ' i 

Chapitre   I.    Comment   Pantagruel    arriva    en    l'Isle 

Sonnante,  et  du  bruit  qu'entendismes 1 1 

Chapitre  II.  Comment  l'Isle  Sonnante  avoit  esté  ha- 
bitée par  les  Siticines,  lesquels  estoyent  devenuz 
oiseaux 14 

Chapitre  III.  Comment  en  l'Isle  Sonnante  n'est  qu'un 

Papegaut 17 

Chapitre  IV.  Comment  les  oiseaux  de  l'Isle  Sonnante 

estoient  tous  passagers 19 

Chapitre  V.  Comment  les  oiseaux  gourmandeurs  sont 

muets  en  l'Isle  Sonnante 22 

Chapitre  VI.  Comment  les  oiseaux  de  l'Isle  Sonnante 

sont  alimentez 2  5 

Chapitre  VII.  Comment  Panurge  racompte  à  Maistre 

yEditue  l'Apologue  du  Roussin  et  de  l'Asne,   ...        28 


3o4  TABLE 

Pages 
Chapitre  VIII.  Comment  nous  fust  monstre  Papegaut 

à  grande  difficulté $4 

Chapitre  IX.   Comment   nous  descendismes  en   l'Isle 

des  Ferremens 38 

Chapitre  X.  Comment  Pantagruel  arriva  en  l'Isle  de 

Cassade 40 

Chapitre  XI.  Comment  nous  passasmes  le  Guichet, 
habité  par  Grippe-minaud,  Archiduc  des  Chats- 
fourrez 48 

Chapitre  XII.  Comment  par  Grippe-minaud  nous  fut 

proposé  un  énigme 48 

Chapitre  XIII,  Comment  Panurge  expose  l'énigme  de 

Grippe-minaud 5  i 

Chapitre  XIV.  Comment  les   Chats-fourrez  vivent  de 

corruption 5  3 

Chapitre  XV.  Comment  frère   Jean  des   Entomeures 

délibère  mettre  à  sac  les  Chats-fourrez 56 

Chapitre  XVI,  Comment  Pantagruel  arriva  en  l'isle 
des  Apedeftes  à  longs  doigts  et  mains  crochues,  et 
des  terribles  aventures  et  monstres  qu'il  y  veit.   .    .        61 

Chapitre  XVII.  Comment  nous    passasmes  Outre,  et 

comment  Panurge  y  faillit  d'estretué 69 

Chapitre  XVIII,  Comment  nostre  nauf  fut  encarrée, 
et  feusmes  aidez  d'aucuns  voyagiers  qui  tenoient 
de  la  Quinte 72 

Chapitre  XIX.  Comment  nous  arrivasmes  au  Royaume 

de  la  Quinte-Essence,  nommé  Entelechie 76 

Chapitre  XX.  Comment  la  Quinte-Essence  guarissoit 


TABLE  3o5 

Pages, 
les  maladies  par  chansons    . 76 

Chapitre   XXI.    Comment    la    Royne    passoit   temps 

après  disner 83 

Chapitre  XXII.  Comment  les  officiers  de  la  Quinte 
diversement  s'exercent,  et  comment  la  Dame  nous 
retint  en  estât  d'abstracteurs 87 

Chapitre  XXIII.    Comment   fut   la  Royne   à  soupper 

servie,  et  comment  elle  mangeoit 91 

Chapitre  XXIV.   Comment    fut  en    présence   de    la 

Quinte  faict  un  bal  joyeux  en  forme  de  tournay.    .        94 

Chapitre  XXV.  Comment  les  trente  deux  personnages 

du  bal  combatent 98 

Chapitre  XXVI.  Comment  nous  descendismes  de  l'Isle 

d'Odes,  en  laquelle  les  chemins  cheminent  ....       106 

Chapitre  XXVII,  Comment  passasmes   l'Isle   des   Es- 

clots,  et  de  l'Ordre  des  frères  Fredons 1 10 

Chapitre  XXVIII.  Comment  Panurge  interroguant 
un  frère  Fredon  ,  n'eust  response  de  luy  qu'en 
monosillabes 117 

Chapitre  XXIX.  Comment  l'institution  de  Quaresme 

desplait  à  Epistemon 124 

Chapitre  XXX.  Comment  nous  visitasmes  le  pays  de 
Satin , 127 

Chapitre  XXXI.    Comment   au   pays    de  Satin   nous 

veismes  Ouy-dire,  tenant  eschole  de  tesmoignerie.      i33 

Chapitre  XXXII.   Comment  nous   fut   descouvert   le 

païs  de  Lanternois 137 

Chapitre  XXXIII.    Comment    nous  descendismes  au 
Rabelais.   V.  3q 


3o6  TABLE 

l'ascs. 
port  des  Lychnobiens  et  enirasmes  en  Lanternoi;.    .      i  38 

Chapitre  XXXIV.  Comment  nous  arrivasmes  à  l'oracle 

de  la  Bouteille 141 

Chapitre  XXXV.  Comment  nous  descendhmes  soubs 
terre  pour  entrer  au  temple  de  la  Bouteille,  et  com- 
ment Chinon  est  la  première  ville  du  monde.    ...       144 

Chapitre  XXXVI.  Comment   nous    descendismes    les 

degrez  tetradiques,  et  de  la  peur  qu'eut  Panurge.    .      146 

Chapitre  XXXVII.    Comment  les  portes    du  temple 

par  soy  mesme  admirablement  s'entr'ouvrirent   .    .      149 

Chapitre  XXXVIII.    Comment    le    pavé    du    temple 

estoit  faict  par  emblemature  admirable i53 

Chapitre  XXXIX.  Comment  en  l'ouvrage  mosayque 
du  temple  estoit  représentée  la  bataille  que  Bacchus 
gagna  contre  les  Indians i55 

Chapitre  XL.  Comment  en  l'emblemature  estoit  figuré 
le  hourt  et  l'assaut  que  donnoit  le  bon  Bacchus 
contre  les  Indians iSq 

Chapitre  XLI.  Comment  le  temple  estoit  esdairé  par 

une  lampe  admirable 162 

Chapitre  XLII.  Comment  par  la  pontife  Bacbuc  nous 
fust  monstre  dedans  le  temple  une  fontaine  fantas- 
tique       i65 

Chapitre  XLIII.  Comment  l'eau  de  la  fontaine  rendoit 

goust  de  vin,   selon  l'imagination  des  beuvans.    .    .       i65 

Chapitre  XLIV.   Comment  Bacbuc  accoustra  Panurge 

pour  avoir  le  mot  de  la  Bouteille 174 

Chapitre  XLV.  Comment  la  pontife  Bacbuc   présenta 

Panurge  devant  ladicte  Bouteille 176 


TABLE  807 

Pages. 
Chapitre  XLVI.  Comment    Bacbuc    interprète  le  mot 

de   la  Bouteille 179 

Chapitre  XLVII.    Comment     Panurge   et    les    autres 

rithment  par  fureur  poétique 182 

Chapitre   XLVIII.    Comment,    avoir  prins    congé   de 

Bacbuc,  délaissent  l'oracle  de  la  Bouteille 186 

Variantes 189 

Glossaire-Index 201 


A  PARIS 

DES    PRESSES    DE    D.    JOUAUST 
Imprimeur  breveté 

RUE       SAI NT-HONORÉ,       338 


l 


PETITE  BIBLIOTHEQUE  ARTISTIQUE 

OUVRAGES      A     C.  R  A  V  U  R  E  S 

Tirage  in-i6  à  petit  nombre  sur  papier  de  Hollande,  plus 
2  5  exemplaires  sur  papier  de  Chine  et  2  5  sur  papier  Whatman. 

Tirage  en  GRAND  PAPIER  (in-S»)  :  170  exemplaires  sur 
papier  de  Hollande,  i5  sur  papier  de  Chine,  i5  sur  papier 
Whatman. 

HEPTAMÉRON  de  la  Reine  de  Navarre,  avec 
les  grav.  de  Flameng.  %  fascicules.  Épuisé. 

DÉCAMÉRON  de  Jean  Boccace,  avec  les  grav. 
de  Flameng.  10  fascicules  in-i6.  Les  derniers  exem- 
plaires, à 80  fr. 

CENT  NOUVELLES  NOUVELLES,  dessins  de 
J.  Garnier,  grav.  àl'eau-forte  par  Lalauze,  ou  repro- 
duits par  l'héliogravure.  10  fascicules  in- 16  .      5o  fr. 

Format  in-8« 80  fr. 

Exemplaires  Chine  et  Whatman  dans  les  deux  formats. 

MANON  LESCAUT, avec  lesgravuresd'HÉDOuiN. 
2  vol 2  5  fr. 

GULLIVER  (Les  Quatre  Vo)'ages  de),  avec  les 
gravures  de  Lalauze.   4  vol.  in-16 3o  fr. 

Format  in-8° 5o  fr. 

Exemplaires  Chine    de    rin-i6,    et   Whatman    des  deux 

formats. 

VOYAGE  SENTIMENTAL,  de  Sterne,  avec  gra- 
vures d'HÉDOUiN 2  5  fr. 

Nota.  —  S'adresser  à  la  Librairie  des  Bibliophiles,  rue  Saint- 
Honoré,  3  38,  pour  connaître  les  conditions  auxquelles  on  pour- 
rait se  procurer  les  ouvrages  épuisés. 


":m:jjj*w^«mTT  '  ' 


^.^i^i 


^^ 


PQ 
1682 

G$ 

1276 
t. 5 


Rabelais,    François 
Les  cina  livres 


PLEASE  DO  NOT  REMOVE 
CARDS  OR  SLIPS  FROM  THIS  POCKET 


UNIVERSITY  OF  TORONTO  LIBRARY 


^1?, 


^^^. 


>1*''J*\ 


^'' 


i^2?t*0-.. 


^■ï*  '  tU 


lv>.^.-<^^#^^. 


iii.